Hello,
Sans transition, (sur le chemin, jusqu'au pont d'Hamilton), je commence par reprendre sur le langage,
xantox a écrit :
La divergence n'est pas dans le fait de considérer qu'il y ait un sens de parler d'un monde sans sujet. Elle est dans le fait de considérer qu'il y ait un sens de parler d'un monde sans sujet conscient. J'avais noté qu'on serait d'accord à condition de nier au sujet conscient l'exceptionnalité de son statut de sujet, et d'étendre ce statut de sujet à toute entité physique. Par exemple : la table est un sujet. La molécule a un monde. Etc.
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xantox a écrit :
Je crois que attribuer le statut de "sujet" à un système qui répond à la définition de "vivant" de l'auteur que tu avais cité, [...] et [...] attribuer ce statut de sujet soit à un système conscient, soit à tout système physique [...], n'est pas pertinent [...].
L'état quantique de la théière se reproduit dans l'environnement, ce qui fait, par exemple, que je peux voir la théière. Le mécanisme qui restreint l'existence des états quantiques est la décohérence (il n'y a pas de "forces" à ce niveau..).
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On peut alors se demander dans quelle mesure les mots "sujet", "survivre", "se reproduire", etc. sont employés par métaphore. On convient que lors d'un débat éthique par ex. le statut de "sujet" d'une table ou d'un scooter est peu pertinent. Parallèlement, suite à tes observations (qui reculent et qui reculent, vers l'élémentarité - et c'est tant mieux), on peut aussi convenir du statut de sujet pour toute entité physique, où "sujet" signifiera "avoir un environnement", "être-au-monde" par un "je peux élémentaire" et par une "capacité d'agir" établissant la relationnalité physique qui détermine les formes, et tout cela parce que ce discours de formes tente de "descendre" jusqu'à l'élémentarité suffisante pour identifier la forme en jeu. La "descente" n'est pas réductionniste, mais vise l'élémentarité suffisante. Idéalement, cette "descente" devrait se faire formellement jusqu'à coïncider avec le calcul physique (calcul entendu dans les termes des théories de l'information), mais en l'état, la visée de cette élémentarité suffisante et nécessaire est décrite par des termes du langage naturel qui font fonction de "remplissement intuitif". Le 'choc' entre ces deux niveaux de langage se produit dans le domaine de la "complexité formelle" : dans le premier cas (le mien au départ en parlant de "sujet" ), la structure référente est, oui, complexe par avance et assumée comme telle. Dans le deuxième cas, "l'idéal de rigueur" et le rêve du calcul physique exige de se référer à un niveau où le flou formel (celui des formes visées) est banni pour pouvoir atteindre l'identité de la forme (et la forme de l'identité).
Mais ce qui distingue surtout les deux cas, c'est la notion d'intentionnalité. Celle-ci est un attribut fondamental de la conscience et elle n'est possible que par le corps virtuellement motile qui la porte (on reviendra sur ce point plus bas), et surtout, c'est une notion complexe aux "yeux" du "calcul physique", mais élémentaire en tant que brique sine qua non de la conscience. En l'état, l'intentionnalité est une notion inexistante dans les sciences physiques actuelles. Il faut donc la reconnaître pour la re-construire. Les sciences cognitives appellent ce problème "naturaliser l'intentionnalité". On y reviendra aussi plus bas.
xantox a écrit :
... Cette "palpation" (cette "interaction" ) n'est pas le propre exclusif du sujet conscient. Pour revenir à cet exemple seulement en apparence surréaliste, la tasse de thé enregistre beaucoup plus d'information à mon sujet, de ce que j'en sais moi-même à mon sujet. Ou pour faire un autre exemple, un photon voyage "tout droit" car il a essayé toutes les directions possibles et seules celles qui vont droit sont à même de l'améner quelque part.
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L'inter-action ne suffit pas à caractériser le sujet intentionnel. On doit distinguer, dans le domaine de la complexité formelle, des complexions originales qui sont ce qu'il nous faut re-construire si on désire re-construire ce qu'on veut reconstruire. L'intentionnalité, le désir, en est une. Mais pour les reconstruire, c'est à dire, pour identifier leur forme, il ne faut ni sous-estimer ni perdre leur sens précisément dans l'équivocité du langage naturel, lors de l'attribution de ces complexions aux choses. La tasse-sujet d'un côté, et le sujet cartésien de l'autre, une bactérie qui 'se reproduit', des états quantiques qui 'se reproduisent' - et d'ailleurs, la décohérence est-elle vraiment équivalente à la 'sélection naturelle' ? si elle restreint la 'plénitude quantique', pourra-t-on dire dans ce cas qu'un condensat de Bose-Einstein est 'plein de vie' ? la classicité devient-elle une 'mort' ? Et Varela, pourra-il dire qu'un état quantique est autopoïétique, le milieu interne étant l'unité épistémo-ontologique, et le milieu externe la classicité déchirée de son auto-identité ?!), et je dis donc, qu'au contraire, il nous faut comprendre ce "génie de l'équivoque".
