Pio2001 a écrit :
Il existe deux approches successives pour qualifier un objectif.
La première, ce sont ses capacités en focale et ouverture (plus la stabilisation). Tant qu'on a la focale nécessaire et l'ouverture suffisante, on peut dire que l'objo est satisfaisant. De fait, plus l'ouverture est grande pour une focale donnée, plus le niveau de gamme, donc le prix, est élevé.
De ce point de vue, bancs d'essais n'ont aucune importance. On prend le moins cher qui fait ce qu'on veut.
La focale la plus propice aux grandes ouvertures est le 50 mm, où on trouve du F/1.8 pour une centaine d'euros. Plus long, cela devient très encombrant, très lourd, avec de grandes lentilles qu'on paye très cher. Plus court, il est de plus en plus difficile d'obtenir une qualité correcte, et le bas de gamme nécéssite, pour une résultat acceptable, des optiques haut de gamme, asphériques, apochromatiques, etc assez chères également.
La seconde approche consiste à évaluer la qualité de l'image pour un réglage donné, en termes de vignettage, piqué, aberrations chromatiques et distorsion. Cette seconde approche se fait sur mires.
L'ensemble de ces caractéristiques distingue ce qu'on appelle un cul de bouteille d'un objectif de qualité. Cependant, chacune d'elles a un impact sur un style de photographie différent.
Le vignettage gêne principalement les photos comportant du ciel. Donc surtout les photos de paysage. Les coins sont assombris. Cela se remarque très peu autrement. Cela se corrige plus ou moins bien par traitement logiciel, avec quelques tâtonnements. Cela prend du temps, et partir d'une image déjà correcte est un gain de temps et d'efforts très appréciable.
Le piqué, c'est tout simplement la netteté. Appréciable dans divers cas : tirages grand format, découpages de petites parties de l'image (souvent utile, quoi qu'on en dise : un ami a, par hasard, un sourire rayonnant sur une photo de groupe alors qu'il fait généralement la grimace dès qu'un objectif est tourné vers lui, et vous voulez en faire un portrait...), photos de paysage où les plus petits détails participent à l'ensemble, recherche de l'agrandissement macro le plus puissant possible... Ce critère n'est pas corrigeable de façon logicielle.
Sur ce critère, les télézooms ont du mal à grande focale, et les courtes focales à grande ouverture ont du mal dans les coins. Les focales marcro F/2.8 vers 80 à 100 mm, ont généralement un piqué excellent sur toute l'image et à toutes les ouvertures.
Les aberrations chromatiques, c'est un décalage des couleurs dans les coins. Cela s'ajoute au manque de piqué, mais c'est corrigeable par logiciel. Certains appareils commencent à corriger automatiquement les aberrations chromatiques dès la prise de vue.
C'est important si on a besoin de piqué dans les coins : paysages, tirages grand format.
La distorsion, c'est une légère déformation des lignes droites. Les focales fixes en sont généralement exemptes. C'est un problème des zooms puissants. Particulièrement en grand angle.
Cela gêne rarement l'image, sauf si vous avez un grillage ou un quadrillage comme fond, si vous prenez un bâtiment de face (cela gêne à peine s'il est pris en perspective), ou si vous photographiez l'horizon marin. Le shareware PTLens est un must pour ce qui est de la correction de distorsion. Il possède dans sa base de donnée les distorsions de quasiment tous les objectifs du marché, et fait la correction automatiquement en se basant sur les infos exif qui donnent l'appareil (facteur de crop), l'objo et la focale utilisée.
Malheureusement, la correction auto du vignettage n'est pas possible, car il faudrait pour cela prendre en compte les courbes de transfert en luminosité du boitier selon tous les règlages possible, et en fonction du dérawtiseur utilisé, afin d'évaluer le facteur de cramage ou de bouchage exact de chaque pixel.
Il existe d'autres caractéristiques, non mesurées par photozone. Le contraste, par exemple, qui donne un effet de halos autour des objets brillants, comme si la photo était prise à travers une vitre sale. La dominante de couleur aussi, car le verre des lentilles n'est pas tout-à-fait incolore. Et sans doute le "purple fringing", que j'ai découvert plus haut en postant une photo prise au Sigma 30mm 1.4.
