Reprise du message précédent :

parce que je souis oune grôsse faignâsse    

Merci pour ce retour. Il est sur ma liste depuis un moment, mais j'ai du mal à m'y mettre car j'ai peur que le sujet ne m'intéresse pas. C'est facile à lire ou pas ?

Un petit peu difficile par endroits. Pour le niveau de langue : je ne sais pas si tu as prévu de le lire en VO, je l'ai lu en anglais et j'ai vraiment un bon niveau, mais il y avait quelques mots que je ne connaissais pas. Pour l'histoire : il y a pas mal de personnages mais ça va, à un moment j'ai eu un peu de mal mais c'était surtout par manque de culture, parce que je trouvais déroutant de ne pas savoir ce qui était une pure invention de Rushdie et ce qui venait directement de la tradition.

Hello,

Je suis en train d'écouter l'excellent podcast de Philippe Collin sur Léon Blum https://www.radiofrance.fr/francein [...] e-heroique et il m'a un peu hypé sur les écrivains de la Belle Epoque

Vous avez des recos sur cette période ? des classiques à ne pas rater mais pas trop chiants. J'ai rien lu
Barrès est présenté comme le goat des goats ça vaut le coup de s'y pencher ? J'avoue que le nationalisme c'est pas ma came

Lire Barrès goat des goats c'est étrange    Il a eu beaucoup de succès à l'époque malheureusement, c'est certain.

La Belle époque est vaste. Tu veux des livres qui se passe pendant la Belle Epoque ou des livres écrits durant la Belle Epoque ? Quel genre de roman tu aimerais ? Dans quel milieu ?
C'est très vaste.

On peut citer Zola avec "Au Bohneur des Dames" par exemple, Proust bien entendu, du Huysmans ("A rebours" si tu veux du dandy), du Gide, le début du surréalisme avec Appolinaire ou l'onirisme du "Grand Meaulnes" d'Alain-Fournier, Anatole France (qu'on ne cite plus assez à mon sens), "Bel Ami" de Maupassant...
Beaucoup d'autrices durant cette période aussi : Louise Michel, Collette, Anna de Noailles.
En divertissement pur tu as Leblanc avec les "Arsène Lupin" ou Gaston Leroux.

Oui c'est vaste. je parlais surtout des auteurs de cette période. Du Mariage de Blum semble être un essai avant-gardiste du féminisme par exemple.
Zola, j'ai lu.
Je pensais à Gide justement.

Pour Barrès, il est présenté comme le modèle de tous les intellos bobo parisiens de la fin du 19è.

Pour les amateurs de Gogol et Boulgakov, une nouvelle traduction d'une longue nouvelle (ou court roman) d'Alexandre Grine est sortie : "Fandango".

J'en avais un peu parlé ici avec la réédition de "L'Attrapeur de rats" il y a 2 ans.
Celui-ci est toujours aussi bon. Une longue nouvelle entre réalisme et fantastique. Un homme vivant dans un Petersbourg affamé et misérable durant la grande guerre rentre dans un tableau.

Je viens de terminer La pièce de Jonas Karlsson, un très court livre, presque une nouvelle, dans lequel Björn, nouvel employé de l'administration complètement mégalo, découvre au sein du bâtiment dans lequel il travaille une petite pièce étrange... et je n'en dis pas plus parce que sinon je dévoile à peu près tout. C'est une connaissance qui m'a prêté le livre en me disant simplement "Lis ça, je ne te dis rien de plus, juste lis-le (©)". J'ai vu sa bibliothèque, on a des lectures communes (dans d'autres genres littéraires par contre), et puis le livre est vraiment très court genre lu en une heure, donc j'ai tenté le coup.  
 
Je ne sais pas trop quoi en penser. Je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt au moins au début, le personnage principal très désagréable façon autiste-asperger-mégalo fait un héros qui me plaît (ok le profil est classique mais le livre est court alors ça convient), mais une fois le livre refermé, ben... bof. Je l'aurai oublié demain. Je comprends les idées de l'auteur, je cerne à peu près les messages qu'il essaie de faire passer (enfin en surface j'imagine, je n'ai pas vraiment envie de creuser), mais je m'en fiche un peu. Je voulais être diverti, j'ai été diverti, mais l'histoire tient en une phrase du début à la fin, donc je n'en retire pas grand chose.  
 
L'histoire est sans intérêt, et même si j'ai eu du plaisir à lire le livre au début, plus le temps avançait et plus une certaine (et trop habituelle) frustration "ça ne va nulle part, il n'y aura pas de fin" montait. La lecture de la fin m'a donné raison. J'ai pensé qu'il s'agissait d'un livre fantastique, ou un livre absurde ; au final ce n'est pas assez absurde ou assez fantastique (je suis vague pour ne pas spoiler ) pour moi.
 
