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Aux premiers temps de l’islam, Dieu exhortait la communauté à la consommation des spiritueux : « des fruits des palmiers et des vignes, vous tirez une boisson enivrante et un aliment excellent. En vérité, en cela, est certes un signe pour un peuple qui raisonne » (16.67). En vertu de cette révélation, l’alcool coulait à flot et imbibait le foie des musulmans jusqu’à saturation, y compris celui de Mahomet. C’était l’esclave d’Aïcha qui, chaque jour, avait l’habitude de préparer la liqueur du prophète : Un jour, j’ai rencontré ‘Aïcha et je lui ai demandé de m’informer sur le nabîdh. Elle a appelé sa servante habachite et elle me dit : « demande à celle-ci de t’en informer, car c’est elle qui vinifiait le nabîdh pour le Messager d’Allah ». Alors, la susdite esclave dit : « je lui vinifiais le nabîdh la veille au moyen d’une outre que je liais d’une ficelle avant de l’accrocher, puis le lendemain, il en buvait.2 De temps à autre, c’était la mère des croyants qui se chargeait de la besogne : « nous vinifions le nabîdh du Messager d’Allah dans une outre dont nous lions l’embout par une ficelle et qui se termine par un trou. Nous préparions un tel nabîdh au matin afin d’être bu la nuit, et nous le vinifions de nouveau la veille afin d’être bu le lendemain »3, et occasionnellement Mahomet s’activait à la tâche : « le Messager de Dieu vinifiait le nabîdh dans un bol de pierre »4. Le procédé de fabrication est relativement simple et à porter de toute les bourses, chacun était assez habile pour produire son propre « cocktail maison ». « Nous préparions le nabîdh du Messager de Dieu dans une outre, on prenait une poignée de dattes ou une poignée de raisins secs que nous mettions à l’intérieur de l’outre puis nous versions par-dessus de l’eau. Le nabîdh que nous préparions le matin était bu par lui (le prophète) le soir, et le nabîdh que nous préparions le soir était bu par lui le matin », rapporte 'Aïcha.5 Les Arabes avaient coutume de se réunir entre amis autour d’un bon repas et d’une bonne amphore de vin en reluquant de belles esclaves, aux voix envoûtantes, se dandiner, les divertissements dans le hijaz étaient peu nombreux : « il (Qayl, membre des ‘Ad) est venu chez Bakr ibn Mou’awiya et il lui a donné à boire du vin et deux chanteuses chantaient devant lui »6. L’Envoyé de Dieu établit quelques règles ayant trait à la production d’alcool : interdiction de vinifier dans une jarre de terre cuite (hantam) ou enduite de goudron (mouzaffat), dans un tronc de palmier (naqir) ou dans une courge (douba’), faute de quoi le breuvage se changerait en vinaigre7 ; et défense de mélanger les dattes avec les raisins et les dattes mûres avec les dattes vertes, « il faut les vinifier les uns séparés des autres »8. Cette dernière recommandation est suffisamment importante à ses yeux pour qu’il prenne l’initiative de le signaler par écrit aux habitants d’une contrée yéménite9. On lui fit remarquer au sujet de l’interdiction de l’usage de certains récipients que « tout le monde ne peut pas se procurer des outres de peau », il autorisa en ce cas l’emploi de jarres en argile non enduites10. Le prophète épongeait jusqu’à une outre de boisson alcoolisée par jour et parfois conservait son élixir durant quelques temps : « le Messager d’Allah buvait au matin du nabîdh qu’on lui vinifiait au début de la veille et continuait à le boire la nuit suivante, le lendemain et le surlendemain jusqu’à l’après-midi. Alors, quand il restait quelque quantité de ce vin, il ordonnait de l’offrir à boire à (son) esclave, ou de le renverser »11. Embarrassé par le fait que l’Envoyé de Dieu ait pu absorber quotidiennement des litres d’alcool, l’imam Moslim ibn al-Hajjaj al-Qochayri invoque le prétexte qu’au delà de soixante douze d’heures de fermentation la boisson conduit à l’ivresse, c’est la raison pour laquelle Mahomet n’asséchait pas son outre. Il écrit en titre de chapitre : « la permission de boire le nabîdh avant qu’il ne se condense et avant qu’il ne devienne alcoolique ». Il soulage de cette façon sa conscience et trouve le compromis entre la future prohibition et la consommation excessive du prophète. Le nabîdh sera cependant totalement interdit à l’avenir par le fondateur de l’islam ; d’autre part il est impensable qu’il ait pu donner à boire à son esclave une boisson illicite. Alcoolique notoire, Mahomet se voyait maintes fois proposer des verres débordant du nectar de ses désirs