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Auteur Sujet :

La moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar.

n°48223910
prospoul
Posté le 04-01-2017 à 16:12:52  profilanswer
 

Reprise du message précédent :
Pour ta littérature ou en général ?

mood
Publicité
Posté le 04-01-2017 à 16:12:52  profilanswer
 

n°48223924
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 04-01-2017 à 16:13:52  profilanswer
 

t'es de la police ?

n°48230632
prospoul
Posté le 05-01-2017 à 09:30:33  profilanswer
 

Non, un agent de la CIA :o

n°48261088
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 08-01-2017 à 09:24:13  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/18/03/vyln.jpghttps://zupimages.net/up/18/03/thrd.gif

 

Salon littéraire.

 

Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.

 

Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - extrait Numéro 34.

 

https://zupimages.net/up/18/03/ojng.jpg

 

Le perroquet gris du Gabon dénommé Guy Ness avait été placé sous protection particulière par l’inspecteur-détective en chef de la police Gilbert Tricard, alias Teddy la Fouine. Restait à savoir quoi faire réellement du volatile à crête, classé dans le fichier peu épais des informateurs privilégiés de la maison, lequel comprenait également Sisco Matteï, le patron de la Rose Noire. Il se croyait dans le pétrin, ce quidam repenti, à cause des trois filles qu’il venait tout juste d’embaucher, avant qu’elles ne soient sauvagement assassinées. Comme il n’arrêtait pas de se plaindre à chaque visite de Gilbert que, merde, ses paris étaient parfaitement légaux et qu‘il pouvait le prouver, qu’il n’avait aucune info à fournir et qu‘on arrête un peu de l‘enquiquiner, les poulagas se montraient nullement décidés à lui offrir une quelconque protection. Sisco prenait néanmoins ses précautions, puisque désormais, deux types armés comme des porte-avions accueillaient chaque visiteur à la porte de son boxon de nuit. Deux autres à l’intérieur tournaient en permanence, avec un air farouche, autour des tables de jeu. Et le reste du temps libre, ils servaient tous les quatre de garde du corps. Le patron du club s’imaginait simplement être aux prises avec la mafia locale, ce n’était qu’une question de temps avant de savoir qui avait dégommé aussi méchamment ses girls, et pourquoi. Dans les locaux de la PJ, l’ancienne stagiaire Angèle Deyord se dévoua finalement pour dénouer la problématique de son chef, à défaut de sa ceinture. Après délibérations communes conclues en présence de l’intéressé, Guy accepta de séjourner incognito chez la policière, le temps pour les poulets de remettre la main sur sa légitime propriétaire. Il insista seulement pour recevoir sa rémunération de témoin-collaborateur en sacs de pistaches grillées, d’une manière illimitée.

 

La nouvelle taulière n’avait pas la beauté de Vaya Condios, mais n’était pas dénuée de charmes, il n’était guère étonnant que son collègue et supérieur hiérarchique ait en permanence envie de la sauter. Les yeux fermés, dodelinant de la tête, Guy se cala sur son perchoir neuf, se rassasiant jusqu’à l’ivresse du spectacle fabuleux d’Angèle Deyord sortant se sa douche, puis il se mit à chanter en gonflant le jabot pour prendre la voix d’Elvis Presley « If you’re looking for trouble, you came to the right place ! », elle salua gaiement la parfaite imitation pour le remercier du show spontané qui essayait de lui faire honneur. Elle-même remua du cul d’une manière endiablée sur les dernières notes et tout le monde sembla content de vivre. Satisfait, Ness retomba dans son bol de pistache rempli à ras-bord, elle se balada à poil toute la matinée, pas forcément pour lui faire plaisir, mais plutôt par flemme de passer un truc, c‘était assez cool. N’empêche qu’elle aurait beau faire, la nostalgie de Vaya le laminerait toujours ; sans nouvelles, il souhaitait que la belle brune n’ait rien connu de fâcheux, il s’impatientait de recevoir de ses nouvelles. Comme de celles de Smith, aussi, sans doute, mais fallait pas confondre. Parce que s’il pouvait sans broncher se rendre à la morgue pour reconnaître le corps du privé criblé de bastos, cette vision ne lui donnerait pas forcément envie d’aller le rejoindre. L’oiseau soudain romantique sentit sous sa couche de plumes que la température de la pièce venait d’être remontée. Il regarda Angèle se coucher sur le ventre, une simple et courte serviette de bain posée sur les fesses. Elle le regardait en rêvant, se toucha un moment le minou et sans autre façon, se masturba tranquillement. Si la nature avait doté le perroquet d’une bouche au lieu d’un bec, il aurait sans doute rigolé bêtement d‘une intimité aussi innocemment partagée. Les policières sont comme les autres, elles ont les mêmes besoins, mais l‘uniforme, ça cache tout.

 

 Un peu nerveux, il craqua bruyamment une énième pistache, puis attendit de se vider le bec pour parler :

 

– Il est quand même insistant, ton collègue. T’aimerais pas qu’il soit là, juste maintenant ?

 

– Gilbert ? Je ne lui ai pas encore prouvé mes limites, sois certain !

 

– Tu vois, je n’ai même pas dit son nom. En fait, tu craques pour lui, et dis toi bien qu’il aimerait certainement être à ma place.

 

– Je suis heureuse de le savoir. Elle tenta un truc un peu brouillon avec l’index qui lui fit l’effet d’une décharge électrique. C’est un détective génial et je ne lui mène pas une guerre impitoyable, mais il reluque mon cul sans jamais que ça lui pose un problème, c’est là que ça coince. Teddy, c’est pas un magnifique étalon, c’est juste un gros bourrin. J’aime pas les tractopelles qui se prennent pour des voitures de sport.

 

– Cause toujours.

 

Ceci étant dit, elle s’exaspéra encore plus longtemps d’un orage personnel, lâcha un faible couinement et Guy Ness patienta en admirant le plaisir qu’elle était en train de se donner à tour de bras. Son attitude agitée lui donnait un petit côté junkie en grave crise de manque, Angèle roulait bord à bord sur le lit en se cramponnant la chatte d’une seule main. L’autre agrippait le dossier du sofa en serrant les griffes. En réalité, derrière ses yeux clos, elle se voyait incarner une boulangère déculottée entre deux poubelles par un facteur pressé, mais ça, Guy, il ne pouvait pas le savoir. Seulement, le postier posait sur elle la tronche obstinée de Teddy la Fouine et après un dernier bond crispé, une longue décharge fusa le long de sa colonne vertébrale, joua dans son dos, tomba dans son pubis en l’obligeant à le toucher une dernière fois, du bout des doigts, comme pour se dire merci ; puis elle se tétanisa trente secondes sur une ultime grimace. C‘était vraiment cool. Après ça, Guy Ness se sentait comme un pape en son palais. Il fut tenté de rechanter un air pour fêter ça, mais en réalité, il la regarda se rhabiller en silence. Elle retrouva son calme peu à peu et Guy s’envoya d’un coup d’aile sur le grand porte-manteau ; ça voulait dire : viens chérie, on va faire un tour en ville, maintenant. Elle le gronda en lui disant de faire gaffe de ne pas chier sur les vêtements. Guy fit encore deux-aller retour, comme un chien qui montre sa laisse en jappant. Peine perdue, puisque selon la consigne, il était tenu au secret dans la résidence de cette poulette, sans aucune permission de sortie. En revanche, elle attrapa un imper neuf dans la poche duquel Ness savait qu’elle planquait une lame acérée. Un cran qui fait clic-clac et s’ouvre dans ton bide en une fraction de seconde. Ce machin de voyou des rues ne devait pas être franchement homologué par son employeur. Mais elle n’était pas en service à ce moment-là. Elle et Guy passaient leur première journée ensemble et visiblement, ils avaient fait connaissance d’une manière remarquable.

 

– Salut pigeon, je te laisse l’appart en surveillance. Y’a aucun fric à gagner pour toi si tu joues les alarmes, mais tu as des pistaches à volonté et de l’eau plein ton bol. Remet une bûche dans la cheminée et tu peux écouter de la musique à fond, tant que tu veux, j’ai tout fait insonorisé des plafonds aux murs, parce quand je fais l‘amour, je le crie.

 

– En tout cas t’es belle quand tu le fais, je l’ai bien vu. Je vais quand même t’avouer une chose : s’il n’y avait pas Vaya dans ma vie, au retour, je t’aurais certainement massé les chevilles.

 

– Avec quoi ? t’as pas de main, et puis tu ne vas pas t’y mettre, toi non plus !

 

Par la fenêtre, Guy la regarda avec un œil gourmand lorsqu’elle traversa le jardin, cette femme était vraiment super sympathique, belle et pas fière, une très jolie poulette. Une bonne photo d’elle en uniforme strict et impeccable trônait dans le salon. Il sentait encore l’odeur entêtante de l‘agréable lotion qu’elle venait de laisser en solitaire sur le canapé. Prenant son envol vers la cuisine, le perroquet se dirigea sur le rebord de fenêtre pour y fumer une clope en prenant un café. Sur la table traînaient une pomme entamée, un calibre 38, une grosse paire de menottes et leur petite clé. Il s’octroya les restes du fruit au goût de rouge à lèvres, puis, l’une après l’autre, il jeta avec précaution ses coques de pistaches inutiles dans la tasse vide, en oiseau bien élevé. Des graines, la généreuse en avait bourré tout un placard. En attendant de revoir Vaya mon amour, la vie pour Guy Ness dans ce logement spacieux se présentait sous les meilleurs auspices.

 

https://zupimages.net/up/18/03/t7fs.jpg

 

Bon dimanche à tous.

 

https://zupimages.net/up/18/03/wje2.png


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 06:48:32
n°48333286
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 15-01-2017 à 09:50:50  profilanswer
 

prospoul a écrit :

Non, un agent de la CIA :o

 

https://zupimages.net/up/18/03/tgsx.jpg

 

Interactions sociétales.

 

Aujourd'hui : Comment se débarrasser correctement d'un gêneur qui vous précède et traîne sur votre plongeoir.

 

https://zupimages.net/up/18/03/ycuo.jpg

 

https://zupimages.net/up/18/03/b6mb.jpg

 

[b]Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.

 

Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou - extrait Numéro 23.

 

https://zupimages.net/up/17/36/ewbs.jpghttps://zupimages.net/up/18/03/drky.gif

 

Ce ne sont plus dix, mais cent hippies venus de tous les pays qui font leur entrée triomphale le mois plus tard à Troulbled, à pied, à cheval et en voiture, invités par leurs frères et leurs sœurs pour fêter la prochaine pleine lune chez Marie-Charlotte de la Tronchedecon. Financé de force par le père de cette dernière, en raison d‘un chantage au mariage blanc, un grand festival  pop-rock est en plus organisé dans le champ du père Mathurin, où tous les habitants des environs sont naturellement conviés. Une fête de huit jours se prépare en effet activement dans l’ancienne ferme de papi Léon, On aperçoit les dessins fleuris peints sur un combi Volkswagen venu d‘Allemagne, à peine revenu de son long périple au Maroc. Le joyeux véhicule aux flancs siglés du signe international et circulaire de la paix est pour l’instant sagement garé dans sa cour, rempli des essieux au toit d’un stock conséquent de bon kiff et d’un super haschich double-zéro provenant des environs de Chaouen. Un antique camion-citerne se tient juste à côté, jugé par les hommes-fleurs sans doute suffisant pour le ravitaillement en bière. Avec deux pots de peinture volés chez l’épicière, quinze bonhommes barbus ont décidé de repeindre à son tour cette vieille guimbarde de fresques psychédéliques. Dans la maison en gros bordel, dans tous les sens du terme, beaucoup de guitares circulent, mais aussi des instruments de musique les plus variés qui se trimballent en grand nombre et passent joyeusement de main en main, tout comme des joints de la taille d‘un bras. Les Rolling-Stones braillent leur (I Can't Get No) Satisfaction, sorti deux ans plus tôt. Une majorité de filles en jupes indiennes s’activent en riant, pour souffler sur le feu qui chauffe l’eau des gros chaudrons de riz complet. Ces faitouts qui reniflent le curry sont posés sommairement sur un foyer de braises installé dehors. Au dessert, on mangera des yaourts qui ne sont plus vendus en pot de verre, mais en emballage plastique, la poubelle va déborder. Le visiteur hésite, en regardant la scène, entre la cour de château moyenâgeux et le campement Kiowa. Les cuisinières rêveuses ont libéré leurs seins pour les livrer au soleil rayonnant de notre mère-nature, ceci afin de les guérir de l’oppression machiste subie depuis au moins la naissance de la civilisation Etrusque. Les mamelles de l’espoir sont pour le moment livrées en premier lieu aux regards fiévreux des Flower-guys, libérés quand eux de l’obligation ringarde des corvées de vaisselle. On se parle le plus souvent en anglais. Les flics de Bripue sont venus voir, moins doués que leurs chiens pour renifler la drogue, dont ils ignorent d’ailleurs tout, ils se sont rincé les yeux sur les nanas aux longues jambes de la tribu, avant de repartir en ricanant. La moyenne d’âge dans les différents clans de routards réunis avoisine la vingtaine d’années et l‘ambiance s‘efforce d‘être à chaque instant la plus joyeuse possible. Peace and love. Faites l’amour, pas la guerre. Mon corps m‘appartient, prend-le comme tu veux. Fume ce joint, prend cet acide, il est temps de regarder tous ensemble Dieu au fond des yeux. Nous sommes aussi des animaux. Bienvenue dans l’ère du Verseau. Le travail nous aliène. Venez dans ma cabane, tripotez-moi la queue, faites-moi des enfants pour égayer la communauté. Et pendant ce temps là, les couturiers capitalistes en vacances à Saint-Tropez commencent à s‘intéresser à leur look d‘enfer, en rupture totale avec les années cinquante et susceptible d’influencer une nouvelle mode. Brigitte Bardot, c’est beau, c’est beau… D’ailleurs, dans toutes les couches de la société les cheveux se rallongent fortement, sans évidemment atteindre des toisons de sâdhus, comme certains petits copains de Marie-Charlotte en provenance directe du Vénus hôtel d’Old Delhi.  

 

Nous rappellerons qu’à la veille de cet été 1967, une année qui fait naitre l’ANPE, Gaston Boudiou a quand à lui quinze ans, une communauté de jeunesse qui pourrait à priori le rapprocher de ces hurluberlus, pour lesquels Pépé Alcyme gardait toujours de son vivant une cartouche dans son fusil à sanglier. C’est d’ailleurs équipés de cette relique que Gaston et Jean vont s’entrainer ce jours-là au tir sur bouteilles, dans un champ désert. Ils viennent de s’amuser avec la grande pancarte rouge du restaurant de « La vache molle », 2 étoiles Michelin, "Maître Restaurateur de France" à 1km à droite », criblée de trous et désormais illisible. Tout en dégommant avec succès son litron de Père Benoit qui éclate bruyamment à 50 mètres, Gaston toujours autant ravagé par la trahison de Marité décide finalement de se confier à son meilleur ami, par besoin de parler, mais aussi pour se remettre un peu les idées en place.

 

– Ah la vache, ah ouais, t‘as baisé Marité Hissedru, ah c’est fortiche, ça ! Jean Micheton regarde Gaston d’un air sincèrement étonné à la suite de cette confidence péniblement délivrée. Il tire longuement sur sa Gauloise sans filtre. Et moi je croyais que tu étais toujours puceau, mon gars !

 

– Et toi, tu l’es pas ?

 

– Ben non, je suis déjà allé voir les putes à Bripue. Dis-donc, quand même, la Hissedru, elle est plus très jeune. Paraît qu’il n’y a que le train qui ne lui est pas passé dessus.

 

– Tu rigoles, t’es jaloux, c’est tout.

 

– Remarque, je dis ça, mais c’est vrai qu’elle est pas mal foutue pour son âge.

 

Moins mature peut-être, Gaston a cependant toujours été la tête et Jean les bras, mais le frère d’Angèle préfère s’abstenir de tout commentaire. Il le sait bien, lui, que Marité est une bombe entre les bras d’un homme. Et pour cause !

 

– Jean, je voudrais qu’on aille casser la gueule au hippie. On devrait le trouver chez la fille du baron.

 

– On prend le fusil ?

 

– Mais non, t’es fou, on va juste lui coller une raclée, pour lui apprendre à pas toucher les femmes des autres.

 

–  T’en fais pas Gaston, fait Jean en écrasant sa clope sur son talon, je lui promet une belle branlée !

 

https://zupimages.net/up/18/03/cnpt.jpg

 

Bon dimanche à tous.

 

https://zupimages.net/up/18/03/kkna.jpg


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 06:52:01
n°48410693
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 22-01-2017 à 14:17:40  profilanswer
 

prospoul a écrit :

Non, un agent de la CIA :o


https://zupimages.net/up/18/03/kqb6.jpg

 

https://zupimages.net/up/18/03/sgnm.jpg

 


Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : L'épilée du Nil - extrait Numéro en 69.

 

https://zupimages.net/up/18/03/zdpx.gif

 

En arrivant par le désert près du port de l’opulente cité d’Halopolis, la caravane harassée de l’ONS aperçut au loin les bateaux royaux amarrés en grand nombre aux quais majestueux, où l’imposante coque du gros Pamalrâssé dominait toutes les autres. Tous ces navires avaient été placés par Néefièretarée, garante de la monarchie et maîtresses des vies, sous la surveillance de son amiral Sésoscristop, le chef du convoi restait donc à bord avec la moitié de l‘armée. Lorsque Tépénib, sa femme Amétatla et leur fille Aménorée firent pénétrer les chameaux de l’entreprise textile aux portes de l’agglomération, ils constatèrent de suite que la  magnificience apparente de la ville cachaient en réalité dans ses ruelles un bordel sans nom. Halopolis manquait singulièrement de parkings, les litières et les charrettes se montraient donc plus nombreuses que les espaces proposés ; ainsi régnait-il une intense circulation dans les différentes artères, égayées par des statues de sphinx, des obélisques et des affiches de papyrus comportant des renseignements sur la tarification des parkings payants. Sur le sol des rues parallèles à la grande plage, foulée en permanence par des habitants nonchalants chaussés d’espadrilles, le sable éclatait d’une blancheur semblable à de la farine. Des vigiles sévères coiffés de casques arpentaient constamment ces voies étroites, en garantissant le splendide isolement du touriste égaré dans un coin sombre, histoire de satisfaire la curiosité des gardes lors de sa fouille au corps. Toute la grande métropole se vautrait dans le gigantisme ambiant de ses constructions et se répercutait sur le niveau de vie des fellaghas alentours. Les paysans tentaient tant bien que mal de survivre au-delà de ses murs, car le pouvoir royal les taxait d’impôts écrasants. Plus qu’ailleurs en Egypte, une sordide misère noire côtoyait ici, en la contrastant fortement, la richesse insolente des notables. On y rêvait pourtant le soir sur les terrasses en admirant ses grandes pyramides, avec parfois la chance d’admirer la naissance d’un bébé sur un trottoir populeux. En dépit de ses jardins mirifiques et des fontaines admirables de ses palais hautains, Halopolis ne faisait pourtant pas oublier qu’elle se vautrait en réalité dans un carcan aride, sableux et désertique. Les lieux les plus courus restaient les tavernes où, gavé de bonne bière, il était difficile de rester plus frais qu‘elle. Venaient ensuite les maisons de joie, lesquelles permettaient aux badauds d’escalader un instant autre chose que des pyramides, en paiement d’un simple bracelet de cuivre. Halopolis se trouvait à l’origine d’un nouveau concept urbain, lequel ordonnait de s’occuper plutôt de soi que des autres, sans pour autant culpabiliser, avec pour résultat de rendre les rues très dangereuses. Dans les maisons modestes ajourées de plaisants patios, tout n’était pourtant que luxe relatif, calme et volupté bien comprise de vivre dans un pays étudié plus tard en classe de sixième. Entre les amphores des étalages privés et les palmiers municipaux, Tépénib eut le plus grand mal à faire circuler ses chameaux, chargés à s’écrouler des lourds ballots gonflés de tissus locaux ou exotiques. Au fur et à mesure que la jeune Aménorée progressait en se frottant aux passants Halopolissons, elle se rendit compte que les effleurages et les pétrissements dont elle faisait l’objet n’étaient jamais accidentels. Devant les maisons aux teintes de terre de sienne et d’ocre qui abritaient parfois quelque artisanat sympathique, Amétatla bavait devant les cornes de gazelles et les pot d’huile d’argan étalés sur les marchés, tout en repérant au passage l’emplacement prometteur d’un hammam.

 

– Le patron se débrouille bien, fit-elle en relevant sa robe pour marcher, il nous donne rendez-vous au temple de Seth. C’est là que vit actuellement la pharaonne. Faut reconnaître qu’il sait se faire rapidement des relations utiles.

 

– C’est pour ça que Valisansoùth est notre big boss. Il lâcha un regard noir au porteur d’eau en train de peloter sa fille au passage, l’air de rien.

 

– Finalement, lâcha Aménorée, en crachant un bout de l’oreille du porteur d’eau, vaut mieux louer une barque que de louer une litière, ici. Elle mordit cette fois dans l’épaule d’un charmeur de serpent plutôt collant, pour le faire dégager plus rapidement.

 

Peu avant d’arriver au temple, ils furent accueillis par Valisansoùth et Mer-Amen Tesmich. Après les chaudes retrouvailles, ils indiquèrent à Tépénib l’endroit déjà loué près de ce palais pour héberger toute la caravane. Le bâtiment était situé en face d’un restaurant chic et spécialisé dans la cuisine des produits du delta. C’est là que le PDG donnait rendez-vous le soir même à ses associés pour discuter tranquillement business, et plus précisément du probable renouvellement de la garde-robe de la pharaonne. Une occasion à ne surtout pas manquer. Amétatla trouva tout à coup l’accent et le parler des habitants d’Halopolis savoureux, mais estima également que la déambulation des maîtres et de leurs esclaves, dans les rues de cette grande ville, constituait un remède d’hippopotame contre la morosité. Elle s’impatientait déjà de plonger comme il faut aux pieds de la reine, puis de trouver un riche et influent soupirant pour sa fille, bien qu’Aménorée ne fut qu’une modeste stagiaire. Une jeune mariée toutefois très prometteuse sur l‘art et la manière de tailler les robes et les pipes. Après avoir rempli ses poches de bon pognon, la femme de Tépenib projetait aussi un truc, comme de laisser enfin le bon temps rouler avec son mari, sur le modèle d‘une vie riche et festive. Ils furent projetés violemment par les piétons dans l’hôtel du caravansérail où ils allaient séjourner, lequel possédait onze étages garnis de colonnes stylisées. Toutes les portes des latrines de l’établissement se gravaient des hiéroglyphes hommes et femmes, des fois qu’on aimerait se tromper. Une majorité de chambres à vingt lits chacune possédaient des parquets de cèdre blanc au parfum entêtant. L’endroit ne respirait pas le luxe, mais offrait une réelle détente après les nombreux jours de désert. Les lits spacieux étaient tous taillés dans le granit d’Assouan. Cinq gros balaises musclés vêtus en pagne servaient d’ascenseur, et leur origine Kouchite leur donnait une touche délicieusement coloniale. Une statue en marbre de seize mètres de haut illustrant Potémé IV ornait également le toit de la vieille bâtisse, lequel débordait largement sur la vaste cour où dormaient les chameaux. A l’arrivée des gens du voyage couverts de sable, l’endroit ne possédait qu’un unique locataire qui logeait au troisième étage, un touriste romain nommé Tampax Nostrum, mandaté en réalité par l’empereur pour espionner l’égypte. Son dernier rapport officiel expliquait à quel point le pays était affaibli et pourrait prochainement être tranquillement envahi, si Rome le désirait. La présence opportune de la pharaonne dans la même ville que lui réjouissait déjà ce fameux Tampax, puisqu’elle lui donnait l’occasion d’observer de plus près la souveraine. Au gré des soirées arrosées dans une taverne toute proche, il s’était lié d’amitié avec un compatriote employé dans l’armée egyptienne, un mercenaire nommé Vequetum Fourlanus.

 

– Bon, ordonna Valisansoùth en désignant à chacun sa place dans le dortoir commun, posez vos valoches, on va voir la reine. Ne regardez pas quand elle se gratte, c’est à cause des morpions sacrés qu‘elle se trimballe depuis Thèbes.

 

Une grande agitation régnait dans le temple lui-même, en vue du transfert de Néefièretarée (la belle est velue) dans sa véritable résidence. Ce qui n’empêcha guère Trêmouatoli et Mer-Amen Tesmich de se retrouver ensemble, pour un petit coup rapide et fiévreux dans un des couloirs. C’est donc trempée et recouverte d’huile parfumée que la nouvelle copine de l’esclave musclé leur fit ensuite les présentations solennelles à la pharaonne d’ Egypte, imprégnée quand à elle d’essences balsamiques. Couché sur le dos et vaincu par les odeurs, le guépard royal digérait près du trône une jeune vierge épilée, choisie parmi la plus grasse des danseuses. En surveillant les déménageurs essoufflés du coin de son œil en amande, Néefièretarée rêvassait sur l’utilité pour elle de faire des enfants, en dehors d’assurer toute dynastie. Devant elle s’agitaient en effet le troupeau hurlant des gosses de la cour, largement énervés par leur récente croisière. Les mioches venait d’entreprendre de couper les moustaches d’un fennec apprivoisé, puis de se faire rabrouer par leur nobles parents, juste à temps avant de s’attaquer à celles du guépard somnolent, plus que jamais vautré au bord de la nausée dans la salle hypostyle.

 

– Oh glorieuse pharaonne qui nous chante encore Horus, déclina Valisansoùth en lui présentant tour à tour ses associés et les deux femmes, voici Tépénib, chef de ma caravane, Amétatatla sa femme et Aménorée sa fille, pour te servir et niquer les éthiopiens sur le marché du lin international, si tel est ton désir. Que Ptah te donne une santé parfaite en évitant sous tes pas les peaux de banane, les serpents et les scorpions.

 

– Et voici Phimosis, mon vizir, répondit Néefièretarée en désignant son amant du bout de son scpetre Ankh. Le Kouchite salua dignement, tout en tirebouchonnant distraitement l’étoffe roulée qu’il tenait à la main, insigne de son rang.

 

– Nous avons largement assez de choix dans nos tissus pour te safisfaire, première dame des deux terres. Notre venue tombe bien, puisqu’on entame tout juste la première période de soldes.

 

Pour se faire remarquer davantage par la reine, Amétatla secoua la tête afin de faire briller ses grosses boucles-d’oreilles en or, en forme de têtes de gazelles. Elle n’en revenait toujours pas d’être en train de s’exprimer devant la pharaonne. Il était cependant trop tôt pour exiger quinze chars en escorte pour les prochaines fiançailles d’Aménorée. Jouant de la trompette, l’un des intendants de la cour vint brusquement les interrompre, il avait selon lui une information de la plus haute importance à communiquer. Il parla sans même se relever, tant il semblait pressé.

 

– Grande perche royale, splendeur de Rê, une terrible nouvelle nous est parvenue de Thèbes, car ton mari vient de mourir subitement ! Le messager nous a dit qu’on l’avait déjà momifié.

 

https://zupimages.net/up/18/03/p24o.jpg

 

Bon dimanche à tous.

 

https://zupimages.net/up/18/03/9km9.gif

  



Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:04:45
n°48411645
electro30
analphabête diplômé
Posté le 22-01-2017 à 16:35:38  profilanswer
 

Tu avais le choix entre le talent et le style de San Antonio, ben...


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moins y en a, mieux ça marche
n°48412089
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 22-01-2017 à 17:36:40  profilanswer
 

rien à foutre.

n°48486015
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 28-01-2017 à 18:45:59  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 22.

 

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Les fers des chevaux battaient avec ardeur sur les pavés de Mouyse, il fallait en urgence fuir la meute féroce des chiens lâchés sur eux. Robin fouettait comme un dément sa monture au poitrinal ensué, car il se montrait tout autant pressé qu’elle de fuir les mâchoires avides des bêtes noires, aux yeux incandescents. Il cramponnait sa précieuse relique au creux de sa tunique, content d’avoir récupéré le sceptre ancestral de son ordre, dont malheureusement il ne contrôlait pas la magie. Les moines chevaliers devaient quitter rapidement cette ville maudite, en ne comptant que sur leur vélocité et l’aide de leurs propres forces. Des chandelles s’allumaient timidement de quelques fenêtres, au gré du raffut qu’ils produisaient en galopant dans les ruelles désertées pour la nuit. Des cavaliers ennemis au heaume argenté, portant arcs et écus à boucle de cuir, les talonnaient dangereusement. Ils se guidaient avec succès en suivant leurs molosses, dont le flair affuté pouvaient tenir une trace plus de trois jours après qu’elle ne fut déposée. Voiles et cheveux dans le vent, Jeanne-Mireille d’Arc jura de se couper ras les tresses, si jamais elle s’en sortait vivante. Tous savaient que pour payer le prix du sang de Marie Stetarte et le vol de l’Œil de dinde, en cas de capture par Vazy Métoian LXIX, ils seraient immédiatement exécutés de la plus atroce manière. En fuyant à bride-abattue dans les rues sombres, nul doute qu’ils entrainaient derrière eux, au grand galop, la cohorte sanguinaire et obstinée de ces bourreaux. Le pied du cheval de messire Gauviens dérapa sur la pierre en passant devant la maison du prévôt des marchands, glissa, se déroba, puis se rattrapa, sans heureusement provoquer de blessure ou faire perdre l’allure. Le château imposant qui pesait de sa masse sur la cité s’éloignait d’une façon enfin significative ; ils franchirent en trombe la porte sud de l’enceinte, laissée libre d’accès, négligence étonnante de la part de futurs assiégés. Le vindicatif train royal leur emboîta aussitôt le pas, deux flèches furent même envoyées sur les fugitifs sans les atteindre. La course devint forestière, augmentant pour Robin et ses amis l’espoir de résister plus efficacement en quittant le nid du scorpion, mais il était hors de question de mettre pied à terre. Exaspérés par la distance qui se creusait toujours entre leur proie et eux, agacés de leur avoir permis de quitter les faubourgs et nullement gênés par les broussailles, les poursuivant hurlaient pour que le sang ruisselle dans les fourrés. Un chien plus vif chercha avidement la cuisse du chevalier Braillard, qui lui fendit le crâne d’un coup de son épée et lui cassa la mâchoire. La vaste forêt qui s’étendait jusqu’aux confins de la Terre du Petit Lieu ne constituait qu’un relais provisoire vers le salut, la route était bien longue pour atteindre le Fion. Robin s’encourageait lui-même, en estimant qu’il était encore bien installé dans cet âge où le cœur tressaille pour de jeunes épaules, il n’était pas question de laisser au tyran le plaisir de jeter ses deux brugnons d’amour aux pourceaux. Près d’une mare aménagée en lavoir, le sabot de son cheval bouscula un baquet et foula sans ménagement un paquet de linge mouillé délaissé pour la nuit. L’embarras laissa à l’un des chiens au cou garni de pointes le temps de s’approcher, mais le cheval rua efficacement pour s’en débarrasser tout seul en lui brisant les côtes. Le jour se levait peu à peu, apportant sa clarté réjouissante dans les clairières, tout en provoquant dans les fermes éparpillées le réveil des gardiennes de vaches.

 

C’est un troupeau de ces bêtes placides qui, obturant le chemin, obligea au combat. Les bêtes à cornes subirent sans distinction les morsures des chiens et la fermière plongea sur un talus en poussant les hauts cris. Elle fut tuée sur le champ et trainée dans le fossé par un sbire de Vazy Métoian. Pendant ce temps, une flèche rapide blessa Guy Bouyave dans le dos, avant qu’il ne reçoive immédiatement la protection de Yvan de Ladaupe.

 

– Foutrekramouille et par le fer aigu de nos aïeux, laissa échapper Percevalve, en perçant son bonhomme aux tripes qu‘il étala partout, viens t‘en donc avaler ma bonne lame dans ta chierie. Il dégagea son épée avec force des boyaux hideusement révélés.

 

Jeanne Mireille fut prise en traître, on n’osa pour l’instant se porter dans le piège, en dépit du coutelas qui pesait sur sa gorge blanche et frêle. Robin passa une main fébrile sur la nuque de Gauviens, lequel lui frotta le menton en retour, molt antentis et molt li plot, avant d’occire à deux un spadassin surpris. C’est dans chaque engagement que l’on voit ses amis véritables. Les hommes de Mouyse les harcelaient, cherchant à les éliminer en partage en leur mettant le plus possible des bâtons dans les roues. Chacun de ces chafouins voulait sa part de la curée, ne pouvant croire possible une issue défavorable pour eux. Leur sang coula pourtant en abondance dans la futaie, épais et sombre, fuyant dans les lichens pour teinter les arbres proches de ses pleurs incarnats. Sur la mousse rougie reposaient des mains coupées, des oreilles, des pieds et d‘autres choses encore.

 

– Prenez douleur et mort, petits faisans, unz chevalier sui, ce veez, hurlait Robin, en s’agitant comme un beau diable pour engager l’acier brillant, qui prit la vie de deux hommes en un coup de fauchage aussi violent que joliment placé.

