RandallBoggs | À propos de quelques fri nipponeries High Beat à 36 000 alternances par heure
En guise d'illustration introductive, une petite photo de famille de calibres japonais haute fréquence (en anglais High Beat, Hi-Beat, HB, whatever) :
© -tac-
Petit rappel historique : Au milieu des années 1960, les Suisses se réunissaient en conclave pour développer conjointement un échappement à haute fréquence et dominer le monde, ainsi naquit le Clinergic 21 et sa roue d'échappement à 21 dents produit par les Fabriques d'Assortiment Réunies (FAR ; société de l'ASUAG à l'époque, désormais Nivarox-FAR, Swatch Group). On pourra se référer aux communications de A. Simon-Vermot dans le Bulletin annuel de la S. S. C., 1966, p. 301, et le Bulletin de la Société Suisse de Chronométrie, 1968 p. 600. C'est technique, ça mérite des commentaires notamment sur la comparaison avec les calibres japonais, mais je n'ai pas le temps de relire la biblio, avec papier crayon.
Et pendant ce temps (à Vera Cruz), les Japonais ne sont pas en reste et développent, peinards dans leur coin du globe, leurs propres calibres haute fréquence afin de tenir la dragée haute aux Suisses, ce à quoi ils parviendront fort bien lors de concours de chronométrie... De plus, tout fourbes qu'ils étaient, ils avaient dans leur carton un drôle de machin à base de quartz qui allait un peu escagasser les Helvètes et leur industrie du tic-tac quelques années plus tard...
Alors, alors... Dans le cadre de ce message, nous nous limiterons aux Seiko de prolos (qui a dit que c'était un pléonasme ?) en omettant les histoires de versions chronométriques, VFA (Very Fine Adjustment), réservées à l'« élite », même si ça ne reste qu'une production japonaise. On ne parlera pas non plus des chronographes de poches à 36 000 alt/h (calibre Seiko 8800).
Pour résumer, il y a 4 familles de mouvements 36000 chez Seiko en vintage :
- 1944, calibre manuel pour ces dames, tout petit mouvement de forme tout kawai
(23 rubis, sorti en 1967)
- 45XX, calibre manuel, équipant des King Seiko et Grand Seiko, épaisseur : 3,5 mm (25 rubis, sorti en septembre 1968)
- 5740C, calibre manuel, équipant les Lord Marvel 36000, épaisseur 4,5 mm (23 rubis, sorti en 1967)
- 61XX, calibre automatique, équipant des Grand Seiko, épaisseur 5,6 mm (25 rubis, sorti en janvier 1968)
© Photos trouvées sur le net, provenant de vendeurs de la baie (ouais, ouais... un jour j'aurai un APN )
Voilà. C'est fini.
Enfin presque...
À noter que des King Seiko et Grand Seiko High Beat automatiques existent aussi en mouvement 56XX, mais c'est en fait du Hi-Beat de p'tit'beat... seulement 28 800 alt/h Pour la forme des boîtes de celles-ci, on en trouve de différentes sortes, certaines préfigurant ce que seront les Ananta actuelles. En ce qui nous concerne, en l'occurrence les mouvements 36 000, les formes de boîtes sont peu variées (sauf le 1944, mais c'est parce que c'est pour poignet féminin et souvent femme varie, c'est bien connu...), la forme la plus courante étant la référence 8000.
Je ne parlerai donc quasiment pas du calibre 1944. Mais ça n'empêche pas certains d'en posséder un exemplaire tout choupi (celle de droite), en version 1944B chronométrique. Je sens poindre les railleries. C'est ça, allez-y ! Il n'empêche, avec une réserve de marche de 38 heures, elle peut en remontrer à certains calibres plus virils. Pas de date, pas de stop seconde, fond vissé.
© IZN2
En famille :
© -tac-
À côté d'icelle, on trouve donc la Seiko 36 000 pour Hômme la moins chère, j'ai nommé la Lord Marvel (LM) 36000 (il y a d'autres Seiko Lord Marvel, voire des Seiko Marvel, mais c'est une autre histoire).
© IZN2
index chiffres, cadran texturé façon trame de tissu (les rolexologues diraient « cadran lin », genre j'me la pète avec cette fibre pourtant impossible à repasser, mais ranafout', j'ai des domestiques qui s'en occuperont 't'façon)
On en trouve aussi en version index bâtons, cadran argent ou noir :
© Ebay...
Pas de date, pas de stop seconde non plus. Ça se contente seulement ( ) d'une seconde centrale très fluide... Le boîtier est poli, très simple, peu travaillé, grosse couronne non siglée, fond vissé.
De la Lord Marvel 36000 passons maintenant aux King Seiko et Grand Seiko Hi Beat.
© IZN2
Nous abordons maintenant ce qui est, selon moi, le calibre le plus intéressant, celui de la famille 45XX. Il y en a quatre : 4500, 4502, 4520, 4522. Ceux finissant par un zéro sont sans date, ceux finissant par un 2 sont avec date (réglage rapide et passage instantané, pas comme chez certaines Rolex ou Patek de cette époque... c'est vous dire si c'est vraiment pourri Seiko). Les 450X équipent les King Seiko (KS), les 452X les Grand Seiko (GS). Il me semble qu'il arrive qu'on trouve des mouvements GS dans des boîtes KS et vice et versa, idem pour les couronnes, les cadrans... Pour les maniaques de la synchronisation des minutes et des secondes, le calibre est doté d'un stop-seconde. Pas mal pour un calibre de cette époque, non ? Quoi Rolex ? en 1972 ? les Seiko 45 datent de 1968/1969... Quelques photos de modèles...
Celle du patron, calibre 4520 a été montrée plus haut. Alexsilvio possède une très jolie KS, avec un cadran semblable à la LM. On remarquera la forme des cornes qui diffère de celle des GS.
