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GRUYÈRE Etablissements publics
Une fleur aux non-fumeurs
Les temps deviennent de plus en plus durs pour les fumeurs. Alors qua été lancée une pétition demandant une meilleure protection contre la fumée passive, certains tenanciers ont décidé dagir: à Bulle, un café-bar vient de bannir le tabac de son établissement, alors quun restaurant a choisi la voie de lincitation et du respect mutuel.
Les amateurs dherbe à Nicot hésiteront, dès le mois de février, à pousser la porte de Chez Raymond. Ou alors ils devront résister à leur toxique. Le patron de ce café-bar bullois a en effet décidé de bannir le tabac de son établissement.
Un geste qui na rien dune croisade contre les fumeurs, assure Raymond Aucoin: «Depuis toujours, nous essayons de présenter des nouveautés. Nous nous sommes demandé ce que nous pourrions offrir pour 2005.» Et lespace sans fumée est fréquemment revenu dans les discussions menées avec le personnel. Un coup de sonde auprès de quelques habitués a permis de constater quils étaient plutôt ouverts à lidée. «Cela pourra même encourager certains à moins fumer, voire à cesser», argumente le patron.
Il ne se fait par contre aucune illusion quant aux «vrais de vrais»: «Ils iront certainement voir ailleurs
Mais nous sommes prêts à assumer le fait dêtre les premiers à proposer quelque chose comme cela.» Raymond Aucoin espère bien que cette évolution de son offre saura séduire une autre clientèle. La statistique plaide en sa faveur: plus de 70% des Suisses ne fument pas.
Chez Raymond, les amateurs de tabac ne seront pourtant pas malvenus: ils pourront toujours aller en griller une à lextérieur. Ou, lété venu, sur la terrasse
Lidée de bannir la fumée de son établissement excite Raymond Aucoin: «Je suis tendu. Je me demande comment les gens vont réagir
»
Inciter au respect
Au restaurant des Halles, à Bulle, Pascal Bonneville a choisi une autre voie: depuis environ six mois, les cendriers ont été retirés des tables. Et remplacés par un mot qui invite les fumeurs à se retenir. «Cest une incitation à respecter les autres, explique le restaurateur. Partout, on entend parler de ce problème de fumée et nous y sommes sensibles, pour notre personnel et notre clientèle.» Pour lui, le but est «de rendre lendroit le plus agréable possible. Nous faisons tout pour que les clients se sentent bien, mais il y a aussi une part quils peuvent faire.» Il se dit en revanche opposé à une loi qui interdirait la fumée dans les lieux publics: «Je naimerais pas quon en arrive là. Une interdiction reviendrait à enlever une part de liberté individuelle et ne serait pas une bonne chose pour notre profession.»
Le système est-il efficace? «Il y a moins de fumée, affirme Pascal Bonneville. Parfois, il arrive que personne ne fume. Mais dautres fois, on dirait que tous les fumeurs se sont donné le mot.» Quant aux réactions, elles sont plutôt positives: «Les non-fumeurs sont enthousiastes et nous félicitent. Les fumeurs râlent un peu, mais font souvent leffort. Et ils saperçoivent que ça ne coûte pas grand-chose dattendre un moment.»
Du côté de Gastro-Fribourg, cest aussi la tolérance qui est prônée. «Les grands établissements qui comptent deux ou trois salles peuvent en réserver une aux non-fumeurs», explique Michel Perler, vice-président de lorganisation. Mais tout le monde nest pas logé à la même enseigne. Le restaurateur de Corminboeuf nespère pas voir arriver une législation restrictive: «Nous risquons de perdre de la clientèle», estime-t-il.
Pas toujours possible
Rien de tel nest prévu pour linstant
Encore quune pétition a été lancée (voir encadré). Pour lheure, précise Alain Maeder, chef du Service de la police du commerce, seul larticle 36, alinéa 2 de la Loi sur les établissements publics et la danse fait référence à ce sujet: «Dans la mesure du possible, lexploitant dun établissement met à disposition des tables pour fumeurs et pour non-fumeurs. Les tables pour non-fumeurs doivent être clairement désignées.»
Le problème, poursuit Alain Maeder, cest que «les infrastructures existantes ne sont pas toutes adaptées. Il ne sert à rien de mettre sur une table un carton table non-fumeurs, si elle est entourée de tables fumeurs.» Reste que de plus en plus détablissements font un effort, constate-t-il. «Jusquà maintenant, la tendance était un peu de placer les non-fumeurs dans un coin peu agréable, ce qui est en train de changer.»
Mouvement en expansion
La guerre contre le tabagisme passif, lancée aux Etats-Unis il y a quelques années, sest étendue à lEurope. Après lIrlande lan dernier, lItalie vient dinterdire la fumée dans les lieux publics. En France, la loi Evin oblige les restaurateurs à prévoir des zones non-fumeurs, depuis plus de dix ans. Et Paris (qui compte près dune centaine de cafés et restaurants interdisant la fumée), a lancé il y a peu un label «Etablissement sans tabac».
En Suisse, le Tessin pourrait devenir le premier canton à bannir la fumée des lieux publics. Le Parlement doit se prononcer sur une modification de la loi, soutenue par la Fédération des cafetiers-restaurateurs. A Genève, le Grand Conseil recevra, au printemps, un texte comparable, venu des rangs socialistes.
Dans le canton de Fribourg aussi, une pétition a été lancée (lire ci-contre). A signaler enfin que le conseiller national radical zurichois Félix Gutzwiller a déposé, en octobre dernier, une initiative parlementaire «Protection de la po-pulation et de léconomie contre le tabagisme passif». Ses arguments: en Suisse, chaque jour, une personne meurt de la fumée du tabac, sans jamais avoir fumé. De plus, 75% des Suisses ne fument pas, mais ne peuvent actuellement se protéger contre le tabagisme passif.
Pétition au ralenti
Trois Fribourgeois sur quatre, fumeurs ou non-fumeurs, préfèrent prendre leur repas dans un restaurant sans fumée. Et malgré ce sondage effectué en mai 2004, la pétition lancée au début décembre peine à réunir des signatures en nombre.
Un mois après son démarrage, cette démarche visant à protéger la population de la fumée passive avait réuni 400 signatures au début janvier.
Il faut dire que le Centre dinformation pour la prévention du tabagisme (Cipret), à Fribourg, na pas encore organisé de manifestation à ce sujet. «Ça va venir, dans le domaine du sport entre autres», indique Monica Celio, responsable du Cipret-Fribourg. La récolte devrait durer en principe jusquau 31 mai prochain, date de la Journée mondiale sans tabac