Je ne le recommande pas vraiment, mais bon il est lu en une heure je pense alors vous ne perdrez pas beaucoup de temps à tenter le coup.

Décidément étrange, ce podcast. Des bobos au 19e.

Pour reprendre Bora², tout est étrange dans cette dernière phrase  

Je vais en profiter pour caser mon Anatole avec "Histoire contemporaine" qui est une satire en quatre romans qui décrit les différentes couches de la société de l'époque, ainsi que les idées politiques. C'est un bon contrepoint à Barrès, puisque Anatole ridiculise dans cet écrit les nationalistes et antisémites.
Enfin Anatole France est la plus grande influence de Proust (l'écrivain Bergotte dans la Recherche est sûrement inspiré de lui). Donc cela a aussi un intérêt d'un point de vue littéraire à mon sens.

Pourquoi c'est étrange ?

Les mecs étaient issus de la bourgeoisie, très à l'aise financièrement et leur occupation c'était d'écrire des essais humanistes, des critiques de théâtre, s'impliquer dans le socialisme et soutenir l'Etat interventionniste.

Je ne vois pas de meilleur définition de "Bobo"

Edit : Je ne parle pas de Barrès bien entendu.

Sénèque qui se plaint qu'il habite à côté des thermes et y a trop de bruit c'est une Karen ?

Bah déjà, "intello"et bourgeois, à la fin du 19ème siècle, c'est une redondance. Si tu exerces un métier intellectuel, tu es forcément un bourgeois (passons sur le raccourci péjoratif "intello" qui n'est curieusement employé que pour les intellectuels de gauche. Barrès ne serait-il pas un bourgeois "intello" ? ).
 
Après, l'adjectif clé dans bobo, c'est bohemian. Le journaliste qui a créé le mot voulait remplacer yuppie qui depuis les années 80 avait pris une connotation péjorative :

D'après ce journaliste, le bobo, au contraire du yuppie qui était fou de thune et adorateur du capitalisme, avait assimilé les valeurs de la contre-culture des années 60 et le mode de vie qui va avec. Et votait démocrate, ce qui en équivalence politique chez nous oscille entre Hollande et Macron. Par contre, l'équivalent du socialisme à la fin du 19ème siècle, dans sa radicalité révolutionnaire, ce serait aujourd'hui le NPA, dont je n'ai pas l'impression que ces fameux bobos parisiens soient si fans.  
 
Bref, identifier une catégorie socio-professionnelle de bourgeois bohèmes au 19ème siècle, un concept déjà assez fumeux aujourd'hui, faut quand même de l'imagination et des raccourcis très simplistes. En déduire en outre que Barrès était leur modèle (tout en exonérant Barrès de ce profil, bizarrement).... mmmh....  

Baaaahhh, j'entends bien ce que tu dis, et j'ai pas du tout la prétention d'être expert sur le sujet et la période.

Par contre ce sont des mots d'historiens qui dit "en fait, on pourrait dire que ce sont des bobos de par leur statut et activité". Pas sur qu'il soit intéressant de pinailler sur ce détail.

Par contre pour Barrès, jusqu'à l'affaire Dreyfus (et qu'il refuse de le défendre) il y a plusieurs sources d'historien qui le décrivent comme l'écrivain le plus influent et admiré de sa période. Notamment par Blum.

Le socialisme à la Jaurès et à la Hollande, tu te demandes si on parle du même mot

Je suis pas expert non plus de cette période mais ce n'est pas un mot d'historien, c'est une analogie de journaliste et je la trouve complètement crétine. Je pinaille pas à chaque fois que je lis le mot bobo qui est devenu aussi bullshit que démago mais dans le contexte d'une émission historique, bah voilà quoi.    
 

Oui, c'est ce qu'il y a de plus crétin dans l'analogie. Ca met les intellectuels socialistes de la fin du 19ème au niveau de l'équipe de Yann Barthès.

Non non, c'est bien l'historien qui emploie "bobo". Je peux essayer de retrouver son nom et l'extrait.

Si tu penses le retrouver vite fait, oui, je serais curieux de savoir si c'est bien un historien (j'en doute très fort vu le niveau rase-moquette de l'analogie) ou juste quelqu'un qui s'autoproclame historien. Mais ne passe pas plus de 3 minutes là-dessus.

https://www.radiofrance.fr/francein [...] ue-5731204
 
46'10
 
Dominique Missika.

Merci, c’est gentil. Le deuxième épisode est sorti hier. Si jamais tu as le temps, je serais curieux d’avoir ton retour (par mp si tu préfères)  

Very very frightening me ! Galileo !