Alors, qui et qu'est-ce qui possède le statut de "sujet" ? L'homme est-il sujet ? Et le condamné à mort ? Le bonobo est-il sujet ? Et la foudre ? A ce stade de la discussion, triste nouvelle, nous n'avons malheureusement pas échappé à la querelle des mots, cela dépendra donc de la définition convenue. Je rappellerai que le statut de "sujet" est absent et critiqué et revendiqué comme tel chez certains philosophes (Spinoza ou Deleuze par ex.) : on parlera alors d'individuation et de processus de singularisation avec plus ou moins de bonheur (expressions à prendre à la lettre). Pour ma part, je ne cherche pas l'établissement de ces statuts parce que j'attend la possibilité de leur convention pendant la reconstruction. Je ne considère a priori aucune séparation radicale entre les entités physiques, tout en reconnaissant le donné immédiat (l'intention, l'élan, etc.) dont il faut se hisser à la complexité. Et c'est seulement cette renaissance qui peut nous imposer un accord.
xantox a écrit :
Or je considère que toute entité physique est sujet (non pas sujet conscient, mais sujet) de son monde. Toute entité physique est "en acte vers ce monde", et produit aussi "un discours".
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Donc, si je dis que le corps vivant est en acte vers le monde, et si tu dis qu'un électron aussi, de l'expression "acte vers le monde" seul demeure le sens métaphorique. Or ce n'est pas ce que je visais, car s'il s'agit de faire de la physique mathématique ou même de l'épistémologie, jamais je n'utiliserai ce discours.
xantox a écrit :
Le corps physique est la physicité de ton corps, c'est ton corps avant la perception que tu en as. Si je regarde ma main, je vois ma peau, mes doigts, si je regarde mieux je vois la texture de la peau, etc mais je sais que ma main est beaucoup plus que cela, que je n'ai encore rien vu, rien suspecté de sa complexité, faite de l'interaction d'un nombre d'atomes supérieur à celui du nombre d'étoiles dans l'univers observable.
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xantox a écrit :
Ce que j'entends en disant que la conscience d'une forme A est "une autre forme" B, c'est tout d'abord qu'elle est aussi "une forme" (et en tant que forme parmi formes, cela n'implique de dualisme). Ensuite, par "autre", j'entends que la forme B, qui "revient dans le contexte d'une autre forme C (la conscience) n'est pas l'identité de A, mais l'identité d'une abstraction B de A.
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xantox a écrit :
Les structures de la perception (par ailleurs, quel statut ont-elles pour toi ? [...]). [...] Pourrais-tu développer ce point.
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Et aussi pour répondre (tardivement) à une remarque d'Hephaestos : http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t8914033
hephaestos a écrit :
Sinon, une question qui me turlupine : aprés m'être convaincu qu'on pouvait difficilement qualifier les différents jeux de couleurs présentés au dessus comme des illusions, je me demande si ça existe, les illusions.
(pour information, l'académie française dit qu'une illusion, c'est une "Fausse apparence matérielle ou morale qui, en nous faisant voir les choses autrement qu'elles ne sont, semble se jouer de nos sens ou de notre esprit ; erreur des sens ou de l'esprit produite par ces fausses apparences." )
C'est étrange quand même : comment nos sens pourraient nous tromper, puisqu'on n'a qu'eux pour accéder au monde ?
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Je reviens donc sur la "métaphore", "l'identité épistémo-ontologique", les "structures de la motilité et de la perception" et le "génie de l'équivoque (qui pourrait servir à définir l'homme)". Pour attaquer le problème, on peut interroger un pré-supposé implicite aux recherche sur la cognition (du latin cognoscere = connaître), et selon lequel percevoir signifie, au fond, connaître. On pose alors l'objet perçu avant la démarche de l'explication de sa perception, alors que c'est une conscience transparente qui pose un "objet", impliquant par là la transparence de sa caractérisation ("le carré", "la table", etc. définis en tant que vus de partout et pour tous). C'est par ex. ce qui ruine les spéculations sur la perception de la couleur dès qu'on assimile cette dernière à une "connaissance de propriétés". La perception devient alors thétique (elle pose des thèses) et la perception "non-illusoire" sera celle qui vérifie une connaissance thétique de l'objet-à-la-conscience. Toute autre non-adéquation entre la connaissance pré-acquise et le témoignage de la perception fera immédiatement de la perception, soit une illusion aux corrélats non fondés, soit une approximation imprécise, i.e. le "sens commun". L'instance suprême demeurant la Connaissance, c'est à dire en fait la conscience thétique, celle-là même qui est capable de réfléchir pour s'abstraire du caractère situé du fait perceptif.
