Les gens qui lisent que ce qu'ils veulent bien lire.
Bon sinon soyons sérieux, je sors de Moana (Jean Vieil Homme, tu peux moletter
).
J'ai même failli ne pas y rentrer, dans le cinéma.
Déjà j'arrive et vois un inhabituel bouchon à l'entrée du centre commercial où il y a le cinéma, alors que j'étais à 10mn du début de la séance (je pensais qu'un dimanche après-midi j'aurais tout mon temps)... Un parking de 450 places qui en était réduit à 12~20 maxi.
Je m'aperçois une fois sur place qu'on était le black friday et donc magasins ouverts. Je me précipite au cinéma, me jette sur une borne, prends un ticket... pour entendre 10s après que la séance de Vaiana était complet, que les gens qui étaient venus pour ça pouvaient repartir, le parking serait gratuit.
Je rentre dans la salle, effectivement blindée mais miracle, une place au bord de l'allée à un endroit en plus qui me convient. Jamais vu ça.
Et le film ?
Ceux qui me lisent et essaient de comprendre sans s'arrêter à la surface des choses (
) savent que j'aime par dessus tout l'animation, et toute la technique qu'il y a derrière, bien plus que l'histoire auquel je ne prête souvent guère d'attention dès lors qu'elle n'est pas spécifiquement pour enfants. Je ne suis pas gaga pour autant du truc, et je ne vais pas voir tout ce qui sort, pour moi il y a à peu près 80% de déchet, ou de trucs médiocres vite vus, vite oubliés.
De ce fait dans la catégorie "synthèse" à part l'exception "Dragons" il n'y a pratiquement rien qu'il ne vaille quelque chose... à part les Pixey et les Disnar (expression pompée à Honest Trailers). Et pour Disney, mon regard positif envers leurs productions est très récent et date très précisément de Tangled. Avant, à part les 5 "grands" faits par Disney lui-même, quelque uns datant de la renaissance avec Aladdin, Mulan ou Tarzan, pour moi je n'ai jamais aimé. C'est bien simple, le seul chef-d’œuvre (post 50's) avant le passage à la 3D c'est pour moi Lilo et Stitch, signés par ceux qui plus tard feront Dragons, tiens curieux hasard...
Longue introduction pour dire qu'avant Pixar et les récents Disney, et le changement assez radical dans la manière de raconter un histoire avec ce médium, je me réfugiais dans l'animation japonaise (Ghibli, Oshii, Ôtomo, Tezuka...) ou même française (Grimault) pour trouver quelque chose qui me satisfaisait. Et puis est arrivé Lasseter chez Disney et tout a changé. L'artiste redevenait le cœur de la création, on a commencé à voir des thèmes qu'on ne voyait pas ailleurs, et les talents de meneur d'hommes de Lasseter ont fait le reste.
2016 a pour moi été une année exceptionnelle dans l'animation avec 2 chefs-d’œuvre que sont Inside-out et Zootopia. Je ne vais pas en reparler, mais pour moi l'avenir de l'animation est là, dans cette manière de concevoir le DA "tout-public". Seulement voilà. Les réalisateurs de Moana font partie de la vieille garde de Disney, une survivance des années Menken, qui a beaucoup fait pour le renouveau du studio (paix à son âme
). John Musker et Ron Clements sont d'excellents cinéastes, qui ont fait de bon films, ils ont fait la plupart des classiques Disney des années 80-90. Mais c'était il y a 25 ans. Et quand ils ont fait un film lorsque Lasseter et venu aux affaires, ils ont accouché de La princesse et la grenouille, film très daté (lui aussi
) qui a sans doute sonné le glas de l'animation 2D hors séries télé.
Et ils reviennent avec Moana. C'est à dire ceci:
(image par ailleurs mensongère, le porc n'est pratiquement pas présent du film, et surtout pas dans tout la partie sur le catamaran).
Avant de parler du cœur du film, une petite précision: Je n'ai pas aimé du tout Finding Dory, que j'ai trouvé assez médiocre, avec un humour bof et une histoire aux situations et rebondissements forcés.
Est-ce que Moana est meilleur que Dory? oui indiscutablement, définitivement (et je ne comprends pas son triomphe aux States, loin devant Zootopia, mais passons).
