L'IRAK: L'APRÈS-GUERRE
Robert Fisk: Pour les gens dans les rues, ceci n'est pas la libération mais une nouvelle oppression coloniale La guerre de 'libération' des États-Unis est peut-être finie. Mais la guerre de l'Irak pour se libérer des Américains est sur le point de commencer ...
17 avril 2003 Les choses tournent mal, plus rapidement que personne ne l'aurait imaginé. L'armée de " libération " s'est déjà transformée en armée d'occupation. Les Chi'ites menacent de combattre les Américains, de créer leur propre guerre de " libération ". La nuit, sur chacune des barricades des Musulmans chi'ites à Sadr City, il y a 14 hommes avec des armes automatiques. Même les 'Marines' américains à Bagdad parlent maintenant des insultes qu'on leur lance. " Allez-vous en ! Que je ne vous vois plus! " a crié un soldat américain à un Irakien qui essayait de s'avancer vers le fil entourant une unité d'infanterie dans la capitale hier. J'ai regardé le visage de l'homme s'inonder de rage. " Dieu est grand ! Dieu est grand! " a répliqué l'Irakien. "Fuck you!" Les Américains ont maintenant émis un " Message aux citoyens de Bagdad ", un document d'esprit colonial au ton dénué de tous égards. " Veuillez éviter de quitter vos maisons durant la nuit, après les prières du soir et avant l'appel à la prière du matin " y dit-on aux habitants de la ville. " Pendant cette période, les forces terroristes associées à l'ancien régime de Saddam Hussein, de même que divers éléments criminels, en profitent pour se déplacer dans ce secteur... veuillez ne pas quitter vos maisons pendant cette période. En tout temps, veuillez être extrêmement prudents quand vous approchez des positions militaires de la Coalition... ". Maintenant donc -sans électricité et sans eau courante- les millions d'Irakiens ici se font ordonner de rester dans leurs maisons du crépuscule à l'aube. Enfermés. Une forme d'emprisonnement. Dans leur propre pays. Rédigé par le commandement de la 1ière Division des 'Marines' des États-Unis, il s'agit d'un couvre-feu sans le nom. " Si j'étais Irakienne et que je lisais ça ", m'a crié une femme arabe " je deviendrais une kamikaze ". Partout à Bagdad, du clergé musulman chi'ite aux hommes d'affaires sunnites, on entend la même chose : que les Américains ne sont venus que pour le pétrole et que bientôt -très bientôt- une résistance de guérilla doit commencer. Les Américains prétendront sans doute que ces attaques sont le fait de " restes " du régime de Saddam ou d' " éléments criminels ". Mais ce ne sera pas le cas. Des officiers des 'Marines' à Bagdad tenaient hier des discussions avec un dignitaire chi'ite militant de Najaf pour empêcher que des combats n'éclatent autour de la ville sainte. J'ai rencontré le prélat avant que ne commence ces négociations et il m'a dit que " l'Histoire se répétait ". Il parlait de l'invasion britannique de l'Irak en 1917, qui s'est terminée de façon désastreuse pour les Anglais. Les signes d'effondrement sont visibles partout. Et partout aussi les signes que les promesses de " liberté" et de " démocratie " des États-Unis ne seront pas remplies. Pourquoi, demandent les Irakiens, les États-Unis ont-ils permis que l'ensemble du cabinet irakien s'échappe? Et ils ont raison. Pas seulement le Monstre de Bagdad et ses deux fils, Qoussaï et Oudaï, mais le vice-président, Taha Yassine Ramadan, le premier ministre adjoint, Tarek Aziz, le conseiller personnel de Saddam, le Dr. A. K. Hashimi, les ministres de la défense, de la santé, de l'économie, du commerce, même Mohamed Saïd al-Sahaf, le ministre de l'information qui, il y a longtemps, bien avant que les journalistes ne le courtisent, était l'officiel qui faisait lecture de la liste des " frères " exécutés dans la purge qui suivit la révolution de Saddam -les parents des prisonniers prenant une bonne dose de valium avant chaque apparition d'al-Sahaf. Voici ce que les habitants de Bagdad remarquent -et ce que les Irakiens remarquent