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Le 13 juin 2004, un incendie se déclare dans un immeuble du Petit Bard. Houssine El Ouamari, 31 ans, décède dans les flammes en tentant de sauver sa nièce. Cinq autres personnes sont intoxiquées et 19 familles évacuées. Un an après lon ne connaît toujours pas les circonstances précises de cet incendie. Mais il ne fait de doute que les conditions dinsalubrité ont favorisé la propagation du feu. Au moment des faits, certains bâtiments ne possédaient pas dextincteur. Le dernier contrôle de ces outils de sécurité remontait à 1999.
Pour les habitants du Petit Bard, ce sinistre marque un point de non retour. La vie dans le quartier ne sera plus jamais la même. Pour eux, il ne sagit plus de transiger avec les principes. Ils ont le droit à une vie digne ; et désormais ils veulent le faire savoir haut et fort. Ils nentendent plus être les victimes de conditions de logements insalubres mais les acteurs de la rénovation de leur quartier : après avoir tant subi, le Petit Bard entre en lutte. Face à la mairie qui proposait de reloger les familles sinistrées dans des chambres dhôtel, les habitants du Petit Bard décident doccuper le gymnase du quartier. Les habitants demandaient : premièrement, le relogement immédiat des familles du bâtiment sinistré ; deuxièmement, lindemnisation de la famille de la victime et de lensemble des familles sinistrées ; troisièmement, plan de rénovation pour lensemble du quartier. Un mouvement de solidarité se met en place dans tout le quartier. Après 40 jours de lutte, les habitants obtiennent que les familles soient relogées. Au-delà du relogement des familles sinistrées, un collectif Justice pour le Petit Bard est constitué par les habitants du quartier. Ce collectif met en cause les responsables politiques, Etat et collectivités locales, quant à la gestion catastrophique du quartier. Il demande aux pouvoirs publics dagir pour rendre justice aux habitants et revendique le droit à un logement digne.
En réponse à la mobilisation des habitants du quartier, le 21 juillet 2004, le ministre délégué au logement Marc-Philippe Daubresse se rend au Petit Bard et annonce la réhabilitation du quartier. Cette réhabilitation, de 80 millions deuros, devant être financée par lEtat au travers de lAgence Nationale de Rénovation Urbaine (à hauteur de 29%), les collectivités locales (13%), OPAC-ACM[2] (50%) et divers organismes pour les 8% restant. Le ministre promet que tout se fera en concertation avec les habitants. Mais les habitants du Petit Bard ne se font guère dillusion. Omeyya Seddik, du MIB [3], déclarait : Nous espérons que la concertation ne sera pas comme dhabitude où lon désigne des interlocuteurs sur mesure et pas ceux que se sont choisis les gens. Afin de pouvoir devenir les interlocuteurs directs des pouvoirs publics, en Octobre 2004, les habitants qui sétaient regroupés dans le collectif du quartier, décidèrent de créer lassociation Justice pour le Petit Bard. Celle-ci se donne pour objectif : premièrement, de défendre les intérêts des locataires et des petits propriétaires du quartier ; deuxièmement, de veiller à ce que la réhabilitation soit réellement concertée avec les habitants ; troisièmement, dobtenir un droit de regard sur la gestion technique et financière de la destruction/réhabilitation ; et quatrièmement, de préserver les intérêts des habitants du quartier pour que cette réhabilitation ne soit pas un prétexte pour expatrier les plus pauvres au profit dune prétendue mixité sociale qui ne profiterait quaux ménages aisés.
Cependant les plans de réhabilitation ne sont pas mis en uvre aussi rapidement que la situation sociale lexigerait. Dans le quartier, les mois sécoulent et les conditions de vie sont de plus en plus difficiles. Cet hiver 2005, le chauffage a été coupé à plusieurs reprises. A lintérieur des appartements le thermomètre affichait péniblement 10°. Les enfants claquaient des dents en faisant leurs devoirs ou en sendormant. Mais cela ne semble pas préoccuper les responsables politiques.
Constatant lattitude des politiques, les habitants du Petit Bard savent quils ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Le 12 février 2005, ils organisaient un forum social de quartier ayant pour thème le logement, la participation des habitants et les discriminations afin de faire un premier point sur leur action. Le forum leur permet aussi de tracer de nouvelles perspectives et de relancer leur action.
Le 26 mars 2005, ils manifestaient contre le blocage du dossier de réhabilitation du quartier. Les banderoles indiquaient le désarroi des habitants ; Yen a marre ; Arnaque au Petit Bard ; et aussi Frêche va te faire rénover en référence à George Frêche, président socialiste de lagglomération montpelliéraine, mais qui refuse que celle-ci contribue à la réhabilitation du quartier. Mais les habitants du Petit Bard sont habitués au mépris des politiques. Lessentiel pour eux était de montrer leur mobilisation ; et ils ont réussi. Selon un des organisateurs la manifestation devait montrer à ceux qui les ignorent que le Petit Bard est toujours présent. Il poursuivait : Ses habitants savent ce quest la justice et ce quest linjustice. Ils refusent de baisser la tête.
Ce courage et cette détermination des habitants du Petit Bard ne plaisent pas à tout le monde. Dans leur lutte pour un logement digne, les habitants du quartier ont dû faire face à une véritable campagne de diffamation. Lélu vert Jean-Louis Roumégas, dès juillet 2004, accusa les militants du MIB, impliqués dans la mobilisation du Petit Bard, dêtre des antisémites et des néo-islamistes. Par la suite, ce genre daccusation sest multiplié afin de discréditer toute revendication. Le Petit Bar nétant plus un problème de logements insalubres mais dislamisme, de dealer, de communautarisme ou encore dantisémitisme ! Le plus virulent dans ces attaques fut sans aucun doute George Frêche. Georges Frêche, dans un style toujours très distingué a déclaré : Je les emmerdes en long, en large et en travers. Selon lélu socialiste, les habitants du quartier sont des islamistes barbus et des trafiquants de drogue qui ont fait du Petit Bard le cur de la vente de cocaïne dans la région. Pour lui les logements du Petit Bard ne sont pas une priorité. Il revenait ainsi sur les projets de réhabilitation auxquels il oppose un non définitif et absolu.
http://www.saphirnet.info/article_1756.html
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