 

Ses compagnons sacrifièrent un instant toute prudence pour s’occuper des chiens, ils furent soulagés lorsque la meute fut enfin décimée ; mais Yvan clopinait sur son mollet vilainement déchiré. La plaie de Guy Bouyave saignait beaucoup, sans qu’il ne la sente, il s’offrit même la chance de tuer un soldat du roi d’un méchant coup de poignard. Alors que, en dernière paroles, l’équipe de Robin se voyait finalement survivre au complet, après avoir fait grand carnage au sein des poursuivants ; celui qui retenait encore Jeanne-Mireille reçut à la volée une hache en pleine tête, lancée sans trembler par Percevalve. Le chevalier se réjouit aussitôt de s’être emparée de cette arme en quittant le château. La belle avait trop peur pour penser objecter qu’elle aurait pu également recevoir la cognée dans la face. La victoire finalement acquise, toute la compagnie s’abandonna longuement en étreintes voluptueuses sur les cadavres ennemis, puis l’on félicita la gueuse pour son heureux salut. Sans état d’âme, on perça deux blessés en laissant à d’autres le soin de leur creuser une sépulture. Inutilement, l’un d’eux implora la pitié, au nom de sa cadette qui allait le pleurer. Deux chevaux affreusement blessés par les chiens durent être également achevés. Au cri du ralliement, on rassembla avec peine ceux des défunts, avant de s’enfoncer bravement dans la forêt touffue. Nul ne savait quand ils auraient franchis les vastes frontières du royaume de Mouyse. Quatre heures plus tard, ayant bien chevauché, ils se pensaient moins en danger, lorsque mille têtes à casques surgirent des hautes fougères pour les encercler ; il en avait tant que l’on voyait maintenant s’agiter un véritable corps d’armée. Lorsque tous ces guerriers aux cheveux longs et peaux de biques se redressèrent, quelque chose dans leur accoutrement les donnait étrangers à ce territoire. Brusquement, les gens de Robin réalisèrent qu’ils venaient de tomber sur l’armée auxiliaire des Zgomatix, commandée par leur chef Olbozgeg au grand nez. Cette fois, il était vain de penser à lutter au milieu des bruyères, les moines et Jeanne-Mireille étaient tout bonnement condamnés.

 

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Bondi, manche de pioche !

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:07:31
n°48486232
electro30
analphabête diplômé
Posté le 28-01-2017 à 19:07:35  profilanswer
 

talbazar a écrit :

rien à foutre.


ça c'est de l'argument béton pour un écrivaillon  :o  


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moins y en a, mieux ça marche
mood
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Posté le 28-01-2017 à 19:07:35  profilanswer
 

n°48486269
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 28-01-2017 à 19:12:11  profilanswer
 

rien à foutre.

n°48576971
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 04-02-2017 à 22:56:19  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole. Extrait numéro 42.

 

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Mars la rouge, dômus résidentiel de Nikos Sirkisi, président du Conseil Martien Défédéré, chef élu du congrès et gouverneur absolu de la planète aux sables incandescents. Ce dernier observe le ballet silencieux des quatre hommes accrédités, venus à son domicile pour inspecter l’imposante baie principale de ventilation ; un contrôle de routine qui ne détecte rien d’anormal dans l‘installation. Il s’agit pourtant de la même équipe qui a empoisonné le cénazteur Jilouc Mélenchouille, mais Nikos sait qu’ils agissaient conformément aux ordres des armateurs Jack Giriaque et Steve Magouine, lui-même n’aurait donc en principe rien à craindre. Quand ils auront terminé, le président activera un robot Liliput N.P. 5357, afin qu’il serve aimablement aux technos des canettes de Kawa autochauffantes, de tiède à brûlant, crème de synthèse à volonté. En dépit de la loi martiale qui verrouille toujours le ciel martien, Jolie Goyette a quitté pour un temps sous escorte la planète conjugale, par autorisation exceptionnelle, pour aller rendre visite à une vieille tante issue de la défédération mercurienne. La femme de Sirkisi va donc passer quelque temps au sein des habitants de la colonie spatiale Cocooniet, l’immense double-sphère qui orbite en permanence autour de Mercure. Son mari reste donc seul dans leur immense habitat martien convexe et transparent. La vue extérieure offerte par un horizon largement embrasé est époustouflante et incendie la mini-jungle privative, vers laquelle le propriétaire dirige à présent ses pas. Le déclenchement de la pluie artificielle a rendu les plantes luisantes et augmenté le taux d’humidité ambiant qui fait agréablement frissonner l‘homme d‘état. Levant la tête, il guette le ciel jaune au travers du plafond polarisé avec un brin d’impatience, avant d’apercevoir avec satisfaction le Turbojetski Gilmark X-43 de Suzanne se présenter chez lui. Il donne par implant le bonjour à sa maîtresse, en la laissant garer son engin sur la plateforme dédiée ; puis il lui donne rendez-vous au petit riad ouest près du plaisant bassin en cérami blanc, où un robot Goliath N.Z s’active déjà à leur préparer deux canettes de Coktaouëlle.

 

 Invisible, un groupe de perruches sifflote d’une manière incessante dans les frondaisons à peine ordonnées. L’heure est au repos et la détente, la quiétude rassurante du lieu balaie dans les pensées de Nikos toute réflexion sur les vicissitudes du pouvoir. Le bassin forme un cercle chatoyant de cent soixante cinq mètres de diamètre, entouré d’énormes monolithes moussus de faux grès. C’est là aussi, au pied du bloc triangulaire immaculé en béton celluloïque tracé par le riad peu élevé, que se trouve l’unique plage présidentielle, sur laquelle le couple illégitime se retrouve enfin. Les ombres installées dans le dôme donnent au vaste jardin une résonance un peu magique, sous le jeu des rayons de lumière naturelle qui éclairent Mars à cet instant là. Ils ajoutent beaucoup de grâce à la silhouette dolente de la jeune femme, lorsqu’elle s’installe sur le confortable sustentateur de son amant. Défiant la gravité et sans but précis, la couchette invisible les envoie dériver tous deux au-dessus de l’eau calme, canettes en main. On est dimanche, Suzanne revient tout juste d’une fête délirante et matinale donnée à l’issue d’un concert ravageur des frères rockers de son éminence, au cours de laquelle elle a religieusement avalé sa pilule de coïne. Les sœurs en porte-jarretelles étaient particulièrement dynamiques pour enflammer la cérémonie, ponctuée d’excellents riffs endiablés. La pieuse ingestion rend encore pour quelques heures les yeux de Suzanne particulièrement brillants. Les techniciens signifient finalement leur congé, Nikos leur souhaite une bonne journée à distance sans retourner les voir, il est à présent seul chez lui avec la fille de Steve Magouine. Elle a laissé couler ses longs cheveux qui enjolivent agréablement sa belle nudité, en lui cachant les seins.

 

– Je viens d’apprendre que la Cour d'appel en troisième trajet viens de classer la mort du cénazteur Mélenchouille en simple accident domestique, mon père n’est plus soupçonné. Je te remercie pour ta délicate intervention.

 

– Il m’a fait réélire à la présidence, je lui dois bien ça.

 

– Et du côté de la Cour Galactique ?

 

– La loi martiale justifie beaucoup de choses sur les événements martiens. Les pelleteuses doivent se remettre au boulot sur la planète rouge, c‘est surtout ce que désirent les différentes défédérations, sous la pression des armateurs. Ton père lui-même perd un tas de fric en finançant notre armée et ses cargos sont pratiquement tous à l’arrêt. D’après ce qu’il m’a dit, le Granny on pot est passé de un million de tonnes d’hallunium par trajet à zéro. Seuls ses transbordeurs sous licence vénusienne lui permettent de faire encore quelques bénéfices. Le Turbojetski qui t’a porté ici est tout de même le dernier-cri de la production terrienne, tu peux remercier Steve pour qu‘il continue d‘offrir à sa fille des cadeaux aussi somptueux.

 

Elle accusa visiblement le coup de se voir traiter aussi brutalement de fille à papa.

 

–  En tout cas, si les urines sont claires concernant cette regrettable histoire de meurtre, c’est très bien. Le contraste de ses lèvres tellement sensuelles en train d’articuler des propos aussi graves trouble tout de même un moment son vis-à-vis. Mais des fois, j’ai l’impression que tu me prends pour une simple gosse de riche qui baise avec un président.

 

– Il y a tout de même un brin de vérité là-dedans. Il embrassa son épaule tiède, en réalité, elle le rendait marteau.

 

– Ne fais pas l’imbécile, fit-elle en s’écartant un peu, Jolie est parfaitement au courant. Elle se sent forte de lui déclarer ça en face, en train de satisfaire sans doute une vengeance idiote. Faisant brusquement diversion, un bip sonore éloigne le sustentateur qui s’approche trop près d’un massif de rares plantes à venin originaires des collines rocheuses de 3289 KZ-Dalida. Sirkisi garde pensivement le silence pendant la manœuvre.

 

– Je ne pense pas, non, je la connais bien.

 

– Tu es naïf, mon vieux. Elle sait, pour nous.

 

Quittant complètement le bassin, l’agréable envolée les porte en randonnée dans la jungle elle-même, au milieu des oiseaux libres cette fois parfaitement visibles. Sous les palmes entrecroisées, le ciel de Mars en revanche se cache aux regards du couple. Ils s'élèvent alors doucement en hauteur, lorsque la densité végétale l’autorise. Leurs canettes sont vides, c’est le moment qu’ils choisissent pour faire tranquillement l’amour, jouissant du surcroit d’émotions que leur offre l’apesanteur, sans parler de la coïne circulant dans les veines de Suzanne. Elle hurle effectivement d‘extase, visiblement enchantée de sa petite dérive aérienne. La couchette volante les ramène ensuite docilement sur le seuil du riad, alors qu’un rob signale en implant la venue d’un visiteur arrivé par le sol, dans un petit Atomjet 58 autorisé. Le lever de soleil est à présent achevé, laissant la place à un ciel rosé sans nuages. On perçoit tout de même Phobos qui entame sa première orbite, sur les trois que le satellite naturel effectuera dans la journée. Pendant que le véhicule pénètre dans le dôme, Nikos demande à Suzanne de s’éclipser un instant, car il désire rester seul pour parler avec le nouveau venu.

 

– Quand je te dis que tu me prends pour une vulgaire pornifieuse, je ne suis plus une gamine, quand même ! Elle l’embrasse pourtant tendrement, avant de s’éclipser quelquepart pour aller admirer la vue panoramique, du haut d’un balcon tournant.

 

Le type à l’allure raide possède un entrainement militaire, cela saute aux yeux.  Chacun de ses gestes semble contrôlé, comme si la moindre action inutile risque de déraper vers une néfaste gesticulation stérile. L’obligeant Goliath N.Z lui sert une canette de tchaï rouge glacé, puis l’alerte poliment sur le taux de radiations un chouille trop élevé qu’il vient d’enregistrer au passage, après son aimable scan de courtoisie. Voilà ce que l’on peut craindre en passant trop de temps à se ballader sur des pistes étroites et dangereuses, sans écouter son scaphandre. Eludant sèchement la réponse de son hôte, Sirkisi souhaite le bonjour à l’officier de renseignement qui lui fait face.

 

– Gavarit Maskva, Camarade oberleutnant Frank Sonotrou, le Congres est avec vous. On m’a dit que vous aviez récemment discuté avec les pilotes de l’Umlaufbahnjagd revenus de l’éperon d’Orion ?

 

– Oui, les Trois Shaleclairs Thunder Flash X-40 sont en effet rentrés. Ils confirment la perte du So long sucker et la mort certaine de son équipage, auquel il faut rajouter les otages Emeline et Basile Decock, et l’anéantissement de leur fusée de tourisme. Les chasseurs ont fourni des explications extrêmement précises sur la présence d’un trou noir responsable de la désintégration désastreuse du transbordeur.

 

– Un accident regrettable, effectivement. Par ailleurs, rappelez-vous, vous agissez à présent sur mon commandement unique, l’état major n’a pas à être informé de la mission secrète que je vous confie, le sort de la guerre en dépend. Dorénavant, ne parlez plus au militaires et vérifiez souvent que vous n‘avez pas de puce importune implantée. Le général Digoule vous empêchera d’agir en vous tuant, s’il vient à connaître les ordres que je vous ai donné.

 

– Monsieur le président, je trouve mon indemnisation dérisoire. Le grand type lutte un court moment en s’agaçant contre l’insistance du robot domestique, parce que la machine lui propose une inspection sanitaire complète par contact direct, compte tenu du taux de radiations qui dépasse un peu la norme.

 

– Ah oui, l’artiste prend la parole ! Je suis en train de vous parler de l’avenir de Mars, oberleutnant.

 

– Et moi, monsieur le président, je vous parle du mien, parce que ma mort sera peut-être au rendez-vous de la petite virée que vous me proposez. Entre les bidasses et les indés, le couloir de survie est plus que serré.

 

– Ecoutez-moi bien, connard, si le job ne vous convient pas, pensez à changer au plus vite de métier et faites-vous fermier. Vous êtes suffisamment payé. Il nous faut agir en devançant la saison des tempêtes, avant qu’elle n’envoie Fanch Yoland et ses troupes se terrer pour un moment dans leurs putains de galeries. Tout ce que j’attends de vous, c’est de l’approcher personnellement pour lui soumettre en main propre notre fameux document. Je vous ai d’ailleurs convoqué ici pour vous confier ce traité ultraconfidentiel, que l‘autre mineur approuvera s‘il n‘est pas trop con, du moins je l‘espère. Et si jamais vous croisez par hasard le taulard psychopathe Flash Gourdin, dégommez-le sur le champ, c’est un ordre. Je ne plaisante pas, abattez-le de suite, sans lui laisser le temps d’un battement de cil. Nul ne sait s’il croit toujours sur parole les souvenirs qu’on a bien voulu lui laisser. Il s’est retourné contre nous, mais si son implant se réactivait pour l’obliger à poursuivre sa mission, il commettrait un carnage dans le camp de Yoland, ce que pour notre part nous voulons désormais éviter à tout prix, bien entendu. Le congres que je préside ne baisse pas les armes, mais désire se montrer pacifique. Le mieux est donc que le cinglé dangereux dont je suis en train de vous parler disparaisse au plus vite, car il est incapable de la moindre réflexion sociale ou politique. Les rancoeurs sont très fortes dans les têtes rebelles, ils revendiquent plus que jamais leur attachement à leur planète et un patriotisme martien à tous crins. En ma qualité de président, je pense, approuvé par l’ensemble des cénazteurs et des administrants de cette planète, que leurs cratères sont suffisamment à feu et à sang. Mais méfiez-vous, Flash Gourdin vous oblige à chasser le gros gibier si l‘on s‘attaque à lui. Partez tranquille, les médias galactiques ne risquent pas de se braquer sur vous.

 

Frank Sonotrou ne répond rien, il hoche de la tête et fait semblant de ne pas apercevoir la silhouette impeccable de Suzanne qui l‘observe avec insistance au balcon mobile du riad, en se disant juste qu’elle aurait pu se montrer plus discrète, la jolie classieuse bis du président. Que n’aurait-il pas dit en l’entendant hurler de plaisir au cours d‘un pornifiage illégal, avant son arrivée ? des cris poussés si fortement à dix mètres du sol qu’ils avaient fait fuir dans les Hibiscus écarlates de gracieux oiseaux du paradis.

 

– Monsieur l’oberleutnant Sonotrou, si vous le désirez, je suis à même de procéder à la mesure adéquate de radioprotection pour assurer immédiatement votre décontamination.

 

Le Goliath N.Z est insensible à l’injure reçue en réponse de la part de Frank, puisque le serviteur en bakélicuivre sait qu’il aura de toute façon le dernier mot sur la situation. Déjà, un clignotement discret annonce la mise en route imminente de ses instruments thérapeutiques ; le robot s’efforçe en plus à prendre le ton juste, pour que l’agent secret veuille bien s’allonger sans manière sur la sustente bientôt tenue à disposition par le Liliput N.P. 5357 tout proche. Un assistant exemplaire qui se dirige effectivement vers eux en silence. Ravi de laisser Franck se faire décontaminer tout seul avant qu’il ne reparte faire son boulot, Nikos est rapidement sur le balcon, à picorer les fesses de Suzanne comme un goret.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:12:12
n°48654895
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 11-02-2017 à 11:54:16  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La Jet larguée. Extrait numéro 16.

 

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Bobby Fiermongol, Président Directeur Général de la compagnie aérienne Petro Jelly, se confrontait à deux problèmes. Le premier était le crash probable d’un de ses appareils, le deuxième résidait dans le souci de trouver dans sa commode une cravate bien assortie à son costume, en vue de sa prochaine conférence de presse. Il en étala sur le lit un bon nombre de toutes les couleurs, la plupart imprimées de petit avions, certains de ces motifs étaient soigneusement brodés sur un tissu chatoyant. En même temps qu’il observait avec une intense réflexion les petits accessoires de mode parmi lesquels il devait faire un choix difficile, il jetait un œil sur la télé, où une chaîne d’infos relatait en boucle ce qu’on savait de manière certaine du vol PJ 612 Paris-Kilapile tragiquement disparu. Déjà, le contrôleur aérien Tommy Boomerang venait d’être mis en examen sur dénonciation anonyme pour port d’uniforme non autorisé. Ensuite, Mme Océane Eight, la femme éplorée du commandant de bord Steven Eight, apportait des précisions capitales sur la manie de son mari de toujours se laver les mains après avoir été aux toilettes. La pauvre essayait de répondre de manière convaincante aux questions, mais présentait aux caméras ravies un visage ravagé par une intense douleur. Egalement appelé à témoigner, un fervent défenseur des requins s’insurgeait avec force contre l’agression d’un long-courrier au sein de leur habitat naturel ; vigoureusement soutenu par l’association des droits des chiots de chenil Puppies Rights Watch. Ce groupuscule venait en effet de perdre tragiquement la majorité de ses militants dans l’accident et réclamait une compensation financière immédiate de la part de la Petro Jelly ; sans même attendre les conclusions de l‘enquête. Optant pour une cravate prune ornée d’une escadrille de vieux coucous, un Breguet XIV, un Macchi M.5 et un Sopwith camel, Bobby Fiermongol changea de chaîne. Celle-ci zoomait sur la dernière Une du magazine de mode Belly Button, remplacée par le visage de sa directrice Marthes Lagourdass, barré d’un bandeau noir, parce qu’elle était portée disparue avec l’avion. Remanié en urgence, le sommaire du numéro du mois annonçait également un porte-folio exclusif, incluant les meilleures photos en double-page des mannequins Cindy Laurel et Jenifer Hardy, qui accompagnaient Lagourdass pour ce dernier voyage. Une autre chaîne, plus culturelle, entamait un reportage détaillé sur l’île perdue de Badigooince, ancienne base secrète russicaine que l’appareil semblait vouloir rejoindre avant de devenir muet. Selon les spécialistes intervenant dans les commentaires éclairés de la voix-off présentant l’émission, les recherches pour retrouver les restes de la carlingue devraient prochainement se concentrer sur cette zone démilitarisée. Investigations rendues hélas très difficile à cause d’un isolement complet de cette région du monde. Un secteur maritime absolument délaissé en raison de son éloignement extrême, en dépit du fort potentiel de l’île de Badigooince pour ses ressources naturelles et son positionnement prometteur sur le développement, plus pacifique, du marché local de la pêche à pied en moyenne vasière.

 

Le mystérieux silence de l’appareil contrastait avec les violentes protestations de la Russique, soucieuse de voir soudainement son ancienne installation désaffectée sous le feux des projecteurs médiatiques internationaux. Les fuites publiques concernant la divulgation des coordonnées de cette base consistaient dès à présent, selon le gouvernement russicain et son président Bronislav Enjoyourself, en une violation flagrante des accords diplomatiques établis entre dictatures par traités bilatéraux. Puisque entre pays pratiquant la torture, on se traitait couramment. Egalement interviewé, le président par interim de la Gerbique, Papi Boum, rappelait les efforts déployés il y a quelques temps par la composante Wallans de son pays, malgré une opinion contraire des gens concernés, pour l’intégration globale de sa population Flomonde et son déplacement définitif vers Badigooince, en remplacement des indigènes locaux de cette île. Un peuple de coupeurs de têtes officiellement décimé dans les années cinquante par la Russique, avant l‘installation menaçante de ses missiles, grâce à une grave épidémie mortelle améliorée de rhynite des bananiers. Au nom de tous les Gerbes, Mr Boum continuait de déplorer que le transfert migratoire n’avait pu avoir lieu, tout simplement parce que le propriétaire officiel de l’île l’avait en son temps stupidement refusé, alors qu‘il abandonnait définitivement cette base. Bobby Fiermongol boutonnait la braguette de son pantalon en soie naturelle, l’œil toujours rivé sur la télévision, pour regarder un ethnologue spécialiste des populations à poil et à plumes retracer longuement l’histoire de cette terre éloignée. Il rebondissait justement sur les aborigènes de l’île exterminés, les Gouroungourous, connus par les scientifiques pour avoir été autrefois de fervents adeptes du culte du cargo. Un piratage ancestral des avions égarés qui leur permettait de survivre dans leur jungle sans rien branler, un capital humain inventif qui n’autorisait pas de qualifier les Gourougourous comme une société primitive. Le culte du cargo qu’ils vénéraient sur les plages autour des épaves d’aéronefs écrasés n’étant somme toute qu’une sorte d’observation participante de leur part, utile à une évidente recontextualisation des objets pillés. Ainsi du glissement sacré d’une mousse à raser New-Yorkaise dans le pagne en rafia d’un ritualiste analphabète pour lui servir d‘étui pénien. Seule une pandémie meurtrière avait eu raison de ce piratage sacralisé au plus haut point, par un peuple mâcheur de racines en train de secouer constamment ses hochets guérisseurs, d’ailleurs visiblement parfaitement inutiles, puisque tous ces primo-arrivants avaient en définitif disparus.

 

Bobby Fiermongol, lui, n’avait pas dix mille ans devant lui, mais, enfin prêt, il s’autorisa à rester cinq minutes devant une autre chaîne. Là, un gros plan sur le commandant Walter Closed, pilote de la compagnie Well Transit, le montrait en train d’expliquer avec force détails les manœuvres employées pour effectuer un bon fuel dumping. Un délestage de kérosène moins tabou en aéronautique que le largage de merde humaine bleue sur les draps en lin immaculé en train de sécher au balcon de la ménagère de cinquante ans environ. Closed affirmait justement avoir été contraint au fuel jettisoning par le commandant Steven Eight lui-même, afin de rendre la vue à son appareil aveuglé suite à une collision aviaire. Il précisa toutefois que les ultimes conversations avec le pilote du PJ 612 PK et le sol indiquaient qu’il avait ensuite percuté un poney mauve à 5.000 mètres d’altitude au-dessus de la Mochkomkudite et que ça, ce n‘était plus son problème. Derrière lui, une hôtesse en uniforme de la Well Transit, Cathy Loublié, grattait malicieusement la nuque de l’officier en approuvant toutes ses affirmations. Dans leur dos, un militant du Puppies Rights Watch profitait de la caméra pour agiter opportunément une pancarte artisanale appelant à la sauvegarde des colibris. Fiermongol éteignit la télé et s’apprêta à quitter son logis luxueux, en claquant la porte sur un mouvement d‘humeur. La Well Transit par ci, la Well Transit par là, la concurrence allait bien évidemment se vautrer à son aise sur les déboires de la Petro Jelly. Malheureusement, le président de cette dernière savait qu’il n’y avait guère de doute pour espérer que son zinc perdu soit un jour retrouvé, afin de croquer le beignet de la Transit en fournissant la preuve d’un vice-constructeur. S’il le pouvait, au lieu de se rendre sous le feu inconfortable des projecteurs, Fiermongol se disait qu’une simple ballade au bord de l’eau dégagerait pour lui un exquis parfum de luxe ultime.

 

La présentation du drame aux actionnaires de la compagnie fut encore plus houleuse que la conférence de presse et son effervescence journalistique. Au sein du siège de la Pétro Jelly, chacun de participants se mit tour à tour à développer les conséquences de ce crash, notamment financières, argumentant, théorisant sans fin, se contredisant en se coupant violemment la parole, refusant de justesse de trop en dire sur ce qu’ils perdaient eux, personnellement, pour avoir misé sur ce segment du transport, alors qu‘on voyait bien que le secteur aérien pouvait se montrer dangereusement instable. En tout cas, terminé pour le moment le projet pharaonique de financer la construction des futurs gros-porteurs sans pilote à train unique. Bobby Fiermongol tapa un grand coup sur la longue table en acajou massif, en rappelant qu’il était le maître des lieux, puis il se pencha pour éviter la cafetière qu’on lui balançait en retour. Pourtant, il fallait bien conclure qu’on avait bel et bien affaire à une coque perdue, ce qui coûtait déjà un max. Finalement, on devait à tout prix espérer qu’elle ne soit jamais retrouvée ; les assureurs ne pouvant s’appuyer sur une expertise de l’épave propre à expliquer l’accident, en mettant en cause la compagnie pour minimiser les indemnisations. Un certain lobbying devait aussi être rapidement activé dans les hautes sphères du pouvoir, pour éviter que le gouvernement ne braque la Russique, sommée de financer exclusivement les recherches, transformant ainsi la tragédie en bataille politique.

 

L’un des actionnaires se mit à brandir un document que la presse ne devait jamais découvrir, il s’agissait d’une note issue des archives internes de la Petro concernant ses équipages et son personnel aéroportuaire, établie au nom du steward Steward Steward et du copilote Jack-André Tyler. La feuille faisait état de leur implication dans une orgie sous mescaline, alors qu’ils se trouvaient en escale à Buenos Aires. On avait également plus d’une fois surpris le dit Steward en train de copuler en plein vol avec l’hôtesse Shirley Cebiène. Le danger sur le scandale qui ne manquerait pas d’agiter les familles des victimes provenait du fait que les deux hommes cités faisaient précisément partie de l’équipage du PJ 612 PK. C’était toute l’autorisation d’exploitation qui se trouvait en jeu. Une biture à coup de cocktails d’Agua Valencia au pied d’une passerelle avant le départ faisait plutôt sale, un pilote la main dans le slip d’une hôtesse et qui pète un boulon en plein vol en tirant sur le joint enlèverait tout confiance du public pour la Petro Jelly, en signifiant à court terme le glas de son avenir. En conclusion, il y avait dans cette affaire pas mal de fric à perdre. Il ne serait pas non plus inspiré d’incriminer le constructeur, en poussant plus avant les investigations sur place. Pour la bonne santé de la Petro Jelly, il devenait ainsi bien évident pour tout le monde présent dans la salle que cet avion ne devait coûte que coûte jamais être retrouvé. Il s’était simplement perdu dans l’océan inaccessible, messieurs et mesdames, ni vu ni connu, vous pouvez compter sur nous pour qu’on vous embrouille.

 

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Bon week-end et merci, les gars, les filles.

 

Et surtout, tournons tous en boucle ce slogan admirable : Rien à foutre !

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:19:01
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talbazar
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Posté le 12-02-2017 à 21:43:29  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith. Extrait numéro 35.

 

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A la cinquième heure de garde à vue, Sisco Matteï commençait à péter les plombs. Gilbert Tricard venait de lui bricoler une petite visite impromptue à la Rose Noire, en plein début de spectacle de Dizzy Pousse-Loupiote. Une nana savoureuse qui donnait bonne réputation à l’établissement, en faisant claquer chaque soir sa voix d‘or dans les aigus, comme personne. Si elle chantait bien, elle était en plus d’une pudeur louable. En tout cas, avec ou sans cette chanteuse la Rose noire n’avait rien d’une modeste bicoque sur la plage ; l‘endroit abritait plutôt un casino luxueux. Grâce à ce club, Sisco pouvait faire croire à tout le monde qu’il cherchait à trouver sa place dans la vie sans passer par les braquages. Le truand repenti se tenait assis devant le flic au contraire debout, qui lui parlait des trois poupées qu’un désaxé avait tuées, en faisant preuve au passage d’une bestialité abjecte.

 

– Je suis bien frustré, Matteï. Au sujet de ces beautés perdues, je n’ai rien à me mettre sous la dent. Pour le moment je creuse le sujet, je creuse et je trouve pas grand chose.

 

– Alors tu te dis, tiens, je vais me rencarder chez ce bon vieux Sisco.

 

– Une idée embryonnaire, au départ, note-le. Mais bon, si tu voulais bien accoucher maintenant, nous gagnerions certainement du temps.

 

– La seule chose que je vais te raconter, c’est que la cellule où je moisi depuis cinq heures est pas trop propice à l’hygiène. J’ai vu des traces pas claires sur les murs.

 

– Je vais te dire un truc, Sisco, quand tu sors de taule après quinze piges, ça t’insuffle un brin de modernité en traversant la rue, crois-moi. Ah merde ! J’oubliais que t’étais au courant depuis belle lurette, excuse-moi. J’en vois tellement passer des types comme toi dans ce bureau que, parfois, j’ai tendance à les confondre.

 

– Arrêtes de me sermonner, Teddy la Fouine, j’ai encore un bon bout d’innocence à garder.

 

– T’es un besogneux, Sisco, c’est certain, mais tu donnes plutôt un mauvais exemple aux gamins. Je te prédis une fin sombre et meurtrière. Quand on plonge la tête la première dans les rouages de ton job, on termine fatalement un jour en steack haché.

 

– Bof, c’est juste une question d’état d’esprit et d’artillerie, avec des mecs de confiance  pour s’en servir et la porter. Et puis, tu peux citer le nom d’un seul mec venu au monde que son destin n’a pas un jour rattrapé ?

 

– Ouais, enfin bon, faut croire qu’on a pas tous le même cerveau, ni la même manière de s’en servir. Ni les mêmes amis, d’ailleurs, tu ne seras jamais mon pote, Matteï.

 

– Tu vas me faire croire que toi, petit flic de mes deux, t’es un type positif et moral, à d’autres ! Tu gaspilles du papier, j’ai rien à te dire.

 

– Ouvre quand même le sas sur ce que tu sais du Tripoli et de Blanche Pearl. Des infos que j‘ignore encore, par exemple, sinon je te colle sous les verrous. N’oublie pas que j’ai toujours dans mon placard de quoi te condamner lourdement. Tu veux que je ressorte maintenant tes œuvres de jeunesse qui ne sont pas prescrites ? Qui a tué aussi salement les trois minettes que tu venais d’embaucher, hein, t’as pas cherché à le savoir ?

 

– Tu fais franchement ton cow-boy, là. Je croyais pourtant qu’on avait tous les deux bel et bien verrouillé mon immunité par contrat, si je vous rendais visite de temps en temps.

 

– Tu vois ce manuel ? Je ne vais pas déverser sur ta tronche des tonnes d’allusions. Il fait le poids d’une brique qui tomberait sur ta gueule du cinquième étage. Mais ne t’inquiète pas, hein, ça donne aux joues des couleurs chaudes et pétillantes. T’es un peu pâlichon.

 

– T’es un trésor de poésie, Gilbert, mon amitié pour toi reste indéfectible. Laisse tout de même un peu tomber le passage en force, et puis je n’aime pas les ambiances carcérales, comme tu l‘as dit, j‘ai déjà largement donné. En plus, je vois bien que tu es d’une nature furieuse, mais tu pourrais peut-être te faire du mal, j’ai les molaires réputées en béton. Qu’est-ce que tu veux savoir de si important, qui pourrait justifier le fait que la Rose Noire attend avec impatience le retour de son cher patron ? Tu veux savoir quoi, au juste ?

 

– Je t’ai déjà dit.

 

– Gros Bill et Sugar Daddy sont venus dans mon bar, juste avant que les mômes ne se fassent décimées.

 

– Et tu ne m’en as rien dis ?

 

– Je vais pas non plus médiatiser mes petits renseignements. Faut bien que j’en garde un peu sous le coude, la preuve. C’est juste pour dire que ces deux là, on les voyait plus jamais en ville, mais ils ont longtemps bu leurs whiskies gratos au Tripoli, autrefois, si tu vois le rapport.

 

– Donc ils ont pointés leurs miches à la Rose Noire ? Et en sirotant leur Black Russian, ils causaient de quoi, d’après-toi ?

 

–  Même s’ils étaient un brin excités, surtout le gros, c’était pas pour eux la veille d’un matin de gueule de bois. Et ils buvaient plutôt des John Collins. Tu crois peut-être qu’ils m’ont choppé à la roulette pour me porter vers mon bar, en me disant qu’ils avaient un truc à me dire pour que je te le répète ?

 

Du coup, Teddy la Fouine tira brusquement le frein à main sur ses menaces de parpaing dans le pif, pour offrir au contraire aimablement un cigare à Sisco Matteï.

 

– Tu vois, je me disais que depuis qu’on se connaît, tu navigues depuis toujours entre deux eaux et tu manges à tous les râteliers, mais ne me prend pas pour un con, toi et moi, on sait que tu balances surtout dans ton propre intérêt.

 

– Tu me les brises, Gilbert Tricard, mes paris sont légaux !

 

– Du calme, Sisco, t’as peut être eu le cigare, mais si je veux, t’auras pas le feu. Rappelle-toi bien, je n’ai qu’un mot à dire pour te coffrer.

 

– Les deux tas de merde parlaient du sénateur Rupin et de son financement pour la location d’un cargo. Ils déconnaient sur Hawaï et les gonzesses en paréo.

 

– Bob Oldson, Perry Gorret, Bonno Landru, Carlos Glaçon, Le Baron, Borz Balkirie, Edouard La Hache, La Teigne, Sugar Daddy, Prince Ahmed, Triple Shot, Jordi Longarçon, Joe Main Chaude, tous ces mecs sont morts, Sisco, il y en avait des plus carrés que toi.

 

– Je sais, quelques uns par les actions de grâce d’un cinglé de ta boutique nommé Martin Smith. Et alors, tu veux que je pleure pour les familles endeuillées ? Et moi qui te prenais pour un dur ! Bon, c’est tout ce que je peux dire, Teddy, je te le jure. Prolonge pas, ça sert à rien.

 

– Tu penses que tes buveurs sont revenus en ville pour dessouder les filles, hein, c’est ça ?

 

– C’est pas moi le flic.

 

– Qu’est-ce qu’il vient faire là, le sénateur Rupin ?

 

– Il vient sucer ta bite, Teddy, laisse-moi partir maintenant.

 

Guy Ness joua le collègue tonitruant en sifflant la marseillaise, perché sur l’épaule accueillante de l’officier Angèle Deyord. Il était née une rapide complicité entre le perroquet et la pulpeuse policière, à tel point que l’oiseau l’accompagnait chaque jour au boulot. Teddy ordonna sèchement à Guy d’arrêter son cirque.

 

–  Ok c’est bon, ça va, fit le gris du Gabon, moi je te rappelle que permis officiel de tuer ne veut pas dire permis de draguer sa collègue sans limite.

 

–  Il n’a pas tort, ton piaf, ajouta Sisco Matteï, levant ses menottes pour pouffer de rire ouvertement.