qu’il acceptait bien volontiers. Jaber ibn Abdollah raconte : « un jour où nous étions en compagnie du Messager d’Allah, celui-ci a demandé à boire. Alors, un homme lui a posé la question suivante : « Ô Messager d’Allah, ne voudrais-tu pas que nous te donnions du nabîdh à boire ? » Il a répondu : « Si ». L’homme est sorti pour revenir avec une tasse rempli de nabîdh.12 Les heureux évènements comme les mariages étaient propice aux beuveries. Les occasions de faire la fête n’étaient pas fréquentes ; purs moments de détente après une journée de dur labeur sous un soleil de plomb : « Abou Ousayd As-Sâ’idî invita le Messager de Dieu à l’occasion de ses noces ; la mariée était en train de les servir ; saviez-vous ce qu’elle offrit au Messager de Dieu ? Elle a fait tremper des dattes dans un vase d’eau toute la nuit et en a fait un breuvage »13. On raconte par surcroît que le prophète était si fortement porté sur le nabîdh qu’il s’en enduisait le corps : « Ibn Mas’oud dit que le prophète lui demanda : « qu’as-tu dans ton récipient de peau ? » Il répondit qu’il avait du nabîdh. Le prophète dit : « les dattes sont pures et purifient l’eau ». Ensuite il fit ses ablutions avec »14. Son penchant pour l’alcool ne lui fit pas pour autant perdre toute sa lucidité. Les traditions ne relatent pas de mésaventure le concernant en état d’ébriété, quoiqu’elles eussent pu être retranchées ou écartées des corpus de ahadith. Dans la saga du voyage nocturne, on prétend qu’il fut présenté au Messager un verre de vin et de lait. Il choisit le second et à l’ange Jibrîl de le féliciter : « louange à Dieu qui a guidé ton instinct, si tu avais choisi la tasse remplie de vin ta nation se serait égarée »15, une annonce sous forme de préambule au futur blâme divin. Des individus sous l’emprise de l’alcool peuvent générer des troubles à l’ordre public (bagarres, insultes, vandalisme, délits, crimes), Mahomet était conscient des problèmes engendrés par l’abus de vin, alors quand Omar, Mu’az ibn Jabal et des Ansars se rendirent en sa demeure pour lui demander : « réponds-nous à la question du vin et des jeux de hasard qui font perdre la raison et les biens »16, il leur répondit : « dans les deux, sont pour les hommes un grand péché et des utilités, le péché qui est en eux est plus grand que leur utilité » (2.219). Ce verset révélé à Médine sonne comme un avertissement, il est déconseillé de boire des boissons conduisant à l’ivresse, toutefois, cela n’est pas illicite. Certaines personnes arrêtèrent de boire après la descente de l’âya mais la plupart des gens continuèrent rétorquant que cela ne leur était pas interdit17, jusqu’au jour où des dévots croyants firent la démonstration d’un spectacle avilissant, conduisant de la sorte, le prophète à imposer des mesures plus restrictives venant limiter la consommation d’alcool. Des sahâba passablement éméchés après un repas, exécutèrent la prière du coucher du soleil avec en chef de file le premier imam du chiisme qui s’emmêla les pinceaux lors de la récitation de la sourate al-Kâfiroun : ‘Ali ibn Abi Tâlib a rapporté : ‘Abdour Rahman nous a préparé un repas et nous y a invité et nous a aussi servi du vin. Le vin nous a rendus saoul et ils m’ont désigné (pour mener la prière). J’ai récité : « Ô infidèles ! Je n’adore pas ce que vous adorez et nous adorons ce que vous adorez ». Alors Dieu révéla : « Ô vous qui croyez ! N'approchez point de la prière alors que vous êtes ivres, avant de savoir ce que vous dites ! » (4.43)18 Cette restriction n’aura pas beaucoup d’effets sur les ivrognes musulmans puisque d’autres incidents plus graves encore vont venir émailler le quotidien ascétique des habitants de Médine, et mettront fin théoriquement à la fabrication, à la vente et la consommation de vin ainsi qu’à l’alcoolisme chronique de l’Envoyé de Dieu. Affront au prophète, prière en état d’ébriété, meurtre et agression d’un combattant de Badr ébranleront la vie de la oumma et mèneront à la révélation des versets 5.90-91 promulguant la prohibition. ‘Ali ibn Abi Tâlib dit : « je reçus une chamelle qui me revenait comme ma part de butin de la bataille de Badr, et le Messager de Dieu m’en donna une autre. Je les parquai devant la porte d’un des Ansâr afin de les charger de idhkhir pour le vendre et organiser un festin à l’occasion de mes noces avec Fatima ; j’étais en compagnie d’un bijoutier de la tribu Qaynouqâ’. Pendant ce temps, Hamza ibn Abd al-Mouttalib était en train de boire dans cette