dans toutes les principales villes du pays. Prenons le vaste appareil de sécurité dont Saddam s'entourait, les chambres de torture et l'énorme bureaucratie sur laquelle tout cela reposait. Le président Bush a promis que les États-Unis faisaient campagne pour les droits humains en Irak, que les coupables, les criminels de guerre, seraient jugés. Mais les quelques 60 quartiers généraux de la police secrète à Bagdad sont vides, de même que le complexe de trois miles carrés qui servait de quartier général au Service de renseignement irakien. J'ai visité plusieurs de ces endroits. Je n'ai trouvé aucune indication de la visite d'un seul expert britannique ou américain à ces sites pour y passer en revue la quantité de documents importants qui s'y trouvent ou pour y parler avec des ex-prisonniers qui reviennent sur les lieux de leurs tourments. Est-ce de la paresse? Ou est-ce délibéré ? Prenons le poste de sécurité de Qasimiyeh sur la rive du Tigre. C'est une villa agréable -ayant déjà appartenu à un Irakien né en Iran qui fut déporté en Iran dans les années 80. Il y a une petite pelouse et des arbustes et, au début, vous ne remarquez pas les trois gros crochets au plafond de chaque pièce ou le fait que de grandes feuilles de papier rouge, décorées de footballeurs, recouvrent les fenêtres pour cacher les pièces des regards extérieurs. Mais les dossiers de cet endroit de souffrance sont dispersés sur les planchers, dans le jardin et sur le toit. Ils nous apprennent, par exemple, que le chef de ce centre de torture était Hachem al-Tikrit et que son second s'appelait Rachid al-Nababy. Un ex-prisonnier, Mohamed Aish Jassem, m'a montré comment il avait été suspendu au plafond par le capitaine Amar al-Isawi, qui croyait que Jassem était membre du parti religieux Dawa. " Il ont mis mes mains derrière mon dos, comme ça, les ont attachées et m'ont ensuite tiré dans les airs par mes poignets attachés " m'a-t-il dit. " Ils utilisaient une petite génératrice pour me monter jusqu'au plafond puis ils relâchaient la corde en espérant me briser l'épaule dans la chute ". Les crochets au plafond sont directement devant le bureau du capitaine Isawi. J'ai compris ce que cela signifiait. Le bureau pour la documentation et la salle de torture n'étaient pas deux pièces séparées. La chambre de torture était le bureau. Pendant que l'homme ou la femme criait de douleur au-dessus de lui, le capitaine Isawi signait des papiers, prenait ses appels téléphoniques et -à en juger par le contenu de sa corbeille- fumait plusieurs cigarettes en attendant l'information qu'il voulait soutirer de ses prisonniers. Ces hommes étaient-ils des monstres? Oui. Sont-ils recherchés par les Américains? Non. Travaillent-ils maintenant pour les Américains? Fort probablement -en fait certains pourraient bien être dans la longue queue d'anciennes brutes de la sécurité qui attendent chaque matin à l'extérieur de l'Hôtel Palestine dans l'espoir d'être réengagé par l'Unité des affaires civiles des 'Marines' des États-Unis. Le nom des gardiens au centre de torture de Qasimiyeh à Bagdad se retrouvent dans les papiers qui jonchent le plancher : Ahmed Hassan Alawi, Akil Shahid, Noaman Abbas et Mohamed Fayad. Mais les Américains ne se sont pas donnés la peine de découvrir cela. Messieurs Alawi, Shahid, Abbas et Fayad peuvent donc postuler un emploi auprès d'eux sans problème. Il y a des documents d'identification des prisonniers sur les bureaux et dans les armoires. Qu'est-il arrivé à Wahid Mohamed, Majid Taha, Saddam Ali ou Lazim Hmoud? Une femme en tchador noir s'est approchée de l'ancien centre de torture. Quatre de ses frères y avaient été amenés et, plus tard, quand elle était revenue pour s'enquérir de ce qui leur était arrivé, on lui avait dit que les quatre avaient été exécutés. On lui avait ordonné de partir. Elle n'a jamais pu voir ni enterrer leurs corps. Des ex-prisonniers m'ont dit qu'il y avait une fosse commune dans le désert