Deux intruses se cachent parmi les 5 hi-beat de la photo suivante, saurez-vous les retrouver ?
© Ice_Pulse
Une 4522 en compagnie d'un panda, animal typiquement chinois (donc pas très éloigné du Japon), ici 36 000, on tolèrera donc cet allogène dans le cadre de ce post :
Flancs polis, entre-corne brossée, les angles sont saillants, index appliqués facettés, couronne siglée. Aiguille argent pour les secondes, noire pour les minutes et argent et trait noir pour les heures.
D'autres jeux d'aiguilles sont possibles (voir la 4520 du patron), avec un cadran soleillé ultra-miamesque (mais refait en fait)...
© Eagertowatch, vendeur sur Ebay
Existe aussi en full-joncaille. On peut détester mais pas ne pas reconnaître un travail certain sur la boîte :
© Internet
Reste enfin le calibre 61XX. Il existe en version 61X5/61X6 (5 final pour le quantième ; 6 final pour le jour et le quantième ; chez Rolex, on aurait eu droit à des Date et des Daydate, mais présentement, on est chez Seiko...) Le 614X est la finition de base, le 615X est plus luxueux et les 618X sont les calibres chronométriques de compétition.
C'est un calibre automatique, réglage de date rapide, mais changement de date qui se traîne comme chez Patek ou Rolex de l'époque (et encore, de nos jours aussi, s'agissant de certaines manufactures. C'est une question de transmission des valeurs et des produits DC, si tu me lis : ). C'est là qu'on mesure les effort de Seiko pour égaler la production suisse quitte à régresser par rapport au 45X2... (comment ? le 45XX est en fait sorti après le 61XX ? mon mauvais ) Remarquons que chez Longines, le calibre 431 est automatique, bat à 36000 alt/h, avec un passage de date instantané, mais pas de réglage rapide de la date en revanche. Conclusion, on peut donc pas tout avoir, même en Helvétie, ou alors ce sera plus tard. Si une bonne âme pouvait me dire si les Zénith 3019PHC sont à date instantanée, je lui en saurai fort gré. Mon exemplaire version Movado 31 rubis ne l'est pas.
Toujours est-il que de nos jours, les GS sont encore et toujours à datekistrèn ; d'aucuns répondront que c'est une fitcheure, en novlangue horlogère. Ce qui se traduit aussi par un misérable (d'autres diront généreux) 63/100 en grille technocratique de notation horlogère (référence infra)
Revenons à nos moutons, le 61GS est bien plus épais ; il y a 2 bons millimètres de différence d'épaisseur entre la version manuelle et la version automatique, ne serait-ce qu'à cause du calibre, ce qui n'est pas rien pour des montres de moins de 38 mm de diamètre. Les GS modernes hériteront de cette épaisseur liée au mouvement (voir l'empilement des fonctionnalités sur la photo du mouvement, en particulier tout ce qui a trait au remontage automatique ; qui a dit que ça rappelle l'architecture des 7s26 des lumpen-tictacophiles ?). On ne le voit peut-être pas bien sur les photos, mais la différence d'épaisseur est très sensible au poignet. À noter : le calibre auto 56XX est plus fin... mais il n'est pas 36000, faut suivre...
Un petit wristhot de 36000 manuels et automatique :
© Ice_pulse
D'autres modèles trouvés sur Internet :
Pour l'anecdote, afin que DrPM passe au plus vite à son autre CHI, signalons l'existence du mouvement 6159 qui équipait l'ancêtre de la Marine Master, j'ai nommé la Grand Seiko Diver :
Plus de photos, ici :
http://www.50717.com/notissued/seiko-6159-7001.html
Je rappelle que chez Citizen, il y a aussi un calibre automatique 36 000 très sympa (le 7230) visible sur la première photo, avec jour et quantième lents... mais à réglage rapide pour le quantième, et stop seconde, s'il vous plaît :
© Bestak
Tout ceci, c'était il y a 40 ans...
Et pour finir... Actuellement, de quoi dispose-t-on côté japonais ? Après l'arrêt de la production des calibres 36 000 au milieu des années 70, Seiko a opportunément ressorti un mouvement 36 000 en 2009, le 9S85 :
Ici, emboîté dans la SBGH001, dans son milieu naturel :
Selon TWO, cette montre ne mérite qu'un médiocre 63/100. C'est vrai que ça manque de Luminova, mais sachant que leurs porteurs sont des gens qui savent, donc des lumières : pas besoin. Au pire, un bon coup de stabilo suffira, la preuve :
La revue de Sebcile est ici.
La course à la haute fréquence (sans électricité, sinon c'est triché) n'est pas près de s'arrêter. Les Japonais (encore eux) ont sorti un 43 200 alt/h (Seiko ND58/9L88 équipant certaines Crédor), commercialisé également sous la marque GSX
http://www.gsx-watch.com/expectati [...] index.html
quelque temps après, Audemars Piguet aussi (2009 il me semble) :
enfin Bréguet a fait plus fort, en portant la fréquence à 72 000 alt/h en 2010 :
http://www.youtube.com/watch?v=d-GSrQ2lIdg
Tout ceci, sachant que presque 100 ans avant, Heuer sortait le Mikrograph (mais pas en montre de poignet) qui chronométrait au 100e de seconde :
http://www.rundenmeister.de/1100.htm
On sent le concours de kikalaplugrosse, mais la fluidité de l'aiguille des secondes des calibres hautes fréquences demeure un agrément visuel indéniable...
Je remercie tous mes camarades kimousseux à qui j'ai très opportunément volé les photos.
Et le vintage 36 000 nazi que je suis de répéter à nouveau : JAPAN SUPERIOR !
/ C'était très intéressant
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