Je ne connaissais ni l'un ni l'autre, ce qui en dit long sur leur impact. Après visite des deux sites (et une certaine consternation en constatant que les premiers ont choisi une domiciliation à Monaco pour échapper aux lois françaises et toute forme de procès de la part de leurs clients, tandis que les deuxièmes préfèrent carrément ignorer les mentions légales et avancer masqués), j'en pense que c'est le système traditionnel revisité à la sauce arnaque web dissimulée sous l'étiquette politiquement très correcte et très en vogue de "projet communautaire".
On voit de plus en plus ce système sur le net, baptisé "pro-am" (pour "professionnels-amateurs" ). Tu montes un projet énorme à 4 ou 5 associés avec seulement 2 ou 3 salariés supplémentaires pour s'occuper des tâches ingrates (répondre au téléphone, classer les factures, faire les photocopies, aller chercher le café). Puis tu fais bosser à l'oeil des centaines d'amateurs, en les gratifiant d'un colifichet à chaque boulot rendu. A chaque fois que l'un se lasse, il y a en a 10 pour prendre sa place. Un rêve néo-capitaliste : monter une boîte de 300 employés où tu es le seul à être payé ! Encore mieux que les stagiaires, encore mieux que l'esclavage, même : un esclave te coûte des sous à acheter, puis nourrir, soigner etc. Un internaute, il suffit de lui bourrer le mou avec le mot magique "communauté" et il accourt, prêt à bosser afin de se sentir enfin "accepté", "faire partie d'un tout" etc. On voit périodiquement des offres de ce genre dans la cat' "offres d'emploi", c'est le nouvel eldorado des start-ups. Et cette bulle-là n'est pas partie pour éclater.
Les deux boîtes ci-dessus portent la chose à un nouveau sommet. Jusqu'ici, le modèle pro-am fonctionnait sur du virtuel : la plupart du temps, l'internaute fait un boulot de journaliste web gratos. Ca peut impliquer des déplacements, des photos etc., mais l'objet produit au final, ce ne sont que des octets en espace disque et bande passante. Qui donc ne coûte presque rien en distribution (et même rien du tout s'il ne se "vend" pas, au sens affiché par des internautes) et est effaçable/transformable/récupérable. Tandis que là, on parle de livres physiques, donc coûteux à produire, distribuer et vendre. Idée de génie : puisque ces cons d'internautes sont déjà prêts à nous enrichir en bossant pour nous gratos, pourquoi n'irions-nous pas leur demander de payer pour bosser pour nous ? Et ça marche !
Après, je peux décortiquer les deux sites, leur clauses, leurs conditions de vente et tout le toutim mais la seule page d'accueil du premier va me demander au moins 30 minutes à rédiger sans rien oublier. Donc pour l'instant, je passe, d'autant que l'on est carrément HS.
Merome a écrit :
Je crois savoir, parce que je crois te l'avoir vu écrire :
Citation :
Mais ce succès de folie n'a que peu de rapport avec la qualité du livre. (...)
Après, je ne vais pas prétendre que ça ne nous agace pas de voir autant de gens acheter un livre uniquement parce que l'auteur a été pendant une semaine sur tous les chaînes de télé, toutes les stations de radio et tous les canards, quotidiens ou hebdomadaires. Evidemment, qu'à chaque fois ça nous gonfle.
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C'est bizarre, tu as zappé pour la énième fois tout le passage sur l'arbre qui cache la forêt et le fait que je vendais 500 autres livres pour 50 Houellebecq. Tout au moins c'est ce qui se passait la semaine dernière : aujourd'hui samedi, on n'en a vendu que 3, la promo est à peu près finie. Par contre, on continue de vendre les 500 autres livres (et le nouveau best-seller de la semaine : le tome 4 de Blacksad).
Pourtant, ce passage était juste au-dessus de celui que tu cites, donc tu l'as forcément lu. De là à penser que c'est un dialogue de sourds ou l'un des deux seulement fait le sourd, il n'y a pas loin.
Citation :
Je ne sais pas si ça m'est personnellement adressé
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Non, ça ne l'était pas.