Khedir, mais personne -surtout pas les nouveaux occupants de Bagdad- n'est intéressé à la découvrir. Et les hommes qui ont souffert sous Saddam? Qu'avaient-ils à dire? " Nous n'avons commis aucun péché ", m'a dit l'un d'eux, un homme de 40 ans dont la corvée comme prisonnier consistait, entre autres choses, à nettoyer le sang et les excréments après chaque exécution. " Nous ne sommes coupables de rien. Pourquoi nous a-t-on fait çà? " " Oui, les États-Unis se sont débarrassés de Saddam. Mais l'Irak nous appartient. Notre pétrole nous appartient. Nous conserverons notre nationalité. Elle demeurera irakienne. Les Américains doivent partir ". Si les Américains et les Britanniques veulent comprendre la nature de l'opposition religieuse ici, ils n'ont qu'à consulter les dossiers des archives des services secrets de Saddam. J'en ai trouvé un, le Rapport no. 7481, daté du 24 février cette année, concernant le conflit entre le Sheikh Mohamed al-Yacoubi et Mukhtada Sadr, 22 ans, petit-fils de Mohamed Sadr, qui fut exécuté sur les ordres de Saddam il y a plus de deux décennies. Ce conflit montrait la passion et la détermination avec lesquelles les dirigeants religieux chi'ites se combattaient même entre eux. Mais, bien sûr, personne ne s'est donné la peine de lire ce matériel ni même de le chercher. À la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, des officiers du renseignement britanniques et américains parlant allemand parcoururent chaque document dans les milliers de bureaux de la Gestapo et de l'Abwehr à travers l'Allemagne de l'ouest. Les Russes firent de même dans leur zone. En Irak, cependant, les Britanniques et les Américains ignorent tout simplement les preuves. Il y a un endroit encore plus terrible que les Américains pourraient visiter à Bagdad -le quartier général de tout l'appareil de renseignement, un complexe massif peint en gris qui fut bombardé par les États-Unis, et une série de villas et d'édifices à bureaux qui sont remplis de dossiers, de documents et de catalogues de fiches. C'est ici qu'on amenait les prisonniers politiques spéciaux de Saddam pour de sales interrogatoires -dans lesquels l'électricité jouait un rôle essentiel- et c'est ici que Farzad Bazoft, correspondant de l'Observer, fut amené pour être questionné avant qu'on ne le pende. L'endroit est agrémenté d'allées délicatement ombragées, d'une garderie -pour les familles des tortionnaires- et d'une école où un étudiant a laissé son essai rédigé en anglais et portant (de façon appropriée peut-être) sur En attendant Godot de Beckett. Il y a aussi un hôpital miniature et une route nommée " Freedom Street " et des plates-bandes et des bougainvilliers. C'est l'endroit le plus sordide de tout l'Irak. Incroyablement, j'ai rencontré un scientifique irakien qui marchait autour du complexe, un collègue de l'ancien chef du programme irakien de physique nucléaire, le Dr. Sharistani. " C'est le dernier endroit que je voudrais voir et je n'y retournerai jamais " m'a-t-il dit. " C'était le pire lieu du mal dans tout le monde ". Dans les dernières heures, les plus hauts responsables de la sécurité du régime de Saddam étaient occupés à déchiqueter des millions de documents. J'ai découvert une grande pile de sacs d'ordures noirs derrière l'une des villas, chacun rempli de milliers de documents déchiquetés. Ne devrait-on pas ramener tout cela à Washington ou à Londres pour les reconstituer et apprendre leurs secrets ? Même les documents non déchiquetés contiennent des renseignements précieux. Mais, une fois encore, les Américains ne se sont pas donné la peine -ou n'ont pas l'intention- de les passer en revue. S'ils le faisaient, il y découvriraient les noms de douzaines de hauts responsables du renseignement, dont plusieurs sont identifiés dans des lettres de félicitations qu'ils tenaient à s'échanger à chaque fois que l'un d'eux était promu. Où se trouve maintenant, par exemple, le colonel Abdulaziz Saadi, le capitaine