 

– Toi tu te barres, lui ordonna Gilbert. Bois un café avant de t’en aller. Les mots pouvaient mentir, mais pas le regard méprisant qu’il lança. Toi et moi, on reprend l’état de grâce jusqu’à nouvel ordre. Juste un conseil, si j‘étais toi, à tout hasard, je transformerai la Rose Noire en bunker. Ta petite bande de casseurs, elle fera pas le poids devant Gros Bill, si jamais l‘envie lui prend d‘aller chez toi faire un poker. Pour ce mec là, ta fin c’est toujours le moyen.

 

– Au revoir La Fouine, ça me touche que tu m’offres un kawa. Je vais quand même te dire un truc que tous les flics devraient apprendre par cœur : on ignore toujours la véritable histoire des gens qu’on rencontre dans la rue. Si ça se trouve, Gros Bill, il bigote comme une bonne sœur.

 

– Et ben si jamais tu apprends qu’il rentre au couvent, fais-le moi savoir tout de suite, puisque tu sais où me joindre.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:22:45
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Posté le 19-02-2017 à 14:57:16  profilanswer
 

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Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou - extrait Numéro 24.

 

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Désormais veuve, Ernestine se tasse. Depuis qu’elle a réussi à rayer son formica en coupant du pain, elle ne croit plus guère au miracle des modernités. Comme les autres et en dépit de l‘interdiction du collège, sa petite fille Angèle porte la minijupe et s’imagine finaude à montrer ses guiboles de gamine glissées dans des collants, des bas qui tiennent tout seuls. Sous son édredon moelleux posé sur des draps brodés, Mémé ne dort plus guère, puisque chaque bruit la réveille, en l‘obligeant à allumer l‘interrupteur en poire installé à la tête de son lit. Parfois, elle allume la radio en sourdine pendant une heure où deux, c’est de cette manière qu’elle prend connaissance du forcing pathétique des Anglais pour intégrer le marché commun, en dépit du va-te-faire foutre résolu de la France. Le peu de sommeil d’Ernestine se trouve parfois perturbé par de déplaisants cauchemars, à cause des boches qui croupissent dans son puits depuis la guerre 39. Elle fait le ménage et cherche à faire table-rase du passé, voilà pourquoi elle a collé dans une décharge une vieille caisse en bois pleine d’obus datés de septembre 1918, cadeaux qu’un artilleur américain fit en ce temps-là à pépé Alcyme. Celui-ci les avait donc précieusement cadenassés dans la grange depuis, en souvenir de l’offensive Meuse-Argonne. Il disait toujours que ça serait l’idéal pour faire sauter les hippies une bonne fois pour toute. Il avait même fait péter une de ces munitions au milieu d'un grand feu, un fois, en 1926, pour dessoucher avec succès un gros chêne. A dire vrai, Ernestine en a soupé de ces sanglantes et tragiques histoires du vieux temps. Alcyme et Léon pouvaient bien autrefois faire ensemble les marioles à l’apéritif pour se féliciter d’en être revenus entiers, ils avaient bien finis par s‘en aller tous les deux au ciel, eux-aussi. Assise devant sa cheminée, elle se pince les lèvres au souvenir des embrasements du siècle et les flammes pourtant domestiques du foyer l’éclairèrent brièvement d’un rougeoiement saisissant. Son chat s’échappe de la pièce sans raison, en miaulant.

 

L’explosion qui volatilisera la jaille sauvage à la sortie de la ville, deux jours plus tard, s’entendra au moins jusqu’à Pleurotte les Bois. Mais, heureusement pour mémé, on ne pourra ensuite déterminer avec certitude l’origine du désastre, en fouillant la fresque dantesque formée par le terrain mitraillé de rats crevés et complètement pulvérisé. Un dernier bye-bye sournois des fridolins de 14, voilà tout. Ernestine brûle tranquillement le témoignage de vieilles photos jaunies où ne sourient en continu que de chers et regrettés cadavres. Si l’on y songe, les photos poursuivent toujours le même but et cherchent en réalité à nous tuer avant l’heure. Sa propre mort laisserait Gaston et Angèle à nouveau orphelins, cette constatation peint une certaine grisaille dans ses pensées, déjà moroses. Perdue malgré elle dans les limbes du temps, à cause de tout ces clichés en noir et blanc qu‘elle étale maintenant devant elle, la vieille arrête son geste sur un Kodachrome, photo cette fois en couleur qui représente un bel homme en blazer et babouches, avec écrit au crayon de bois sur le verso le nom de l‘individu : Emile Pertuis. Témoin d’une époque pourtant récente et malgré tout presque oubliée, ce portrait provoque une résonance particulière dans la mémoire de la grand-mère. Elle fouille plus profond dans sa caisse parmi un tas de lettres froissées, dont certaines s’en vont aussitôt alimenter la flambée. Puis elle trouve enfin ce qu’elle cherche, en sortant du lot une carte postale plus récente qu’elle sait d’importance, un petit carton du commerce timbré en 1963 et qui représente sur son recto la tour Eiffel. Derrière ses lunettes rafistolées, Ernestine contemple attentivement les petites lignes griffonnées près de la signature énergique, sous quelques phrases banales de soleil radieux brillant sur Paris. Ces mots tracent en fait l’adresse la plus récente d’Emile Pertuis.

 

Ses deux reliques en main, Ernestine fait craquer ses os pour grimper l’escalier qui la mène vers la chambre de Gaston. Chaque marche conquise lui apporte son lot de regrets et d’espoirs avortés. Bien sûr que son propre fils René avait été le cocu aveugle de la Caroline, seul le mari feignit jusqu’au bout de l’ignorer pour assumer ensuite dignement sa fausse paternité de Gaston. Avant hélas de périr tragiquement trot tôt dans les flammes avec sa femme, en léguant leur fils à la garde de ses grands-parents. En s’approchant de la porte qui ferme celle d’Angèle, Mémé Boudiou entend Françoise Hardy chanter en refrain qu’elle ne sait plus où est la maison où elle a grandi, « babalabadam, je reviendrai un jour, un beau matin parmi vos rires, oui, je prendrai un jour le premier train du souvenir ». La grand-mère passe en l’ignorant, pour aller frapper doucement à celle de son petit-fils.

 

– Gaston, je voudrais te parler de quelque chose de grave. Est-ce qu’elle n’aurait pas les yeux un peu humides, au moment de lâcher cette requête ?

 

Dans cette chambre où des albums de Tintin traînent toujours par terre, Ernestine remarque en douce une revue de filles nues et perdues, que Gaston a probablement acheté chez Marité. Ben oui, son piou-piou est pratiquement un homme, maintenant. Elle ne sait par où commencer les phrases qu’elle veut dire, elle est tout d‘un coup prise d‘une immense fatigue. Dans la chambre voisine, la voix de France Gall succède à l’autre, Ernestine imagine qu‘Angèle est une fois de plus devant sa glace, en train d’essayer de se maquiller comme Stephane Audran dans Le Scandale, de Claude Chabrol. Oui, décidemment, ces deux oisillons mâle et femelle qu’elle héberge ne sont plus vraiment des enfants et se préparent sans doute à prendre leur envol.

 

– Alcyme et moi, nous t’avons toujours faire croire que ton vrai père, c’était le facteur du Troulbled. En tout cas, je sais que c’est dur de te dire ça, mais c’est certain, c’était pas mon René.

 

– Alors, ça n’était pas non plus ce postier qui a disparu de la région à ma naissance, après avoir été confondu par les P & T puis arrêté par la police, pour incendie de courrier dans le cadre de sa mission publique ?

 

– Non.

 

– Tu le connais, le vrai ?

 

– Oui.

 

Gaston semble très attentif et désormais, lui parler se montre plus facile. La musique s’arrête brutalement dans la chambre d’Angèle, ce qui trahit que la punaise écoute contre la cloison, c’est sûr. La réalité la pose en demi-sœur, mais ce statut ne peut guérir son obsession actuelle d’attraper une maudite varicelle en allant répéter sa pièce de théâtre. Elle n’est pas plus que ça obsédée par son passé et encore moins par celui des autres, seul compte son propre futur sous les projecteurs de Los-Angeles. Entre les deux gosses Boudiou, il n’y eut cependant jamais, d’après nos propres archives, la moindre discorde fraternelle pour remettre en question le lien qui les a toujours fortement unis.

 

– L’Apocalypse est peut-être proche, j’en sais rien, reprend Ernestine. Mais je ne peux pas te laisser plus longtemps dans l’ignorance, en quelque sorte victime d’une double-peine ; tu as le droit légitime de connaître ton père, à présent. Il s’appelle Emile Pertuis, il vit à Paris, le voici. C’était un grand ami de ton père, l’amant de ta mère et nous n’avons jamais vraiment rompu le contact ; il prend des nouvelles et envoie un mandat de temps en temps pour vous deux. Il préférait que tu n’en saches rien, par égard pour le secret de Caroline, ta mère. Elle dépose avec un geste lent la photo sur le lit.

 

Gatson détaille le portrait, ce nouveau papa là ressemble beaucoup au duc d’Edimbourg, les cheveux un peu roux largement et férocement plaqués en arrière, avec un front large et un menton pointu de mécano. Il fait chicos dans son costume brun, le véritable paternel enfui, mais ce n‘est pas vraiment une question de fringues, plutôt une manière insolente de les porter. Un cœur de marbre en dépit de ses attentions louables, peut-être. Pieds serrés dans ses mules à talons, mains croisées sur sa blouse ample, regard compassionnel savamment dosé, Mémé reste d’habitude inébranlable dans toutes les circonstances. Mais, là, alors qu’elle regarde son gamin plongé dans d’intenses réflexions, elle se gratte quand même le pied, comme si elle vient tout à coup de subir une douleur au talon, puis, un peu embarrassée, elle laisse finalement tomber ses bras le long du corps. Son long mensonge fait d’elle en quelque sorte la complice plus ou moins volontaire de sa maman volage. Toute cette synergie de muscles mise ainsi en mouvement, une observation attentive de la position des tendons et des articulations de sa mémé permettra à Gaston d’écrire en 1998 un livre fort bien vendu, qu’il intitulera sobrement « Comment dérouler en quinze leçons une bonne posture, en révélant à un proche que son père ne l’est pas, pour éviter à ce proche la vision d‘une navrante hésitation. » En tout cas, Ernestine Boudiou ne perd rien de ses facultés cognitives en dépit de son grand âge, elle est sérieuse, elle apporte à présent du concret. Tenant toujours la photo dans sa main, Gaston doit bien croire l‘ancienne ; puisqu’elle jure que Emile Pertuis a profité physiquement de sa mère, à 100%, comme s’il s’agissait d’un second mari. On s’achemine avec cet aveu dans une nouvelle donne familiale, mais qui ne va pas forcément pourrir l‘ambiance des prochains repas de la ferme Boudiou. Nul n‘obligera Gaston à aimer un intrus au pied levé, il garde néanmoins le silence sur ses impressions, refusant devant mémé d’ajouter le moindre commentaire sur la révélation qu‘elle vient d‘exposer. Elle l’autorise bien entendu à garder photo et carte-postale. Il hésite un peu avant d’aller la punaiser sur le mur, au-dessus de la petite table où il fait habituellement ses devoirs. Lui escamote tout simplement les mauvaises cogitations par l’élaboration d’un nouveau projet. Vu qu’il possède son adresse, l’année prochaine, il ira sur Paris pour rendre visite à ce père authentique, puisque cet Emile Pertuis incarne avec certitude le gagnant du bon coup de piston. Pour Gaston, ce très bon résultat atteste somme toute, dans le trajet de vie du cher inconnu, l’étendue d’une veinarde et salutaire compétence.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:28:00
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talbazar
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Posté le 20-02-2017 à 17:02:03  profilanswer
 

revue de presse.

 

Aujourd'hui : Un chasseur avisé.

 

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Salon des inventions.

 

Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar.

 

Aujourd'hui : L'équipement de protection individuelle pour serveurs de bistrots.

 

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En général, on ne néglige aucun contact au gré de ses rencontres professionnelles, mais l’on ne saurait risquer la peste bubonique sur une simple poignée de mains, pour un positionnement juteux sur le réseau et trouver avec le mec d’en face le bon moyen d‘investir. Au cours d’une célèbre expérience réalisée pour la Moyenne Encyclopédie, le pro-fesseur Talbazar a laissé traîner un mois entier sa vaisselle dans son évier. D’après ses conclusions plus mitigées que son petit robinet, l’hygiène peut parfois être nécessaire, en tout cas si l’on ne vit plus tout seul dans son foyer. Nous serons plus ferme, puisque d’une manière générale, compte tenu du degré d’infection de certains clients, nous venons de voir que l’ambiance au travail peut rapidement se montrer inquiétante, voir dangereuse, mais encore plus si l’on est serveur de bistrot ou de restaurant ; les chauffeurs de limousines et les peintres en  bâtiment sur nacelle étant moins concernés. Comment assurer sans risque son service en terrasse par - 25° en pleine épidémie de grippe, sans négliger le relationnel contaminé susceptible de lâcher son pourboire ? Vous travaillez déjà d’arrache-pied, inutile en plus de céder à un triste sentiment de solitude, en refusant de l’approcher pour le servir, puisque vous le devez. Les métiers de l’hôtellerie et de la restauration nous ont longuement écrit, eux savent le risque pris par un travailleur saisonnier au milieu des germes de sa clientèle, un être humain que l’on maîtrise surtout par le salaire, et déjà riche de nombreuses expériences malheureuses, en se retrouvant couvert de boutons dégueulasses sur toute la ceinture abdominale à l‘heure de votre apéro.

 

Un bon serveur de bistrot chauffe un biberon en trois minutes, un petit pot en sept et fait le job comme il faut, quand bien même le bébé de sa cliente réussit avec succès à partager avec lui sa gastroentérite. Notre dévoué occupera alors plus souvent les toilettes du café que ses clients. Se laver les mains ne sert à rien, puisque sur la peau des doigts déformés par son plateau de chaque barman, poussent en effet des picots et des stries, qui encouragent la dextérité des bactéries et leur permet de s’inviter en lui sur une longue durée. En raison des microbes que les clients déposent au cours de leur visite, les serveurs sont très souvent victimes de démangeaisons et d’irritations au niveau de leurs zones intimes. On sert en sifflotant ses bonnes tartines au client et voilà qu’à la clé, on se retrouve avec la peau qui desquame et les pommettes qui bombent sous le coup d’une terrible fièvre ! Et pourtant vomir dessus n’a jamais fait briller le cuir des mocassins d’un serveur. La manip consistant à s’enrober chaque matin le corps de films alimentaires transparents peut-être pénible, elle n’évite pas toujours d’avaler les postillons d’une gourmande qui grignote sa quiche, alors qu’elle est déjà, sans qu’elle sans doute, une porteuse malsaine d’un staphylocoque doré à l‘or fin.

 

Considérant le besoin de répondre positivement au problème soulevé par la profession, le bureau de recherche associé au salon du pro-fesseur Talbazar vient de réussir la fabrication d’un astucieux dispositif antiviral, antibactérien et antimycosique, vendu pour un prix de 2503,08 euros, hors serveur et montage. Un cadeau original à glisser dans la valise d’un serveur, si vous êtes enceinte de lui. L’équipement individuel de protection pour bistrotier s’utilise n’importe où, même les pieds dans le sable ; il permettra au serveur de s’approcher enfin à moins de trois mètres du consommateur mal rincé. Lequel est rappelons-le presque toujours atteint de tuberculose et frissonnant, même hors-saison. On sait que servir un simple thé/citron s’apparente souvent à dépoussiérer d’horribles vieilleries, pour qui se nettoyer c‘est juste se démaquiller le midi. Témoin de la synergie qui anime toujours la griffe du pro-fesseur Talbazar, l’élégant EPI (équipement de protection individuelle ) bistrotier qu’il vient de mettre au point ouvre un nouveau chapitre de la méfiance urbaine, en venant rassurer le métier, lequel pourra continuer de vider sans s’inquiéter le porte-monnaie du client avant son arrêt de travail. Protégé et confiant, le serveur enfile d’abord ses lunettes plexis antipostillons et glaviots, puis il met en bouche l’embout du respirateur intégré, en attendant dix minutes que l’échange gazeux lui permette d‘avaler de l‘air filtré. Ainsi protégé des cellules mortes de la clientèle qui tourbillonnent autour de lui en essaims effrayants, l’homme positionne ses mains de façon à les mettre dans ses poches, car il n’a nul besoin de porter lui-même son plateau. Un mécanisme auto-suçant fait en effet corps avec ce dernier, alors qu’une pompe à vide hyropneumatique lui permettra une stabilisation solide à 90°, pour un poids supporté de 120 kilos solides ou liquides. A aucun moment, grâce à notre invention, vos clients vous prendront encore pour une poubelle au moment de leur servir le petit déjeuner, en vaporisant leurs microbes sur vous et votre outil de travail. Quel plaisir au contraire de leur apporter, sans aucun danger pour vous, l’eau du moulin sur un plateau ! Quand la crainte s‘efface, on est libre, comme les prix devraient tous l‘être, ainsi que le hurlent si bien les patrons de brasserie, qui se ruent actuellement en masse pour que leurs serveurs achètent notre appareil.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:34:00
n°48776960
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 22-02-2017 à 21:21:56  profilanswer
 

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Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : L'épilée du Nil - extrait Numéro 70.

 

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La nouvelle troubla tant Néefièretarée qu’elle renversa son porto sur sa robe bleue, tendue sur ses tétons par deux minuscules chaînettes en or, une somptueuse et dernière création des ateliers de l’O.N.S. L’occasion pour Amétatla était trop belle, elle se précipita aussitôt pour conseiller en experte le saupoudrage d’un peu de sel de Tibériade sur la tache, pour ne pas qu‘elle persiste. Mais d’autorité, la reine colla tout le monde dans l‘antichambre, où une nuée de prêtres admiraient en la commentant une belle paire de Bastet qu‘un sculpteur habile leur proposait. Dans le fabuleux temple situé sur les rives du Nil, la pharaonne resta seule, à caresser pensivement son guépard sous le menton, de sa longue main droite passée dans un gantelet de fer. De la gauche, elle tripotait nerveusement l’amulette en forme de croix de vie qui pendait à son cou de cygne. Provisoirement délaissée, sa petite chatte faisait forcément la gueule. A chaque fois que la maîtresse des mondes penchait la tête, les gros rubis chutaient de son diadème qu’ils perlaient de rouge vif, en ruisselant sur sa perruque de tresses pâles nouées de fils d’argent. Alors comme ça, se disait-elle, Ramassidkouch vient de passer subitement la lance à gauche, la scie impitoyable du disque solaire l'a broyé et le Kouchite paye enfin le prix de sa vie dissolue. Néefièretarée n’aurait donc pas à faire appel aux juges du palais royal pour divorcer. Du coup, Schrèptètnuptèt et son fils restaient les seuls ombres qui viendraient ternir son retour triomphal à Thèbes, lorsqu’elle aurait maté la grève des ouvriers construisant son tombeau. D’après les infos provenant du sud, on n’en était encore qu’à fixer l’enduit sur les parois rocheuses. Comme ils la sentaient préoccupée, les types à ses côtés ventilaient comme des malades leurs grands éventails blancs en plumes d‘autruche, elle leur ordonna sèchement d’arrêter de s’exciter, avant que la clim ne vienne à la rendre malade.

 

Recouverte de bijoux en or, la reine brillait de partout, elle n’éclairait cependant pas totalement l’Egypte comme elle l’aurait voulue. Les larges carreaux rouges tapissant le sol de la salle miroitaient sous ses pieds comme une lisse mare de sang. Elle éprouva le besoin de se blottir dans les bras de Phimosis, exténuée par le poids éreintant de la couronne qu’elle avait à porter. Pourtant, elle n’appela pas tout de suite le vizir auprès d’elle. Les grosses bougies tremblaient sur leur trépied au moindre souffle venu de la terrasse. Quand aux fleurs de lotus déposées dans les vases par les prêtres de Seth, en l’honneur de sa venue, les beaux calices blancs étaient pratiquement tous fanés. La voix éraillée d’un vieux machin diffusée par les fenêtres annonçait le prix d’un amphore d’huile d’olive pour deux achetées, Néefièretarée quitta son trône pour aller voir, les ménagères se pressaient en piaillant autour du vioque, pour profiter de l’aubaine constituée par le pack familial. Toutes les denrées encore disponibles voyaient leurs prix bradés, en raison de la chute des cours provoquée artificiellement par Schrèptètnuptèt. La pharaonne alla se vautrer sur les larges coussins éparpillés qui jonchaient la pièce, puis elle enleva sa perruque, avant de maintenir fermement la tête du guépard par terre, puisque ce crétin voulait mordre vicieusement sa main non protégée. Et puis, désirant plus que tout être tranquille, elle sortit de l’herbe de sa petite boîte en acacia pour s’en rouler un. Trois clepsydres de rêveries plus tard, elle fit venir Phimosis, il la bascula entre ses bras musclés comme une simple poupée, elle lui passa longuement ses mains baguées dans ses cheveux bouclés. Elle sentait la main ferme de l’homme qui retenait fermement son épaule, sans que cette pression ne l’oppresse le moins du monde. Il lui toucha les seins, elle se donna à lui, sans prendre le temps de se mettre entièrement nue.

 

Du coup, les visiteurs passèrent la nuit dans l’antichambre, n’osant quitter le temple sans l’autorisation de la reine. Ils discutèrent longtemps avec les gardes de la production de litière sévèrement ralentie et du nombre de porteurs qui se tournaient les pouces. Vequetum Fourlanus avait envoyé un petit esclave galoper jusqu’à leur hôtel, afin d’aller chercher son concitoyen Tampax Nostrum, histoire que ses amis et lui fasse plus ample connaissance. Rentré dans le temple sans problème, l’espion romain arriva en faisant état de bruits de la rue concernant des rumeurs alarmantes, sur de récents raids Hyksos aux frontières. Des types, par Jupiter, qui ne connaissaient même pas l’usage des canalisations publiques, et encore moins des gogues communautaires. Des enfants de souche noble, à la tresse unique plantée sur leurs crânes rasés, passèrent devant eux en leur marchant sur les pieds avec un air de mépris ; Amétatla leur balança que si jamais elle construisait un jour une maison, elle les enfouirait tous sous les fondations. Elle ajouta en plus qu’elle n’avait rien à faire de sales gosses dont les parents pratiquaient tous impunément la fraude fiscale, alors que elle, elle filait tous les ans correctement ses moutons et ses oies au trésor. Si elle était leur mère, justement, elle les enverrait un bon moment à la dure en colo à la campagne pour leur apprendre à vivre. Mais bon, fallait pas s’étonner de la passivité actuelle des tuteurs, soit disant par manque de temps, sans parler des baby-sitters peu concernées. Effrayés par son audace, les mioches déguerpirent en courant. Tampax avait posé ses grands pieds sur la table, à la romaine, ce qu’Aménorée trouva immédiatement fort mal élevé.

 

– Le mal qui ruine l’Egypte empire de jour en jour, continua Tampax, le roi est mort et la reine se ballade, c‘est pas le tout de manger des topinambours en la comparant à une étoile du ciel. Ce n’est pas à Rome qu’on est à même de contempler un tel bordel.

 

– Vive l’empereur ! grogna Vequetum, en approuvant son compatriote, tordons la petite queue ronde des babouins qui oseraient dénigrer l‘aigle aux serres dorées.

 

Avant d’insinuer qu’il était en attendant mercenaire pour l’Egypte et que Rome était un vrai bled de fachos gouverné par un empereur taré qui finira assassiné, Valisansoùth, Tépénib, Amétatla et Aménorée se virent appelés à comparaître devant la reine. Comme elle n’arrêtait pas d’éternuer à cause des vents trop frais provoqués par la clim déréglée, un médecin dont la tête ressemblait à celle de Khépri, le dieu scarabée, faisait couler du jus de datte dans les narines de la pharaonne. Dans une grande vasque noire, de l’oliban brûlait abondamment près du grand trône, un parfum écoeurant à coller la migraine. Le médecin parlait de placer ensuite une à une des caroubes séchées dans la vulve de sa patiente, elle le livra au guépard sans lui laisser le temps de finir sa phrase. Après quoi, elle pria les nouveaux venus de l’écouter attentivement. Comme elle parlait, un peu de jus de datte glissa brièvement sur sa joue, qu‘un esclave obligeant s‘empressa aussitôt de lécher.

 

– Je vais vous offrir le moyen de rentrer gratuitement à Thèbes.

 

– Mais, protesta Tépénib, il n’est pas question pour nous de …

 

– Tais-toi. J’ai une mission pour vous. Je viens de perdre mon mari, il est normal que j’envoie un petit cadeau de consolation à ma belle- sœur, une belle robe tirée du stock de votre entreprise, par exemple.

 

– Ben, on voudrais pas dire, madame la fille des dieux, mais Schrèptètnuptèt, là, elle vous a fait un moutard dans le dos avec lui, quand-même ! Sans parler du fait qu’on raconte qu’elle ourdit des complots contre vous.

 

– Et en quoi ça te regarde ? Si tu fais ce que je dis, je te le promet, je trouverai un mari pour ta fille, du genre qui ne fait rien d’autre que de boire de l’Ouzo sur son yacht amarré en Mer Rouge, en empilant sa thune. Un mec à gourmette avec ses entrées au palais. Bien entendu, toi tu n‘aurais plus jamais à te présenter au secrétariat pour pouvoir y pénétrer. C’était bien là un argument-massue et Néefièretarée s’en amusa brièvement, en voyant la marchande de fringues lui rendre un visage dompté.

 

– Bien évidemment, asséna t’elle encore pour tout le monde en dosant son effet, le tissu de cette fameuse robe sera empoisonné !

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:36:35
n°48779328
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 23-02-2017 à 07:35:16  profilanswer
 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:39:38
n°48794524
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 24-02-2017 à 11:58:00  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 23.

 

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Le cœur meurtri, Robin et ses compagnons se voyaient vaincus par trop grand nombre de belliqueux en passe de les chatouiller. Visages fermés et le meurtre dans l’œil, les autres cornus en bottes de daim s’approchaient lentement par les bois pour refermer le piège. Lorsqu’ils furent à portée de voix, Chevalier Yvan leur déversa un tombereau d’amabilités propres à les déchaîner, en lorgnant sur les plus proches, puis il les assura qu’il serait le premier à plonger dans l’aventure, en jouant pour le coup sa peau à quitte ou double. Robin le retint malgré tout fermement, puisque son propre cœur n’était pas prêt à arrêter de battre. Cherchant encore un peu la protection des rochers de granit, les guerriers Zgomatix évaluaient la possibilité technique de faire durer le massacre et se disputaient l‘acces prime time aux éventrations. C’est alors que, reconnaissant enfin à qui il avait à faire, Olbozgeg au gros pif vint jouer le trouble-fête en abaissant leurs bras. Pendant ce court instant de flottement, seul s’entendit dans la clairière le bourdonnement incessant des mouches à merde, bêtes noires qui avaient suivi par gourmandise la grande armée des auxiliaires barbares du pays de la Godée. Protégé par trois archers, Olbo se dégagea justement des ronces en rajustant ses braies, pour ordonner aux moines de mettre bas l’épée :

 

– Comme on se retrouve ! Il me semble bien avoir échappé il y a quelque temps  à une tentative d’assassinat par enfouissement, fomentée par vos soins, petits merdeux de prêtres armés. Il me semble qu’en l’espèce, une petite vengeance personnelle devrait tenir justice, point ne croyez ? Il se gratta le tarin avec un air joyeux, ce faisant, il sembla lui pousser des canines monstrueuses. Derrière lui, ses vieux routiers tapotaient leurs cuirasses en auroch pour l’approuver.

 

– Certaines pensées ne valorisent aucun propos, gros, moi je dirai que votre armée de mecs crasseux et pisseux, j’en ferais bien mes victimes du viol en balançoire au milieu des douces églantines de cette forêt. Un principe poétique pour leur assurer un nouveau destin plus aimable.

 

– Ceci n’est point l’éloge de la nuance. Vous êtes mes prisonniers. Je vous sais en cavale, nous rejoindrons la cité de Poudkor d’où j’avertirai le roi de Mouyse que je demande rançon pour vos têtes. En attendant, vous aurez la vie sauve. D’impatience, il fit secouer nerveusement sa cape de lamé argenté : rendez-vous à nous !

 

Les moines avaient un sacré cran, mais ils se savaient bien en danger absolu. S’ils capitulaient pour éviter une mort certaine, ils semblait que l’avenir puisse rester ouvert. Bien qu’échauffés par les mélodies injurieuses en cascades que leur servaient à présent les Zgomatix qu‘ils pouvaient presque toucher, il s’avéra qu’il valait mieux pour survivre passer de la complexité à la facilité, puisqu’en se rendant à ces nombreux chafouins, il leur restait une chance de rester en vie. Jeanne-Mireille soupira qu’elle n’avait jamais été destinée à être princesse, certes, mais elle bénissait comme les autres son précieux souffle de vie délivré par notre Sainte Kramouille. Elle était cependant terrifiée des nouveaux horizons émotionnels que lui procureraient certainement ses gardiens, au cours de son odieuse captivité dans les geôles de Poudkor. Aussi, pour éviter de s’enfoncer plus avant dans la galère, ils préférèrent renoncer au combat suicidaire. Les chevaliers se rendirent, sans pour autant faire taire les joyeuses trouvailles sonores qui les insultaient en brassant de curieux concepts, comme cette affiliation de ta mère la bique. Guy Bouyave répondit tout de même à l’autre qu’il lui trouvait justement un bon air de famille. On s’offensait, mais les armes reposaient tranquillement au fourreau. Et puis, Robin cachait toujours sur lui le précieux Œil de Dinde, son fameux bâton magique, dont il devait à tout prix apprendre le maniement, car on disait que la relique permettait de voir clairement dans l’obscurité, ou bien encore accélérer le temps, ainsi qu’éventuellement le ralentir.

 

– Soit, fit-il en détachant prestement son ceinturon, nous vous suivons jusqu‘à Poudkor, inutile de nous couvrir de chaînes, puisque vous nous verrez dociles. Charge à vous d’assurer le reste du contrat, si votre foutue théorie tient comme vous dites la distance.

 

Toute la horde puissante s’ébranla donc peu-après dans la forêt, en emportant ses prisonniers. Retenant son propre cheval par la bride, Olbo fit taire l’un de ses hommes qui houspillait vilainement Jeanne-Mireille sur quelques digressions, en lui baillant qu’il l’imaginait bien nue et découpée, morte sans avoir compris. Pour le chef, il n’était plus question de verser le sang de quiconque, puisqu’il s’avérait que Vazy allait monnayer très cher les fugitifs. Dans la soirée, accompagné de ses hommes, il dévala en souriant la grande artère principale de Poudkor, une agglomération désertée de ses habitants et qu’il avait impitoyablement ravagée. Les ruines de la cité lui servaient à présent de cantonnement, où s’ébattait en pagaille sa grande armée dans les jardins malodorants. On plaça les chevaliers et Jeanne-Mireille dans une prison solide qui ne sentait pas mieux, puis les barbares cessèrent enfin de vomir sur eux leurs répugnantes imprécations. Quand aux rires joyeux de la population exterminée par les envahisseurs, ils avaient disparus depuis longtemps et ne faisaient plus partie de ce monde, car tous ceux qui n‘étaient pas morts avaient quittés la contrée d‘Hyperbourrée. Il n’y avait donc à présent que l’armée Zgomatix pour occuper ces lieux. Dans la ville de Poudkor horriblement saccagée, on apercevait toujours les corps des centaines de personnes qui étaient mortes en cours de route en espérant de fuir, avant d’être sauvagement abattues par des lances aux carrefours. Les Zgomatix avaient seulement gardé vie aux prostituées terrifiées, charge à elles de bien vouloir, entre deux raids, leur dégourdir la nouille. Olbo Zgeg se vautrait désormais sur le trône encore chaud de Foutre 1er Danjou, malchanceux roitelet décédé de Poudkor, au sein du nid douillet d’un petit palais situé dans la très belle maison d’un quartier chic. Le Zgomatix gardait cependant les pieds sur la terre et sans attendre, il envoya un émissaire vers Mouyse, pour avertir le roi qu’il détenait ses évadés. Il exigeait une réponse rapide, priant le roi de faire promptement déballage de sa thune, de tirer sans faiblir sur ce cordon là, car il pouvait se réjouir d’avoir du bol de remettre la main au collet des prêtres de Kramouille, tous atteints de méchante vilenie. Le roi de Mouyse le savait bien, le métier d’auxiliaire était dur et coûtait cher, avec un bilan de suicide dans les troupes parfois alarmant. En attendant, les prisonniers se trouvaient à disposition dans une sombre oubliette de Poudkor, un cloaque malsain qui devait faire grosso-modo neuf mètres carrés et plutôt bas de plafond. En bas de son message, sur lequel il apposa son sceau dans un cachet de cire rouge, Olbo Zgeg ajouta qu’en raison du traitement inhumain qu’il avait eu à subir de la part de ces moines, parce qu’ils l’avaient enterré vif sur le chemin de Kiess, sa loi personnelle exigeait leur décapitation. Il n’allait donc pas attendre dix ans la réponse et le paiement du roi pour les enfouir dans la terre en deux parties. A moins, bien sûr, que son grand coffre ne vienne à se remplir de bonnes pièces d‘or, auquel cas il acceptait de les livrer et de les reconduire à la capitale sous bonne escorte. Pour le reste, l’âpre campagne des prémices de la guerre se déroulait bien, ses hommes n’avaient pour l’instant aucune nouvelle de l’armée du Fion, que l‘on disait pourtant venir puissamment vers eux. En réfléchissant qu’au moins, ce parchemin offrait l’occasion d’ouvrir le débat avec le tyran de Mouyse, il se bouchonna le pif et regarda l’émissaire s’en aller en faisant trembler le pont-levis calciné. Puis, pleinement satisfait de lui, le barbare leva sa corne aux faisceaux aveuglants des rayons du soleil, parce qu’ils donnaient bonne lumière d’après-midi.

 

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Revue de presse.

 

Aujourd'hui : Radio Troulbled.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:45:26
n°48811997
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 26-02-2017 à 13:38:58  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole. Extrait numéro 43.