Citation :
Non, mais je lis très peu. Si tu me demandes les auteurs dont j'ai entendu parlé depuis le début de l'année, je te dirais Amélie Nothomb et Houellebecq. Je suis pas client, et c'est pas ça qui va m'inciter à devenir un plus grand lecteur. C'est plutôt ça qui me chagrine : le fait qu'il y a sans doute des tas de trucs vraiment bien au travers desquels tout le monde passe, y compris ceux qui sont de gros lecteurs.
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Réalises-tu l'absurdité qu'il y a à dire que lire t'intéresse tellement peu que les deux seuls auteurs dont tu as entendu parler cette année sont Houellebecq et Nothomb, puis à déplorer qu'il y ait "un tas de trucs vraiment bien" qui t'ont échappé ? Et encore plus absurde : imaginer qu'un modèle web "sans filtres" qui fonctionnerait on ne sait trop comment te permettrait de découvrir des "pépites" alors que les innombrables pépites de l'édition traditionnelle, à la portée de n'importe qui en achetant simplement un magazine littéraire dans n'importe quelle maison de la presse, en rentrant dans une librairie ou en fréquentant n'importe quel site "filtré" t'échappent déjà complètement puisque tu n'aimes pas lire ? Ca devient vraiment naouak, cette discussion...
En attendant, ça t'a évité de répondre à ma question qui était pourtant évidente : tu parles des soit-disant pépites révélées par ce monde idéal de l'auto-édition débarrassé des filtres des affreux censeurs/capitalistes de l'édition traditionnelle et quand je te demande 2 ou 3 titres concrets parmi les dizaines de milliers déjà publiés, tu me réponds que tu ne peux pas savoir parce que les livres auto-édités ne t'intéressent pas.
Citation :
Il y a des francophones partout.
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Ouais... sauf que "niche à 3 pékins dans le monde" et "niche à 3 pékins francophones dans le monde", ça change énormément les choses. Tiens, d'ailleurs, les traductions : comment ça va se passer en auto-édition ? A part l'auteur qui paye de sa poche, et vu le peu qui le pourront... bonjour la diversité culturelle.
Citation :
Je n'ai jamais dit que ce modèle était financièrement intéressant, ni pour les auteurs, ni pour les libraires, éditeurs...
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Non, mais il l'est pour les imprimeurs en ligne ou pseudo-éditeurs qui ne sont au final que des imprimeurs, et qui sont les seuls à être payés.
Citation :
Je révolutionne rien du tout, je discute avec quelqu'un de bien placé pour me répondre. Je suis étranger à ton monde et tu es étranger au mien, nous avons des choses à nous dire. N'y cherche pas des frustrations ou des envies révolutionnaire de ma part. J'essaie d'appliquer des modèles que je connais (genre logiciel libre) à un monde que je connais pas, mais que je touche quand même en écrivant un peu.
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Le hic est que tu es écrivain mais pas lecteur, or c'est du point de vue du lecteur que tu prétends te placer pour échafauder tes théories. C'est d'ailleurs le problème de presque tous les écrivains qui prétendent refaire le monde (du livre, dans leur cas) : ils ne se mettent jamais à la place du lecteur. Ou quand ils prétendent le faire, ils se plantent complètement parce qu'ils sont obsédés par les best-sellers. Donc on retombe à chaque fois sur le combo "les gens sont trop cons et n'aiment que la merde" ou sa variante "les gens sont victimes des médias et achètent tous les 3 mêmes livres".
Citation :
Sur l'Education Nationale, les logiciels libres, la politique, ...
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Je serais curieux de lire un blog un jour qui délivre des infos qui n'aient pas été "filtrées" en amont par des journalistes professionnels. En donner une interprétation, c'est sûr. Comme disait l'autre, les avis, c'est comme les trous du cul, tout le monde en a un (et je ne suis pas le dernier à asséner le mien dès que j'en ai l'occasion). Enfin bref, ce n'est pas le débat pusiqu'il ne s'agit même pas de blogs littéraires.
Citation :
Ce n'est pas exactement ce que j'ai dit. Quand t'as lu 10 bouquins d'un gars que tu as trouvé génial, tu peux raisonnablement conseiller à des gens de lire le 11ème, avant de l'avoir lu.
