Citation :
L’heure est grave, je le disais lors du CN du 25 juillet. Nous sommes dans l’impasse, la gauche et l’espoir qu’elle avait suscité est dans l’impasse.
Et nous voilà à la croisée des chemins. Soit nous persévérons dans l’erreur et nous condamnons le pays à la violence en étant aussi irresponsables que le Président de la République qui a mis le pays dans cette situation, soit nous donnons le coup de talon qui nous permet de remonter à la surface.
Je ne ferai pas la litanie des manquements de la direction nationale, il y aura l’histoire pour l’écrire, un congrès un jour, même si tu n’en veux pas quoique tu dises Olivier pour l’écrire.
Comment de l’immense espoir né de l’élection des européennes de la reconstruction d’une gauche capable de gouverner et d’ouvrir des perspectives réelles de changer la vie, nous en sommes arrivés là, à peine trois mois plus tard ? Comment est-on arrivé sur ce champ de ruines ?
Je précise tout de suite que je réfute tout procès en macronisme déguisé. Vous nous en avez fait le reproche le 25 juillet. Vous savez très bien que nous ne sommes pas des soutiens ou des supplétifs d’Emmanuel Macron.
En revanche, nous ne pouvons pas être des supplétifs de La France Insoumise.
Je vais essayer à la fois de dresser rapidement quelques constats et de proposer des solutions.
Un constat d’abord, notre dernière décision collective remonte au 13 juillet quand nous t’avons unanimement désigné comme notre candidat à la fonction de Premier Ministre pour le Nouveau Front Populaire.
Je ne sais toujours pas aujourd’hui pourquoi tu ne l’as pas été, pour quoi le NFP a refusé notre premier secrétaire sans que cela n’entraîne la moindre réaction, la moindre indignation vis-à-vis de nos partenaires ? Ils refusent notre chef de file et nous ne disons rien, tu ne nous dis rien ?
Et voici que Lucie Castets, qui est une femme déterminée, nous l’avons constaté, est désignée sans vote des militants par une décision en chambre obscure comme notre représentante. Et voilà, que désormais tu annonces être prêt à censurer tout gouvernement qui ne serait pas dirigé par Lucie Castets. Y compris s’il est dirigé par un Premier Ministre dans un gouvernement de cohabitation ?
De même, tu dis le programme, rien que le programme. A quel moment avons-nous voté la retraite à 60 ans (pas dans la campagne d’Anne Hidalgo), à quel moment avons-nous voté la rupture avec l’Europe (pas dans la campagne de Raphaël Glucksmann), à quel moment avons-nous voté la doxa économique de l’extrême-gauche qui va accélérer les difficultés de notre outil de production et donc aggraver le chômage ? A quel moment avons-nous renoncé à la question de la sécurité ?
Assez, cela suffit ! Nous le savons tous dans ce BN, les provocations de LFI ne cesseront jamais, c’est leur ADN. Depuis les élections législatives, le 7 juillet au soir quand il pris la parole le premier, dimanche dernier quand il a annoncé qu’il voulait la destitution du Président de la République. Nous le savons, ils ne veulent pas gouverner. Mélenchon l’a lui-même reconnu puisqu’il s’est mis hors-jeu en disant qu’il pouvait ne pas y avoir de ministres LFI. Et nous voulons continuer dans les mêmes conditions alors que LFI ne peut gouverner.
C’est le sens de la Convention que j’ai demandé et que je réclame de clarification de notre stratégie et de la forme d’union de la gauche que nous voulons. Elle est essentielle.
Et moi je dis que nous voulons gouverner, plus nous le devons.
Je n’ai aucune leçon de gauche à recevoir de LFI. Je ne me laisserai pas intimider par leur terrorisme intellectuel. Aucune leçon pour me demander si je serais macroniste ou pas, c’est indigne de notre débat et du moment.
J’assume qu’il nous faut reprendre des discussions avec le Président de la République. Il nous sera reproché par tous les électeurs, les nôtres et ceux du front républicain de n’avoir pas essayé jusqu’au bout.
Parce que vois-tu l’alternative que tu proposes est le bruit et la fureur, le désordre.
J’assume de refuser d’appeler à manifester. Je suis maire de Vaulx-en-Velin et je sais le prix qu’il en coûte d’appeler à l’émeute. Je n’ai pas besoin d’imaginer ce que serait une chambre brune à l’Assemblée Nationale pour les Mohamed, Pierre et David, Kevin, Sarah, Laurine, Fatima de ma ville.
L’alternative que tu proposes est le renoncement à l’universalisme.
J’assume de chercher encore des solutions pour un Premier Ministre socialiste/ social-démocrate qui nous permettrait d’appliquer des mesures immédiates d’apaisement du quotidien des habitants de nos villes. Tu nous as dit que tu as rencontré les groupes du bloc central, quels sont les projets sur lesquels nous pourrions trouver des compromis ? J’exige un retour. Il faut que nous poursuivions les rencontres pour discuter les mesures qui empêcheraient une motion de censure et commencer concrètement à trouver les compromis.
Le pays ne vaut-il pas mieux que nos intérêts particuliers ? Car du point de vue du PS, si nous continuons ainsi, nous le condamnons pour les prochaines échéances électorales, municipales, législatives anticipées ou non, présidentielle...
J’assume de ne pas vouloir le grand soir et la Révolution.
J’assume de comprendre le réel et d’aller vers l’idéal.
J’assume l’utopie face à la radicalité.
J’assume désormais cher Olivier, que nous devons essayer jusqu’au bout, parce que nous serons responsables devant l’histoire.
Je le dis solennellement, le Parti est au bord de la rupture. Et je n’engagerai aucun départ sur mon nom, je ne créerai pas d’autre partie mais si nous devenons les appendices de l’extrême gauche, alors la force centrale à gauche se reconstituera ailleurs, par la force de la réalité. Ce sera la réalité des territoires, des maires, des collectivités locales qui le feront à bas bruit vidant le parti de sa substance.
Je l’ai dit en introduction, nous sommes à la croisée des chemins Olivier, et je continue à penser que nous socialistes, sommes une partie de la réponse aux désordres actuels du pays et du monde.
En conclusion, nous demandons un fonctionnement qui associe les instances du Parti, le retour à la table des discussions pour trouver une issue et l’abandon du dogme du programme du NFP, le refus d’un vote d’une motion de censure par principe. Il peut y avoir des réformes engagées de gauche et nous devons essayer de les trouver.
Je demande que soit organisé un nouveau BN et CN dans les règles permettant un vote en présentiel pour décider quelle sera notre position une fois un nouveau PM nommé a priori hors NFP et j’annonce que nous prenons totalement notre liberté de parole, pour dire qu’un autre chemin que celui que tu empruntes est possible, qu’un autre PS est possible. Nous avons été constructifs, nous serons en frontal si nécessaire, pour donner une capacité d’espérer.
Je ferai miens les mots d’Aimé Césaire : Gardez-vous de vous croiser les bras en l'attitude stérile du spectateur, car la vie n'est pas un spectacle, car un océan de douleur n'est pas un proscénium, car un homme qui crie n'est pas un ours qui danse.
Hélène GEOFFROY
Bureau National du 27 août 2024
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