C'est pourquoi je dis que ce qui est à l'oeuvre dans la perception n'est pas une rencontre épistémique, ni même le commencement linéaire d'une épistémo-logie. D'abord, la perception n'a rien d'imprécis. Les sens ne sont pas du "confus-obscur". J'estime, et la sélectivité biologique l'atteste et l'exige, que la perception d'un champs visuel d'où se distingue une table et une feuille de papier est étonnamment claire, sans jamais relever d'une thèse de connaissance, car cette dernière est l'acte de la conscience. En ce sens, il n'y a pas de science (connaissance) sans conscience, mais il y a une perception sans conscience réflexive douée de langage. Mais pour saisir ce qui est à l'oeuvre dans la perception, il faut rappeler et concilier (c'est à dire abstraire jusqu'à trouver le lieu de rencontre) au moins 4 points :
- D'un point de vue bio-logique, la perception est efficace et au service de l'action, sinon elle n'est plus.
- Toute connaissance humaine provient de sa rencontre avec le monde via la perception.
- Des formes de connaissances établies et vérifiées sont "structurellement" peu proche du perçu immédiat voire lui sont hétérogènes.
- Il y a des artistes.
J'observerai au moins deux choses. D'abord, le premier point relève l'action située (je retiens pour linstant le vivant motile) cest à dire lagir vital quil faut caractériser pour le distinguer dautres dites actions (par la connaissance vérifiée, celle dune particule élémentaire par ex.). On peut se dire : tandis que le photon accomplit sa 'pleine téléologie' en "voyageant tout droit car il a essayé toutes les directions possibles et seules celles qui vont droit sont à même de l'amener quelque part", le vivant quant à lui ne bénéficie pas du privilège d'être "pleinement accompli" : sa situation est précaire. Le vivant n'accomplit pas le "explore all paths" de la même manière. Caractériser le mouvement suscité nous permettra de "naturaliser lintentionnalité"..
Ensuite, il faut méditer le lien sous-thématisé entre le deuxième et le troisième point. Car si le monde apparaît à l'homme connaissant par la perception, il faut bien entendu et tout de suite abandonner cette conception de la 'sensation' instantanée en tant quatome de la connaissance. Les mathématiques sont possibles ainsi que leur "déraisonnable efficacité". Il sagit alors de penser quelles ne seraient pas si ce corps singulier ne pouvait assumer des principes d'action et de changement qui tissent le réseau mathématique par des ordonnancements, des isolations, des intersections, des symétries, des substitutions, etc. (cf. notre anecdote), cest à dire le geste mathématicien, le je peux rationnel, (dont l'histoire des mathématiques, parce que les mathématiques ont une histoire, ne cesse de nous en révéler la beauté et la véritable intelligence). Je ne vois pas comment "conduire une forme" sans être soi-même le repli de principes d'actions, qui est le savoir perceptif. C'est à dire, le savoir perceptif, qui est la motilité-perception, il est son identité, il n'est pas thétique : le discours perceptif n'est pas le discours de connaissance, ni son opposé. Il est pouvoir d'effectuation et d'action, un élan porteur. Si on dit qu'une particule a aussi un pouvoir d'agir, je dis en retour, que parler de ce pouvoir d'agir nécessite d'en être soi-même un pour ainsi comprendre ce qu'on vise (l'intentionnalité). C'est à dire, c'est par le savoir moteur-perceptif élémentarisé que l'élémentarité est atteinte.
[...]
xantox a écrit :
C'était ma réponse du 2 mars ("Le seul chemin de reconciliation possible, est celui de caractériser les modes d'élémentarité du 'corps physique' au point de les faire coincider avec l''esprit') - entends-tu que tu es d'accord, ou c'était pour reprendre un contexte?
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Question décevante car moins qu'un accord, il s'agit d'une évidence et nous n'avons pas le choix. Mon rêve à moi, est de faire advenir ce corps, je dis ce rhizome, me taire, pour le laisser 'parler à ma place'.
(Par ailleurs la série d'échange de cette date n'est pas un exemple d'échange.)
Sur la "loi du moi". On convient (pour reprendre Chaitin et son ami Leibniz) qu'une loi doit être plus simple que ce qu'elle est censée expliquer (sinon tout est loi et donc plus rien ne l'est) : comprendre (par les lois) signifie compresser, comprimer. Quel est l'intérêt de parler de la loi-xantox si nous ne pouvons compresser xantox ? Ensuite tu cites l'exemple artistique comme empreinte de la complexité, et ailleurs la forme artistique comme "une prise instantanée mais qui ne retrace pas explicitement le chemin de la complexité". La question méthodologique s'interroge (avec les termes de Chaitin) sur le comment engendrer élégamment le programme descriptif élégant.