Petite digression personnelle, après tout il s'agit du topic Lecture et pas livres du commerce.
Ma grand-mère, aujourd'hui décédée, est née en 1927. En mai 1940, sa famille et elle ont tenté une "évacuation" (c'est le titre de l'ouvrage), qui a malheureusement tourné court. Quelques jours après cette tentative ratée, elle a rempli un carnet avec son histoire. Mon père a retrouvé le carnet il y a un moment, l'a mis au propre et en a tiré quelques exemplaires pour notre famille. Une fois imprimé le document fait une soixantaine de pages.  
Je l'ai lu cette semaine, c'était passionnant !
La première chose qui m'a marqué c'est le niveau de langue, qui est *ahurissant*. Elle avait 13 ans à l'époque, et je pense qu'aujourd'hui peu d'adultes ont la capacité, en quelques jours, de rédiger un texte aussi bien écrit et aussi long (je m'inclus dans le lot. ) Bien sûr il y a des fantaisies d'enfant, des tournures qui essaient d'en mettre un peu plein les yeux et qui ratent, mais l'ensemble a vraiment estomaqué le père du pré-ado que j'ai à la maison. (Et je ne parle même pas de l'écriture, puisque j'ai vu le manuscrit original. Autre temps, autre éducation.)
Le récit ne couvre que 3 ou 4 jours de voyage, et il ne s'y passe pas grand chose : pas de bombardement ni de fusillade heureusement ; beaucoup d'avions allemands, de soldats anglais en déroute et de gens sur les routes. On partage le quotidien d'un équipage formé de la famille de ma grand-mère et de quelques personnes parties avec elle. Cette "évacuation" est assez étrange ; il me faudrait une carte pour suivre précisément leur itinéraire, mais dans l'ensemble ils sont du Nord et se dirigent vers l'ouest avant de... tourner un peu en rond ? En tout cas ma grand-mère a repris le carnet 60 ans plus tard pour ajouter une conclusion, et c'est vraiment une chance parce qu'après ces 3 4 jours d'évacuation on reste sur sa "fin", la coupure est brusque et on ne sait pas où ils sont partis. (Spoiler : ils sont rentrés dans le Nord et peu de temps après leur maison a été brûlée par les allemands.)
C'est un ouvrage très touchant, j'imagine que c'est à ça que doit ressembler le journal d'Anne Frank que je n'ai toujours pas lu, avec une conclusion moins funeste toutefois. Je vous le recommanderais bien, mais ça n'aurait pas tellement de sens.

Bon c'est pas de la littérature mais je me rends compte qu'on m'a fait un joli cadeau à une époque : https://www.chasse-aux-livres.fr/pr [...] -et-tome-2
 
J'ai par ailleurs obtenu cette nouveauté qui semble déjà prendre de la valeur, les gens sont fous :  https://www.chasse-aux-livres.fr/pr [...] ry=Invader

C'est juste des programmes qui font nimp quand les livres ne sont plus dispos (entre autres), t'inquiète ça arrive tout le temps.

C'est une de mes petites frustrations de lecture ça, je sais qu'après la mort de mon grand-père un carnet a été retrouvé, dans lequel il avait posé par écrit un récit qu'il n'a jamais fait de son vivant, celui de sa captivité en Allemagne et de son retour au pays du biniou (pas la porte à côté il aurait mieux fait d'être Champenois ) Je me rappelle que ça avait ému mon père qui l'a lu, mais je n'ai jamais vu ce carnet et j'aurais bien aimé le lire un jour.

Ça a dû vraiment être cool pour toi de découvrir ça

Intéressant comme anecdote.  

Oui c'était un peu fou.

C'est vraiment chouette que ton père ait pensé à le diffuser dans la famille, ça doit générer plein de conversations. Et c'est sûrement une « drôle » de fenêtre ouverte vers la petite histoire dans la grande. Quand tu parles des gens qui tournent en rond, qui essaient des trucs, ça marche pas trop, par rapport à des tas de raccourcis ou d'incidents laissés de côté dans un récit ou un livre d'histoire.

J'avais le souvenir de ma mère me parlant de lettres de guerre de mon grand-père, sans plus trop savoir de quoi il parlait (au front ? Exode ?, STO ?) et encore moins de ce que sont devenues ces lettres. Je viens de l'avoir au téléphone (ma mère, pas mon grand-père, mort avant ma naissance) et... c'est râpé. Elle n'a aucune idée de ce que sont devenues ces lettres et ne se souvient plus du contenu, juste qu'elle les a lues à l'époque où il les envoyait à sa mère, et qu'elles les avait trouvées bien écrites et prenantes. Son seul souvenir est qu'il avait été envoyé par erreur en bataillon disciplinaire en Tunisie, pris pour un autre qui portait le même nom et le même prénom. Finalement rapatrié grâce à son second prénom qui différait de l'autre (bravo l'administration ).