 

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 Fascinée, Karela Borounie regarde la course lente des gros tapis sustentateurs promener vers un laboratoire de croissance spécialisé les jeunes plantules tinctoriales destinées à produire diverses teintures naturelles, notamment pour les cheveux, très prisées et de grand luxe au sein des défédérations galactiques. Bien qu’évoluant dans l’univers hermétiquement clos du vaste complexe agricole où se sont réfugiés Fanch Yoland et ses hommes, ces plantes précieuses soignées par les robs jardiniers offrent des matières colorantes particulièrement riches, sous l’influence même de l’environnement martien. On teint aussi les étoffes avec ces racines et ces fleurs, mais pas de vêtement, puisque sur Mars comme ailleurs on vit habituellement nu. Un haut séparateur cohérent fait le tri des espèces, avant qu’elles ne s’offrent en bon ordre au condensateur à forte intensité. La teinture non synthétique est une filière qui rapporte énormément aux peu nombreuses unités agricoles martiennes, comme le commente avec professionnalisme Zona la fermière, qui commande cette installation de production avec son mari Manu Mekton. Ils forment en réalité les gérants principaux de ce dômus de taille relativement modeste, puisque cette communauté n’héberge en totalité que 1322 personnes, dont beaucoup d‘enfants. Zona contrôle les informations baladeuses d’un holocast bleuté provenant de la sphère fraichement labourée D4, une anomalie fonctionnelle qui rend la trentenaire un poil soucieuse. Elle bouscule un peu les visiteurs pour s’approcher de son mari et lui parler de vive-voix, les implants des fermiers étant devenus inopérants sous l’action du brouillage indé. Fanch s’est d'ailleurs déjà excusé pour ce désagrément collatéral, conséquence d’une guerre qui n’épargne plus personne.

 

– Manu, fait sa femme, la glaciation du D4 vient de commencer, mais il y a eu un épisode de chaleur entrainant un bref réchauffement global des parcelles, avec émission de trop-plein gazeux, je colle l’info sur le réseau 3 pour que les robs se bougent le cul, ces champs de graines doivent geler rapidement et surtout correctement, bordel.

 

Une buse terrienne et un clapatoire originaire de 5699VB-Beatles les survolent de concert, en glissant silencieusement au-dessus d’un alignement impeccable de mandariniers en pots. Les volatiles semblent fuir le jet d’un soudain flot de vapeur s’échappant en hauteur d’un énorme conduit, zébré à son extrémité d’une signalétique jaune et criarde. Une douce brume évanescente envahit peu à peu le sommet du dôme, accompagnée d‘une étrange odeur de fumerie. Les oiseaux évoluant librement provoquent l’admiration unanime du groupe. La visite continue par un changement de dôme, où s’épanouissent quelques plantes exotiques venues des tréfonds planétaires, étranges variétés avec lesquelles les technosrobs de cette base synthétisent des colles extraordinaires. Manu précise même qu’elles offrent des possibilités de soudures incroyables, en assurant le liage des plaques de la structure des Sharshermans spatiaux. La traversée d’une haute passerelle jetée sur une fosse hydroponique se montre très impressionnante. Ici, comme le précise Zona à son tour en se penchant sur la rambarde métallique, alors qu’une puissante ventilation entre bruyamment en fonction, les plantes aux racines immergées dans un petit canal nutritif ne voient jamais les larves, autorisées quelquefois dans d’autres jardins à provoquer leurs dégâts mesurés. Zona et Manu leur exhibent ensuite un curieux lot de champignons lumineux, irradiant des lueurs violettes de toute beauté. La fermière précise que des spores de ces choses furent envoyés autrefois sur Mars en provenance d’une planète lointaine, en l’occurrence 8495SK-Rolling Stones, par un missionnaire de son éminence nommé Ouzy Osburne, mais le gourou et ses nonnes n’étaient quand à eux jamais rentrés de cette portion de l’univers. Manu ajoute que ces eucaryotes merveilleux conserveraient la mémoire de leur monde, mais cette rumeur a toutefois résisté à l’analyse et n’a jamais été prouvée. La vision de ces champignons est en tout cas aussi plaisante que fascinante. Par jeu, avant de suivre à nouveau le pas des autres, Jorg Glooniais pose une main sur la corolle évasée d’un chapeau allumé de rose brillant, mais le champignon se rétracte pudiquement à son contact, en exprimant un soupir discret. Un bref échange avec les cellules ganglionnaires de l’importun oblige aussitôt celui-ci au retrait. Une simple démangeaison d’avertissement.

 

Un homme cependant brille lui par son abscence, puisque Flash Gourdin ne les accompagne pas, il est resté dans la loge que les ploucs lui ont attribué, sévèrement atteint d’une horrible migraine que les efforts attendris de Siguiline n’ont pu atténuer. Une douleur sourde lamine le crâne du colosse, à l’emplacement de son implant qu’elle lui a retiré. Rien ne va plus dans les pensées de l‘ex-bagnard. La doctoresse a pu constater que la structure toute entière de son cerveau se trouve profondément bouleversée, elle se doute bien qu’il doit s’agir des conséquences d’un bidouillage métabolique et judiciaire, mais cet effet spectaculaire dépasse toutefois ses compétences pour y remédier. Elle n’a pas d’autre choix que d’endormir profondément l’ancien taulard au bras paralysé, pour offrir un répit à l’évadé et soulager sa crise. Longtemps, tout en suçant sa pilule de pâte d’amande, elle reste rêveuse devant le grand corps de l’homme endormi sur son sustentateur, prise d’une irrésistible envie de pornifier avec le géant musclé, en dépit du tatouage infamant qu‘il porte sur la peau. La jeune femme blonde est plus que jamais troublée et séduite par l’impressionnant capital physique de son patient temporairement fragilisé, il venait en fait, juste avant de sombrer, de reconnaitre une altérité complète de sa mémoire et la perte de tous ses souvenirs. Dans un coin de la pièce, elle a déposé le lourd et encombrant Wee Gee Ray Gun Gun, à côté du petit TZ-24 Sanitizor Tinkerbots. Au risque de blesser l’amour-propre de Siguiline, Flash Gourdin ne semble pas partager pour elle la même attirance sentimentale. Après s’être assurée du long sommeil prévu et tranquille de son protégé, elle accompagne finalement un paysan venu l’inviter à rejoindre enfin ses camarades. Elle croise en chemin, en traversant une large coursive, une ribambelle de gamins occupés à jouer en riant avec un câble sustentateur invisible. Bien que les maladies soient généralement prises en charges par les robs médicaux, Siguiline sait qu’elle aura sans doute fort à faire pour soigner quelques-uns des mômes en bas-âge.

 

Les habitants paisibles de l’exploitation ne sauraient oublier que les nouveaux-venus sont des guerriers, les armes menaçantes qu’ils portent sur eux sont là pour le leur rappeler. Sur un ordre de Fanch relayé par Zona la fermière, tous les guns présents dans le dômus ont été recensés et entassés devant lui. Jorg Glooniais fait le tri lui-même, aucun de ces objets n'est en réalité une véritable arme de guerre, juste quelques vieux Zap Brannigan, fusil à plasma trois tirs avec guidage faisceau, quatre petits Ionization Nebulizer, auxquels il faut tout de même ajouter un Remco ST Phaser vénusien, le lasergun le plus puissant. Pas de quoi au final égratigner les défédérés, ni créer du souci aux indépendantistes. Rassurés par le climat pacifique du dôme, Fanch, Karela, Jorg et Siguiline ont soigneusement fait main basse sur cette maigre artillerie, qu‘ils comptent bien rajouter à la leur, en dépit de sa puissance relative. Autour d’eux, les colossaux cônes de croissance blancs en Tecrum artificiel à cristal augmenté, chargés d’offrir des orientations préférentielles à certains végétaux, donnent à cette partie du  dômus une allure de temple étrange et silencieux. Ils offrent aux petites silhouettes humaines qui les longent sur un sol pavé d’un glaçage immaculé un sentiment de démesure. Sous certaines cloches proches, on travaille en compagnie des robots au grand soleil, mais dans d’autres demi-sphères, une variation cyclique de nuit noire provoquée éteint la moindre activité. Parfois, un ballet tranquille de petits train autoportés lévitent comme dans tout le complexe, transportant les plastibocaux contenant des molécules d’ARN de certaines plantes ou d’insectes, alors que d’autres chargent au contraire d’énormes citernes d’hydrogène ou d’oxygène. Au centre de la base martienne, pousse même trente hectares d’une insolente forêt marécageuse parfaitement contrôlée et propice à d’intenses recherches de la part des fermiers. Là, dans l’eau saumâtre constamment analysée, de gros arbres pourrissent à l’endroit même où ils sont tombés, donnant au décor l’illusion d’un espace vierge dénué d’intervention humaine. Plantée au cœur de l’aridité du désert martien, cette oasis de vie bienfaisante abrite une fabuleuse biodiversité, comprenant même un certain nombre d’espèces animales et végétales galactiques, désormais éteintes sur leur propre planète. En dépit de leur rôle de serre poussé à l’extrême, les dômes entourés de leurs buttes sableuse offrent les mêmes caractéristiques généraux que toutes les installations humaines construites sur Mars. A chaque réflexion de Fanch, Zona et Manu répondent aux questions, en se promenant entre les grosses cuves renfermant de l’hydrogène ou du monoxyde de carbone. Ils expliquent ainsi être à la merci de nouveaux contrats d’exportation galactique avec les administrants spécialisés, pour espérer le moindre gain financier ; une recette bien entendue fondée sur la part minimale des producteurs. Dans la douceur émoliente de l’atmosphère artificielle, une nouvelle fois embrumée, Zona s’interrompt un instant pour holocaster à quelque rob de secteur d’aller en S3 soutenir quelques floraisons en cours. Le chef des rebelles ne peut pourtant s’empêcher d’imaginer en même temps les manipulations d’un opérateur ennemi de Grand Contrôle Martien cherchant à le localiser ; la simple présence du commandant en chef des indés dans cette ferme met à l’évidence ses habitants collectivement en danger. S’il prenait au Général Digoule de venir chasser par ici, nul doute que la surmortalité dans ce dômus en Shellglass trempé allait soudainement bondir.

 

Hanches et taille fine, offrant une silhouette malgré tout banale, Zona la fermière à la peau de satin est d’une nature enjouée, tout comme le rire de son compagnon barbu se montre très communicatif. Karela et elle se sont spontanément liées, surtout lorsque la femme de Yoland lui a avoué sa propre jeunesse passée en partie dans une ferme implantée près de Gorgonum Chaos. Quelque part, pense Karela, en voyant s’enlacer joyeusement le couple devant elle près d‘un cristalgraphe tripendulaire, ces paysans au service de la caste des administrants sont l’écho d’un vieux monde en contact avec la réalité permanente du vivant, des esprits plus méditatifs qu’ailleurs sur la nature, ce qui leur confèrent indéniablement à tous une certaine vertu de sagesse. Cet endroit abrite également un bon nombre de vieillards vénérables originaires de toute la voie lactée. Une existence tranquille que les indés pointent à présent au bout de leurs guns, le temps pour la base enterrée des rebelles de les retrouver afin de les rapatrier. Sans parler du danger possible d’un survol impromptu des Panzigs de l‘armée, toujours avides d’expéditions punitives.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:48:40
n°48885666
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 04-03-2017 à 12:13:37  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La Jet larguée. Extrait numéro 17.
 

 

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Avec une intense émotion, manifestant lampes-torches allumées et brandies dans la rue, alors que d’autres tapaient comme des forcenés sur des poêles à frire, les adeptes de l’église auto-définie du Pape Eloi de Pouillet, fondateur de La L²HP, signifiant la « Largeur, Longueur, Hauteur, Profondeur du sublime dessein éternel et divin pour le rayonnement de la cause qui évite aux lépreux guéris de devenir aveugles et paralysés en faisant leur prière quelques fois par jour », critiquèrent les mœurs apparemment dissolues de l’équipage. Ils organisèrent ce tapage public suite à une importante fuite d’informations confidentielles causée par une jeune stagiaire adepte de cette secte. Une spécialiste de la photocopie employée en alternance par la PJ, puis soudoyée ensuite sournoisement par la Compagnie aérienne low-cost Pelleafric Airlines, sur la promesse mirifique d‘un CDD à temps partiel. Les compagnies rivales Well Transit et Crash Airways se joignirent naturellement au formidable tollé médiatique qui découla de cette indiscrétion. La riposte vint de très haut au sein de l'organigramme de la Petro Jelly. Vanessa Erelle, la directrice générale adjointe chargée des avions égarés, a aussitôt démenti formellement ces insinuations teintées de perfidie, en proclamant haut et fort que le commandant Steven Height était un homme exemplaire, qui n’avait pas le temps de biberonner aux commandes autre chose que de l‘eau, de la bonne eau minérale « Fées de la source », servie pour un prix étudié à bord de tous les appareils de la compagnie, bien entendu (jingle). On lui répliqua que ce n’était certes pas le cas de l’hôtesse Kinni Quelpapishi, une chef de cabine de 35 ans, d’ailleurs également présente dans le vol incriminé. Une femme notoirement connue pour picoler et sévèrement notée en interne par son employeur pour sa manie de gerber avant chaque atterrissage sur les chaussures des passagers ; nombreux étaient d’ailleurs ces malchanceux qui pouvaient venir en témoigner. S’appuyant carrément sur un viol manifeste du secret médical, la Pellafric Airlines dévoila dans la presse la psychanalyse régulière dont faisait l’objet l’hôtesse de l’air Shirley Cebiène pour soigner sa cleptomanie, ce qui ne l‘empêchait pourtant pas de voler. Sans parler des scandaleux exploits sexuels au boulot de cette dernière avec le steward Steward Steward, puisqu’on avait même quelques vidéos probantes sous la main. Les images volées d’une sodomie réalisée au cours d’un survol de l’Amibie venaient d’ailleurs d’être publiées en double-page/couleurs par un journal d’extrême-droite, suite à quoi ses lecteurs professionnels inondèrent de trolls injurieux le site web de l'office de tourisme Amibien.

 

Les services douaniers de l’aéroport confirmaient de plus la présence de peyotl à bord ce jour-là. Le cactus magique aurait été embarqué dans les bagages des botanistes Pierre Simon Langevin et Paul Laplace, déclaré en simple outil de travail par les chercheurs probablement gauchisants. Selon les assistantes dentaires interrogées par les radios périphériques, il paraissait évident qu’un cactus avalé, même par mégarde, pouvait très bien provoquer le crash d’un appareil, en anéantissant la raison et la lucidité de ses pilotes lors d’une manœuvre cruciale. Plus que jamais, les militants du Puppies Rights Watch se joignaient au concert malveillant, pour rappeler au monde le sacrifice atroce subi dans les airs par les colibris et les poneys, en raison de la cruauté indécente d’un personnel navigant irresponsable. Tout semblait mis en œuvre pour éveiller la suspicion sur l’équipage du vol PJ 612 PK de la Petro Jelly, écornant sérieusement au passage l’image de la compagnie. Le tourbillon des mauvaises nouvelles faisait fulminer son PDG Bobby Fiermongol, qui n’admettait qu’un seul point positif dans le fait que les recherches pour retrouver l’épave se trouvaient heureusement pour l’instant au point mort. Il espérait bien qu’elles le restent à jamais.  De réunions de crise en réunions de crise concernant le crash du PJ 612 PK, il fut simplement décidé, à l’unanimité, d’un changement de moquette dans le bureau du conseil d’administration de la Petro Jelly. Une décision forte copiant le fonctionnement habituel des administrations publiques territoriales des états en de telles circonstances, avec naturellement d’âpres débats sur le choix de la couleur. Vanessa Erelle suggéra aux actionnaires la création d’un comité de pilotage spécialement chargé de l’accident, ils lui répliquèrent qu’on avait assez de problèmes avec les pilotes en ce moment pour en rajouter un. Oui, Bobby Fiermongol n’était pas à la noce et se voyait presque déjà en liberté surveillée. Sur sa zone aéroportuaire, le staff de la Petro était déboussolé, puisque, harcelé de questions par les passagers en partance saisis d‘angoisse, l’atmosphère devenait chaque jour un peu plus étouffante. Il faut dire que la presse dans son ensemble interrogeait à tour de bras les familles des victimes, multipliant sans tact les projections-hommage de vidéos privées, dans un but avéré d’occuper les écrans avec un maximum de sensationnalisme. En terme d’audience, cette belle affaire de marketing international rapportait déjà très gros. En tout cas plus qu’une simple avalanche hivernale sans tués sur un volcan d’auvergne.

 

Plus discrètement, on assistait en coulisse à un intense ballet diplomatique entre Paris et le Boukistan, la Russique, la Mochkomkudite et la Gerbique. La catastrophe aérienne venait en effet de réveiller douloureusement les anciens clivages entre les Gerbes Flomonds et les Wallans, en dépit d‘une communauté nationale d‘accent. La Mochkomkudite se trouvait cependant ouvertement condamnée par l’ensemble des nations démocratiques, en raison d’un laxisme coupable de sa propre sécurité aérienne qui laissait impunément trainer des poneys dans son ciel sans réagir. La dictature répliqua que toute la famille Danlevan venait d’être éliminée jusqu’à la troisième génération, puis, criant au complot des nations soit-disant libres, elle persifla sur la fragilité alarmante des réacteurs d’avion survolant ses frontières, délimitées au sol par le creusement d’un gouffre de 400 mètres de profondeur. Le Boukistan insistait officieusement sur la mauvaise humeur de son émir suite à l’accident, sans vouloir révéler en aucune manière le secret qui dormait dans les soutes de ce long courrier. Le rajout gracieux de sable tamisé australien sur les plages du sud de la France offert par la tribu de cet émir semblait donc fortement compromis. La tension internationale ultime provenait surtout de l'irritation du gouvernement Russicain, puisque son président Bronislav Enjoyourself redoutait un peu la découverte des anciens charniers dans lesquels son pays avait, à l’époque de son occupation de l’île de Badigooince, enterré sous les baraquements militaires la quasi-totalité du peuple autochtone des Gouroungourous.

 

Sur place, à des milliers de kilomètres de toute civilisation, Shirley Cébiène désinfectait sa plaie au front et regrettait sans doute son choix professionnel en n’ayant pas épousé une carrière d’animatrice chez Disney, voir de danseuse étoile. Le décor de cette mystérieuse île déserte sur laquelle son avion venait de s’écraser n’était cependant pas en polystyrène, mais démontrait à chaque instant son caractère d’une jungle hostile bien réelle, même si les survivants pouvaient juger les plages utiles au perfectionnement de leur bronzage sans maillot. Dans la carlingue emprisonnée au milieu des branches enchevêtrées, son bel uniforme maculé du sang des autres, Shirley regardait le commandant Steven Eight menacer d’exclusion de l’épave ceux qui ne respecteraient pas ses consignes strictes, nécessaires selon lui à la sécurité de tous. Il visait entre autre l’agité Eloi de Pouillet qui venait de le traiter ouvertement de fils de Satan, pour avoir succombé à l’attraction d’un plan de vol maléfique. Il faut dire que deux ou trois amputés entraient déjà en conversion, suite aux efforts déployés en douce auprès d’eux par le Pape de la L²HP. Il leur disait qu’une fois entrés au paradis, leurs membres perdus repousseraient. Beaucoup de valides continuaient en revanche d’errer sans but dans les travées dévastées, le regard fou, promenant dans leur égarement un vide existentiel poignant que Steward et Tyler s’efforçaient de combler, non sans quelque héroïsme et le sentiment précieux de s’accomplir vraiment au boulot. L’endroit du crash était malsain et pullulait de moustiques et de sangsues, puisqu’il s’avéra selon les premières constatations que l’avion reposait en réalité sur un marais insalubre. Accoudés au bar intact en savourant leur vodka enfin gratuite, les deux derniers syndicalistes de la charcuterie industrielle la Kelien se partageaient des mezzés de poisson décongelés et une boîte personnelle de pâté Strakouilh. Ils noyaient leur chagrin d’avoir perdu leurs treize autres potes, tout en se félicitant de s’en être sortis vivants. Au moment où l’un des ouvriers racontait à l’autre qu’il fallait toujours se méfier des prix sympas, ils chutèrent brutalement sur la moquette rose, lorsque l’avion craqua horriblement avant de tanguer de façon inquiétante. La carlingue accusa ensuite une gite spectaculaire. Ses occupants terrifiés constatèrent ainsi qu’elle s’enfonçait lentement dans la boue mouvante, ajoutant une nouvelle menace à la désolation offerte par les tristes décombres. Ce bonus dans l’horreur effaçait à présent le caractère de havre de paix que l’épave semblait auparavant constituer pour eux. Pour les pauvres survivants tombés du ciel sur ce lagon perdu frangé d‘écume, il devenait sans doute urgent de retrouver au plus vite la terre ferme plantée de cocotiers, avant d‘être engloutis dans le bassin vaseux. Bien évidemment, parmi les engins militaires rouillés et les vieux camions bennes qui pourrissaient autour des bungalows Russicains, personne ne disait avoir remarqué la présence d’une salutaire pelleteuse géante. Dans l’épave menaçante spectaculairement sciée, Steven, bien éloigné d’une part de rêve partagée, se prépara donc au déménagement de tous, en s’occupant en priorité des blessés les plus graves. Contre toute attente, l’agent secret bouskistannais Moktar Bouif se maintenait toujours en vie, en dépit de son côté droit atrocement bousillé. Au pied des hauteurs touffues, le capitaine guida donc la marche éprouvante de ses passagers vers une plage de sable fin, nichée dans une anse protégée des vents et baignée d’une aussi merveilleuse que cynique mer turquoise. Grand soleil et vagues, tu parles ! Nouvelle escale de tranquillité, peut-être, mais dans la foulée on abandonnait avec l‘avion un grand nombre d‘équipements précieux. Sans parler qu’à peine posé sa valise sur l’endroit ouvert du nouveau campement, le scientifique Pierre Simon Langevin commença à faire chier son monde en les alarmant sur un risque de cyclone toujours possible.

 

–Ta gueule, lui répondit Brandon Poutrelle sans ménagement, on est pas si mal, on aurait pu se crasher au Groenland.

 

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Excellent WK à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:53:02
n°48893584
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 05-03-2017 à 11:24:06  profilanswer
 

Au départ, je voulais pas m'y mettre, mais c'était ça ou faire l'amour à ma charmante voisine.

  

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith. Extrait numéro 36.

 

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Quelqu’un trifouilla la solide porte en métal de la cabine, puis Martin Smith, Gordon Strazdinovsky et Vaya Condios virent entrer un type au crâne mal rasé et plutôt court sur pattes que, à sa grande surprise, le privé connaissait déjà. Il découvrit en face de lui Hurricane Mick, un gangster qu’il avait autrefois collé au gnouf pour un fameux vol de bijoux. Huit ans de placard en QHS, quand même. Le gars posa son plateau de victuailles fumantes sur la petite table, pourtant le regard presque coupable qu’il lança au privé ne semblait guère embrasé par un esprit de revanche. Dans son dos, El Barbudo et Grand Tonio assuraient pétards à la main leur prudente logistique de dissuasion, mais ils restaient en retrait dans le couloir, en attendant que leur pote ait terminé son service. Martin tâtonna un court instant pour trouver la bonne prise mentale en observant l‘ex-taulard se débarrasser en silence de sa tambouille, puis il engagea franchement le contact verbal avec Mick, ajoutant un sourire non dénué d’ironie au coin de ses lèvres.

 

– Alors comme ça, Hurricane, t’as le pied marin, maintenant ?

 

– Pose pas de questions, Smith, ça vaudra mieux pour tout le monde.

 

– C’est ballot finalement, Mick, parce que je t’aurais bien demandé l’heure qu’il est. Le temps passe curieusement ici.

 

– Pas aussi bizarrement qu’au placard, crois-moi. J’ai pas oublié que je te dois huit années de black-out sans remise de peine.

 

– Ben, quand on peut aider un brave truand à faire un peu le point sur sa vie de merde, faut jamais hésiter. Sans parler qu’à l’époque j’étais quand-même payé pour ça, hein ! Pas des masses, c’est certain, mais chaque fin de mois sans faute. Si je me rappelle-bien, tu aimais un peu trop les cailloux brillants que tu volais à d‘autres, Hurricane Mick. La liberté ne te réussis pas, on dirait, qu’est-ce que tu viens foutre dans cette galère ?

 

– Boucle-là, Smith, lâcha Grand Tonio sur un ton coupant, tout en faisant un geste explicite aux deux autres pour signifier que le restaurant allait fermer sur ces trois derniers clients et qu’ils devaient à présent décaniller pour leur faciliter la digestion.

 

– Toi, la tige filetée, tu m’as l’air aussi grand que t’es con, lui balança Vaya avec son air vachard.

 

Mais la porte se referma sans apporter la moindre confirmation là-dessus. Il fallait bien manger un truc, surtout que Martin se sentait encore faiblard après sa prise de sang. Dans les trois assiettes posées sur le large plateau, gisaient quelques patates chaudes baignant dans une sauce épaisse. Trois yaourts accompagnaient ce repas de fête et les prisonniers n’allaient surement pas se quereller sur le choix des fruits. Ils mangèrent d’abord en silence, puis Strazdinovsky écrasa son yaourt vide d’une seule main, avant de lâcher sa petite compression sur la table.

 

– Et donc, Smith, vous connaissez ce loufiat ?

 

– Un peu mon neveu, j’ai même failli tringler sa cousine, parce qu’elle pensait qu’un contact rapproché entre nous ramollirait mon enquête. Une câline aux yeux de rêve, soit-dit en passant, mais rien d‘une mondaine, à la vérité. Une fille que j’ai souvent vu saoule à onze heures du matin, hélas.

 

– Ouais, ouais, fit Vaya un rien ironique, je suis sûre que tu l’as fait. Figure-toi que je sais parfaitement que toi, tu n’as rien d’un ramolli quand tu veux. Elle battit brièvement des cils vers lui sur un entrechat séducteur.

 

– C’était il y a fort longtemps. Et puis, si cette affirmation peut servir à te rassurer, à présent je n’aime que toi, chérie.

 

– Et bien vous m’inviterez à votre mariage, vous deux, fit Gordon en étouffant poliment son rot. Il chercha en vain dans sa poche un paquet de cigarettes. En attendant, si vous désirez tirer un coup, je vais m’en aller pour vous laisser tranquilles.

 

Sa blague tomba pourtant à l’eau, parce qu’elle les ramenait tristement à la sévère réalité de leur situation. Martin manipula un instant sa fourchette entre ses doigts, comme s’il pensait qu’elle pouvait fournir une arme efficace, puis il la balança d’un geste un peu brusque devant lui. On n’arrête pas la bastos crachée par un Browning avec une raquette aussi minuscule. Quand à penser planter les dents de cet outil dérisoire dans la viande ennemie, il valait mieux ne pas trop l‘envisager. Vaya avoua son soulagement de n’avoir pas vu Gros Bill, ce tas de lard lui collait une sainte trouille, avec ses yeux porcins et ses mains baladeuses. Son cœur de femme tremblait devant les intentions à peine réprimées par ce sadique. Pendant ce temps, le rafiot tanguait dur au vent mauvais, luttant vaille que vaille contre les éléments naturels et une heure plus tard, aussi nauséeux qu’un quidam raide bourré, Gordon dégueula son repas dans l’unique lavabo entartré équipant la cabine. Martin lui-même s’allongea sur le sol, qu’il préféra au moelleux de sa couchette, sa tête aux yeux fermés prenant appui contre le mur à la mobilité têtue. Au contraire, Vaya resta longtemps debout, les joues creusées par une angoisse visible et son regard ne lâchait pas les hautes vagues salées qui léchaient le hublot par intermittence. Un mélange de trop plein et de vide qui eut à son tour raison de son pauvre estomac torturé. Le lendemain, en fin de matinée, la mer s’était un peu calmée, offrant au cargo hostile la possibilité d’arpenter les flots au gré d‘un rythme moins chahuté, ce qui soulagea grandement le trio reclus. Personne n’avait trouvé le sommeil et leurs traits fatigués portaient le témoignage de cette nuit éprouvante. Rêvant d’intimité physique, Martin et Vaya se prirent longuement dans les bras pour se réconforter, ignorés pudiquement par un Strazdinovsky qui roula sur le flanc au milieu des draps sales. Il ferma ses yeux bleus pâles pour s’immerger vaille que vaille au sein du monde chaotique de ses rêves contrariés. Mais l’embrassade des amoureux en resta là, car les pensées de Martin étaient plus avides de sang versé que de câlins. Dans la soirée, Hurricane Mick revint leur apporter des assiettes de crevettes, promenant derrière lui les deux autres enfoirés armés de leurs joujoux, de bons pan-pan qui rendaient pour le coup Martin Smith fataliste et modeste.

 

– Dis-donc, Hurricane, on dirait qu’on vient de traverser des eaux plutôt sauvages. Je voudrais surtout pas voir ma gueule dans un miroir ! Il s’appelle comment d’ailleurs, ce bateau ?

 

– Le Play boy of the sea, tout le contraire de toi en ce moment, effectivement.

 

Gros Bill et Van Degaffe se pointèrent à leur tour sans crier gare. Du moins, il fallait supposer que c’était bien le savant fou, car il arborait trait pour trait le physique de Gordon. Martin et Vaya en restèrent bouche-bée, mais le vrai directeur des Flocons d’argent fut moins submergé par l’émotion, puisqu’il avait déjà été familiarisé avec l’étrange combine. C’était pourtant son propre visage qu’il avait le loisir de contempler sur la tronche du nouveau-venu. Un don de soi involontaire qui donnait vie à un parfait sosie, à la cicatrice près. Un portrait étonnant et parfaitement réussi qui portait témoignage de la virtuosité du docteur cinglé, en lui faisant endosser l’identité physique d’un autre. Une performance exceptionnelle différente, certes, mais que l’on pouvait adjoindre à ses succès lorsqu’il décuplait la longévité de ses riches clients. Un très beau cadeau qu’il monnayait à prix d’or en catimini dans sa base Hawaïenne. En attendant, sa présence spectaculaire en tant que doublon de Strazdinovsky devant ses prisonniers n’était pas faite pour purifier l’atmosphère de leur prison. Martin Smith ne goûtait guère les approches novatrices de ces expériences parallèles, en reluquant devant lui le résultat bluffant des processus systémiques mis en œuvre par le clone bigleux. La plaie au bras de l’ancien flic provoquée par la femme-rat et le rappel de ces gosses martyrs utilisés pour les odieux bidouillages organiques composaient une visite guidée largement suffisante pour avoir un avis sur les progrès créatifs de toute cette merveille. La métamorphose extraordinaire de Van Degaffe ne faisait certainement pas de ce type un humaniste, elle restait néanmoins fascinante. Si l’on s’appuyait sur le résultat de ses travaux, le doc ne faisait plus du vieillissement un fait inéluctable et ses cures de jouvence semblaient bien réelles, le vrai Gordon en avait dressé pour le couple enfermé avec lui un tableau précis. On s’éloignait franchement d’une simple méthode pour rendre les ventres plats, c‘était tout le métabolisme des vieillards que ce barjot était visiblement parvenu à modifier, pour lui rendre l‘aspect de ses vingt ans. Ce cinglé génial plongeait à bras le corps au cœur d’un des plus vieux fantasmes de l’humanité pour apporter au corps de ses patients friqués une nouvelle jeunesse, d’une qualité remarquable, en régénérant leur coquille de chair usée. Mais il le faisait sans vergogne à l’aide d’expériences épouvantables qui lui faisaient lécher sans honte le trou de balle des dieux. Une mise en plan qui ne pouvait laisser aux esprits sains le souvenir d’un goût de noisette, mais plutôt celui du pauvre sang innocent. Inutile pour Martin et Vaya de fuir l’évidence, la réalité de l’horreur leur faisait face, alors que Van Degaffe les mettait dans le bain de sa folie par sa simple présence. Son génie névrosé au service d’un travail approfondi de reprogrammation neurologistique par adénoplastie et sa façon odieuse d’apprivoiser l’ignoble pour se retricoter un nouveau corps, en piquant celui d’un autre, poursuivait en définitif un objectif démentiel. Le sourire sardonique du savant transmué qui toisait Martin Smith à présent cessa sur le champ de provoquer chez le privé la moindre étincelle d’émerveillement. Un malaise identique habitait Vaya, mais sa peur paraissait plus visible, car elle prenait naissance au plus profond d’elle-même, issue peut-être d’une fragilité plus féminine. Une trouille à peine contenue dans laquelle venait s’entremêler un poignant sentiment de tristesse. L’ordure folle en blouse blanche qui la regardait à présent maîtrisait peut-être le temps normal de l’évolution humaine, il avait pour ce faire écourté la vie d’un bon nombre d’enfants atrocement charcutés dans son labo. Rien que pour ça, ce meurtrier devait crever.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Bon, je vais demander un peu de sel à côté.


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 07:57:22
n°48976705
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 12-03-2017 à 10:10:47  profilanswer
 

 

Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou - extrait Numéro 25.