Pour évaluer tout cela, et savoir si l'objectif est de qualité suffisante pour ce que l'on veut en faire, il faut se baser sur des mesures chiffrées. L'essai dans le magasin est impossible. Comment savoir si l'image est vignettée ou si le plafond, dans le coin de la photo, est tout simplement mal éclairé ? Comment savoir si les coins sont nets (il faut déjà décharger l'image sur un PC portable) alors qu'on a fait la mise au point au centre ? Il faut prendre une photo à l'infini jusque dans les coins. Le vignettage est donné en nombre de diaphragmes perdus dans les coins par rapport au centre. On peut aussi poster une image d'un fond parfaitement uniforme pour voir comment il se répartit sur l'image, car pour une même mesure, un vignettage brutal est beaucoup plus gênant qu'un vignettage progressif.
Le piqué est donné en nombre maximum de lignes noires et blanches par hauteur d'image à 50% de floutage. Cette mesure dépend fortement du boitier. D'une part parce qu'un boitier avec peu de pixels, comme de Canon EOS350D de photozone, 8 mégapixels, ne peut pas enregistrer plus de 2304 lignes par image, alors que les boitiers avec plus de mégapixels peuvent monter plus haut.
Ensuite parce que le niveau de floutage est fortement dépendant du règlage interne de netteté, qui varie d'un boitier à l'autre, selon les choix du constructeur. Il faut savoir que même le règlage de netteté minimal, sur l'EOS350D, c'est-à-dire un règlage "le plus flou possible", est accentué en netteté par rapport à ce que le capteur a enregistré. En plus cela dépend de l'algorithme de débayerisation, car le capteur n'est pas une grille de pixels RVB. Il dépend aussi du soin apporté à la mise au point. Photozone fait un bracketing manuel pour chaque mesure. La bague de netteté est tournée d'un poil à chaque fois, et l'image la plus nette est conservée pour la mesure. Il en résulte que les résutats réels peuvent être moins bons que les mesures notamment en cas de front focus (l'autofocus est devant le focus de la prise de vue), de back focus (l'autofocus est derrièe le focus de la prise de vue), ou de champ courbe (l'objectif ne peut pas faire la mise au point à la fois au centre et au bord, c'est l'un ou l'autre).
C'est pourquoi il faut interpréter les mesures de netteté de la façon suivante :
-Le sommet du graphe correspond à 8 mégapixels pour les mesures sur Canon. Les mesures vers 2100 et au-delà peuvent être considérées au max du capteur (plus ou moins un certain floutage dû à la dérawtisation), et sur un boitier avec plus de pixels, l'objectif va peut-être au-delà.
-D'un boitier à l'autre, on ne peut comparer que les mauvaises mesures. En-dessous de 1800, cela paraît raisonnable de considérer qu'on aura une performance équivalente sur un autre boitier. Au-delà, cela dépend trop de la résolution du capteur et des algorithmes de l'appareil.
-Pour un objectif donné, en raison de l'imprécision de la mise au point, il me semble raisonnable de considérer comme équivalentes des mesures séparée d'une valeur de 100.
La distorsion est donnée directement avec la photo d'une grille.
Les aberrations chromatiques sont données en nombre de pixels, ce qui complique leur interprétation, car les pixels n'ont pas la même taille d'un boitier à l'autre.
On a le droit de considérer cela comme du "pignolage", tant qu'on ne fait pas de grands formats, ni de panoramique, ni de crops, ni de photo d'architecture, ni de photo de mer. Cela n'empèchera pas de rechercher dans du haut de gamme une grande ouverture, un très grand angle, ou une stabilisation, pour travailler d'excellentes photos, de portraits, de sport, d'animaux etc
En revanche, il faut bien se dire qu'on ne peut définir objectivement un "cul de bouteille" que sur mire. Cela répond à certains besoins assez courants.
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