Ca a souvent disparu hélas. Mon père se souvient des "affaires personnelles" de son grand-père, brûlées après sa mort, y compris les lettres du front (de la 1e Guerre Mondiale). Pour mes grand-parents, on n'a rien retrouvé, donc ils les ont probablement jetées.
Il faut dire que pour eux (on a évoqué la chose quelques fois), c'était beaucoup de mauvais souvenirs qu'ils n'avaient pas envie de garder, et le journal d'Anne Frank à l'époque était une exception, on ne s'intéressait pas trop à la "petite" histoire.

Il y a aussi des familles où on jette tout (ou alors il y a un Harpagon de l'archive qui thésaurise sans rien dire à personne, c'est possible aussi).

Quand j'ai emménagé dans une baraque construite par un vieux fou qui avait fait la Première guerre (il avait gardé une affiche de la mobilisation qui était collée derrière la porte du garage…) j'ai trouvé des cahiers avec des dessins représentant des poilus et des petits textes écrits à la plume d'une écriture d'écolier sage, mais j'ai jamais su si c'était à lui. Il était mort depuis longtemps, sauf pour le FN qui a continué de nous mettre son magazine dans la boîte aux lettres pendant des années. Je pense que ces cahiers ont été détruits depuis, ils n'étaient pas très intéressants dans l'absolu, mais ça pince toujours un peu de se dire que quelque chose disparaît comme ça.

Dans un autre genre, je connais quelqu'un qui a fait pour sa famille une sorte de reportage écrit avec des photos de toutes les époques de la ferme familiale et l'a envoyé à tout le monde, ça a vraiment été marquant, chacun a pu retrouver ou découvrir des trucs, les gamins ont halluciné et les gens des générations qui avaient connu certains trucs se sont mis à raconter des tas d'anecdotes qui leur revenaient, c'était très chouette

Edit : si jamais ça vous intéresse de réfléchir sur « pourquoi c'est triste » quand on perd un truc, je recommande toujours la lecture du Culte moderne des monuments d'Alois Riegl. C'est pas cher (7€50) et bien qu'il ait plus d'un siècle il est encore cité tous les jours par les historiens d'art parce qu'il a contribué à définir quelles sont les valeurs qu'on donne à un objet ou un bâtiment. C'est très intéressant de réfléchir à si on trouve un truc important pour des raisons esthétiques, pour l'histoire qui y est accrochée, pour le simple fait que c'est ancien, etc.

Une fois en faisant un trou dans mon plafond ancien j'ai retrouvé un bout de journal des années 1930. Rien de spécial mais ça a suffit pour me mettre la larme à l'œil    
 
(vu que c'était lié à l'installation électrique, c'était aussi la preuve que l'ancien réseau à base de fils gainés en tissu a été en service jusqu'en 2004, date de la rénovation du proprio précédent)

Puisque qu'on hs comme des gorets, je me souviens qu'à dix ans, j'avais trouvé une boite en bois avec des dizaines de plaques photos en verre, en les regardant par transparence, j'ai vu qu'elles étaient toutes des images de la guerre 14-18, sans doute les oeuvres d'un grand oncle. J'étais trop gamin pour poser des questions, cette boîte s'est sans doute perdue. Je suis encore marqué par cette trouvaille aujourd'hui, pas seulement pour l'objet rare en lui-même, mais par le témoignage évaporé à jamais.

Pour revenir à la lecture, j'ai retrouvé un exemplaire de "La science et la vie" de 1918. Dans les 200 pages, à l'époque on s'embarrassait pas de la ménagère de moins de 50 ans. Vous reprendrez bien un peu de classification des locomotives ?
 

j'en ai un de 1942, avec des ailes volantes, de la peinture aux bunkers en passant par les canons, tout pour la guerre, c'est la science déprimante !!!

Je viens de finir la biographie de Marcel Proust de Ghislain de Diesbach, intitulée fort simplement Proust, et rééditée chez Perrin Tempus l'année dernière.

Mais quel bonheur, bon sang !  

Enorme bonbon de pratiquement 1000 pages, dans lequel l'auteur prend en réalité prétexte de l'exercice de la biographie pour dresser un panorama grisant du Paris de la belle époque (ou plutôt un certain Paris, celui de la haute bourgeoisie et des derniers feux de la noblesse), puis celui de la première guerre mondiale.

Ghislain de Diesbach a vraiment un talent d'écriture certain (que j'avais déjà souligné ici à propos de son Histoire de l'Emigration) ce qui rend la lecture extrêmement agréable et captivante.

Je recommande chaudement et, de ce pas, reprends ma seconde lecture de la Recherche.