 

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Gaston fait le pied de grue devant l’épicerie close, puisque Marité a fermé sa boutique pour la semaine. Désemparé par une telle absence, car il n’en connaît pas la raison, le jeune garçon sent monter en lui une pointe d’inquiétude, qu’il décide de combattre en partant dans Troulbled à la chasse aux infos. C’est en provenance de la femme du boulanger que la nouvelle tombe, l’épicière s’est déplacée à Paris pour assister au premier Festival International de Pop Music au palais des sports, afin d’y voir et écouter entre autres Eric Clapton. Elle va loger le temps de son séjour qui va durer en réalité le mois tout entier, chez une de ses cousines qui habite en banlieue, où les journaux y déplorent d’ailleurs en ce moment un taux plus qu’alarmant d’agressions de femmes isolées. Cet éloignement forcé de la belle Marité provoque autant de dégâts dans le petit cœur amoureux de Gaston Boudiou que l’explosion de la cinquième explosion nucléaire. La bombe A tricolore vient en effet de déchirer cette fois le ciel de Mururoa, la nouvelle base française du pacifique, un océan visiblement très mal nommé. L’adolescent s’enferme dans sa chambre et révise son B.E.P.C, qu’il obtient finalement haut la main, après avoir donné en guise d’adieu à son professeur de mathématiques un brillant cours d’astronomie. Après l’été, il rentrera en pension au Lycée Jean-François Champollion de Bripue, au grand dam d‘Angèle qui supporte difficilement l‘idée de se voir séparée de son demi-frère. Alors que des vents violents passent en tornades sur la France, en raison d’une météo bouleversée, le hangar déjà branlant de la ferme Boudiou s’écroule complètement avec un grand fracas, triste illustration signalant la fin du monde de Mémé Ernestine. La longue coupure électrique la ramène ensuite  temporairement à l’époque de la lampe à pétrole qu’elle allume pour s‘éclairer. Son petit-fils planche donc pour s’occuper, quand il est assis bougie en main dans la minuscule cabane extérieure d‘aisance, sur un vague projet de lampes à vapeur de sodium haute pression. Incapable de cicatriser la douloureuse plaie mentale provoquée par la vision de l’autre barbu grimpé sur Marité, c’est cependant le raid vengeur qu’il compte organiser en compagnie de Jean Micheton chez les hippies qui monopolise toute son énergie, en ce début d’été au ciel menaçant. Ils ne manquent ni d’élan ni d’idées pour prouver à l’autre clochard la fierté des gars de Troulbled, à coups de pieds dans ses roustons aussi baladeurs que mal lavés. La fleur vénéneuse qui s’épanouit dans les esprits échauffés des deux amis ne ressemble pas à celles qui s’affichent en colliers sur les torses dénudés des copines folkloriques de Marie-Charlotte. Des indépendantes rigolardes et scandaleuses qui refusent obstinément de pointer à l’usine, pendant que leurs mecs boycottent effrontément les salons de coiffure, en agitant ostensiblement sur la tête de longues toisons de balais faubert.

 

A deux sur la mob de Jean qui fait le frimeur en faisant vrombir son moteur, ils foncent vers l’ancienne ferme de Papi Léon et parcourent rapidement le chemin si bien connu de Gaston. En slalomant entre les nids de poule, il suit effectivement la vieille piste de son enfance, un poil rassuré par le fait qu‘elle ne sera probablement jamais bitumée. Ils s’arrêtent finalement pour se retrouver au milieu de la cour bruyante, où s’offre à eux un spectacle pittoresque. Des drapeaux multicolores flottent au vent, hissés sur de hauts mâts. Mains sur les hanches, psychologiquement prêts à la lutte, Gaston et Jean observent devant leurs yeux ébahis des filles très jeunes à moitié nues qui tanguent sur une musique tour à tour planante et tourmentée, ces fameux airs de rock qui sont en train de mettre le feu à la planète, du moins en occident. Elles n’ont pas forcément l’air de nanas névrosées en pleine crise, mais se trouvent simplement plus défoncées que des bidons vides, par le LSD qu’elles ont gobé au saut du lit. Plus loin, s’organise dans la bonne humeur le mariage officiel d’un scandinave aux grandes lunettes rondes qui a décidé d’épouser un sapin, richement enguirlandé pour l‘occasion. Un comité goguenard et survolté célèbre l‘événement en encerclant l’arbre, verres de blanc bien remplis à la main. Tout le monde ici a l’air de bien se marrer, une joie partagée que Gaston culpabilise soudain de vouloir éteindre par ses velléités vengeresses. Sur l’une des tables encombrées de déchets divers, traîne justement un panier vide affublé d’un écriteau qui indique en français qu’il est là uniquement pour piéger les mauvaises vibrations. La ferme est méconnaissable et de l‘une de ses fenêtres ouvertes au volets repeints de couleurs criardes, s‘échappe en revanche le son méditatif de lancinantes cordes indiennes. Une musicalité rendue presque solide, puisque d’incessantes volutes de fumée de Marijuana l’accompagnent en même temps. Un assemblage hétéroclite de vieux engins agricoles rouillés a été ressoudé pour composer près du puits une monumentale sculpture baroque, sur laquelle sèchent quelques jeans brodés de fleurs et bien troués. A même le sol, un type aux bras nus assis en tailleur sur une couverture berbère fait de la vannerie. C’est le seul qui donne l’idée de s’occuper à quelque travail. Si l’on s’interpelle ici et là en français, beaucoup de ces chevelus sont américains. Visiblement, ici, le seul mot d’ordre semble être de s’amuser en permanence pour effacer la grisaille du monde, en faisant preuve d’une insouciance très communicative. Affublées de draps tendus qui leur font des auvents, de vieilles guimbardes servent à l’évidence moins de véhicules de transport que d’abris provisoires ; il y a pourtant ce bus bigarré fleuri de pompons qui n’attend plus que de rassembler ses joyeux passagers pour les amener aux Indes. A l’autre bout de la planète. Des guitounes et des tipis sont plantés un peu partout sur la prairie. Ce théâtre bon enfant déstabilise profondément les deux garçons, plus occupés à décoder les aboutissants de tout ce fatras qu’à se rappeler le motif réel de leur venue. Tout ce qu’ils découvrent autour d’eux semble si scandaleusement étrange ; ils sentent peu à peu que leur expédition belliqueuse se noie dans une ambiance qui vient anéantir d’elle-même le moindre germe de violence. Ils cèdent en revanche complètement à l’irrésistible attrait d’une énorme curiosité. Les autres les observent sans malveillance, sans paraître une seule seconde s’interroger sur les raisons de leur intrusion soudaine au milieu de la tribu. Un accueil cordial qui transforme leur présence en une réalité parfaitement naturelle. Une belle tige blonde s’arrête même de danser et s’approche d’eux pour les interpeller avec un grand sourire. L’accent lâché par ses lèvres admirables rajoute à l’envoûtement qu‘elle provoque sur les jeunes hommes, lesquels baissent la garde bien malgré eux.

 

– Ho little boys, a beer ? Vous venez pour la fête ? Vous-êtes du coin, are you  ?

 

Jean Micheton ferme sa grande gueule devant l’invitation sympathique. Il n’a d’yeux que pour les tétons du mignon mannequin qui percent sous son tee-shirt blanc. Il faut dire que la fille les embrasse d’emblée sur la bouche, puis leur tend une bouteille de Kronenbourg à chacun. Elle est avenante et absolument très jolie. Moi, je viens de Chicago et j‘arrive d‘Ibiza, leur dit-elle, toujours avec sa voix charmante, mais je suis la citoyenne du monde entier, rajoute-t-elle encore, alors qu’ils s’emparent finalement des bières et qu’ils n’osent lui répondre quoi que ce soit. Le cadre étriqué des pensées de Gaston et Jean vient en fait instantanément d’exploser, sans qu’ils s’en rendent vraiment compte sur le coup. Il est cependant indéniable que l’ambiance de jeunesse amicale provoque sur eux sa véritable attraction. Pour se donner une contenance, Jean sort une gauloise sans filtre, la fille qui dit s’appeler Wendy lui propose de venir fumer un truc bien meilleur à l’intérieur de l‘habitation. Ils la suivent docilement, toute fausse fierté soudainement évaporée, conquis un peu malgré-eux par l’ambiance festive proposant une certaine idée du bonheur de vivre tous ensembles, les deux amis pénètrent dans cette maison qui a autrefois abrité les jeux enfantins de Gaston et d’Angèle. La communauté rassemblée ici aurait sans nul doute fait frémir de rage le vieux poilu papi Léon. Plus grand chose ne rappelle d’ailleurs l’ancien propriétaire, les murs repeints son couverts de grandes fresques assez jolies, des poufs et des matelas couvrent le sol, sur lesquels s’écroulent des gars et des filles déglingués. Une épaisse fumée opaque floute ces ombres avachies. Wendy a posé son petit cul sur le rebord en pierre de la cheminée éteinte, où se trouve déjà assise Marie-Charlotte de la Tronchedecon, perdue les yeux fermés sur un rêve personnel qu‘autorise le large financement de son baron de papa. Ce n’est plus une nouvelle bière qu’un type en treillis militaire délavé propose cette fois aux invités, mais du thé brûlant. La musique d’un groupe nommé Pink Floyd remplace bientôt le son du sitar indien. Des bâtons d’encens à l’odeur suave fument en volutes, dont les colonnes tranquilles s’élèvent vers le plafond. L’atmosphère calme et paisible achève d’éteindre complètement l’ardeur guerrière des deux copains, qui s’accroupissent désormais volontiers entre deux petites brunes aussi mignonnes que bienveillantes. L’une d’elles est vêtue d’une longue robe en coton constellée de minuscules miroirs, qu‘elle a largement remontée sur ses cuisses. Tous ces hippies ont l’air de développer ici avec grandiloquence une personnalité absolument unique, dont les vêtements bigarrés ne représentent que l’un des signes le plus visible. Comme deux poussins brisant leur dures coquilles, Gaston et Jean ont l’impression d’avoir brusquement ouvert la porte sur un monde étrange, où chaque nouveau pas les amène à découvrir d’étonnants secrets. Ils sont littéralement emportés par l’attrait magique de toute cette originalité qu‘ils découvrent de l‘intérieur et qui vient bouleverser l’ensemble de leurs préjugés. Même quand ils aperçoivent de loin le parisien qu’ils voulaient massacrer et qui les salut à présent d‘un petit geste de la main, ils restent sans réaction, alors que l’une des filles leur fait passer le joint. A cet instant précis, emporté par l’ambiance, Gaston ne pense même plus à Marité Hissedru. Très vite, dès les premières bouffées de haschich qu‘ils aspirent tour à tour franchement, la musique psychédélique les emporte dans son crescendo hallucinatoire. Le temps ralentit, Jean se sent flotter et tout dans la pièce perd sa banalité pour devenir très bizarre. Bing bang dans les caboches. Quelque temps plus tard, l’intérêt de Gaston Boudiou pour les stupéfiants sera si vif qu’il mettra lui-même au point de nouvelles drogues dans sa chambre transformée en laboratoire clandestin : le Quadritorgniole suractif, L’ADSLSD biluoré, surnommées au début des années 70 par leurs consommateurs les détonateurs psychiques QSAB et encore plus joliment appelés « Poudres à Manon ». Des produits basés sur des molécules psychotropes si puissantes que Gaston en détruira assez vite les formules pour protéger l’humanité du chaos.

 


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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:01:10
n°49053911
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 19-03-2017 à 10:13:27  profilanswer
 

 

Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : L'épilée du Nil - extrait Numéro 71.

 

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 Thèbes la magnifique ne l’était plus vraiment, il régnait au palais une ambiance délétère, un climat d’oppression diffuse s’abattait en effet sur ses nobles hôtes et une grande partie du personnel de maison. Si les assassinats de paysans avaient cessés aux alentours de la capitale après la mort du roi, la résidence royale souffrait terriblement de la nouvelle personnalité de sa sœur, sans que l’on puisse en comprendre la raison réelle. Quand à cette dernière, sa transformation soudaine lui provoquait de multiples désagréments qui la rendaient plus que nerveuse. Par exemple, la première fois que Schrèptètnuptèt-Tahosétlafer-Ramassidkouch essaya d’uriner, la momie réincarnée manqua de se casser la gueule, car elle ne savait plus si elle devait s’accroupir ou rester debout. Les trois entités bataillaient continuellement pour prendre le contrôle de ce pauvre corps, en lui fournissant un carburant mental propre à l’alimenter d’une singulière psychose. Piétinant sans scrupule les liens sacrés du sang, la pharaonne par intérim se désintéressa totalement de son fils éclopé Moisi, obligeant tout de même sa nourrice Keskiya à le protéger tant bien que mal des dangereuses bouffées de colère maternelle. La nouvelle Schrèptètnuptèt se montrait en effet avec son pauvre rejeton d’une brutalité extrême ; peut-être se trouvait-elle déçue de n’avoir point livré à l’Egypte, en guise de prochain pharaon, un beau gosse bien sapé au sourire de loup. Harcelé en continu par son irascible maman, son petit corps débile recouvert d’ecchymoses, le malheureux bambin trainait du soir au matin son éprouvante misère pour tenter de lui échapper en louvoyant entre les colonnes de porphyre des splendides appartements. Les serviteurs n’étaient guère mieux lotis, ils croulaient sous les heures supplémentaires non payées et le non paiement de leurs congés annuels, naturellement revus par cette monarque maudite à la portion congrue. Sans compter les douloureux coups de fouet délivrés à foison par d’odieux contremaîtres, puisqu‘il y aura toujours de sombres tarés disponibles pour ce genre de mission. Les syndicats d’esclaves se voyaient de fait complètement muselés par la nouvelle tyrannie, alors que les musiciens, les perruquiers et les danseuses recevaient l’ordre de leur maîtresse de dormir moins pour travailler plus. Même les prêtres d‘Isis autrefois si puissants se tenaient à présent à carreau. Peut-être pour se venger des dieux qui la, ou le, faisaient à présent se vautrer dans une vie devenue bien merdique, Schrèptètnuptèt-Tahosétlafer-Ramassidkouch avait en effet singulièrement réduit l’enveloppe budgétaire dédiée aux temples thébains. Terminés les veaux, vaches et cochons offerts à foison au clergé. Embarrassée dans ses nouveaux oripeaux, bousculée en profondeur par son extraordinaire bouleversement neurocognitif, la momie s’attachait à rentrer dans l’histoire en faisant pas mal de bruit. Puisque le test magique de sa survie liant trois existences en une seule, certes sous la belle apparence d’une femme distinguée, plongeait l’Egypte toute entière dans une époque vraiment désastreuse. Sans compter que la formidable crise financière déjà en cours portait à présent les créances de la banque Royale à plus de 1 600.000 quintaux de céréales bio et 787 milliards de dindons et de chèvres. De plus en plus, l’Egypte plongeait dans la faillite, avec le risque que les Amorites, les Lybiens ou les Hyksos ne viennent à profiter de cette faiblesse pour déborder, sabre à la main, des frontières bien mal défendues. Ceux-ci se tenaient d’ailleurs effectivement prêts à faire une guerre impitoyable à leurs voisins. Les étrangers vindicatifs agitaient lances et boucliers pour railler par provocation les bédouins du désert, pauvres nomades qu’ils apercevaient parfois dans les dunes, en leur gouaillant des airs pleins de méchante ironie, du genre « Si t’es fier d’être égyptien tape dans tes mains ». On racontait aussi dans Thèbes qu’un groupe d’anarchistes Kouchites avaient tragiquement fait sauter la litière d’un noble dans les rues de Memphis, dans le but de défier la couronne, en agitant follement les brancards pour faire tomber son illustre passager, après avoir mis les porteurs hors de service. Plusieurs étals de potiers venaient également d’être pillés dans cette même ville, puis sauvagement saccagés, malgré le déploiement de trois compagnies du Corps Royal Shardanes envoyées pour contenir les émeutes dévastatrices.
 
 Doublement homme dans un seul corps de femme, au demeurant pas mal roulé, Schrèptètnuptèt-Tahosétlafer-Ramassidkouch se sentait toutefois plus masculin que féminin, il finit par convenir qu’il préférait les courses de chars à la création de bouquets de fleurs. Las de cogner sur le petit Moisi, complètement libéré de tout instinct maternel et ne se rappelant plus grand chose des motivations personnelles précédent sa réincarnation, il ordonna finalement un matin de noyer ce vilain mioche dans le Nil. Sans cet héritier, l’incarné compromettait sa propre légitimité à régner ; mais conforté par le climat de terreur qu’il provoquait sans arrêt dans le palais, il s’en moquait à présent éperdument. Certainement portée par un désir de maternité non satisfait, la triste servante Keskiya ne pouvait se résoudre à l’abomination de filer le pauvre chérubin difforme aux crocodiles. Elle pria de toutes ses forces la déesse Hathor pour avoir le plaisir d’assister plus tard aux délires d’ado de Moisi et le voir grandir jusqu’à ce qu’il atteigne ses 1,80 m. C’est pourquoi, sortant l’enfant de sa couette, elle décida de fuir avec lui dans les bras par une petite porte percée dans la muraille du palais. Ensuite, elle monta avec l’enfant dans un grand panier en osier qu’elle poussa sur les vagues tranquilles au cœur de la nuit. Et vogue la galère au milieu des ibis endormis et des nénuphars, le cœur noué par l’angoisse d’être poursuivie par les gardes royaux. Elle dériva cependant sans anicroche au gré d’un fort courant, bien loin des eaux thébaines. Incapable de placer les bons mots sur sa peur, Moisi se contentait de pleurer dans les bras de son héroïque sauveuse, mais il sentait bien qu’en quittant l’emprise de sa salope de mère, il était bel et bien en train de l’échapper belle. Et puis, sa brave nourrice était si prévenante et si gentille avec lui, cette femme aux yeux si doux toujours vêtue de sa nuisette 100% soie d’un blanc d’ivoire qui le choyait depuis sa naissance. Il savait bien qu’elle aurait donné sa vie pour le protéger des pédophiles actifs, si nombreux chez les prêtres de Khnoum, ce dieu à tête de bélier dont on disait qu‘il façonnait les enfants sur un tour de potier, pour mieux les peloter tour à tour, sans doute ! Dans la lumière de l’aube rouge que Rê diffusait progressivement sur le grand fleuve salvateur, Moisi et Keskiya se virent finalement sauvés des autres, avant de débarquer de leur fragile esquif sur la grève désertée.                                            

 

Portant peu d’attention au petit personnel et ne remarquant pas l‘absence de la courageuse nourrice, content d’imaginer enfin son moutard au fond de l’eau, Schrèptètnuptèt-Tahosétlafer-Ramassidkouch fut satisfait de se croire définitivement débarrassé de ce gamin infirme et encombrant, conformément aux ordres donnés. Incapable de se gratter les parties selon son habitude, il émergea de son lit ce matin-là en se caressant plutôt les cheveux. Avec encore un écoeurant goût de paprika au fond de la bouche, il fit sonner sa petite cloche en bronze pour appeler son barbier, se ravisa en voyant sa tronche dans un miroir d’argent et préféra réclamer ses maquilleuses. Elles se présentèrent accompagnées d’un représentant de commerce nommé Gémémébeline-Solucebôté, tout juste remonté du grand sud pour venir vanter aux riches thébaines son excellent produit phare provenant de Sumer, qu’il nomma avec emphase « Palette de Narmer », une merveille certifiée aux Normes Méditerranéennes. C’est seulement lorsqu’il évoqua l’enthousiasme de la pharaonne en titre Néefièretarée pour ce fard à paupière révolutionnaire, puisqu’il lui en avait vendu six bons kilos, que le souvenir de cette poufiasse de rivale revint à la mémoire de l’ex-momifié. Avant de refaire une beauté à leur maîtresse, les maquilleuses avaient chaudement recommandé la plus grande prudence au VRP, dans ses paroles et dans ses actes, vu que les lubies soudaines et brutales de la patronne pouvaient donner le frisson aux plus patients.

 

– Elle a une haleine qui sent le pagne grec et une voix de mec, sans compter que sur elle, le Khôl ne tient jamais.

 

– Elle nous considère pour moins précieux que ses meubles.

 

– Elle ne construit plus de monuments et les produits du terroir, elle n‘en a plus rien à secouer. Même ses nouvelles perruques sont importées de la gaule chevelue.

 

– Elle a viré 500.000 fonctionnaires.

 

– Un seul mouvement de son poignet t’envoie directement aux crocodiles ou dans le bide de son guépard, pour une simple broutille. Ou tu perds tes oreilles et ton nez.

 

– Elle persécute les prêtres et ne va plus au temple. Tu vas voir, Horus nous vienne en aide, pénétrer dans sa chambre, c’est rentrer dans les flammes.

 

Après leur départ, seul devant sa commode à contempler ses cheveux rouges et ses yeux violets, sa tronche fardée d’albâtre, de vieux poisson, de myrrhe et de natron brûlant, Schrèptètnuptèt-Tahosétlafer-Ramassidkouch se leva pour se rendre sur la terrasse entourée de treillages. Là, à l’ombre d’un kiosque aménagé sous un grand jujubier, la triple momie se rappela enfin qu’elle n’était toujours pas pharaonne, en dépit de son pouvoir absolu sur Thèbes la jolie et d‘une âme devenue réellement éternelle. Tirant sur la peau de son cou distendue, elle regretta peut-être quelques gouttes de clepsydre d’avoir tué Moisi. Mais remplie d’une haine vengeresse à l’égard de Néefièretarée, elle décida de quitter la ville sans attendre pour aller en personne faire rendre gorge à la reine de ses propres mains, dans le sud du pays.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:03:59
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talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 26-03-2017 à 11:28:13  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 24.

 

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Sous les étendards cannibales tannés en peau humaine, ballotaient encore par provocation de pauvres têtes Bozobites, dont les cheveux blanchis témoignaient d’une vie qui fut longue et heureuse. Ou bien les Onkulés brandissaient de simples crânes débarrassés de leurs chairs fraîchement rongées, tout bonnement fichés sur de longs pieux en bois. D’épaisses fourrures de renne couvraient ces mangeurs d’hommes et de terribles colliers d’os s’agitaient à leur cou grossièrement tatoué. Ils ne vénéraient plus de reine, ils n’honoraient plus de roi et l’issue de la guerre pour eux semblait perdue. En bonne colonne, les gens des grottes marchaient sur eux d’un pas décidé. Les cannibales avaient en effet toutes les raisons de trembler face aux hommes de Brakemar à la braguette velue, puisqu’il déploya son armée de façon à prendre l’ensemble des viandards en étau. Montés sur la falaise en éclaireurs, Wallala forte fesse, Vélan Dansonku, Aragne reine des joutes, Osgard belle anguille, Isolde le bas blanc, Kilav le blanc et Ursuline grande ciguë revinrent en racontant qu’ils avaient aperçu le roi Karbone, la reine Naphtaline et tous les survivants du sac de Bozob cruellement encagés derrière les lignes ennemies. La princesse Agrippepine dansa aussitôt la ronde avec son jeune cousin, en apprenant que ses parents chéris n’étaient point dévorés. Brakemar heurta la pogne des gars de la communauté, se baissant même pour atteindre celle du nain Belbit du pays de la Godée, en remerciant les étrangers de leur prêter main-forte au combat annoncé.

 

– Y’a pas, mes gars, on est ben fier d’avoir ceux de votre gang en compagnie, vu qu’on va en câlisser une bonne dsus la gueule de cette criss de bande de criminels en maudit, pour clearer nos dettes à fin de toute. C’est pas long qu’on va leur turlutter ben comme y faut, aux gros zéros qui mangent leurs ciboires de père et de mère. Le roi Karbone XIV, ct’un homme en moyen qui se torche pas avec de l’écorce de pin, vous verrez ben après l’affaire, je vous le dzis, il aura pas les mains pleines de pouces pour vous remercier.

 

– Certes, fit Mirlen en approuvant ses dires avec courtoisie, mais ce n’est point l’attrait de l’or qui nous pousse à vous aider. Nous éprouverions certainement grande honte à ne point vous venger. Puisque seule Sainte Kramouille le commande et le veux. Nous ne servons pas notre gloire personnelle, messires des hautes grottes, mais simplement la sienne !

 

– On est willing, Brakemar, c’est quand tu veux, les interrompit un peu sèchement Trakenar Sonfrok alors que, rabaissant son heaume reluisant, il se préparait lui-même à prendre la tête du deuxième corps d’armée. A pas le temps de jouer les branleux, faut y aller now, agite donc voir maintenant le signal, pour faire bouger ta criss de troupe !

 

Sur un geste explicite de leur chef, la formidable armée cogna donc bravement ses ronds boucliers, puis les guerriers troglobites s’élancèrent au pas de course dans les prés ras en fouettant les lamas, afin de s’affaler comme nuées du ciel sur le clan ennemi, aussitôt encerclé. On tira des flèches à l’envi en semant la terreur, le carnage et la mort chez les cannibales du Mont Velu. De cette manière, on en supprima rapidement et d’un seul coup 56 358, hommes, femmes et enfants. A chacune des dangereuses volées, beaucoup d’anthropophages tombaient dans la prairie comme baleines échouées, puisque de nombreux traits venaient boucher les trous que la nature leur avait déjà sagement distribué au jour de leur naissance. Ensuite, on cingla franchement les autres avec l’épée, Hivalanoué se démenant plus que les autres pour planter la sienne bien au fond des gosiers mangeurs d‘hommes. Flanc de pute et Kurt caniche tombèrent hélas le ventre ouvert à ses côtés. En compagnie de William, le chevalier Erald n’était point en reste, car il se donnait mission particulière d’occire jusqu’au dernier ceux qui avaient si traîtreusement tourneboulé sa mie. Car c’était finalement à cause d’eux que dame Helga Tétipayday était entrée en paradis, sous les propres coups furibonds de son fiancé. Ce dernier fut sauvé de justesse par un coup de maître qu’exécuta juste devant lui Olaf aux beaux tiffs. Dans la cacophonie des cris de guerre qui fusaient de cette grandiose mêlée, au bruit des chocs métalliques incessants et rageurs, la bataille sanglante donnait gloire aux combattants les plus hardis et perçait de la lance les moins vaillants. En dépit de leur précieux courage, on perdit tout de même pour toujours Katrakat au fier baston, puis Wallala forte fesse et Isolde le bas blanc, morte d‘un trait enfoncé en plein front. Le sang clair perlait de chaque brin d’herbe, puisque même les pauvres chevaux hennissants se voyaient sacrifiés par une rage démente. Les Onkulés s’opposaient farouchement, mais leur espoir de vaincre brillait de plus en plus comme un ciel sans soleil et la nuit de leur mort les enveloppa peu à peu, en signant l’apogée d’une victoire totale des Bozobis. Loin d’être en reste, Belbit coupait jarret sur jarret en s’aidant de son petit coutil, Mirlen tapait sur les caboches avec son grand bâton, au fur et à mesure que la lutte armée des habitants du royaume des grottes augmentait sa pression. Les morts horribles et douloureuses d’Atulsan tout en long et de Kilav le blanc, qui tomba tristement sous son cheval fauché, vinrent encore illustrer la farouche défense qu’opposaient les cannibales aux ongles dorés. Le sang coulait à flot entre leurs doigts crochus qui agitaient leurs pieux sur le champ d’épouvante. De tous côtés on gémissait, on roulait nus, l’acier tombait en pourfendant les épaules écarlates, on ouvrait brillamment des passages en balançant l‘épée, le fer des lances fauchait les autres à plus de vingt pas. On barbouillait les ventres déchirés de confitures puantes et avant qu’on ne leur coupe le cou, des Onkulés effrayés tombaient genoux à terre ; mais leurs cris répétés faisaient rire ceux qui leur séparaient la tête du corps, pauvres caboches barbues qui roulaient dans les pâquerettes au milieu des perles de verre lâchées par leurs colliers rompus.

 

– Lâcegratte! Lâcegras! Liséricordemem, car ma lairchem n'est loimpem lonnebem à langémem!

 

Et sans aucune pitié, bien au contraire, leurs bourreaux de Bozob les frappaient sauvagement,  en passant outre à leurs supplications :

 

– Tiens prend donc ça, tabarnak, tu pueras moins de ta gueule en ostie ! ça goûte ben drôle de te raccourcir sans anesthésie pour t’opérer les cordes vocales. Je m’en vas te l’enlever, moué, ton acré masque d’Halloween, criss de plein de marde ! C’est sûr, cré-moé, cré-moé pas, mais après ça, je te dzis, tu seras encore plus court d’esprit, pis t’auras ben du mal à te les bouffer, tes crottes de nez !

 

Les Onkulés avaient perdu, à présent ils payaient le prix de la défaite et n’aurait point la gourmandise de se repaître des vaincus. C’est ainsi que le sort des nombreux blessés fut promptement réglé. Au pied de la falaise, les Troglobites n’en laissèrent pas un seul en vie. Bien que très fatigué, Brakemar avait bonne mine, il ordonna sans attendre la délivrance des prisonniers. Belbit le Huelabit fut très ému de revoir la reine de près, car il n’oubliait pas la douce promesse qu’elle avait formulé, avant sa périlleuse descente en panier dans la vallée de Bogland. Elle lui jeta d’ailleurs brièvement une doux regard complice.

 

– Avez-vous toujours votre flûte, messire nain ? car par Notre dame de Kramouille, watch ben ça que j’aurais grand plaisir à la voir et l’entendre.

 

Comme de bien entendu, la princesse Agrippepine tomba follement en pleurant dans les bras de sa chère maman. Issue des retrouvailles, une effervescence plus joyeuse régna longtemps sur le champ de bataille aux jonquilles dévastées. Monoïsurmékoss se retira enfin de sa cachette, mais son père adoptif lui rappela qu‘il lui devait toujours une paire de claque pour avoir fugué. Le roi Karbone félicita Brakemar, mais peut-être plus encore son conseiller Tréponème le Pal, car bien que fort blessé à l‘épaule, l’homme à la barbe noire s’était férocement battu. En fin d’après-midi, six cent cruches d’eau claire piochée dans un torrent furent déversées sur les plaies profondes pour les laver. Toutefois, les chevaux et les lamas survivants réclamaient l’écurie, alors on termina d’étrangler pour le compte les blessés ennemis. Fendant la foule compacte et enthousiaste de ses soldats émus, Karbone fut porté en triomphe sur un grand bouclier. Et puis, curieusement, toute cette formidable armée retomba dans la banalité des papotages à l‘accent singulier, puisque victoire acquise, il fallait à présent retourner au logis. Toutefois, Mirlen le mage avait causé avec ses compagnons de la communauté de la gnôle, ils avaient décidé de ne point retourner vers Bozob, puisqu’il leur fallait repartir en quête de la fleur de Pinette, en prenant cette fois la direction du nord pour atteindre le Mont Chauve.

 

– Nous en sommes désolés, messire Karbone, fit Mirlen, mais nous avons mission sacrée. Vous avez remporté belle victoire et nous sommes heureux d’y avoir contribué, mais notre quête n’est point achevée. La reine Amanda Blair du Fion, my lady l’imburnée, reine des mandales, pleine des derniers hommes, doit être sauvée des glaces qui lui gèlent la cuisse et cette précieuse Pinette qui réchauffera sa faille d’amour sera bientôt à notre portée. Nous vous saluons donc ici et vous souhaitons bon retour chez vous. Nous espérons que les grottes de votre cité seront promptement restaurées.

 

– Ayoye, mes amis, en vrai nous en avons le cœur ben meurtri de vous voir aller, criss de colons, mais nous comprenons votre désir. Prenez garde à vous, car le maudit Mont Chauve est connu pour cacher pleins d’embûches, tabarnak, ça goûte la chnoute là-bas, dans les hauts du Bonanzaza ! Adieu donc, acré ramancheur de Mirlen de La Pérouse, dit Mirlen le tchatteur, adieu, chevalier Erald de Bavevieux, adieu chevalier Hivalanoué, adieu, messire William de Bochibre, seigneur de Balaizebaloches, adieu, Belbit le Huelabit, du pays de la Godée. Ah p'tain, c’est total fucké d’aller gosser dans le nord du Minouland, mais là, tu me vois de proche, ben chuis radieux d’avoir pu rencontrer la face de vous autres. Ouais, vous avez ben fait la job et j’men va vous filer du cash de piastres, prenez donc ce bon sac d’or, il devrait vous aider pour le reste du trip.

 

Pendant que le roi Karbone XIV parlait ainsi, en transmettant un trésor conséquent au mage, sa femme Naphtaline Dumuzdorsay et Belbit s’étaient discrètement éloignés dans les fourrés. Dans les buissons proches, ils entendirent gémir d’amour l’esclave Zénobite, puisque Hivalanoué s’occupait déjà à la fourrer. Faisant preuve d’une mobilité incroyable pour un nain, Belbit assiégea donc de belle façon la petite motte de la reine de Bozob, au cours d’une besogne très joyeuse, mais assez épuisante. Il entra tout entier dans le chemin étroit de son palais, car elle avait promis. Couché sur l’herbe verte, le Huelabit joua de sa flûte sans effort défaillant, avec son inégalable talent, menant sur la monarque une longue campagne à la victoire fameuse. Car pour finir, sur les joues de Naphtaline aux couleurs de feu, les anges de Kramouille propulsèrent également la semence de Belbit en plein sur ses cheveux nattés. Fort heureusement, l’énorme caprice de la reine n’eut point de spectateur, car il était plus grave pour une tête couronnée de tromper son mari que d’écosser des fèves dans sa cuisine. Cependant, Mirlen, à qui rien n’échappait, vit bien qu’il fallait se hâter, sous peine d‘assister à quelque grabuge venant ternir la douce amitié qu‘il venait de sceller avec les Troglobites. Belbit se retira promptement de la douce chaudière dans laquelle il venait de se damner, Hivalanoué fit de même avec sa Zénobite, puis l’on jugea que c’était bien assez du repos du guerrier. Personne ne remarqua Erald qui dégageait des troncs en lâchant prudemment la main d’Agrippepine, ni William lorsqu’il émergea des frondaisons en bottant le cul de son lama. Inconscient des nouvelles cornes qui venaient de pousser sur son casque par la grâce du nain, Karbone ordonna de brûler les morts, les siens et ceux des autres. On sella soigneusement les lamas et toute l’armée se mit en branle pour quitter les falaises qui dominaient les bois de Tamerlaput, vaste forêt qui tapissait d‘une épaisse toison verte la vallée de Bogland. Les deux groupes se firent encore de loin de petits signes de la main pour se souhaiter bonne chance. Montés sur un roc, Brakemar à la braguette velue, son beau fillot Monoïsurmékoss, Trakenar Sonfrok, Vélan Dansonku, Osgard belle anguille, Aragne reine des joutes, Ursuline grande ciguë et Doucine suce clairon s’attardèrent aux adieux plus longuement que les autres. Mais, résolue, la communauté de la gnôle devenue riche se sépara pour toujours des Bozobis. Puisque désormais, il leur faudrait avancer dans l’inconnu sur le chemin contraire et malfaisant qui grimpait le Mont Chauve, une montagne encore lointaine que l‘on disait hantée depuis toujours par des forces mystérieuses.

 

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Bon dimanche à tous

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:07:24
n°49209515
talbazar
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Posté le 02-04-2017 à 06:07:54  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole. Extrait numéro 44.