maison-là, avec une chanteuse qui lui dit : « Ô Hamza, va tuer ces deux chamelles bien grasses et sers-les à tes hôtes » ; Hamza tira son sabre et sortit : il coupa les bosses des deux chamelles, les éventra et en sortit le foie ». ‘Ali dit ensuite : « je vis alors un spectacle horrible, je me rendis chez le Messager de Dieu qui était en compagnie de Zayd ibn al-Hâritha et l’en informai. Tous les deux sortirent et moi à leur suite. Le prophète apostropha furieusement Hamza qui, levant les yeux sur lui, dit : « vous n’êtes après tout que les esclaves de mes pères ». Le prophète se retira et sortit. Cela eut lieu avant la prohibition des boissons alcooliques ».19 Le camouflet d’Hamza à son neveu restera dans les annales de l’histoire islamique. Parmi les premiers convertis à l’islam, l’oncle de Mahomet était connu pour son courage et sa bravoure, sa réputation d’excellent guerrier lui valu le sobriquet de « lion d’Allah ». Le prophète n’avait pas intérêt à le châtier en raison de son outrecuidance à l’image d’Oqba ibn Abi Muayt et d’autres poètes, transpercés par les sabres mahométans pour ce qu’ils ont écrit comme vers satiriques vis-à-vis de l’Envoyé de Dieu. La présence d’Hamza était trop indispensable sur les champs de bataille pour que Mahomet puisse s’en passer en se le mettant à dos. Le fils d’Abd al-Mouttalib ne se repentit pas de son incorrection et Mahomet garda en mémoire l’incartade qui « fut l’une des premières causes de la révélation de l’interdiction du vin »20. Le verset 4.43 devait modérer les excès de vin avant les offices cultuels sans en interdire l’usage mais au mépris de la parole de Dieu, « les gens continuèrent à boire si bien que l’un d’eux venait saoul à la prière »21 ; résultat prévisible d’une politique trop laxiste, il en fallait plus pour décourager nos gais lurons. Puis survint un évènement dramatique, un jeune garçon fut victime de l’œnolisme d’un pieux serviteur de Dieu. En effet, il fut assassiné par ce dernier, respirant lorsqu’il rendit son dernier souffle, l’haleine fétide et alcoolisé de son bourreau. ‘Othmân ibn ‘Afân (m. 656) alors calife, explique à ses compatriotes lors d'un sermon sur le vin, comment se déroula la tragédie : Evitez le vin car il est mère de tous les péchés. Il y avait un homme avant votre temps qui s’était retiré à l’écart des gens pour adorer Dieu. Plus tard, une mauvaise femme est tombée amoureuse de lui et envoya sa servante lui dire qu’elles voulaient qu’il soit témoin de quelque chose. Il suivit donc la servante. Au moment où ils franchirent le seuil de la porte, elle ferma derrière eux puis il trouva une belle femme avec un jeune servant et de l’alcool. Elle lui dit : « Par Dieu ! Je ne t’ai pas invité pour être témoin de quelque chose, mais je t’ai appelé pour que tu couches avec moi, tues ce garçon ou bois cet alcool. Elle lui donna alors de l’alcool et il lui en redemanda jusqu’à ce qu’il fit l’amour avec elle et tua le garçon. C’est pourquoi évitez le vin car il ne se combine pas avec la foi, l’un d’entre eux expulse nécessairement l’autre.22 Les anges de Dieu, eux aussi, se sont laissés prendre au piège. Dans un hadîth analogue enregistrée par Ahmad ibn Hanbal, Dieu envoie sur terre Hârout et Mârout où ils firent la rencontre d’une belle femme qui leur demanda de tuer un garçon, ensuite elle leur servirait à boire. Après avoir étanché leur soif, les anges assassinèrent l’enfant sous l’emprise du vin23. L’agression de Sa’d ibn Abi Waqqâs, illustre compagnon à qui Mahomet promis le paradis, est l’incident de trop qui mit un terme à la consommation des boissons alcooliques. Son talent d’archer n’avait d’égal que son insolence. Convié à un repas, il offusqua ses hôtes en leur lançant une remarque désobligeante, et reçu en guise de réponse un grand coup sur le nez qui le fit saigner. Sa nature de fayot le poussa à plaider sa cause auprès du prophète et c’est ainsi que les versets de la prohibition furent révélés. Enfin, un jour où je suis descendu chez un groupe d’Ansars et de Mouhajirins, ils m’ont dit : « viens pour que nous te donnions de la nourriture à manger et du vin à boire », avant l’interdiction du vin. A ce moment-là, je suis entré dans l’un de leurs jardins où j’ai vu la tête rôtie d’une bête égorgée et une outre (remplie) de vin. Alors, je me suis mis à manger et à boire avec eux. Pendant ce temps-là, en mentionnant les Ansars et les Mouhajirins, j’ai dit que les seconds sont meilleurs que les premiers. A ce moment-là, un