Abdulsalam Salawi, le capitaine Saad Ahmed al-Ayash, le colonel Saad Mohamed, le capitaine Majid Ahmed et tant d'autres? Nous ne le saurons peut-être jamais. Peut-être que nous ne sommes pas supposés le savoir. Les Irakiens ont raison de demander pourquoi les Américains ne cherchent pas cette information, tout comme ils ont raison d'exiger de savoir pourquoi l'ensemble du cabinet de Saddam -sans exception- s'est échappé. La capture par les Américains du demi-frère de Saddam et du Palestinien vieillissant Abu Abbas, dont le dernier acte violent remonte à 18 ans, est une bien pathétique compensation pour tout ça. Et voici une autre question, posée par les Irakiens, à laquelle je ne peux apporter de réponse. Le 8 avril, trois semaines après le début de l'invasion, les Américains ont largué quatre bombes de 2 000 livres sur le quartier résidentiel de Mansour à Bagdad. Ils ont prétendu croire que Saddam s'y cachait. Ils savaient qu'ils allaient tuer des civils parce qu'il ne s'agissait pas, comme un mandarin du Commandement central (Centcom) l'a admis, d'une " aventure sans risque " (sic). Ils ont donc largué leurs bombes et tué 14 civils à Mansur, la plupart étant des membres d'une famille chrétienne. Les Américains ont dit ne pas pouvoir confirmer avoir tué Saddam avant de faire des expertises sur le site. Mais cela s'est révélé être un mensonge. J'y suis allé il y a deux jours. Aucun officiel américain ou britannique ne s'est jamais donné la peine de venir voir les cratères des bombes. En fait, quand je suis arrivé, il y avait une odeur de putréfaction et les familles ont retiré les restes d'un bébé des décombres. Aucun officiel américain n'a présenté d'excuses pour cette terrible tuerie. Et je peux leur garantir que le bébé que j'ai vu être placé sous une feuille de plastique noir n'était définitivement pas Saddam Hussein. S'ils s'étaient donné la peine de regarder à cet endroit -comme ils ont prétendu qu'ils le feraient- ils auraient au moins trouvé le bébé. À présent, ces cratères sont un lieu de pèlerinage pour la population de Bagdad. Ensuite il y a les incendies qui ont consumé tous les ministères de la ville -à l'exception bien sûr des Ministères de l'intérieur et du pétrole -de même que les bureaux de l'ONU, les ambassades et les centres commerciaux. J'ai compté un total de 35 ministères maintenant vidés par le feu et leur nombre continue d'augmenter. Hier, je me suis retrouvé au Ministère du pétrole, gardé assidûment par des soldats des États-Unis, dont certains se recouvraient la bouche de vêtements en raison des nuages de fumée qui roulaient vers eux en provenance du Ministère de l'irrigation agricole, situé juste à côté. Difficile de croire, n'est-ce pas, qu'ils n'étaient pas au courant que quelqu'un mettait le feu à l'édifice voisin? Puis j'ai repéré un autre feu, trois kilomètres plus loin. J'ai conduit jusque là pour constater que des flammes sortaient des fenêtres du Département d'informatique du Ministère de l'éducation supérieure. Et juste à côté, perché sur un mur, se tenait un 'Marine' américain, qui a dit garder un hôpital voisin et ignorer qui avait allumé ce feu à côté de lui, parce qu'on " ne peut pas regarder partout en même temps ". Je suis convaincu que le 'Marine' n'était ni plaisantin ni malhonnête -et si les Américains ne croient pas cette histoire, il s'agissait du caporal Ted Nyholm du 3e régiment, de la 4e division des 'Marines' et j'ai d'ailleurs téléphoné à sa fiancée, Jessica, aux États-Unis pour qu'il lui transmette son amour- mais il y a quelque chose qui ne va vraiment plus quand on ordonne à des soldats de simplement regarder de grands ministères se faire incendier par des foules sans rien faire. Mais il y a aussi quelque chose de dangereux -et de profondément troublant- concernant ces foules qui mettent le feu aux édifices de Bagdad, y compris les grandes bibliothèques et les archives de l'état. Parce qu'il ne s'agit pas de pillards. Les pillards