 

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Etre femme de président concède quelques privilèges, voilà pourquoi Jolie Goyette embarque à bord d’un Shaleclair Thunder Flash X-40, puisque en vertu de la loi martiale, seuls les véhicules militaires sont aurorisés à s’échapper de l’orbite martienne. Elle est censée se rendre directement sur Cocooniet, la colonie spatiale mercurienne ; elle a quand même exigé du Generalmajor commandant le vaisseau de se poser au préalable sur Phobos, sans qu’il n’ose la contredire. Il peut être risqué de briser un objet que l’on ne saurait réparer, la femme de Sirkisi est cependant décidée à se venger de Suzanne, en provoquant la ruine définitive de son père et ramener cette petite garce à plus de modestie. Tuant dans l’oeuf tout espoir de pacification avec les indépendantistes, elle imagine ainsi sauver son couple branlant, en éloignant la fille de Steve Magouine des bras trop accueillants de Nikos. Quitte à anéantir au passage l’accord de paix que les administrants manigancent en grand secret du Congres et de ses cénazteurs. Elle pense en effet avoir trouvé le moyen de redorer le blason conjugal, en livrant l’Oberleutnant Frank Sonotrou à Vlodim Pourichine, le cénazteur belliciste d’Arsia Mons, ainsi qu’au général Digoule, avant que le négociateur officieux ne parvienne à contacter Yoland. Bien sûr, elle donne de cette manière un coup de laser dans le dos à son président de mari, mais elle ne peut supporter plus longtemps de se voir méprisée avec autant d’aplomb. Elle sait cependant qu’une dénonciation publique de pornification illégale ne saurait le toucher, un hypothétique verbiage procédural ne suffirait pas à soigner la jalousie qui l’anime à présent. Elle n’aurait finalement rien à gagner d’une telle accusation et préfère donc faire confiance à la ruse issue de son initiative personnelle. Tout en semant certes au passage un sérieux bordel diplomatique, mais le cœur à ses raisons que la raison ignore, comme le proclame si bien depuis des millénaires le proverbe terrien.

 

Le croiseur n’a en réalité qu’une infime poussée lumineuse de ses réacteurs zionniques à effectuer pour atteindre le satellite naturel. Sans blesser la morale, le port de vêtements transparents est parfois admis, notamment pour des raisons climatiques. Jolie s’autorise donc à porter pour le voyage une longue cape en plastok souple, comme pour se protéger des frissons qui la parcourent, dans un environnement constant de 22 °. La pèlerine aux reflets irisés ne cache rien de ses formes agréables, mais lui rajoute en revanche un port gracieux, lorsqu’elle déambule dans l’une des chambres récréatives située sous la conséquente soute d’infirmerie. Un Stabsfeldwebel discute avec un jeune Leutnant non loin d’elle, sans faire cas de sa présence, mais Jolie comprend que l’embarquement vers Mercure d’une civile à bord n’est pas vraiment à leur goût, quand bien même celle-ci serait l’épouse du président du Congrès Martien Défédéré. Ils jettent cette fois un œil intéressé sur les déambulations oisives de leur passagère, lorsque la marche de cette dernière enfle derrière elle l’aile ample formée par sa tenue miroitante. Sous la large baie perçant la plateforme du sixième canon, l’immense dômus collectif de Phobos se rapproche doucement, puis l’arrimage de l’engin militaire sur un piédestal télescopique s’effectue impeccablement pour effectuer une descente en douceur. Plus que jamais hantée par le sentiment de se sentir trahie par Suzanne Magouine, Jolie prend alors place dans un taxirob plutôt bavard, avant qu’il ne la mène directement du gros croiseur au bloc luxueux du cénazteur Pourichine. Elle ne lui a pas holoscasté sa venue, préférant lui en faire la surprise par souci de discrétion. Finalement prévenu par un robot domestique Dux-Astroman, Vlodim reçoit sa visiteuse en déployant une insistante courtoisie, sans complètement masquer sa stupéfaction. Il fait ainsi preuve d’une certaine hypocrisie, puisqu’il a amplement comploté avec le regretté cénazteur Mélenchouille pour éliminer son mari. Pluie artificielle abondante, végétation dense, troncs de taille honorable, le décor du jardin de son dôme dans lequel le serviteur mécanique introduit Jolie évoque celui d’une forêt de l’Asie terrienne. La richesse ostentatoire de l’endroit rend évidemment compte de la carrière politique exceptionnellement longue de son propriétaire. Jolie démontre une certaine impatience et ne semble pas venue pour savourer l’ambiance de villégiature proposée par le théâtre élégant du riad secondaire de Pourichine. Apercevant son air soucieux, ce dernier voit bien que Jolie fait tout pour maintenir ses propres émotions à distance. Il lui souhaite toutefois la bienvenue, d’une pincée de tétons à peine appuyée, avec une ardeur malgré tout un peu trop virile. Ils s’installent aussitôt sous l’ombre d’un large Nabanié originaire de 595570 - Stevie Nicks, afin de déguster leurs canettes d’Armagnoc au menthos offertes complaisamment par le robot.

 

– Ma très chère amie, que me vaut de savourer votre charmante présence chez moi ?

 

– Gavarit Maskva, camarade cénazteur Pourichine, le Congres est avec vous. Nous voulons tous que reviennent des saisons de bonheur sur Mars, n’est-ce-pas ?

 

– Mais bien entendu, Jolie, ce sera le cas lorsque notre armée aura définitivement mis un terme à la rebellion de ces saletés de mineurs.

 

– Et tant que notre brave armée bénéficiera du financement des administrants. Sachez cependant que la majorité des propriétaires de cargos est en ce moment en train de reconstruire la paix dans votre dos. En coulisse, la consigne des armateurs n’est plus de fournir au général Digoule une aide illimitée. Disant ces mots, sa voix s’enroue presque et devient moins claire. Peut-être voit-elle devant ses yeux le visage du père de Suzanne Magouine qu‘elle espère ruiner définitivement par l‘effort de guerre.

 

– Auriez-vous par hasard des informations capitales à me fournir, dans l’intérêt de Mars, frau Goyette ? Ses yeux insistants se plissent d’une manière involontaire. En réalité, tout son être se tend pour mieux soutenir ce que peut lui révéler son charmant vis à vis.

 

– Un certain Franck Sonotrou, un obscur Oberleutnant du service de renseignement, se prépare à rencontrer Yoland secrètement pour négocier avec lui un accord de paix bilatéral.

 

– Oui ma chère, je suis parfaitement au courant de l’existence de ce foutu banalisé.  Il a en fait toujours considéré l’épouse du président comme une plante un peu stupide. Mais, s’avouant en réalité peu la connaître, il ne comprend pas vraiment ce qui la pousse à lui révéler ce qu’elle croyait être une précieuse confidence, une révélation somme toute si mortellement dangereuse pour son homme. Suspicieux de quelque grossière traîtrise, il lui en fait aussitôt et ouvertement la remarque.

 

– Peu importe, élude Jolie avec une pointe d‘agacement, je tenais simplement à ce que vous et l’état-major de l’armée puissent être plus amplement tenus au courant du secret d’état concocté par mon mari avec les administrants. Elle voit que Vlodim réfléchit intensément, mettant peut-être toujours en doute sa sincérité. Elle reprend donc la parole sans attendre, pour mieux le rassurer. Je suis venue vous offrir l’occasion de localiser rapidement cet agent et vous laisse utiliser à votre convenance cette information. Avant que je ne parte vers Mercure, concentrons nous sur mes déclarations, évitons si vous le permettez les commentaires ou paroles inutiles. L’officier dont nous parlons se trouve actuellement sur Phobos, bloc 5032 d‘Ariane 20, avec un code implantaire falsifié numéroté 481s0. Son départ pour Tharsis Montes à bord d’un véhicule militaire complice est imminent, dans cinq heures exactement. Cela vous laisse amplement le temps, je pense, d’agir correctement pour le neutraliser. Maintenant, cénazteur, veuillez m‘excuser de ne point profiter de votre honorable compagnie davantage, car Cocooniet m’attend. Mon salut, camarade Pourichine, le Congres est avec vous.

 

Une fois traversé un plaisant petit ruisseau presque à sec, puisqu’en attente du prochain déclenchement automatique d‘une ondée, Jolie Goyette quitte l’agréable bloc, reconduite vers l’hydrocab chargé de la ramener à son vaisseau par le Dux Astroman qui l‘avait introduite. Tout en la guidant vers la sortie, le robot domestique s’obstine à lui livrer au passage, histoire de faire un brin de conversation, d’inutiles prévisions météorologiques terriennes. Fébrile, Vlodim Pourichine ne perd pas de temps, il holocaste immédiatement en direction du Sharsherman orbital de l’amirauté, afin de réclamer de toute urgence la présence du Général Digoule à ses côtés. Une heure plus tard, les deux hommes décident d’envoyer deux commandos des forces spéciales au bloc 5032. Dans ce quartier du dômus nommé l’Ariane 20, dont l’ordonnance des blocs un peu confuse forme un vrai labyrinthe, vivent de riches personnages de différentes origines planétaires, toutefois moins fortunés que les autres propriétaires, puisqu’ils ne sont en réalité que les simples locataires de leurs confortables demeures.

 

 Dans la solitude de son sustentateur en lévitation, Franck Sonotrou dort en souriant, mais sa vie dangereuse lui a enseigné depuis longtemps à se méfier de chaque instant en apparence paisible. Ce n’est pas pour rien qu’il peut toujours profiter d’un physique absolument intact, en dépit de ses nombreux combats. Trente secondes avant qu’on ne force le cadenas paradn de sa porte, réveillé par une salutaire intuition, il se trouve sur ses pieds, s’étonnant de constater dans l’action de ses assaillants d’aussi pitoyables partisans du moindre effort. Eteignant toute luminosité, il se glisse aussitôt dans les ombres de sa chambre, son Atomatic à canon cranté au poing. Pas besoin d’un dessin, le gars qui se présente devant lui tient quand à lui un Bliss Disruptor - Deslon Atomizer Pistol MK 7, le lasergun préféré des FS. Un intrus aussi prétentieux qu’imprudent, ce qui n‘empêche pas Franck d‘être très inquiet, car il sait qu‘un ou plusieurs de ses compères vont le suivre en retrait pour le couvrir. C’était idiot d’avoir voulu prendre un peu de repos avant sa descente sur Mars, une erreur qui ne peut le conduire qu’à la mort. En espérant déjouer ce dénouement fatal, il tâche juste d’être le plus rapide. Les yeux équipés comme les siens d’un voile rétinien, l’ennemi le distingue probablement dans le noir aussi bien que lui, mais l’Atomatic fait mouche à une fraction de seconde près avant la moindre riposte. Commandant par implant le sustentateur invisible et confortable qu‘il vient de quitter, l’Oberleutnant le lance ensuite à vitesse maximale dans la tronche du second sbire soudainement révélé, avant d’éliminer ce gars à son tour dans la foulée d‘un trait de lumière cuisant. Tireur d’élite un jour, tireur d’élite jusqu’à l’arrivée inéluctable des vieux jours. Sur l’heure, son cœur encore jeune cogne à toute volée en attente d’un nouveau guss, contre lequel il ne peut plus opposer la moindre ruse. Sonotrou imagine avec effroi les dégâts probables causés dans la pièce par le Bliss du deuxième attaquant ; puisque ce crétin a tout de même eut le temps de déclencher un tir, heureusement perdu. En s’efforçant de calmer sa respiration, Franck se demande combien de types on été envoyés vers lui pour l’éliminer, il a pour l’instant la désagréable impression d’être coincé dans un piège mortel. Une violente odeur de plasma lui chatouille les narines. Avec une prise de risque maximum, parce qu‘il n‘a pas le choix, il se déplace rapidement vers la porte en enjambant les deux cadavres. Dans la veine de son poignet gauche, dort le fameux traité de paix qu’il doit apporter à Fanch Yoland. Soutenu par l’inflexible volonté de réussir cette mission, l’Oberleutnant sort de sa chambre en cramponnant son gun. Nul éclair mortel ne vient saluer son apparition, Franck ne cache pas sa joie d’avoir contré de tels connards d’amateurs, en dépit du fait de les savoir appartenir aux Forces Spéciales. Intensément soulagé, mais tous ses sens aux aguets, il quitte précipitamment son bloc pour se lancer aussitôt dans une course éperdue au sein du dédale compliqué d’Ariane 20. Au creux de sa main ensanglantée, le fuyard serre très fort les minuscules implants des deux types qu’il a soigneusement charcutés avant de fuir. Les cervometteurs pourront lui servir plus tard de précieux sésames si la situation venait à se gâter davantage, avec le danger que les commanditaires de cette visite ne s‘en servent pour mieux le localiser. Il devra donc s’en débarrasser au plus vite dès qu’il s’estimera en sécurité. Il a en revanche laissé sur place les laserguns trop reconnaissables de ses agresseurs. Toisée par l’immense sphère de Mars, la profonde nuit permanente de Phobos écrase le dômus constamment affairé, mais Sonotrou connait parfaitement sa destination. Il s’agit simplement de hâter le rendez-vous prévu. Son vif désir de rejoindre la planète rouge au plus vite constitue désormais l’unique guide de ses actions, avec la crainte d’en être empêché à chaque instant. De toute évidence, l’armée est au courant de son objectif et la fausse quiétude de Phobos cache désormais en réalité le plus malsain des repaires.

 

Il appelle un hydrocab providentiel dans lequel il grimpe vivement, en prenant soin de le déconnecter pour lui préférer un prudent pilotage manuel, savourant de plus la satisfaction de rendre le taxirob muet. A vitesse maximum, il rejoint l’astroport 12 où l’attend normalement son contact et le Panzig Space Rocket BZ-3000 complice, chargé de le transporter sur Mars. Avec une certaine angoisse, il distingue sur l’une des pistes d’envol prioritaire la massive silhouette sombre et noire du très reconnaissable Sharsherman Flash Space aux emblèmes de l’amirauté, trahissant sans nul doute possible la présence à son bord du général Digoule. Ce grand et puissant con chef de l’armée défédérée martienne, que les hommes du rang appellent entre eux très familièrement le « Tsar ».

 


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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:10:33
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Posté le 09-04-2017 à 11:14:42  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La jet larguée. Extrait numéro 18.

 

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Allongée dans l’obscurité sur le sable blond, Shirley se laissait bercer au son régulier du ressac, un ballet liquide véritablement enchanté par le miroitement incessant des reflets de la pleine lune. Sur la côte, l’alizé tiède venu du large chahutait dans la nuit la cime des palmiers verts, dont les troncs fins ne formaient que de hautes ombres agitées. Aux côtés de la jeune femme, Steward paraissait dormir à la belle étoile, mais ce n’était à vrai dire qu’une fausse impression.

 

– C’est drôle, murmura Shirley, en perdant ses beaux yeux bleus sur les innombrables constellations, la même lune est visible par tous dans le monde entier, mais les peuples se côtoient et vivent sur Terre dans des mondes tellement différents !

 

Après trois jours seulement, elle avait craqué. Steward ne s’était pas obligé à d’épuisants effort pour qu’elle retombe dans ses bras secourables, tant elle ressentait le besoin d’être rassurée, après le choc initial de leur traumatisante aventure. Il s’était aussitôt montré avec elle d’une drôlerie tendre, vif et charmeur comme d’habitude, oubliant volontairement la claque qu’elle lui avait assénée en plein vol. Réunissant finalement tous deux des pensées roses, ils tentaient à l’unisson de chasser par leurs caresses conjointes la folie et la douleur de l’horrible accident. Du coup, Steward remontait ses plans sur la comète et se voyait déjà marié, il regrettait juste d’avoir perdu la bague de fiançailles dans l’accident. Shirley manquait de courage pour les mises au point, pour lui avouer qu’elle avait toujours cette bague et lui répéter qu‘elle ne l‘aimait plus ; elle lui faisait juste bravement l’amour sur la plage à l’écart des autres et se contentait de le laisser rêver à leur hypothétique vie commune. Il lui sembla que son partenaire dormait pour de bon, elle arrangea sur lui la couverture rose et salie au sigle de la Petro Jelly, mais elle s’avouait bien incapable de tomber à son tour dans les bras de Morphée. Belle et obsédante, la mer visible à ses seuls scintillements orchestrait le silence et le noir presque absolu de cette nuit, en dépit du cercle lunaire qui la trouait. Des pensées moroses agitaient l’esprit de l’hôtesse, alors qu’elle remontait bien malgré elle le puzzle de sa vie, en réalité continuellement balayé par les images de la récente tragédie. Le crash meurtrier l’avait obligé à affronter la peur véritable et son cerveau en sortait complètement épuisé. Elle naviguait dans le théâtre de sa vie, au gré d’une conscience assourdie par les échos de ses souvenirs d’enfant, bousculée intérieurement par de multiples flashback intimes et bouleversants. Parce que le simple fait de se rappeler les événements passés venait prouver d’une façon éclatante qu’elle était toujours bien vivante. Un flot de larmes lui échappa des yeux lorsqu’elle revit le sourire complice de Victoria, sa meilleure amie qu’elle avait vue morte à ses pieds. Mais engluée dans sa fragilité, l’hôtesse fut surtout prise d’une indicible nostalgie de sa prime jeunesse.

 

Elle se revit assise sagement devant la télévision, protégée par le rassurant cocon familial, alors que dans la cuisine, son gentil papa hurlait sur sa douce maman qui lui balançait des assiettes en retour. Entre chaque round, sa mère pouvait ensuite rester des heures assise en train de rêvasser devant la fenêtre, sa tasse de café refroidi et non bu à la main, à observer son mari calmer ses nerfs sur quelque nécessaire tonte de pelouse. Etre une enfant unique vous oblige à vivre une solitude insupportable, parce qu’elle vous rend muette au sein d‘un tourbillon d‘émotions sans partage. Sur le balcon, Shirley donnait en soupirant des miettes de pain aux oiseaux et les jalousait secrètement, les choses semblaient si simples pour eux ! Un seul coup d’ailes et on se tire dans le grand ciel, loin des pénibles turpitudes du bas monde ; peut-être fallait-il rechercher dans ce vif sentiment de frustration son désir de s’envoler en leur compagnie, dès son plus jeune âge. Si un bienveillant se mettait à psychanalyser avec succès tous les gamins, qu’ils aient été élevés au sein ou au biberon, peu importe, nul doute que l’on noierait dans l’œuf bien des vocations précoces, du curé au vétérinaire, en passant par l’astronaute ou l’écrivain. A l’inverse à cette époque, son petit voisin Jérôme dégommait au lance-pierre ces mêmes passereaux que Shirley gavait des bouts de sa brioche, lui était à présent pilote de chasse et honorablement décoré. Disons que ses proies avaient changées de nature et qu’il manipulait aujourd’hui, au-dessus du désert sableux, des bombes plus sophistiquées que le simple pousse-caillou fourchu de ses huit ans utilisé pour estropier d‘innocents moineaux.

 

A l’instar des autres survivants qui s’entassaient un peu plus loin dans leur campement de fortune rapidement bricolé, l’avion n’avait pas tué Shirley. Comme eux, elle pouvait se sentir heureuse de respirer encore, mais elle aurait beau faire, en continuant d’exister, elle ne verrait rien d’autre dans cette île perdue qu’un univers endeuillé et atrocement douloureux. Un raz de marée d’émotions tristes et négatives vint la submerger à nouveau, en lui soutirant de nouvelles larmes. La mort brutale de tous ces passagers, l’agonie de beaucoup d’autres lui brisaient le cœur, alors que le sort l’avait elle-même épargnée. Une entraide admirable liait les survivants, une extraordinaire énergie animait chacun d’entre eux sous l’aiguillon d’un prodigieux instinct de survie, mais à présent que les craintes se calmaient peu à peu, que les morts gisaient sous la terre et qu’on voyait la possibilité de s’octroyer sur la plage un confort relatif, Shirley subissait le retour brutal de l’ascenseur émotionnel, tout sentiment d’optimisme balayé par quelque angoisse post-traumatique. Un puissant chagrin qui venait lui interdire de profiter comme elle l’aurait dû de sa  précieuse vie sauvegardée. Un jour, son père s’était tiré avec sa secrétaire et sa mère avait finalement enfin terminé sa tasse. Adolescente, Shirley n’avait jamais fini de lire Guerre et Paix et ce bouquin plus que chiant avait terminé vite fait au fond d’une poubelle. Le député Dominique Quenique avait justement insisté pour qu’on regroupe et préserve tous les livres, journaux et magazines en bon état trouvés dans la carlingue, ils dormaient à présent rangés dans une valise, mais personne encore n’en avait réclamé un. Comme quoi, une fois que l’on se trouve réellement perdu sur une île déserte, la lecture se montre finalement très secondaire. Steward se retourna sans faire de bruit en plissant la bouche, elle envoya une deuxième fois Tolstoï se faire voir et se pencha pour embrasser le dormeur tendrement, comme on le fait d’avantage sur le front d’un poupon tiède que sur celui d’un amant. Alors qu’elle tournoyait avec inquiétude dans les abysses de ses craintes, Steward était pour l’instant la bouée à laquelle elle désirait se raccrocher, mais il n’était pourtant rien d’autre qu’une salvatrice bouteille d’oxygène et finalement rien de plus. Le cadre se montrait pourtant idyllique, puisque la jungle épaisse de l’île de Badigooince qui frangeait ses plages offrait des floraisons admirables à chaque recoin de la forêt profonde, où circulait une foule de créatures furtives et affairées plus ou moins bavardes. Les singes surtout donnaient de la voix. Ils maraudaient avec habileté dans les branches élevées, hurlant avec stridence à chaque fois qu’ils apercevaient sous eux l’un des intrus humains. Les rescapés comptaient les jours, un mois s’écoula ainsi depuis leur arrivée.

 

Dans cet espace vierge, la civilisation s’efforçait coûte que coûte d’exister, empilant sous les tentes de fortune victuailles conditionnées et médicaments, un nombre conséquent de fringues et d’objets jugés de quelque nécessité. Surtout pour occuper son monde, Steven avait ordonné qu’on en dresse une liste extrêmement détaillée, nommant pour l’occasion la magnifique Wanda Vasline au poste improvisé d’intendante-magasinière pour veiller sur ce trésor. On retourna une nouvelle fois visiter les baraquements militaires, mais l’impression de pourriture et de dangereux délabrement fut la même, et nul ne se montra désireux de vouloir s’y installer. Et puis, profitant des conseils pertinents de l’hôtesse Kim Kosanshian, laquelle se découvrit sur le tas une heureuse vocation architecturale, Brandon Poutrelle, Carl Wash, Karl Ashnigof, Pierre Simon Langevin et Ewin Talbaway se montrèrent d’ardents bâtisseurs, en donnant peu à peu corps sur la plage à un véritable petit village de bambou, concentré près d’une longue case commune. Un grand feu y brûlait en permanence, principalement sous la surveillance d’Inès Deloncle et des Pinsonnettes survivantes. Shirley se démenait et se rendait utile à chaque instant, comme elle le pouvait. Par-dessus tout, chacun louait ses talents de cuisinière, puisqu’elle transformait chaque gamelle de bigorneaux en écrin gourmand. Les repas pris en commun s’agitaient parfois des dérisoires querelles musicales entre l’artiste de variété Georges Pinson et le rocker Carl Wash. Dans la grande hutte centrale au toit de palmes où dormaient Steven Eight, Jack-André Tyler et Steward Steward, se prenaient la plupart des décisions vitales concernant la nouvelle communauté. De petites cases orbitaient donc autour de cette imposante cabane, avec chacune une destination particulière. L’une d’elle, fief du docteur Akim Zemblablek assisté par Loraine Careaway et les deux mannequins Cindy Laurel et Jenifer Hardy, servait d’infirmerie où s’entassaient tous les blessés plus ou moins graves. On ferma encore là les yeux d’un grand nombre de gens. Gisant dans son coin, Moktar Bouif délirait, le front bouillant, on craignit plusieurs fois de le perdre, pourtant, il tenait bon. L’agent Boukistanais fut l’objet d’avis partagés, mais l’on ne jugea finalement pas nécessaire d’avoir à l’amputer. Avides d’autres actions, Woody Woudspeaker, Georges Pinson et les deux charcutiers de la Kelien exploraient soigneusement le territoire à proximité de la plage, à la recherche de denrées fraîches ; ou bien ils partaient à la pêche en remportant un certain succès. D’extrême justesse, ils avaient plusieurs fois sortis de l’eau le dépressif Louis de Bourvil qui essayait en douce de se noyer. Tous s’activaient au mieux pour redonner du sens à l’existence, mais seul Michel Tatol, le riche héritier, semblait encore croire à la venue rapide de quelque secours. Il avait lui-même tracé sur le sable un gigantesque S.O.S avec des gilets de sauvetage pour signaler leur présence, puis voyant ses efforts constamment ruinés par la mer, il avait ensuite allumé trois feux en triangle, qu’il alimentait en permanence de plantes fraîches pour produire une épaisse fumée. Dominique Quenique et les gars du Puppies Rights Watch se relayaient pour lui donner un coup de main. On les laissait faire, puisque ces efforts peut-être utiles leur offraient certainement une manière d’exorciser l’angoisse de se voir complètement isolés à l’écart du monde. En revanche, Summer Undergodmitch et Laetitia Doujouet semblaient savourer ouvertement le bonheur d’une certaine oisiveté dans ce coin de paradis tropical, puisqu’elles passaient la plupart de leur temps à déambuler sans rien branler sur la longue plage. Derrière elles, Perlin, le petit Chihuahua tremblant de la très regrettée hôtesse de première classe Pamela Good accompagnait en permanence leurs pas désinvoltes et graciles.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:15:29
n°49346777
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 13-04-2017 à 15:29:33  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith. Extrait numéro 37.

 

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Monté sur son perchoir doré dans les bureaux de la police, Guy Ness ne se tracassait pas trop le cigare. Du matin au soir, il se remplissait le gousset d’une abondance de bonnes pistaches vertes que lui donnait sans compter l’officier Angèle Deyord. Fusillant la ville de quelques derniers éclairs, l’orage faiblissait, mais l’eau du ciel ruisselait encore abondamment sur les vitres de la pièce obscurcie. L’ombre étirée du perroquet dansait sur le mur blanc, où Gilbert Tricard, alias Teddy la Fouine, avait punaisé dans un coin tous les morts répertoriés de l’opération Gros Bill. Moins décontracté que Guy, l’inspecteur pensif n’avait pas pris le temps d’enlever sa canadienne. Disons que la pluie venait de faire baisser un peu la température. Il ne savait toujours pas ce qu’il était advenu de son prédécesseur Barracuda N’Dyé, mais il ne doutait pas qu’il fut décédé violemment. L’ensemble des services semblait parfaitement d’accord avec cette conclusion, il ne restait sans doute plus qu’à retrouver son corps. Son regard insista longtemps sur le portrait souriant de Gypsy Sorrow, qu’un démon des enfers avait privée de sa vie. Comment pouvait-on vouloir du mal à une gamine aussi belle et enjouée ? La stripteaseuse ne charmait pourtant plus, en leur dévoilant peu à peu ses tristes os, que ses bons vieux copains de cimetière. On l’avait fait taire, elle, Holy Ghost et Câline Grosby, parce qu’elles savaient des choses que Gilbert aurait bien voulu apprendre. Et Martin Smith et sa jolie moukère ; ils étaient passés où, ad patres, eux aussi ? Angèle regardait son collègue en coin et regrettait presque le coup de la tape sur les fesses dès le matin, l’occasion pour elle de brailler dans ses oreilles pour jouer les saintes-nitouches à bon compte. Ce jour là, il s’était abstenu. Un jeu de dupes, en réalité, puisque si Teddy se permettait ainsi de jouer avec elle le grossier macho lorsqu‘ils étaient seuls, c’est qu’il savait très bien pouvoir se le permettre. Certes, il aurait fallu à la jeune femme au minimum un canon de marine pointé sur sa tempe, pour qu’elle lui avoue désirer de sa part et en secret quelques claques sur son cul franchement plus fortes, avec pourquoi pas des menottes entravant ses mains. Il la taquinait sans nuance, elle le faisait ramer sec, en jouant la partie d‘un jeu qui durait entre eux depuis longtemps ; mais tous deux semblaient s’amuser comme un vieux couple complice de ces manières trop rudes, des privautés vulgaires qui auraient fait passer au yeux d’un tribunal l’attitude de Gilbert pour un condamnable harcèlement sexuel sur le lieu du travail. Oui, mais voilà, toutes les parcelles du corps d’Angèle quémandaient de se faire peloter par lui et personne d’autre, ce qui rendait les choses plus complexes que n’en livrait la simple apparence. Guy voyait clair, mais son bec rempli de pistaches s’efforçait tant bien que mal de ne pas abreuver les deux flics de ses commentaires, enfin pas trop souvent. Mais pour quelle obscure raison, grand Dieu, ces deux loustics ne s’enlaçaient pas sur un lit comme tout le monde, après le boulot, au lieu de passer leur temps à des chamailleries stériles en vivant seuls chez eux ?

 

Enfin bref, ce n’était pas le derrière somptueux d’Angèle qui occupait l’esprit de Teddy ce matin-là. Le soleil revenu jouait avec les perles de pluie attardées aux carreaux. L’inspecteur en délaissa la vision pour retomber dans ses dossiers. Il avait demandé qu’on fouille d’un peu plus près les affaires concernant le sénateur Rupin. Selon un dernier rapport, un grutier sans histoire venait d’être shooté dans un port avec une arme puissante, à bonne distance, ce qui supposait l’utilisation d’un fusil à lunette et le job d’un professionnel. Une fiche griffonnée à la main et retrouvée dans la grue avouait que la dernière activité du type avait été de charger le container 87-B sur un cargo nommé le « Play boy of the sea », officiellement en partance pour Hawaï. Le 87-B n’existait dans aucune liste d’embarquement et cet intrus le rendait forcément suspect, de quoi l’imaginer être en réalité gavé de schnouf ou d’armes, du sol au plafond. En passant à la loupe les différents commanditaires de la cargaison, on retrouvait comme par hasard le nom de Rupin, certes d’une manière habilement marginale, mais il était bel et bien, dans les documents livrés par l’armateur, le locataire principal de ce vieux bateau. Tout comme on découvrit avec stupeur qu’il le fut également du bananier battant pavillon allemand, mais hélas naufragé, « Ex-Stasi ». Cerise sur le gâteau, une petite visite de routine dans sa somptueuse demeure avait révélée que le sénateur, temporairement absent de chez lui, s’offrait en ce moment quelques vacances à Hawaï. La mort brutale du grutier ne donnait pourtant pas matière à lancer contre le puissant politicard un mandat international. Le vieux mafieux en convalescence et visiblement passionné de voyage au long cours pouvait tranquillement continuer de se bronzer les fesses, sans qu’un petit flic ne puisse songer à venir l’inquiéter.

 

– Hé Gilbert, figure-toi qu’aujourd’hui je porte un soutif qui m’a coûté dans les deux cent cinquante balles.

 

– Tu fais ce que tu veux de ton salaire.

 

– Ben tu le verras pas, mais il est plutôt chouette, fabrication française, rouge, avec de la dentelle.

 

Ils s’échangèrent un dialogue de flammes lorsque Teddy suggéra la connerie de payer une fortune pour de simples trous, avant que le téléphone ne se mette à sonner. On venait d’arrêter, pour le caprice du vol d’une imposante moto, un des hommes de main de Sisco Matteï, un dénommé Pietro le Corse, notoirement à la colle avec la chanteuse de la Rose Noire, Dizzy Pousse-Loupiote. Il venait d’avoir un accident de la circulation et on avait retrouvé dans sa poche un pétard de gros calibre, dont provenait, on le savait à présent avec certitude, la balle qui avait envoyé Suggar Daddy de l’autre côté de la barrière. La petite Dizzy avait de toute façon rapidement craquée et reconnu que son mec avait agi sur l’ordre du patron. Elle plongeait par ses aveux spontanés le collaborateur officieux Sisco dans une merde plutôt noire. Présenté devant Angèle et Gilbert, Pietro se portait finalement pas trop mal, même s’il avait le bras en écharpe et trois côtes cassées. Sur son compte en banque, on releva le virement d’une grosse somme d’argent en provenance des fonds personnels de Comtesse Monique, la légitime de Matteï. Contrairement à ses habitudes, l’indic à l’esprit vengeur avait agi dans la précipitation, en manquant pour le moins de discrétion. On l’arrêta dans son casino, lui et sa donzelle, sans qu’il ne moufte.

 

– J’ai rien fait, jura-t-il pour la forme dans le bureau de Teddy la Fouine.

 

– C’est pas sympa de laisser le Corse porter le chapeau, néanmoins. Je te l’avais bien dit, la dernière fois qu’on s’est vus, que ton ciel serait bientôt quadrillé. Il refila un mouchoir en papier à Comtesse Monique engoncée dans sa fausse fourrure d‘ocelot, parce que la pauvresse n’arrêtait pas de chioler.

 

– Gros Bill et Suggar Daddy ont buté mes filles. Tu étais où, toi, pendant ce temps là ?

 

– Sur le pas de leur porte, figure-toi, mais je suis arrivé trop tard. Pietro va chopper quinze ou vingt ans. Mais toi, ma vieille, t’en auras largement plus de la moitié, crois-moi. Tu n’es plus blanc comme neige et la Rose Noire, c’est terminé. Les yeux de Monique se mirent à fuir de plus belle.

 

– Tu m’emmerdes, la Fouine, mes paris sont légaux !

 

– Bon, Sisco, tu n’es pas le mauvais cheval et le Daddy polluait gravement l’air du bon dieu. Pietro le Corse va se reposer deux ou trois ans et toi, tu seras libre à dix-sept heures, je te le jure, si tu fais à la lettre exactement ce que je vais te dire. Dis à ta femme d’arrêter de pleurer, elle suinte comme une grotte inondée et ses peintures foutent le camp.

 

– Salaud.

 

– Allons, Sisco, essaie de faire un effort du cerveau. Si tu ne laisses pas échapper la belle occasion que je vais te proposer, tu vas pouvoir dans très peu de temps emmener madame au ski.