Mais on reste loin d'Inside-Out et de Zootopia. Moana est un excellent film "classique" à la sauce Disney des années 80, mais il n'a en rien la profondeur de Zootopia.
Je vais essayer d'être concis, car je m'aperçois que je suis pas mal long déjà.
La technique: Elle bute. Period. J'achèterai le BR day one rien que pour ça, me repasser les meilleures scènes et admirer la complétion artistique. C'est tout simplement du jamais vu, que ce soit au niveau des couleurs, de la lumière et du traitement de l'océan. Le film dégueule de détails, de soin maniaque à reproduire les paysages polynésiens, c'est absolument dément, et il faut remonter à Brave pour retrouver un soin pareil dans la manière de montrer une forêt. Bien entendu l'animation n'est pas en reste et c'est un plaisir de voir tous les persos (très typés et qui ressemblent vraiment à des Polynésiens, l'héroïne n'est pas filiforme par exemple) bouger à en donner le tournis.
La vision de la Polynésie: Le film délivre un message sympa, où même le twist (habituel maintenant dans les Disney) sert le propos doucement écolo (mais sans aucune lourdeur). Le film n'est pas niais du tout, pas de scène cucul (sauf une, peut-être), c'est vif, les Polynésiens ne sont pas pris pour des arriérés ou des indigènes bons à christianiser, et encore moins comme des bêtes curieuses que l'on filme dans leur milieu naturel, avec leur drôle de croyances et tout et tout... Je n'ai pas trouvé ça caricatural ou pittoresque, et rien que pour ça on peut saluer l'effort.
Derniers trucs avant de parler de ce qui fâche: VF très bonne, chansons bien fichues, bande son garantie authentique et musique qui tabasse. Je ne peux malheureusement pas parler de la performance de Dwayne "la légende" Johnson, et je ne pourrai pas avant d'avoir le BR, car il n'y a aucune séance de prévue par chez moi, une honte. Le court de début de programme, que j'ai pu voir, n'est pas terrible en revanche.
À noter une séquence post-générique assez drôle.
Mais
Malgré l'histoire qui est excellente (ils avaient de l'or entre les mains, encore une fois) et une attention louable de bien faire, on se retrouve devant un "Classique Disney" comme ils en faisaient il y a 20 ans, ni plus ni moins. Alors bon ça a peu changé, là c'est la princesse (non, la fille du chef! Dixit Moana) qui "saves the day", l'humour est d'aujourd'hui, on a un gag visuel sur Frozen très drôle, Moana est plutôt délurée, le début du film est dément, le rythme général est rapide (un peu trop même parfois).
Mais il y a pas mal de problèmes de rythme. Le scénario, les scènes, rebondissements et la progression de l'histoire sont très classiques, rien d'original. J'ai écouté un podcast très intéressant d'un gars qui disait la même chose, sauf que lui disait que des fois, c'est bien de regarder un truc pas très original, tant que c'est bien fait. C'est vrai mais là il y avait tellement moyen de faire un truc jamais vu qui aurait tenu en haleine jusqu'à la fin. Là on se retrouve avec le duo de comédie classique qui va passer par toutes les étapes avant de triompher ensemble du vilain (je ne dirai rien de plus pour pas spoiler). Et surtout on a toute une scène (assez longue, avec beaucoup d'action) qui ne sert strictement à rien, plus une autre qui se passe dans les abysses et qui est limite du même tonneau. C'est spectaculaire, époustouflant techniquement mais à part ça... Et puis tous ces petits détails (dans la narration) parfois à la limite du cliché ou de la facilité (on a droit à une courte séquence de rêve), certains gags pas drôles...
Et je pense que le coté "Musical" est de trop, le film n'en avait pas besoin.
Est-ce que c'est un film à voir? Oh putain oui, la question ne se pose même pas. Il est tellement au-dessus de la production actuelle du point de vue artistique. C'est époustouflant du début à la fin, pas de scènes bâclées, de fautes de goût, de vulgarité (sauf pour un gag que j'ai trouvé très très drôle, j'en dis pas plus
). C'est un produit extrêmement bien fini, bien supérieur pour moi à Dory, ou à toutes les comédies aux couleurs criardes qui pullulent sur nos écrans en ce moment. Mais on reste assez loin d'un Zootopia pour ce qui est de la manière de traiter une histoire et de la profondeur des thèmes abordés, alors qu'il y avait de quoi faire.
