(Je viens de voir ce post, donc je me permets de poster également, après je lirai vos extraits pour donner mon avis. Donc voici le début d'une aventure menée dans monde arabo-fantasy qui s'intitule "Radjah" :
(Ah oui aussi, la mise en page sur forum est loin d'être efficace, pas de retrait alors je mets des __ pour remplacer et les passages en gras sont des passages qui ont été modifiés suite à certaines remarques sur d'autres forums))
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Le 27 du Sheib 2491
Sur ordre du Raïjz, les mentalistes sont désormais considérés comme ennemis de l'état et passibles de la peine de mort. Toute information permettant à nos Séides de mettre la main sur l'un de ces mentalistes hors-la-loi se verra récompensée d'une large prime de délation. Toute personne couvrant la sécurité d'un mentaliste se verra offrir le même statut que son protégé et sera passible d'exécution sur place publique. L'annihilation totale des mentalistes devient la priorité du Raïjz-Khalifà. Nous devons hâter ce processus avec une froide inflexibilité.
Mazarus, Vizir du Raïjz-Khalifà.
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Chapitre I (extrait début) :
__Lenfant pleurait ; sa mère se tenait agenouillée sur le sol, loeil humide, maintenue violemment par un soldat du Raïjz qui la projeta, elle et sa petite, à lextérieur de sa misérable cabane afin quelle rejoigne dune marche piteuse le convoi de prisonniers. Ils embarquaient les gens par centaines dans les quartiers pauvres dAl Wazat, défonçant les portes, sans même montrer de respect pour ceux quils arrêtaient, pillant et détruisant leurs biens ; torturant ou écrasant leurs animaux domestiques. Parfois les soldats dérapaient et laissaient choir volontairement quelques têtes dans leurs manuvres pour montrer, à ceux qui résistent ou qui sopposent, ce quest lhonneur dun séide du Raïjz et jusquoù il va pour mener à bien son devoir. Ils ne connaissaient ni les tourments ni la pitié et firent tomber les uns après les autres les quartiers dAl Wazat, par le feu et le sang, comme dans toute ville du Raïjz-Khalifà.
__A lécart des émeutes, les appartements du baron Douareb affichaient la silhouette dun petit palais dans les beaux quartiers dAl Wazat ; Le monument régnait sur la magnifique place Neib el fnà dun éclat de somptuosité face à la lourdeur et à la vulgarité des autres bâtisses. A la différence des grossiers manoirs de pierre blanche, la demeure Douareb était faite de pierre jaune qui néblouissait pas la vue lorsque le soleil venait à frapper en son angle. Elevée sur une plate-forme circulaire par onze piliers fondateurs dont les couronnes sculptées représentaient les onze divinités du Rhamâ, elle offrait une flore luxuriante par ses jardins intérieurs boisés de palmiers et rafraîchis par les fontaines en marbre jaune. Mais le ciel des nobles nétait pas plus clair que celui des pauvres ce soir là : le soleil était déjà tombé depuis quelques heures lorsque les séides semparèrent du quartier et sévirent dans un tumulte de colère. Les cris qui se soulevaient contre lautorité furent bientôt étouffés par le vacarme des mamelouks du Raïjz qui embarquaient de force les insurgés et parfois le sang même venait tapisser les pavés des nobles dAl Wazat quaucune révolte navait jamais souillé. Le baron Douareb contemplait tristement le massacre du haut de ses quartiers lorsque ses gardes lavertirent quune femme venait de pénétrer lenceinte de son palais en franchissant un bas muret, sans doute pour échapper aux séides. Dans sa générosité, fut-elle aussi grande que la prestance de ses appartements, Sire Douareb fit cueillir la jeune femme avec dignité. Elle avait le visage estompé dun voile fin transparent et déclinait un frêle sourire trahi par un regard profondément triste. Vêtue de quelques vieilles nippes et de pauvres escarpins, elle laissait paraître quelle nétait pas des nobles ni même une marchande du souk de Nebhezt, mais une femme des quartiers pauvres du sud dAl Wazat. Elle portait à son bras un berceau et appliquait avec respect un regard conciliant au baron quelle savait être un homme de parole et dont la réputation familiale avait été encline à offrir quelques espoirs aux contempteurs du régime de Sarmate. Elle se présenta timidement à lui : Suhaymah et sa fille, Gwaen. Sire Douareb invita la jeune femme à découvrir les salons afin quil puisse la servir convenablement et apaiser ce regard terrorisé. Le baron fit dresser deux couverts et, sans faillir à son devoir dhôte, installa le berceau près de son invitée et sassura que la petite ne manquait de rien tandis quil engageait la conversation :
__« Les mamelouks oublient parfois quils sont issus des lignées desclaves ; ils traitent aujourdhui comme ils ont été traités jadis, exprima le baron sur un ton las. Jai vu ce dont ils sont capables, mes murs ne me protègent pas de lindignation que jéprouve lorsque je vois de telles choses. Pardonnez-moi car je nai pas fait vérifier si vous portiez quelconque blessure. Dois-je faire appeler lun de mes soigneurs ? »
__Elle se contenta dagiter la tête en un «non » manifeste. Elle nosait pas sasseoir ; ses mains tremblaient et son regard ne parvenait pas à se poser. Le baron sapprocha delle en lui présentant un verre de thé chaud ; un sourire réconfortant pinçait ses lèvres épaisses. Sire Douareb avait un don pour rassurer son entourage par de simples gestes.
__« Je ne jugerai pas votre don, poursuivit-il. Les mentalistes effraient la majorité parce que leurs capacités ne connaissent pas de raisonnement logique. Elles ne sont ni liées à la génétique, ni liées à lapprentissage. Qui peut être en droit dattribuer tel pouvoir à untel et non un autre ? »
__Elle posa ses lèvres sur son verre à thé, séduite par le parfum de la menthe verte et sabreuvait tout autant des paroles du baron, lancé dans ses explications sur la question des mentalistes.