 

Angèle gratouillait la tête de Guy Ness, elle le charriait sur sa peur du tonnerre, en lui disant qu’elle l’avait vu trembler. Un flot de lamentations indignées s’échappa du gros bec de l’oiseau. Il argua qu’il avait dans le sang les gènes d’un ancêtre connu pour avoir été la mascotte d’un célèbre et dangereux pirate. Elle cherchait surtout à ne pas intervenir dans la discussion en cours entre les deux hommes. La longue plainte rageuse d’un scooter anima un instant la rue, mais Sisco se figeait à présent dans un silence attentif, il ouvrait pourtant grand la mâchoire, en attente de ce qu‘allait lui proposer Teddy.

 

–  Je veux que tu ouvres et que tu fouilles un coffre-fort, tout seul ou avec tes potes, je m’en ballonne.

 

Le menton de Matteï reprit du mouvement pour lui clore sa gueule pavée d‘or, mais son expression révélait un espoir grand comme la mer.

 

– Chez qui ?

 

– Ho pas dans le château de la famille royale d’Angleterre, rassure-toi, mais presque. Bon, si tu me ramènes en mains propres le contenu intégral du coffre du sénateur Rupin, je ne te promet quand-même pas la légion d’honneur, mais l’occasion inespérée d’aller manger des tortillas au Mexique avec Monique, pour te faire oublier. Si tu refuses, en revanche, tu serviras comme un guignol de girouette aux avocats d’assises, pour finir dans une maison de retraite de neuf mètres carrés. Tu sais bien, ce grand poulailler pas trop noble où c’est plutôt les poulets qui surveillent l’ouverture des cages dans lesquelles les mecs comme toi sont en train de moisir.

 

– Merci pour la conférence, Gilbert, je savais bien que tu étais un ami.

 

– On est d’accord pour le prix convenu ? Mais attention, pas de besogne mal faite, je te demande un beau boulot d’artisan et tout ce que tu trouveras dans le coffre, absolument tout, y compris la petite monnaie. Tu as déjà fait quelques veuves, Sisco, mais on sait bien que tu n’es pas un voleur.

 

– J’ai pas non plus la réputation de me complaire dans l’oisiveté d’un fainéant, mais tu as raison, c‘est important que tout le monde se comprenne. Entre nous, mais ça me regarde pas, ton Rupin cachotier, il porte bien plus qu’une modeste écharpe de maire, quand-même. A mon avis, si tu te plantes, tu risques gros pour ta carrière, mais je dis ça, je dis rien. Monique dirigera la Rose Noire en attendant, hein, pas question de fermer le magasin, hein, tu promets ? Un petit basculement de la tête d’Angèle pouvait se prendre comme une réponde positive à cet engagement.

 

– C’est bien, fit Gilbert en forme de conclusion, tu vois Sisco, je pense que tu viens singulièrement d’allonger d’un sacré bout de chemin ton propre horizon.

 

Entrevoyant peut-être l’opportunité inouïe de dormir ce soir-là dans son lit, Comtesse Monique sembla un peu guérie de son chagrin. Ses pleurs enfin taris, elle suivit un moment la trajectoire d’une mouche en vadrouille qui baguenaudait sur les dossiers, pour lâcher finalement d’une voix aigrelette « merci beaucoup, monsieur l’inspecteur ».

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:18:14
n°49375040
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 16-04-2017 à 07:42:45  profilanswer
 

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Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou - extrait Numéro 26.

 

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Le jeune Boudiou passe une bonne partie de l’après-midi à compter et recompter ses doigts, puisqu’il a beau faire, il s’aperçoit que ses deux mains en portent dans leur totalité entre 12 et 18. La nouvelle théorie porte un échec cuisant au principe de réalité, probablement parce que Gaston est obligé d’utiliser ses propres doigts pour les compter. Il convient donc de faire appel à un observateur extérieur. Hélas, après avoir demandé à Jean Micheton son aide pour réaliser un comptage impartial, son copain parvient à des résultats multiples, avant de se satisfaire d’un total définitif qui additionne le nombre des extrémités de Gaston à 22, dont trois pouces. De leur côté, les mains de Jean en exhibent étonnamment 8. Finalement, les deux compères délaissent cette éprouvante énigme. Bien à l’aise entre les deux minettes occupées à lui passer de temps à autre la pipe à eau, Gaston Boudiou se rend enfin à une singulière évidence, puisqu’en face de lui, la belle Wendy n’arrête pas de le fixer des yeux. Pleine de dynamisme, c’est toujours elle qui se charge de changer la face des disques, les autres étant plutôt chargés de les écouter. La fée électricité balance en effet tour à tour dans la piaule le son des vinyles de Grateful Dead, puis du Jefferson Airplane, des groupes déjà connus dans leur pays, mais que Gaston découvre ici pour la première fois. Dans la cour, le mariage du binocleux féru de botanique bat longuement son plein, se calme enfin, puis les noceurs le laissent finalement empoigner son sapin. Hilare, il se trémousse alors sans façon pour accomplir son devoir conjugal. Certains des gars et des filles qui l’ont abandonné viennent ensuite grossir les rangées somnolentes dans la maison, on se pousse volontiers pour qu’ils trouvent leur place, puisqu‘ici on partage tout. Assis en tailleur, l’un des hippies termine la 200 ème lettre par avion qu’il compte un jour envoyer à sa famille californienne. Ses missives rassurantes tiennent surtout à vanter à ses parents l’excellent vin français. Un autre, d’ailleurs plutôt doué, dessine dans son carnet le portrait de son voisin avec application, puisque sa vie doit forcément servir à quelque chose. Comment nier la force d’une telle communion qui unit cet après-midi là les résidents chevelus de l’ancienne ferme de Papi Léon ? On revient au temps des premiers chrétiens, on savoure en tétant son joint le plaisir d’intellectualiser à outrance l’impressionnant vol des mouches, on est tous unanimes pour affirmer que la guerre du Vietnam est avant toute chose une ordure mentale, on est heureux de représenter l’avant-garde des défricheurs de l’esprit humain, on ouvre des petites boîtes en carton peint remplies de pilules et l’acide gobé à profusion permet enfin aux esprits de viser avec justesse les bonnes cibles. On ouvre grand les yeux sur une nouvelle page de sa vie en pratiquant la même expérience, dans le respect d’une vie strictement collective. L’ensemble de la société de consommation a jusqu’à présent harcelé chacun dans une traque inhumaine, cherchant avec obstination à le réduire en simple client. Dans le but de faire lâcher prise à cette ignoble pieuvre mercantile, il faut donc se libérer de la criminelle oppression, acclamer la gratuité comme une chose évidemment naturelle, en se grillant joyeusement les neurones au passage. Le monde entier n’est qu’un brouillon colossal et triste qu’illustrent si bien les Babylones planétaires, mais c’est leur propre existence que les hippies cherchent à sublimer, en marchant dans les traces de Jésus et de Bouddha, des types supers, pour essayer d’incarner au mieux la crème des humains. S’efforcer de retrouver sa nature en pleine nature. Bien entendu, on botte en touche sur pas mal des débats pratiques soulevés par les pourris réactionnaires du vieux système, en se contentant simplement de leur sourire coûte que coûte. Cette revendication d’innocence et de liberté provient surtout du fait que les joyeux rêveurs pacifiques qui entourent Gaston, tous directement issus du baby-boom d‘après guerre, ont pour la plupart moins de vingt cinq ans et pour beaucoup largement moins. Oui, c’est entendu, dans un monde idéal, la jeunesse se devrait évidemment d’être éternelle. En tout cas, il règne tout de même à cet instant dans ce lieu rendu magique un beau déploiement d’énergie rayonnante et un formidable déballage d’utopies, dont les années 2000 ne retiendrons en tout et pour tout de la culture beat que celle des haricots bios, amorce d’un new commerce labellisé pas franchement équitable, mais particulièrement fructueux. Gaston Boudiou s’en fout pas mal. En ce début d’été 1967, il est content de sa journée saturée de nouveautés, au cours de laquelle il découvre qu‘il peut aspirer la musique par la peau ; sa cervelle déployée est complètement azimutée, il a quinze ans et forcément toute sa vie devant lui. Et surtout, il n’arrête pas de rigoler sans raison.

 

Sur un air de Bob Dylan qui préconise dans sa chanson qu’on l’envoie disparaître à travers les cercles enfumés de son esprit, Wendy s’est approchée et plantée devant Gaston, sans qu’il ne l’ait vu arriver. Agissant comme une sorte de loupe étonnante, le LSD révèle au jeune homme les adorables taches de rousseur qu’elle affiche sur ses joues, de petites marques mutines qu’il n’avait pas franchement remarquées auparavant. Mais qu’est ce qu’elle est mignonne, cette petite américaine qui ondule et mesure à présent 6 mètres de hauteur, alors qu’elle le toise gentiment en l’invitant d’un geste de ses 40 doigts à se lever pour qu’il l‘accompagne à l‘étage. Elle doit le prendre par la main pour l’aider à grimper l’escalier de meunier, sorte d’Everest en bois impressionnant, dont la fabuleuse ascension dure une bonne heure. La vue aérienne ne propose en bas que le paisible massacre des dormeurs en plein trip, sous la mer de nuage provoquée par la fumée des joints, alors que la chaîne stéréo s’est finalement arrêtée. Gaston atteint la dernière marche, le nez à deux centimètres des splendides fesses de Wendy, au nombre rassurant de seulement deux. Là-haut, c’est l’orgie. Sur l’un des nombreux matelas, Jean Micheton est aux prises avec les deux brunes qui ont laissé tomber leurs robes sur le parquet. Elles sont donc toutes les deux à poil en train de s’occuper de lui, avec la ferveur pratique des résidentes confinées du harem de Constantinople. Nue également, Marie-Charlotte à plus que jamais la tête à l’envers et leur récite à côté un poème de Prévert, qu’elle déchiffre avec peine d’un livre écorné, puis elle suce son joint et leur murmure cette petite citation de l’auteur, destinée peut-être à les encourager : « on reconnaît le bonheur au bruit qu’il fait quand il s’en va ». Et du barouf heureux, dans cet immense grenier où Léon Cocominute de Givenchy stockait autrefois son grain, il s‘en pose un peu là. Le parisien qu’ils étaient venus démolir est monté sur une petite rousse, elle semble de son côté à deux doigts de grimper au paradis. Cette vision en rappelle une autre pour Gaston, car il a déjà vu ce cul poilu travailler Marité Hissedru dans son épicerie ; mais à présent, tout est pardonné, puisque la nouvelle conscience de Boudiou l’immerge dans un bienheureux sentiment d’amitié fraternelle. Il y a surtout que la belle Wendy vient de plaquer des lèvres gourmandes sur les siennes. La bouche de cette fille venue d’outre-Atlantique possède en vérité un merveilleux goût de miel. D’autres couples s’activent dans la même communion au sein d’un bordel joyeux, c’est précisément le cas de le dire. L’amour appelle l’amour et ici, on le fait à quinze ou à deux, mais de toute évidence, le bonheur ne semble pas franchement pressé de foutre le camp. L’érotisation du spectacle emporte Gaston et l’emmène à s’immiscer dans la grande communion des chairs, puisque toute cette agitation sexuelle transporte les agités du grenier au sein d’une vaste partouze, qui n’est pas seulement le seul assemblage des corps, mais qui fait d’elle, évidemment, un véritable rituel magique et sacralisé. Wendy joue à merveille son rôle de grande prêtresse et Gaston lui fera l’amour dignement, mais il apprendra d’elle des subtilités formidables que Marité ne lui avait pas montrées. Jusque tard dans la nuit, il embrasse l’Amérique sur ses taches de rousseur et partout ailleurs, laissant son cerveau pour l’instant bien cramé par les drogues brandir triomphalement aux étoiles le rayonnant bréviaire hippie. Désormais seul à recevoir l’approbation de la pleine lune, le mari du sapin est toujours dans la cour en train de s’agiter sur l‘épousée. Alors que, au son lancinant d’un tambour marocain en peau de gazelle, Gaston Boudiou est en train de pratiquer un laborieux cunnilingus sur Marie-Charlotte de la Tronchedecon, encouragé par Wendy mais à la requête express de l’intéressée. L’adolescent de Troulbled va résoudre plus de huit énigmes jamais résolues par la science. Hélas, la drogue effacera immédiatement dans son esprit les réponses cruciales, aussi vite qu’elles sont nées. La glorieuse mêlée des corps vient cependant de donner le coup d’envoi de la fameuse fête de huit jours annoncée, au cours de laquelle Gaston et son ami ne quitteront pas la ferme et verront le nombre de leurs orteils singulièrement augmenter.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:22:15
n°49382112
In Ze Navy​ II
Obsédée textuelle
Posté le 17-04-2017 à 00:57:00  profilanswer
 

[:zoubi]


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n° 11 * RED * Tiens, voilà ton thé, c'est du café.
n°49382565
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 17-04-2017 à 09:04:18  profilanswer
 

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Beaucoup de bisous madame boat.
Ce qui me flanque la nostalgie du temps où le coin était plein de gens intelligents et drôles.
On a plus que des cultivés chiants comme la mort, mais les temps changent, quoi.
 Bon, nous avons entre autres de sérieux problèmes avec les participes, ce qui devrait hélas nous priver forcément du prix Fémina.


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:27:06
n°49382986
In Ze Navy​ II
Obsédée textuelle
Posté le 17-04-2017 à 10:28:25  profilanswer
 

Je me demande si on est obligé de devenir vieux et emmerdant. Apparemment non, quand on vient dans ce petit coin-ci.  
 
Voilà, la mort viendra bien assez tôt - en attendant j'aime autant rire et friser l'irrévérence.
 
Je resterai toujours la correctrice en terrasse de ce topic, pro-fesseur.


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n° 11 * RED * Tiens, voilà ton thé, c'est du café.
n°49383626
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 17-04-2017 à 11:52:21  profilanswer
 

Parfaitement, soyons terrassés, que diable !
Un doigt de Genepi, pour moi.

n°49384097
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 17-04-2017 à 12:50:44  profilanswer
 

Conseils pratiques de puérile culture

 

Aujourd’hui : Comment empêcher Bébé de pleurer.

 

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En 1971, paraissait « ABC de puériculture », de l’abbé Julio, ouvrage en cinq pages qui nous donnait déjà quelques pistes salutaires pour réduire les nourrissons au silence. Il suffisait, selon cet auteur référent, de lire à haute voix, à deux centimètres de la tête d’un bébé en sanglots, du Marguerite Yourcenar. Hélas, une grande majorité des nouvelles mamans possède désormais son bac et un relatif esprit critique est de ce fait passé dans les gènes des nouvelles générations. L’artifice ne prend plus, cette méthode ne pourrait que remplacer les pleurs d’un bébé par un rire tonitruant encore plus désastreux, en l’affublant malgré lui d’un irrésistible sentiment d’hilarité. Notamment sur des phrases comme « Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts ». Reste qu’un bébé qui pleure ne fait pas seulement chier ses parents, mais également ses voisins. Notre installation idéale a donc pour but de répondre au besoin de ces derniers, afin de leur offrir enfin la sérénité nécessaire pour faire chier les parents du bébé incriminé, en faisant l‘amour à trois heures du matin. Ce qui, si cette voisine est fertile, relança neuf mois plus tard un cycle étonnant, propre à priver de sommeil les autres voisins célibataires. Les hurlements d’un bébé criard atteignent facilement 110 DB et proviennent essentiellement du fait qu’il regrette d’être venu dans un monde de tarés, mais ses parents auront beau faire, il n’en démordra pas jusqu’à l’âge de prendre sa retraite, alors qu‘eux seront morts sourds bien avant.

 

Au contraire de l’extraordinaire machine à langer*, le dispositif décrit dans cet article ne se rangera pas dans la catégorie des machines essentielles du salon des inventions du pro-fesseur Talbazar, mais simplement dans la section des astuces géniales destinées aux parents pragmatiques et responsables. Il convient ici de les rassurer, en leur offrant la possibilité de faire taire instantanément leur bébé. Beaucoup d’idées reçues circulent quand aux causes et à la manière de traiter la fatigue des pères et des mères, mais il est certain que les hurlements de leur rejeton, occasionnant nuits blanches et troubles de la digestion, dominent trop souvent le bruit de la télé après 22 h. La sensibilisation des politiques sur cette question depuis 40 ans n’a jamais apporté la moindre solution, même symbolique, pour réduire les bambins au silence. Chaque génération nouvelle porte ainsi sur la plus ancienne son lot de responsabilité et l‘harmonie des âges semble toujours à conquérir. Mais grâce à notre agencement astucieux et cohérent, la sphère familiale va enfin pouvoir rouler. Des pourparlers auprès de la Caisse des Allocations Familiales devraient même aboutir à la gratuité du dispositif, pour les procréateurs les plus persuasifs. L’achat d’un vieil avion de chasse sera de toute façon toujours moins onéreux que la construction d’un mur pour séparer le bébé de ses parents, surtout si cette cloison est réalisée par une entreprise parisienne. Refouler les pleurs d’un bébé en l’obligeant à ravaler ses cris sur le champ s’obtient d’une façon finalement très simple, il suffit de le plonger dans une stupéfaction instantanée, en utilisant un appareil qui va hurler plus fort que lui. Nous savons cependant qu’une colère de papa n’y parvient jamais, surtout si son enfant a seulement deux jours d‘existence. Les corps d’un père et d’une mère sont avant tout confrontés à leur nourrisson par l’ouïe, il est donc logique de répondre au problème sur un mode identique, afin de retrouver au sein de la famille une paix libératrice. Alors que le bébé hurleur est encore très loin de faire ses premiers pas, l’immense révolution qui va le rendre coi est déjà en marche, ce qui vaut largement notre investissement. Il suffit simplement de se promener un dimanche dans une casse d’avions de chasse, pour négocier à un prix raisonnable un vieux Mirage ou pourquoi pas un ancien Mig de chez Mikoyan-Gourevitch. On utilisera de toute manière tous nos temps de repos pour faire connaître à notre bébé l’utilité de profiter d’opportunes vacances éducatives. Le savoir se taire est désormais à portée de ses oreilles et il va rapidement le trouver.

 

Les acteurs associatifs nous ont écrit pour préconiser l’usage du procédé en rase campagne, nous insistons sur le fait que l’envergure d’un avion de combat permet largement son installation dans un petit jardin de banlieue. Tous les bailleurs d’appartement munis de parking accueilleront de toute façon notre dispositif à bras ouverts, puisqu’il garantira une paisible harmonie silencieuse à leurs locataires. Notons également qu’une vingtaine d’essais concluants ont été réalisés dans la cour de l’université Pierre-et-Marie Curie sur les enfants d’étudiants âgés d’environs quarante ans, et les petits cobayes ont été munis d‘un doigtier électronique pour enregistrer au mieux leurs réactions, avec un franc succès. L’installation a par ailleurs été largement approuvée par l’Institut national du sommeil et la vigilance (INSV). L’enfant posé à l’arrière de l’avion, nous y sommes enfin : veillez à la propreté de votre turbine avant utilisation et à protéger vos tympans par le port d‘un casque. Une fois placée la poussette du bébé en larmes et peu discret à 5,25 m du réacteur de l’avion, puisqu’il faut le faire taire, pas forcément le griller, on met plein gaz, sans dépasser huit heures de mise en route, sous peine de provoquer dans les oreilles du gamin des dommages auditifs. Le brailleur fait aussitôt les yeux rond, sa bouche s’ouvre en cul de poule sur un appréciable constat d’échec, renforçant au passage l’ossature et la musculature de sa mâchoire et finalement il se tait, avec pour ses parents le bénéfice d’un effet durable, au coucher ou dans la journée. Tout en vérifiant sa température, on amorcera le reste de son éducation d’un seul regard, afin de bien lui faire saisir le véritable rythme du monde. Sevrer toutefois progressivement les enfants du réacteur, pour arrêter aux alentours de dix ans, mais il est tout à fait possible de continuer jusqu‘à l‘adolescence.

 


*( La moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar / Salon des inventions - Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar : La machine à langer - VOL 1)  

 


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:27:25
n°49392886
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 18-04-2017 à 10:56:36  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/18/03/bkds.jpg
https://zupimages.net/up/18/03/vgmy.jpg


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:29:53
n°49405255
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 19-04-2017 à 08:29:08  profilanswer
 

Et encore un plagiat, on a les boules et pourtant c'est vrai.
Vous verrez que nous finirons milliardaire. En tout cas, la 126ème invention répertoriée est d'actualité, bande de voleurs !
vous vous souvenez certainement de ça :

 

https://zupimages.net/up/18/03/2ue1.jpg

 

et bien le comité de vigilance de la ME vient de signaler ça :

 

http://sciencepost.fr/2017/04/voic [...] ard-futur/

 

Bien évidemment, un procès est en cours de récré. [:oh-la-vache-eh:4]


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:33:12
n°49423546
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 20-04-2017 à 12:25:33  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/18/03/fd81.jpg

 

Salon littéraire.
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : L'épilée du Nil - extrait Numéro 72.

 

Assise sur une chaise à pattes d’autruche recouverte de la peau d‘un tigre de Tasmanie hollywoodien, Trêmouatoli regardait en souriant le porteur d’aiguière laver les pieds de Néefièretarée, laquelle, pour lui faciliter l’ouvrage, retenait d’une main gracieuse la robe en lin plissé qu’elle avait largement relevée. Yeux traqués, mains tremblantes, le type au crane rasé collait son eau partout à côté. La jeune confidente de la reine cumulait les bracelets, les anneaux et les colliers, autant de dons que lui faisait sans compter sa puissante amie. Couché près d’elles, le grand guépard royal croquait à pleine gueule des oisillons à peine éclos. Loin de la ville d‘Halopolis, les champs et les palmeraies se perdaient dans la brume de chaleur et les poissons du Nil sautaient directement dans les barques qui flottaient sur la crue, car l’Egypte était une grande nation. Sous un étroit portique aux colonnes fasciculées, un peu anxieux, Mer-Amen Tesmich attendait la réponse espérée, en observant de loin les deux femmes deviser.

 

– Tu es certaine que c’est ce que tu veux ? demandait la pharaonne à sa dame de compagnie, tu veux vraiment te marier avec lui ?

 

–  Mais ouais, ce gars-là c’est l’homme de ma vie, je te dis. Tu m’as rendu ma liberté, c’est donc une femme libre qu’épousera Mer-Amen Tesmich. Mais je veux que tu me donnes quand même ton approbation pour établir le contrat de mariage, histoire d‘affranchir mon mec à son tour. Les divinités féminines m’ont déjà dit oui, si la chose peut te rassurer. Allez, vas-y, dis-moi que tu es d’accord, franchement ça devrait pas faire déborder le Nouou.

 

– Bon, ok, mais je crois bien que tu fais une connerie, en voulant te marier simplement parce que l’engin de ton mec est d’après ce que tu m’as dit aussi dur que la diorite de mes statues.

 

–  Pas seulement, c’est vrai que de ce côté-là ça baigne dans l‘huile. Non, je veux faire plein de gosses avec lui, pour pouvoir les regarder jouer à l’arrière de la maison dans une mer de jouets, pendant que leur père chassera les canards des voisins au harpon.

 

–  Alors comme tu veux, Phimosis préparera lui-même le papyrus de mariage. Pas trop mal vu, le coup du chantage à l’amour maternel ! Mais tu fais une folie, je trouve qu’il sent la litière à bestiole, ton fameux Mer-Amen Tesmich, l’ancien garde du corps de ma salope de belle-sœur, quand même ! Soit, on reprendra la croisière pour rejoindre Larnak après la cérémonie. Faut qu’on se dépêche, néanmoins, parce que Sésoscristop se montre très pressé de manier les rames à nouveau. Elle congédia le podologue pour qu’il laisse sa place à l’épilateur qui attendait patiemment, sa faucille sous le bras, en s’apprêtant à commencer son travail par les genoux. A sa ceinture au fermoir en forme de nœud d’Isis pendait une énorme queue de quadrupède. Malgré elle, les joues de Néefièretarée s’empourprèrent comme deux disques solaires, ce cercle rouge depuis toujours attribut des déesses, pour qui toute chose doit se lever.

 

C’est ainsi que, dans un coin du palais, on commença à brasser la bière nécessaire au banquet des épousailles de Trémouatoli et de Mer-Amen Tesmich. Au douze du mois de Méchir, un samedi matin ensoleillé, le couple se retrouva dans le bureau du maire d’Halopolis dont le cou brillait de toutes sortes de pierres précieuses. Ils boudaient ouvertement le mariage religieux, puisque les prêtres consultés réclamaient trop de cochons pour officier. Le fonctionnaire contresigna soigneusement le contrat qui liait les mariés au régime du chacun pour soi, puis tout le monde s’en alla faire la bringue dans les jardins du palais, où l’on avait installé sur les tables de splendides bouquets montés. Jamais, depuis l’inauguration de la première maison à étage, aucune cérémonie ne s’était déroulée avec autant de faste dans la cité. Il est vrai que la pharaonne avait dépensé sans calculer pour plaire à son amie. Aux côtés de Néefièretarée, joliment apprêtée dans ses plus beaux atours, le vizir Phimosis se grattait le dos avec son flabellum, emblème de son rang. Après les prières d’usage à Rattaouy, tout le monde se mit à picoler en s‘efforçant de calmer les gosses nombreux et turbulents. Bien que les époux ne furent que des esclaves, tout le gratin de la ville se trouvait là, à s‘ébattre entre les grenadiers en compagnie de la noble suite embarquée pour descendre le Nil avec la reine. Etalés sur chacun et chacune, bijoux, parures, maquillages et tatouages donnaient le tournis. Naturellement, les amis du marié étaient réunis également, comptant tout le staff important de l’ONS, de son PDG Valisansoùth à son associé Tépénib, en passant par la comptable Katikèlsalop ; mais les romains Veuquetum Fourlanus et Tampax Nostrum avaient également reçus leur carton d’invitation et chantaient de concert des paillardes en latin, en vidant copieusement les amphores. Jouant la précieuse et la maniérée, Amétatla prenait le temps de présenter sa fille à tout le monde, précisant qu’Aménorée était sans doute vierge, diplômée, célibataire, pas fière et bonne cuisinière. Ses méthodes pour attiser le feu et cuire la viande d’âne faisaient merveille.

 

 Cherchant à s’échapper du chaperonnage lourdingue de sa mère, la jeune fille s’échappa un moment du côté des petits fours, où faisait semblant de travailler un vulgaire domestique d’origine grecque, le néanmoins très beau Lachedékess. Sans pouvoir s’en défendre, car elle avait déjà un bon coup dans le nez, le cœur de la jeune stagiaire fut instantanément ému par cette rencontre. Comme elle portait une longue robe cape aux manches évasées, resserrée à la taille par un long ruban bleu, le lin diaphane ne cachait rien de ses formes épanouies. Attiré aussitôt par cette beauté qui faisait mine de s‘intéresser aux poissons rouges nageant dans l‘eau claire d‘un bassin, le portefaix grec s’approcha d’elle pour la draguer. Lui-même avait les yeux un peu trop brillants d‘alcool, mais il était grand, robuste, instruit, plein de la sagesse de son peuple, son courage avait laissé en souvenir la griffe d‘un lion sur sa poitrine, bien fait de corps et bien proportionné, avec un malicieux mais honnête phallus qui pointait pour l’instant dans son pagne, parce que la petite chatte noire et poilue d‘Aménorée se distinguait parfaitement sous sa robe transparente. Le soir tombait déjà et dans le ciel incendié par le feu des dieux, l’énorme disque blanc de Rê perçait le flamboiement céleste comme la prunelle éteinte d’un vieux atteint de cataracte. Le soleil aveugle n’avait beau n’être à cette heure qu’un gigantesque cyclope immaculé et vibrant de sa propre chaleur, son œil unique portait sur l’Egypte un regard qui voyait mieux qu’avec deux. En tout cas, Lachedékess bandait comme un taureau, alors qu’Aménorée trempait insidieusement sa précieuse robe d’un amour coupable. En un quart de clepsydre à peine, elle se voyait soudainement aimer cet homme entre tous les autres, plongée contre son gré dans un tourbillon vertigineux.

 

– Ouh là là, t’es belle comme Nephtys, toi, une amie de la mariée ?

 

– Non, du marié, c’est un associé de mon père. Papa est chef de caravane, on fait dans les fringues de luxe et les tissus de grande qualité. Elle retraça longuement les grandes étapes de la carrière de son père, qui d’obscur berger s’était élevé tout seul à la force du poignet, pour aujourd’hui se faire odieusement redresser par les impôts, alors qu‘il employait pas mal d‘esclaves nourris d‘olives et d‘oignons, d‘eau et de simples racines arrachées des broussailles. Il venait de s’offrir pour ses cinquante ans une magnifique clepsydre de chez Rollex, le célèbre horloger de Memphis.

 

Peu sensible à ce badinage élogieux visant à encenser le père de la petite, puisque, en conclusion, Tépénib gagnerait mieux en payant moins de charges, le pénis du tentateur grec trahissait plus que jamais un secret bien mal gardé. La fête battait son plein autour d’eux, dans leur dos les danseuses s’exténuaient avec grâce et ténacité et tous les invités se bafraient avec démesure, car il y avait vraiment beaucoup à boire et à manger. La nuit tomba et chassa Rê, en enveloppant la grande terrasse dans un noir total, où le couple passait inaperçu au sein de la bonne société agitée. La grosse saucisse du grec ne désarmait pas et trainait carrément en longueur, alors que de son côté, Aménorée se souillait plus que jamais avec coquetterie. Elle écoutait avec passion ce beau mâle du Péloponnèse lui balancer des banalités telles que : « Un gars qui n’est jamais tombé n’apprendra jamais à tenir sur un chameau, il faut se casser la gueule pour apprendre ». La simple idée de tomber sous ce type là au milieu des lotus travaillait durement le corps bouleversé de la jeune fille, parce qu’aucun homme auparavant ne lui avait provoqué une telle émotion. Sur la terrasse pleine de vie et d’animation, l’esprit d’Aménorée, ivre de vin, se mit à tournoyer et s’abandonna au milieu des cris, des coups portés sur les tables, du bruit des bouchons d’amphore qui sautaient, du tumulte excité des voix joyeuses. Elle ne résista pas au désir du portefaix de l’entrainer à l’écart sous un figuier. Il lui montra enfin sa bête, elle aima aussitôt ce Lachedékess comme s’il était le propre fils sacré d‘Isis. Vaincue pour la première fois de sa vie, elle remonta très haut les jambes pour se faire copieusement tartiner par l’esclave, partagea avec lui ses eaux jusqu’à ce qu’elle fut enfin froide mais rieuse ; elle laissa avec ravissement ce mec sans noblesse et sans argent embrasser ses tétons énormes avec l’ardeur d’un escadron de cavalerie. Aménorée gloussait, la tête remplie de fleurs merveilleuses, car son œil avait rencontré celui de son brave écuyer et le langage de leurs lèvres croisées lui allait droit au coeur. Ses beaux yeux noirs s’allumaient pour le regarder en souriant avec passion. Et puis il recommençait encore et encore, parce que quand un grec est décidé à faire ce qui lui plait, c’est assez difficile de l’arrêter. Bien que vulgaire esclave uniquement propre à labourer le champ des autres, il était à cet instant là son puissant maître qui la fouillait avec pas mal de nerf en écrasant son joli nez, elle s’exposait avec avidité à la flèche obstinée de son gentil ennemi, elle lui léchait sans fin sa cicatrice pendant qu’il projetait, bien à fond dans son ventre, mais sans que tous deux n’y prennent garde, un enfant vagabond de la nature. Nul doute que lorsque Amétatla apprendrait que ce salaud de pauvre étranger venait de déshonorer à jamais sa fille non mariée, elle n’allait pas se satisfaire du simple motif du désir allégué. Maintenant que la gosse avait un mioche bien lové au fond d’elle, la maternelle allait sacrément gueuler sur son irresponsable fille, vu qu’il n’y aurait aucun dédommagement possible à espérer de la part du métèque, pour réparer.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:33:42
n°49464456
talbazar
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Posté le 23-04-2017 à 11:28:34  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 25.

 

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Sur l’île de Godapat, le roi Guibert Sonfutal rendait justice dans l’une des tours de flanquement de son château de Pleugaphion, où siégeait son tribunal. Il ordonna de punir deux paysans selon son bon vouloir, car les deux hommes s’étaient rendus coupables d’avoir lâchés leurs castors laineux dans ses prés, désormais envahis de bouse molle. Les manants indélicats furent condamnés à payer 10 deniers de ban par animal en infraction, ce qui constituait bonne ruse de la part du roi, puisque les négligents incapables de payer cet argent allaient se pendre eux-mêmes sur quelque fourche patibulaire, avec pour le trésor public économie de bourreau, plus bon gain de corde et de temps. La mission du monarque accomplie, le sergent renvoya les contrevenants dans leur foyer et Guibert clapa du bec en lichant sa corne remplie de vin rouge aux cerises. Alors qu’il ôtait de sa tête la lourde couronne gemmée et dégrafait son manteau aux franges brodées, sa femme Hildegarde Bourrelareine fit irruption dans la salle pour le prévenir qu’un des invités du Fion venait de rendre son dernier soupir, puisque le Duc de Médeux n’avait pas résisté à sa terrifiante crise d’arpionnite. Le noble vassal d’Amanda s’était finalement éteint sur le seul cri de « Let me alone », entouré de ses nobles collègues réfugiés dans la tour Pucelle. Les jumelles Anaïs et Manon qui suivaient leur mère insistèrent pour récolter quelques poils de la barbe du défunt, afin d’agrémenter leur collection ; la servante Huguette Donnsapine les rabroua vertement pour leur apprendre à respecter les morts, quand bien même ils n’appartenaient pas au royaume de leurs parents. La servante fut rabrouée par le roi, pour lui apprendre à parler plus correctement à ses filles. Puis, se dirigeant vers le logis, on alla en famille déguster bonne terrine de paste de foies cancéreux de goélands gavés à l’hydromel sur fameux coulis de blanche pesche, en s’émerveillant de regarder jongleurs et fauconniers s’ébattre autour de la table au son des ménestrels.