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Avant d'en avoir lu 10, il faut déjà en lire un. Et donc, le premier ? Tu es assez impressionnant dans ton art d'éviter les questions et ignorer les réponses.
Citation :
Et si tu as trouvé un gars de confiance qui analyse les choses comme tu le ferais et à des avis très proches des tiens, tu peux aussi t'y fier.
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Oui, comme un directeur de collection, par exemple ? Ou un éditeur ? Un critique professionnel ? Quel rapport avec ma question ? Je te demande comment lui, ce blogger, va choisir ses livres ? Parce que l'éditeur, on sait comment il procède : il paie des gens pour trier dans la merde. Et tout le reste de la chaîne du livre bénéficie de ce premier tri que personne au grand jamais ne voudrait/pourrait faire sans être payé pour ça (et même en étant payé, c'est un boulot bien plus ingrat, difficile et mortellement ennuyeux que l'on ne peut se l'imaginer).
Le plus drôle, c'est que les sites d'imprimeurs en ligne reproduisent finalement le modèle éditorial pour mettre en avant une poignée des milliers de livres qu'ils impriment : avec ce bon vieux système pro-am décrit ci-dessus. Au lieu de payer des lecteurs professionnels, formés à ce métier, on le fait faire par les internautes. Ainsi, tel ou tel livre qui a été "bien noté" par tant de lecteurs est mis en avant en première page, ou reçoit tel ou tel label. Et celui-ci sera visible tandis que les autres tomberont dans les oubliettes. C'est toujours un comité de lecture qui filtre, mais de pékins dont on n'a aucune idée des critères, des goûts, de la culture ou même s'ils ne sont pas des pseudos des potes et de la famille de l'auteur.
Citation :
'tain, avec mes 45 exemplaires vendus de mon premier roman, je suis un best seller en fait ?
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45 vendus à de parfaits inconnus, et qui ne sont pas non plus d'autres auteurs auto-édités du même site ? Oui, c'est un best-seller, sans aucune ironie.
Citation :
Le policier n°1 dans le top100 de lulu s'est vendu à 5200 exemplaires.
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Fais une recherche sur l'auteur : il est publié aux éditions de la Mouette, donc a un éditeur derrière lui qui l'a "filtré" par un comité de lecture.
Et par ailleurs c'est un auteur régional, qui fait des tournées de promotion dans les librairies de la-dite région, et a reçu un prix typiquement régional, réservé à des auteurs liés à l'Ardèche ou les Hautes-Cévennes. Donc éditeur traditionnel + ciblage "livre qui parle de notre belle région" + prix littéraire + tournées de promotions dans le secteur des libraires traditionnels = bonnes ventes. Bref, rien à voir avec l'auto-édition virtuelle et anonyme de l'impression en ligne.
Et tu vois, quand je te disais plus haut qu'il fallait distinguer l'impression à la demande et l'auto-édition, et que les éditeurs traditionnels y recoureraient : voilà un bon exemple. Les éditions de la Mouette utilisent les services de lulu pour imprimer mais l'auteur publié n'est pas auto-édité. Un éditeur traditionnel peut très bien combiner impression à la demande, vente électronique et circuit traditionnel. Parce qu'étant éditeur il a accès à ce circuit traditionnel. Tandis que l'auto-édité n'a quasiment aucun accès à ce circuit, en dehors des librairies de son coin (s'il en a) ou des librairies spécialisées s'il a écrit un bouquin qui les concerne (et encore, en excluant le secteur BD, ou même les librairies spécialisées sont déjà plombées par la surproduction).
Marrant. Mais la bloggeuse ferait mieux de ne pas parler du marché du livre, parce que le seul passage où elle se la pète "moi je connais le milieu" est un beau combo de conneries :
Citation :
Sachez que le lecteur n’existe pas, qu’il n’y a quasiment plus que des lectrices et que la lectrice semble friande d’amour. (Nulle misogynie de ma part, voyons-y un déterminisme sociétal.)
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Qui peut le moins peut le moins.