homme m’a frappé avec l’une des deux mâchoires de la susdite tête de bétail, en me faisant saigner du nez. Alors, une fois où je suis entré chez le Messager d’Allah, je l’ai renseigné sur l’évènement. C’est pourquoi Allah, puissant et grand, a révélé à mon propos et en matière de vin, le verset suivant : {… le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de divination ne sont qu’une abomination, œuvre du Diable…} (Al-Mâida « la table servie » : 90)24 Au moment de la descente de la révélation, Anas ibn Mâlik servait à boire aux convives d’Abou Talha le maître de maison, lorsqu’ils entendirent un homme crier dans la rue. Anas sortit s’enquérir de la raison de tout ce ramdam et l’homme l’avertit de l’interdiction du vin, subséquemment les gens vidèrent leurs cruches dans les rues de Médine. Les Médinois s’interrogèrent ensuite sur le sort des compagnons tués tandis qu’ils avaient du vin dans leurs ventres (en référence aux martyrs de la bataille de Ohod25), Mahomet les rassura par la providentielle promesse : « il n’est pas de grief à faire à ceux qui croient et accomplissent des œuvres pies pour ce qui touche ce qu’ils mangent, quand ils sont pieux, croient et accomplissent des œuvres pies, [quand] encore ils sont pieux et croient, [quand] encore ils sont pieux et sont bienfaisants. Allah aime les bienfaisants » (5.93)26. La sunna rapporte une autre tradition dans laquelle les versets sur le vin descendirent successivement sous l’impulsion d’Omar. Celui-ci exigeait à chaque fois une prescription plus explicite jusqu’à ce que Dieu abdiquât et proclamât l’interdiction des breuvages alcoolisés. Quand la prohibition du vin n’était pas encore déclaré, ‘Omar dit : « Ô Allah ! Donne-nous une explication satisfaisante au sujet du vin ». Alors le verset suivant de la sourate al-Baqara fut révélé : « ils t’interrogent sur le vin et le maysir. Dis : dans les deux, sont un grand péché… ». On appela ensuite ‘Omar et le verset lui fut récité. Il dit : « Ô Allah ! Donne-nous une explication satisfaisante au sujet du vin ». Puis le verset de la sourate an-Nisâ’ fut révélé : « Ô vous qui croyez ! N’approchez point de la prière alors que vous êtes ivres… ». Plus tard, le héraut du Messager de Dieu cria quand la prière fut exécuté : « prenez garde, celui qui est saoul ne doit pas venir prier ». On appela ‘Omar une seconde fois et on lui récita le verset. Il dit : « Ô Allah ! Donne-nous une explication satisfaisante au sujet du vin ». Ce verset fut révélé : « cesserez-vous ? » ‘Omar dit : « nous nous en abstenons ».27 Le prophète s’empresse d’assouvir les désirs d’Omar ; d’autres versets lui sont imputés du fait de ses sollicitations. Mahomet opéra un changement radical d’attitude vis-à-vis de l’alcool dans la crainte de voir la religion se pervertir. En peu de temps, le vin qui, au commencement, était « clairement marqué d’un signe positif ; (…) un signe de l’existence de Dieu pour qui sait réfléchir »28, est devenu une « œuvre du diable » (‘amal ach-chaytân). La contradiction ne s’arrête pas là puisque jaillissent du paradis de Dieu des sources intarissables de « l’œuvre du diable ». Sachant les dissensions que pouvaient créer un tel décret chez les amateurs de vinasse, l’Envoyé de Dieu les enjôla par une chimère et le tour était joué : « [voici] la représentation du jardin qui a été promis aux pieux : il s’y trouvera (…) des ruisseaux de vin (khamr), volupté pour les buveurs » (47.15), « on leur fera circuler des coupes d’une [boisson] limpide, claire, volupté pour les buveurs, ne contenant pas d’ivresse, inépuisable » (37.45-47), « parmi eux circuleront des éphèbes immortels, avec des cratères, des aiguières et des coupes d’un limpide breuvage dont ils ne seront ni entêtés, ni enivrés » (56.17-19). En ce qui concerne le sort des maudits, Dieu leur fera absorber tinat al-khabâl, l’eau-de-vie (al-‘araq) des habitants du feu décrit comme une sorte de pus29. Néanmoins, Dieu ne prescrivit pas de peine légale aux musulmans qui oseraient braver l’interdit, par conséquent la tradition vient compléter le livre saint. On raconte que Mahomet et ses compagnons rouaient de coups les ivrognes avec ce qu’ils leur tombaient sous la main : « lorsque an-Nou’aïmân ou son fils fut amené dans un état d’ébriété extrême, le Messager de Dieu ordonna qu’on le batte. J’étais parmi ceux qui étaient présents dans la maison, et ce avec des souliers et des branches de palmiers »30,
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