viennent en premier. Les incendiaires viennent plus tard, souvent dans des autobus bleu et blanc. J'en ai suivi un, qui filait hors de la ville, après que ses passagers eurent mis le feu au Ministère du Commerce. Le discours officiel des États-Unis sur tout cela c'est que le pillage est une revanche -une explication qui tient de moins en moins la route- et que les incendies sont allumés par des " restes du régime de Saddam ", les mêmes " éléments criminels " sans doute auxquels les ordres de couvre-feu des 'Marines' font référence. Mais les habitants de Bagdad ne croient pas que ce sont les anciens supporteurs de Saddam qui allument ces incendies. Et moi non plus. Les pillards font de l'argent avec leur butin, mais les incendiaires doivent être payés. Les passagers de ces autobus se font visiblement diriger vers leurs cibles. Si Saddam les avaient payés d'avance, ils n'allumeraient pas les incendies. Dès sa disparition, ils auraient empoché l'argent et oublié tout le projet. Mais alors, qui sont les membres de cette armée d'incendiaires? J'en ai reconnu un l'autre jour, un homme d'âge moyen, non rasé, en T-shirt rouge, qui lorsqu'il m'a vu pour la deuxième fois a pointé sa Kalachnikov vers moi. De quoi avait-il peur? Pour le compte de qui travaillait-il? Qui a intérêt à la destruction de toute l'infrastructure physique de l'état et de son patrimoine culturel? Pourquoi les Américains n'ont-ils pas mis un terme à cela ? Je le répète, il y a quelque chose qui ne va vraiment pas à Bagdad et ce qui s'y passe exige que des questions sérieuses soient posées au gouvernement des États-Unis. Pourquoi, par exemple, Donald Rumsfeld, secrétaire à la défense, a-t-il prétendu la semaine dernière qu'il n'y avait pas de pillage et de destruction généralisés à Bagdad? Sa déclaration était un mensonge. Alors pourquoi l'a-t-il faite? Les Américains disent qu'ils n'ont pas assez de troupes pour contrôler les incendies. Cela est également faux. Si c'est le cas, que font toute la journée les centaines de soldats déployés dans les jardins du monument de l'ancienne guerre Iran-Irak? Ou les centaines qui campent dans les jardins de roses du Palais Président? Les habitants de Bagdad demandent donc qui est derrière la destruction de leur patrimoine culturel: le pillage des trésors archéologiques du musée national; l'incendie de toutes les archives ottomanes, royales et d'état; la bibliothèque coranique; et la vaste infrastructure du pays que nous prétendons vouloir créer pour eux. Pourquoi, demandent-ils, n'ont-ils toujours pas d'électricité ni d'eau? Cela sert quel intérêt que l'Irak soit déconstruit, divisé, incendié, vidé de son histoire, détruit? Pourquoi leur soi-disant libérateurs leur imposent-ils des ordres de couvre-feu ? Et ce ne sont pas seulement les habitants de Bagdad qui posent ces questions, mais également les Chi'ites de Najaf et de Nasiriyah -où 20 000 personnes ont protesté mercredi contre la première tentative des États-Unis de réunir un gouvernement de marionnettes. Présentement il y a du pillage à Mossoul où des milliers de personnes auraient mis le feu à la voiture du gouverneur pro-américain, après qu'il eût promis que les États-Unis aideraient à rétablir l'électricité. Il est facile pour un journaliste d'annoncer le malheur, surtout après une guerre brutale dénuée de toute légitimité internationale. Mais la catastrophe attend plutôt les optimistes au Moyen-Orient, en particulier les faux optimistes qui envahissent les pays riches en pétrole avec des justifications idéologiques, des prétextes et des accusations de haute voltige morale, comme les armes de destruction massive qui demeurent non prouvées. Je ferai donc une prédiction terrible. Que la guerre de " libération " des États-Unis est maintenant terminée. Que la guerre de libération de l'Irak contre les Américains est sur le point de commencer. En d'autres mots, c'est maintenant que la vraie histoire, terrifiante, commence. |