__« Vous seriez une élue, une déesse pour les peuples de lorient mais vous êtes une menace pour le Raïjz qui considère avec injustice ce qui vous a été offert par la vie. Ce sont tous ces raisonnements, de haine et de jalousie, qui provoquent aujourdhui cette vague destructrice. Linjustice... ma chère... linjustice. Face à de tels pouvoirs...
__- ... mes pouvoirs sont un fardeau, fit timidement la jeune femme.
__- Non, ils sont une récompense, Suhaymah. La récompense de votre existence. Enfin, les séides voient les choses aveuglément, les ordres sagitent comme étant leur seule source de réflexion. Ce ne sont que des bras articulés dune machine infernale qui ne tardera pas à emporter ses instructions dans lenceinte de ma demeure. Vous ne serez pas en sécurité très longtemps ici et votre présence est dangereuse pour tous ceux qui résident ici, alors...
__- Alors quoi faire ? gémit-elle désemparée. Pour ma fille ! »
Le baron sapprocha du berceau, laissant échapper un long soupir avant de se faire surprendre ; la petite chose venait de lui agripper son large doigt de sa petite main potelée tandis quelle agitait ses pieds en poussant de petits cris dexcitation :
__« Wa ? ! »
__Sire Douareb écarquilla les yeux, attendri par lenfant. Il se prit au jeu des grimaces durant quelques secondes et répondit à la mère sur un ton assuré et confiant :
__« Je me suis désigné responsable de votre vie dès linstant où vos pas ont atteint le sol de ma cour en franchissant le muret. Le peuple na pas assez de volonté pour contester la décision du Raïjz, mais je compte parmi mes plus fidèles amis, des gens de valeurs qui sauront vous guider hors dAl Wazat. Vous cheminerez par les déserts afin datteindre la cité Ouadit, dans le royaume des Halevins. »
__Le visage de la jeune fille se referma soudainement. Suhaymah craignait terriblement la traversée des dunes. Elle connaissait les sombres légendes ; ce que lon disait sur les Skarjens qui peuplent les terres arides de Shazat, les cauchemars provoqués par les effroyables esprits Djinns ; mais encore la difficulté avec laquelle les colons, pourtant investis dentraînements intensifs, peinaient à survivre dans les limites de lempire. Le confort nexistait que dans les cités du Raïjz-Khalifà, cétait précisément ce qui permettait au Raïjz Sarmate daffirmer son autorité en assurant avec fermeté la défense des frontières et des cité-forteresses. Tout en esquivant les nombreuses tentatives de la petite qui cherchait en vain à lui chaparder son monocle ou lui tirer sa longue et fine moustache, le baron reprit :
__« Demain, nous irons au souk de Nebhezt, chez les marchands de kelims sauriens. Ils seront dune aide précieuse dans le choix des trajets, ce sont des nomades des déserts glacés du Maïzern et des dunes de Shazat. Quant à vos guides... ils vivent en marge, ce sont des hors-la-loi recherchés dans la plupart des califats, sous ordre direct du Raïjz. Que cela ne vous empêche pas de les considérer... car vous êtes comme lun deux. »
__Suhaymah hocha la tête. Le baron lui sourit. Elle doutait, de lui, delle, de ce projet farfelu de franchir les déserts avec un enfant de bas âge. Mais elle ne pouvait accepter de se faire saisir par les séides et de risquer la mort de Gwaen : le baron et la jeune femme savaient tous deux que les mamelouks népargnaient pas les petits de moins de trente-six mois, incapables de réagir au «test des miroirs » ; un test manipulé par les séides afin de différencier un mentaliste dun commun.
__« Bien. Il est temps que vous vous reposiez, Suhaymah. » conclut-il.
__Le baron Douareb se releva avec grâce et ordonna que lon prépare la chambre de laile sud pour Suhaymah et son enfant. Leffroyable calme qui balayait les rues après les émeutes neffaçait pas les marques de lutte ni le sang noirci par la chaleur. Lair nétait pas plus sain et les inquiétudes commençaient à peser sur les habitants dAl Wazat, comme ceux de Harab ou de Dioneb et ceux dAlkhabad, la capitale du Raïjz-Khalifà. Mais trop nombreux parmi les hommes, les sauriens, les psioniques ou les insolites soutenaient Sarmate et sa couronne de fer. Et dans sa chambre où chaque détail, de la penderie au lustre, arbore le luxe, demeurait Suhaymah, une femme pauvre et si fatiguée, si faible, qui prononçait dans ses vux les plus chers un confort pour sa petite fille, sa tendre chair, Gwaen. Le témoignage dun amour parfait mais éphémère. Une caresse sucrée dans un monde amer. Et de son neuvième mois, elle était déjà capable dapaiser dun seul sourire comme dun seul éclair, les craintes de ceux qui lentouraient. Elle était un sentiment dune candeur étincelante. Cette nuit là, comme toutes les autres nuits qui la précédèrent dans son existence, la petite ne dormit pas, le regard éveillé, sa tête appuyée contre le bras de sa mère qui rêvait profondément dun long voyage dans le désert. La petite Gwaen, calme, souriait tandis que la nuit sachevait lentement, la lune masquée à nouveau par la poussière de sable rapportée des vents chauds du désert de Shazat.
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Kelim : tapis d'orient
Mamelouk : Soldat de la milice constituée d'esclaves affranchis
Raïjz : Se prononce Reich, pas besoin d'en dire plus
Khalifà : Le terme arabe pour Califat
Suhaymah : prénom qui signifie "la récompense"