 

Cette mort subite n’arrangeait point les affaires de Gaëtan Maldemer de Posegalettabord, amiral de la flotte du royaume de Fion, lequel cherchait le moyen de dérober la Pinette contenue dans l’herbier des jumelles. Il lui semblait que ces funérailles allaient retarder son projet. Grâce à l’aide précieuse et courtoise de la guilde des scieurs en long de la cité de Godakatpat, les réparations allaient bon train et l’armada du Fion serait remise à l’eau dans deux jours. Sans compter que l’hospitalité îlienne commandait d’assister à une ultime chasse au castor sauvage en compagnie de la noblesse Pleugaphiote. Il fallait pourtant attendre que le corps de Médeux fut brûlé pour remettre les voiles, ce qui ne se faisait dans cette contrée que huit jours après le décès. Ce pauvre banneret disparu, de naissance pourtant obscure, laissait dans un coin de l’Hyperbourrée, tout près de la frontière du pays de la Godée, un petit fief en legs à ses six filles et deux indécises. Devant le corps inerte et déjà faisandé de messire de Médeux, Gaëtan se rêvait en revanche déjà roi du Fion par nom et scel, après avoir gaillardement dégourdi la reine Amanda, avec l’appui généreux de son précieux cadeau. Il veillerait plus tard à attacher cette modeste seigneurie à son nouveau titre, en condamnant au passage les héritières au bannissement, pour traître prix de la loyauté de leur valeureux père au royaume de Fion. La guerre contre Mouyse vers laquelle l’amiral était censé conduire ses bateaux s’annonçait cruelle et sauvage, mais lui-même n’y porterait point l’oriflamme, puisqu’il allait de belle manière conquérir le trône de Fion par grandes galipettes, en se montrant à sa manière grand conquérant. Il saurait bien trouver les arguties pour faire la paix avec l’Ovoïde Vazy Métoian LXIX. Grâce à la plante sorceresse, lui allait bientôt connaître grande gloire et foison de richesses d’or, d’argent et de chers joyaux. En attendant, il devait s’emparer de la Pinette, guerpir promptement de Godapat et retourner devers la reine Amanda qu‘un sort ignoble laissait en friche d‘amour, car lui avait grande hâte de la cravacher sur les hanches avec ses doux éperons ; par si grande ardeur que ce serait certainement grande merveille à raconter. Ce triste soir de pieuse et sombre veillée il engagea donc son propre avenir, en décidant de passer tout de suite à son acte qu’il avait soigneusement planifié. Chambellans et autres serviteurs allèrent se mettre au lit, Gaëtan Maldemer prétexta auprès de Gaëtan Manquedamour et du capitaine-chevalier Franquette de Labonne qu’il resterait pour sa part toute la nuit auprès du mort, pour prier avec ferveur sainte Kramouille, laquelle ne porte point ses fils en amer dépit ni vileté. Puisque le sieur de Médeux méritait à coup sûr éternelle mémoire d’entre les preux. En réalité, ce qu’il ne pouvait leur dire, c’est qu’il avait moult à faire dans l’appartement des fillotes jumelées.

 

Chandelle de suif en main, il pénétra donc silencieusement dans la chambrée des dauphines pour farfouiller et trouver le grimoire qu’il désirait rober. Estant au dit lieu, il butina de-ci de-là, au milieu des étagères aux nombreux recueils renommés, en prenant surtout garde de rester silencieux. C’estoit un gros bordel se dénicher l’herbier au milieu du fatras des collectes amoncelées, où régnaient des cohabitations étranges et singulières. Dans le jus noirâtre des bocaux, nageaient d’ignobles résidus de braconnage, allant de la couille de berger à la cervelle de cormoran, puisque le beau est toujours étonnant. Des éprouvettes classées constituaient bonne banque d’embryons frelatés, choses étonnantes et rares dont les blondes gamines raffolaient. Fruit d’une passion volontariste pour les sciences naturelles et les secrets d’apothicaire, les collections de Manon et Anaïs composaient un projet ambitieux qui laissait le visiteur nocturne totalement ébahi. Il fouilla longuement entre les pots stockés, plongea au cœur des fleurs séchées, les morceaux de résine ambrée, il butina fébrilement au milieu des précieux ouvrages de maître astronomier et les morceaux de fromage en provenance du monde entier. Il louvoya avec précaution entre les baldaquins des petites occupées à ronfler ; entre ses doigts menus, Manon cramponnait en doudou une mince calotte blanche. Puisque c’était surtout les livres qui l’intéressait, il entassa dans un coin tous ceux qu’il pouvait déchiffrer dans la pénombre, autant de manuscrits qui allaient des traités sur l’érosion des sols aux incipits chargés de faire comprendre la fragilité du bonheur de vouloir se venger. D’épaisses sommes enluminées avertissant du danger des lavandières sur la pollution des lavoirs, en passant par le véritable bienfait des racines acaloriques idéales pour apaiser les menstrues de riches damoiselles. En tâchant de ne pas éternuer, Gaëtan balaya des tonnes de poussière au cours de son examen. Son oreille attentive écoutait chaque bruit du château, mais il s’impatientait de ne point retrouver l’herbier qu’il convoitait, farfouillant au milieu des cornues remplies de sang, de sperme, de poils, de salive, de cheveux et de peau des malheureux pendus royaux. Il décida d’élargir sa quête en rampant sous les lits. Là-dessous, quelques caisses ravagées de cossons contenaient les cendres de chers disparus, classées par ordre alphabétique. Il fit fuir en passant des familles entières de cafards véloces qui s‘égayèrent sur les crottes de souris. L’amiral délaissa rageusement en les poussant de la main de gros catalogues réunissant des produits vendus en boutique, mais il se voyait échouer dans sa quête et le temps qui passait commençait à le rendre nerveux. Dans cette chambre d’enfant transformée en temple de la science, on trouvait de rares grimoires à la douzaine aux trois quarts remplis de secrets ancestraux, mais Gaëtan ne pouvait rester là cent sept ans. Néanmoins, il s’accorda un court repos. Il s’imaginait réussir en cinq sept et tomber sur l‘herbier en moins de deux, mais il reconnaissait être à cent coudées de son but et sa recherche freinait des quatre fers, bien qu’il fit le diable à quatre au milieu des reliures. Il s’effraya qu’un second couteau puisse avoir eut la même idée que lui et que la Pinette fut déjà subtilisée par un rôdeur davantage rusé. Ce serait pour le coup triste compte à demi qu’un rustre de son armée puisse l’avoir maronné ! Trouvant un second souffle, il se remit vaillamment quatre à quatre à fouiller partout avec moins de discrétion, sans cette fois juger utile de couper les cheveux en quatre. Il fit du bruit, réveillant dans la chambre voisine le valeret Valentin Douceverge, lequel s’était octroyé un plaisant cinq à sept avec la jeune servante Huguette Donnsapine. Puis les coilles bien vidées, il s’était endormi sur le sein de la belle pour y passer la nuit, ce qu’il faisait de temps à autre. Le domestique dégagea de son oreiller un couteau à deux lames, car en journée il n’était pas baiseur, mais apprenti boucher. Au sein d’un regain d’activité, Gaëtan se démenait plus que jamais pour réussir, rechignant à l’abandon, il était malgré tout plus que jamais gêné par l’abondance du fatras qu’il devait écarter. Immergé comme un fol dans la pénombre de la pièce, il fit tomber par terre des crânes de chats qui pendouillaient au-dessus de sa tête comme guirlandes de kermesse. Le grand barouf réveilla au passage les petites filles modèles. Manon et Anaïs poussèrent aussitôt de grands cris, alertant pour de bon Valentin. Le brave garçon se précipita dague en main pour tomber sur la vision de ce voleur, qu’il suspecta plutôt de vouloir pratiquer d’odieuses et abjectes foutreries sur la fragile personne des filles du roi.

 

– Point ne taillerai pipe ! point ne taillerai pipe ! hurlait la pauvre Manon, en relevant son drap sur sa poitrine absente, car elle avait six ans.

 

– Mais non, Manon, fit Gaëtan en lui pointant néanmoins sur sa blanche gorge son coutelas, donnez-moi juste votre herbier, je jure que si vous accordez, dans moins de dix années vous allaiterez gamin paisiblement. Autrement, je vous tranche le cou sur l’instant.

 

Un peu jalouse qu’on l’oublie, Anaïs plaida à grand renfort de pleurs que l’on puisse respecter la dignité de son être, mais elle redoutait quand même un peu de se voir bien vilainement fourrée et farcy par ce rustre du Fion, ce salopard qu’elle aurait bien voulu revêtir de poix brûlante. Valentin Douceverge hésitait à agir, craignant pour la vie des princesses que l’autre menaçait, car c‘était grande pitié de voir les larmes et d‘entendre les gémissements de ces pauvres créatures blondes, à peine venues au monde. Bien que déterminé à tout faire pour les protéger, il en estoit fortement émeus.

 

– Soit, vous voulez notre herbier, vous l’aurez, mais laissez ma frangine en paix, s’adressa au milieu des sanglots Anaïs à ce preneur d’otage. Voici, prenez-le. Elle dégagea le précieux livre placé sous son matelas, sur lequel en fin de compte elle dormait, puisqu’elle aimait s’enivrer du parfum des fleurs avant de s’endormir.

 

– Par Kramouille, donnez ! Hurla Gaëtan sur un ton enflammé, mais il barrait toujours le fer contre la gorge tendre de Manon.

 

– Quand le roi Guibert apprendra ce que vous avez fait, menaça Valentin, nul doute qu’il brûleroit et arderoit ton corps misérable sur un bûcher, car tu es bien lasche de courage de menacer aussi vilainement d’innocentes fillotes ! Ta faute ne peut rester impunie !

 

Eteignant toute prudence, le valeret hors de lui s’élança comme un diable sur son ennemi, mais il avait grande peur de percer la jolie Manon d’un coup malheureux. Mettant à profit l’instant d’hésitation, Gaëtan sortit quand à lui son épée et la plongea d’une main dans le corps du valet qui tomba mort sur le tapis. Dans l’action, la lame du couteau avait un peu glissée sur le menton de la gamine, un peu de jeune sang coula sur sa chemise, mais la coupure n’était cependant pas bien grave. Les deux enfants en furent cependant très effrayées. Elles firent mesmement diligence aux ordres de leur bourreau, puisque le tueur de Valentin leur commandait de se tenir tranquilles pour le laisser aller. Les pauvres mignonnes se résignèrent à ne point crier pour rester en vie, puisqu’il istrait un grand péril à courroucer cet impudent voleur d’herbier. A côté, la servante Huguette roupillait toujours et la triste nuit noire enveloppant le châtel endormi refusait tout secours. A grandes enjambées, cramponnant fermement son trésor sur son ventre, Gaëtan Maldemer de Posegalettabord trouva moyen de quitter le château sans encombre et se barrer d’illec en volant un destrier rapide, pour fuir à toute allure vers ses bateaux afin d‘y brander sournoisement le feu.

 

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Bon dimanche à tous et bonne bourre.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:39:59
n°49512554
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 26-04-2017 à 08:01:15  profilanswer
 

Et encore un nouveau vol manifeste découvert par le comité de vigilance (CV) !

 

Un plagiat éhonté qui viendra nous prouver une fois de plus que le pro-fesseur Talbazar est bel et bien ce génie universel qui sauvera le Canada de la famine !
vous vous souvenez certainement de la 22 ème machine essentielle de notre salon :

 

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Et donc, le CV de la Me du PT nous a signalé ceci :

 

http://sciencepost.fr/2017/04/proj [...] e-afrique/

 

naturellement, nos avocats ont déjà acheté sur plans leur luxueuse villa à Saint-Barth  [:pepe le moco]


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:43:00
n°49564159
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 30-04-2017 à 01:36:28  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole. Extrait numéro 45.

 

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Si le grand Manitou se trouve sur Phobos, ce n’est certainement pas pour se la couler douce en villégiature. Selon la juste estimation de Franck Sonotrou, nul besoin d’un don particulier pour deviner que le général a dirigé lui-même les deux tueurs vers sa planque. Dénoncé, certainement, mais par qui ? Une prudente méfiance commande de ne pas s’approcher trop près du Panzig ami, il reste donc à distance de l’engin jaune pâle au profil effilé qui devait l‘emporter sur Mars. Près de ce vaisseau léger règne un calme apparent. Avec un déploiement de précautions, Franck louvoie prestement dans la pénombre du dock, un petit numéro d’acrobatie de son corps gonflé à la testostérone l’envoie ensuite sur le toit d’un conteneur standard, où l’officier se couche en long, en espérant pouvoir se rendre relativement invisible. Sans qu’aucune hypothèse ne puisse prévaloir sur une autre, il reste simplement très longtemps en observation, dans une vigilante expectative. Physiquement et mentalement, il est cependant gavé d’énergie pure. Le cadre rassurant et trompeur s’agite enfin et se met à fourmiller de trognes maléfiques bien armées et soudain impatientes, qui encerclent le véhicule et viennent enfin apporter leur navrante certitude : le contact prévu est bel et bien cramé. Les bidasses révélés annoncent la couleur en dévoilant le piège, mais ils semblent renoncer à tomber sur le râble de l’espion à l’improviste, il faut désormais à leur proie s’efforcer de penser comme eux pour agir. Franck à beau focaliser son regard sur le Panzig désormais inutile, l’énorme forteresse garée non loin de là l’attire comme un aimant, en le faisant cogiter à toute berzingue. Il repère au pied du piédestal métallique sur lequel il se perche un Atom Rocket 7 sustenté à l’arrêt, véhicule civil du service de l’astroport qui traine en remorque un lot conséquent de pièces détachées. Il se dit que, peut-être, ce coup de pouce inespéré de la providence a quelque chance de boucler l’audacieux projet que son esprit construit rapidement, mais il se rend compte qu’il est pris d’un certain vertige à l’élaborer. Le bâtiment amiral ne restera pas éternellement sur Phobos, il est même fort probable qu’il s’apprête déjà à rejoindre l’orbite martienne. Cette conclusion alléchante donne un corps solide au formidable coup de poker envisagé, il serait pourtant dommage pour Franck que ce fut son dernier ! Il se sait toutefois dangereusement piégé sur Phobos et n’a plus le choix : s’il peut s’imiscer dans le Sharsherman, en plein cœur du commandement ennemi, il gagnera paradoxalement en sécurité. En grimpant dans l‘astronef, il serait idéalement placé pour échapper aux soldats qui le traquent aux alentours et cette idée ne cesse de l’enthousiasmer, en dépit du fort potentiel de danger que cette manoeuvre suppose. Plus il est en train de réfléchir, plus l’Oberleutnant se dit que son plan est pourtant le meilleur possible, parce que de toutes les hypothèses, l’intrusion de l’agent à bord de son propre vaisseau est la seule que Digoule ne peut envisager. Reste à procéder à l’exécution, dans un secteur grouillant d’ennemis, puisque aucun civil ne semble autorisé à circuler pour l’instant dans ce secteur de l’astroport. Le Panzig est complètement investi, une noria de patrouilleurs entre et sort en continu du vaisseau, laserguns aux poings. Quand à lui, le contact doit vraiment passer un sale quart d’heure, s’il n’est pas déjà exécuté. Il n’y a que sur Terre qu’on balance les indésirables chez les rampants pour faire semblant de ne pas se salir les mains, mais cette apparente attention revient finalement au même.

 

Franck a déconnecté son implant factice depuis longtemps, puisque cette ruse a probablement été éventée et le rend facilement repérable, mais il lui reste ceux des mecs des Forces Spéciales qu‘il a tués. On a du découvrir qu’ils manquaient aux morts, il faut faire vite, car on doit logiquement les pister. Ces trucs identitaires peuvent débarrer des portes par simple contact, ils devraient lui être utiles une fois grimpé à bord du Sharsherman, encore faut-il pouvoir l’approcher. Il place l’une des pastilles minuscules en aluton contre son crâne, en essayant de la dompter par la pensée, miracle, elle obéit, une fois qu’il a fait le tri dans les souvenirs du défunt, un type qui a plusieurs fois fait des coups de force en commando dans les canyons. L’usurpateur commande au cervometteur un plan détaillé de Sharsherman, de belles visions s’imiscent dans ses pensées, il devrait pouvoir s’orienter correctement dans l’astronef de l’amirauté, semblable à tous ceux de sa catégorie. Les images deviennent cependant rapidement instables, puisque l’implant étranger n’est que posé sur l’os, au lieu de baigner tranquillement dans son bain de neurones. Rassuré cependant par l’expérience, Franck cède aux interférences un peu douloureuses et décide de passer sans plus attendre à l’action, il arme pour ce faire son Atomatic avant de glisser vers le sol dans l’ombre du container. Trois sentinelles font le guet sous l’énorme bâtiment de guerre, la plupart des autres sont près du Panzig ou surveillent au loin les environs. L’Oberleutnant veut semer la confusion dans cet ordonnancement, trop peuplé de sens à son gout. Habile comme un chat, il parvient sans être vu près de l’Atom Rocket qui n’est pas verrouillé. Le plan de route qu’il commande ensuite au petit remorqueur est clair, puisqu’il va le lancer pour faire diversion sur le long ruban gris de l’astroport, du côté opposé du Shasherman. Ce qui devrait occuper suffisamment de soldats pour lui laisser le temps de s’approcher de ce dernier. Il n’aura qu’un temps très court pour valider cette équipée, mais l’effet de surprise supposé devrait jouer son rôle. Il craint surtout que les sentinelles restent à poste, être obligé de les tuer signifierait un fiasco qui révélerait sa présence. Il n’est plus temps de s’interroger, il n’a pas d’autres stratagèmes sous la main. Placé en mode télécommandé par implant, l’Atom Rocket 7 feule et bondit prestement, en trainant au-dessus du sol sa lourde remorque, alors que Franck s’apprête à courir vers la masse gigantesque du Sharsherman. Comme prévu, les soldats s’agitent à la vue du déplacement incongru du petit convoi qui fonce vers eux, il ne peut y avoir de collision, c’est positivement rendu impossible, mais la stupéfaction de cette anomalie provoque bel et bien une salutaire agitation. Deux bidasses font feu immédiatement sur le petit appareil, d’autres courent dans sa direction, les sentinelles redoutées focalisent également leur attention sur l’incident. Parfait, c’est le moment, l’agent se lance pour de bon dans l’aventure. La plupart des soldats se sont massés autour de l’engin en partie carbonisé, alors que, bingo, la curiosité se fait plus forte que les ordres en déplaçant quelque peu les guetteurs du gros vaisseau interplanétaire, estompant un peu leur vigilance. Le risque est à cet instant maximum, mais Franck tente le tout pour le tout et s’élance dans l’espace vide qui le sépare de son but.
 
 Il n’a pas été vu, mais le bordel qu’il vient de provoquer va rapidement déclencher un redoublement de la vigilance des soldats, qui vont fouiller partout à la recherche du fauteur de trouble. Franck se sert à présent de l’ombre gigantesque du volumineux croiseur militaire, au côté duquel il existe à peine. Allumée en permanence, la masse globuleuse des éblouissants feux de positions bordent le gouffre béant des déflecteurs principaux, en lâchant continuellement leurs éclairs d‘un rouge vif. On s’agite toujours autour de l’épave brûlée, mais la circonspection des soldats ne saurait durer. La mosaïque lumineuse et linéaire des capteurs à balayage et autres flash sporadiques longeant les ailettes supérieures des gouvernes du Sharsherman apportent de temps à autre une redoutable clarté, dont Franck Sonotrou cherche absolument à s’échapper. Le renflement trahissant la présence d’un puissant piston de silencieux d’échappement et situé dans l’un des cônes avant du carénage lui offre son ombre ténébreuse en répit. Il se cache là quelques minutes pour méditer la suite de son plan, mais il sait parfaitement ce qu‘il doit faire, si les gardes ne le découvrent pas avant. La cloison arrière du logement d’un des trains avant déployée descend pratiquement jusqu’au sol, c’est par là que sera possible l’intrusion, si l’implant ne ment pas. Pour pénétrer dans le vaisseau, il entame une ascension pénible dans la glissière étroite d’une épontille creuse qui permet tout juste le passage de son corps. Mais il s’élève correctement, par une intromission réussie dans le puits 3 de l’un des atterrisseurs principaux. Il reprend sa respiration et savoure le fait de se considérer provisoirement hors de danger. Le décor redevient horizontal, puisqu’il s’introduit et progresse à présent à plat ventre dans une grosse chambre de gainage. Il rampe là un bon moment, comme un rat obstiné, dans cet espace circulaire et totalement obscur qui doit logiquement le mener vers la double paroi arrière de la soute en avant bâbord. Voilà, le souffle un peu court, il progresse à présent entre deux cloisons étroites au sein des garnitures d’étanchéité, pas à pas il pose un pied malhabile dans la travée longue et étroite, cette fois debout, mais souffrant d’une progression pénible pour atteindre enfin un espace technique assez large, muni d’une trappe perçant un corridor longitudinal. Il fait une pause afin de faire le point, puisqu’il se pose l’implant dérobé sur la tempe, estimant avoir besoin de se repérer. A sa demande, la structure interne d’un Sharsherman s’offre à sa vision intérieure, aussi clairement que s’il lisait un plan. C’est bon, il peut repartir. Le panneau qui s’offre à lui maintenant est par chance équipé d’une bague de serrage manuel ; il s’empresse aussitôt de manipuler l’anneau de garde rotatif pour le déverrouiller et passe par l‘ouverture. Il y a un équipage nombreux dans ce type d’appareil, mais pour l’instant tout est calme et silencieux. A tout hasard, il s’empare d’une petite ventouse de préhension collée sur un mur. Il se trouve toujours dans les méandres techniques du navire, lesquels le protègent sans doute d‘une rencontre inopportune avec les hommes et les femmes du bord. L’intrus marche ensuite comme un funambule sur l’arbre principal d’une unité rotative, en s’accrochant tant bien que mal au cable tendu d’une poulie motrice ; il observe alors sous ses pieds un vide aussi dangereux que respectable. Satisfait de sa course quelque peu risquée, Franck Sonotrou dédaigne un panneau partiellement ouvert qui ne le mènerait qu’à l’une des capsules de sauvetage, une voie sans issue. Ces nacelles typiquement militaires rapidement descellées s’utilisent comme des chambres de flottement spatiaux, en cas d'urgence. Sur un puissant Sharsherman, il est cependant peu probable qu’elle soient jamais mises en service au cours d’un combat spatial, comme ce fut plusieurs fois le cas sur les Shaleclairs, légèrement plus vulnérables.

 

 Parvenu au bord inférieur d’un manchon d’aspiration, il joue facilement sur la poignée à came pour ouvrir l’un des vantaux d’une des dix écluses à oscillation, ce qui lui permet de plonger dans la grosse tuyère desservant l’un des siphon à gravité, en s’aidant de sa ventouse pour éviter de chuter. Il dépasse l’énorme buse de succion de la pompe radiale d’un échangeur de chaleur à circuit scellé et retombe sur ses pieds. Derrière le mur brillant, dorment dans leur chambre les redoutables missiles HFR 412 à désintégration moléculaire qui font la force réelle de ce type de dévoreur d‘espace intersidéral. Sur le sol de la pièce où se trouve en revanche le visiteur clandestin, des câbles innombrables et multicolores courent partout sans ordre, comme si de longs serpents tentaient d’envahir de façon anarchique ce segment de coque. Certainement le seul endroit du bâtiment qui peut donner le sentiment à l’intrus d’arpenter un décor traité avec une certaine négligence. Inaccessible aux soldats, ce coin là n’est après tout destiné qu’à servir uniquement aux technos de maintenance, des clampins forcément plus pointus que de vulgaires astroragistes. Soudée au mur, une interminable échelle à crinoline mène vers le panneau de pont ouvrant 7, mais une autre, simple et plus courte, conduit directement vers un logis de maintenance du basculeur gyro d’un châssis-cabine, à proximité de la passerelle principale de commandement bâbord, rien de moins ! Sous charge de pression, le cylindre 5 se trouve fermé mais son cadran délivre une lueur providentielle qui permet à Franck de se repérer correctement. Il franchit un long couloir d’accès aux batteries d’artilleries, par chance complètement désert et visiblement non maintenu pour l’heure en service sévère. Il dédaigne la salle dédiée au capteur radar controlatéral à longue portée et redoute plus que jamais une rencontre possible, auquel cas il devrait faire feu sans hésiter. Puis, heureusement sans voir personne, il se glisse à nouveau dans un conduit lisse et étroit après avoir dévissé l’obturateur, c’est celui du générateur d’impulsions hautes-fréquences. Franck se guide aux lumières intermittentes du relais clignotant du calibrateur. Un endroit dangereux où il ne faut cependant pas s’éterniser. Il a un peu de mal à le croire lui-même, mais il est parvenu à son but, dans le cœur vif de la bête de plastacier, au sein même du compartiment central de pilotage.

 

Cette fois, après avoir encore rampé sous un mince plancher de bakélicuivre, il ne peut aller plus loin et se retrouve sous la console G8 d’un collecteur de pressions, couché au milieu des câbles et des flexibles de raccordement. Une grille minuscule perçe la base de ce pupitre surchauffé pour le ventiler, au travers de laquelle Franck colle un œil avide : il s’offre de cette façon une vue imprenable et discrète sur le poste principal de commandement au design épuré, avec dans son axe direct le pont légèrement incliné menant au cockpit, dont la pente douce le divise symétriquement en deux. Ce poste névralgique destiné au Sharshermankommodore, au Sharshermankommandeur et au Sharshermankapitän ne manque cependant ni de raffinement ni d’un certain confort. Avec un sentiment de jubilation ironique, Franck savoure de contempler en face de lui le Tsar en personne assis dans l‘un des fauteuils, observant sans vraiment y porter d‘intérêt les écrans qui signalent des synchronisations rectifiées. Au pied du large hublot de coque panoramique ouvert sur la nuit de Phobos, un jeune Leutnant attentif procède aux côtés de son chef à la collecte des infos provenant d’une quelconque sonde de prélèvement. Tout le bâtiment de guerre à l’arrêt témoigne néanmoins d’un repos vigilant et Franck estime avoir eut beaucoup de chance d’être parvenu où il se trouve à présent. Comme il s’en doute, le centre de commandement prépare un retour sur Mars imminent. A première ouïe, les ordres délivrés à haute voix par les hauts parleurs suggèrent en effet que le grand vaisseau de guerre ne tardera pas à être placé en alerte décollage. Le système de propulsion indique d’ailleurs se trouver déjà en attente critique d’un déclenchement bas régime. Personne ne semble avoir été prévenu de l’incident qui vient d’avoir lieu sur la piste peu de temps auparavant. Le visage collé à la petite écope d’entrée d’air, l’espion aguerri Sonotrou s’étonne de cette singulière omission, mais il ne perd pas une miette de la conversation agitée que mène le général Digoule avec le cénazteur dissident d’Arsia Mons, Vlodim Pourichine. L’observateur fébrile les regarde chuchoter, animés d’une passion commune devant l’échec de leur plan concocté à la hâte. Une main balayant nerveusement son front en sueur, le cénazteur parle enfin plus fort, pour accuser son interlocuteur aux tatouages galonnés d’être seul responsable de la faiblesse des moyens employés. Devant la sévère critique, le général l’écoute sans broncher, puis il justifie son surnom en ordonnant à Pourichine de fermer sa grande gueule, avant de lui demander sur un ton plus doux d‘imaginer l‘émotion de sa femme et de sa fille, lorsqu‘elles apprendront qu‘un coup de laser vient de fendre leur mari et père en deux parties. L’habitacle se plombe pour le coup, quelques secondes, d’un silence menaçant. Digoule rappelle simplement lequel des deux se trouve réellement aux manettes, il fait même un mot d’ironie pour insister sur le fait qu’un pilote de Shaleclair plongé dans une terrifiante tempête cosmique ne vaut plus que ce que vaut son vaisseau. Une manière de préciser pourtant que les événements ne sont pas prêts de le faire trembler, lui.

 

– Cénazteur, soyez plutôt content de m’avoir à vos côtés, on peut tout de même se réjouir d‘avoir l‘armée martienne que je commande toujours, en épaulement de sécurité, non ? Vous manquez de coffre, monsieur. N’importe quelle juridiction mise en place par le président Sirkisi va vous écrabouiller rapidement en vous offrant la mort ou l‘exil, nous manquons de temps pour nous quereller. Convenons-en, vous avez pour l’instant peu de chose concrète à m’apporter. Une belle dame anonyme vous a aidé à localiser Sonotrou, dites-vous ? Elle n’est pas celle que vous croyez et nous trahira à la première occasion, que croyez-vous donc ? je devine très bien de qui il s‘agit, même si vous ne voulez pas me révéler son identité. Pour ma part, l’unique soutien que je m’autorise, monsieur, c’est un recours efficace à la force probante que je dirige encore.

 

– L’affaiblissement des crédits ordonné par Sirkisi affectera rapidement votre fameuse armée, Général, les gisements martiens ne sont plus en exploitation, la production planétaire de la SGL accuse pour la compagnie une baisse conséquente sur les marchés galactiques. Vous n’êtes pas aussi puissant que vous le pensez, soyez certain que vos militaires seront très bientôt les victimes obligées de l’accord de paix qui se prépare. Nous sommes finalement trop peu nombreux dans les rangs du Cénaz à adopter mon point de vue. D’une certaine manière, les mineurs de Yoland ont déjà gagné la guerre et peuvent tranquillement espérer un accès rapide à l‘indépendance. Digoule, les administrants aux abois vont incessamment vous désarmer et l‘ensemble du Congres les écoutera finalement avec bienveillance, en ralliant définitivement les indécis. Il se cala à fond dans son siège au dossier enveloppant. Je vais vous donner mon sentiment, général, parce que je suis finalement moins con que vous, j’ai la certitude que ce petit branleur d’Oberleutnant qui vient de nous glisser entre les doigt est déjà sur Mars à l‘heure où je vous parle, vous voulez parier ? Fouillez Phobos de fond en comble si ça vous chante, vous ne le trouverez pas. Inutile également, sans doute, de pulvériser Ariane 20. Choisissez l’économie que vous devez en urgence réaliser, mon général, celle de vos missiles ou bien celle de vos nerfs ?

 

Le cou tendu vers l’orifice qui lui offre l’amusant spectacle, les cervicales de l’espion le font souffrir. Il subi en plus l’intense chaleur dégagée par les circuits qui l’environnent et il aurait voulu reposer sa tête quelques minutes, pour se libérer de l’inconfort détestable de sa position ; mais il est tout simplement fasciné par la proximité de ce fameux duo de comploteurs. Il constate également en même temps que les commandes superdrive du réacteur zionnique s’enclenchent les unes après les autres. L’immense tableau de bord s’illumine et prend un aspect un peu solennel, quelques pompes de ce sanctuaire volant de l’amirauté laissent échapper un sourd grondement qui fait trembler légèrement l‘ensemble du vaisseau. Le sifflement continu ne vas pas tarder à faire place à un aboiement rageur, que l’espace rendra pourtant muet, une fois quitté le dômus de Phobos et son astroport 12. Quelques informations holocastées défilent devant les yeux des pilotes : 28 s 3/8, 10 s 6/3 départ imminent. Visiblement, Pourichine est de ce voyage, puisqu’il n’a pas quitté le cockpit, mais il garde désormais à la droite du général un silence amer. Sa bouche a pourtant laissé échappé un soupir contraint devant l’air méprisant de son voisin. Le saut de puce vers Mars peut commencer. La fabuleuse machine de guerre décolle soudain du sol qui le portait jusque là, pour s’élever en une fraction de seconde vers la nuit cosmique d’une merveilleuse pureté. Une simple sollicitation d’un pilote accélère à peine la machine qui tournoie rapidement dans l‘espace aux frontières infinies ; ensuite, le Sharsherman pénètre déjà dans l’orbite martienne avec une belle stabilité dynamique. Toujours planqué au sein du poste de commandement du formidable engin, le clandestin Franck Sonotrou se trouve particulièrement ravi de cette escapade réussie. Il retourne se réfugier sous le plancher relativement plus acceuillant, l’esprit toutefois entaché de pensées acerbes. Une belle dame dans le secret l’aurait donc effectivement trahi, mais qui peut-elle bien être ?

 


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Beau dimanche et bon lundi à tous.

 

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Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:44:18
n°49576808
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 01-05-2017 à 15:17:35  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La jet larguée. Extrait numéro 19.

 

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Alors que l’avion brisé ne trahissait plus sa présence que par un mince bulbe blanc émergeant du marigot au milieu des irisations de kérosène, il plongeait avec lui dans la boue mouvante les enregistrements de ses deux boîtes noires. Ces dernières portaient la preuve que les pilotes avaient suivis l’intégralité d’un match de foot au cours du vol, que l’hôtesse Kim Kosanshian au chignon impeccable avait pris les commandes pendant 30 minutes exactement, qu’une autre leur avait lu des poèmes chinois pendant un quart d’heure, que la qualité des équipages n’était pas en cause, mais que bon, le moteur numéro 2 était en feu avec un réacteur complètement hors service et qu’on allait se poser, enfin sans doute s’écraser, dans une zone inhabitée autant qu’inabritée, puisque bâtie de vieilles ruines. Le commandant de bord Steven Eight indiquait donc un soudain changement de cap, pour effectuer un atterrissage en catastrophe sur une île minuscule balayée par les vents. On l’entendait franchement rire de la tête ahurie du copilote Jack-André Tyler transformé pour le coup en planeur. Les réservoirs étaient plus secs que les plateaux-repas de la Petro Jelly et on appliquait les procédures d’urgence pour que les passagers puissent intégrer le pire sereinement. Ce qui n’irait pas sans provoquer des angoisses et susciter des interrogations, mais qu’une fois l‘avion immobilisé et partiellement détruit, ceux qui survivraient sauraient certainement s’adapter pour le mieux au changement d’horaire. Jack André se voulait toutefois confiant, il communiqua même à son collègue que sous ces latitudes, si par hasard des pompiers les attendaient quand même, leur eau ne risquait pas de geler dans les lances à incendie. Dommage, lui répondit Steve, puisque pour se protéger du froid, les survivantes se seraient serrées contre nous. En syndicaliste modérément militant, ouvertement nostalgique des rototos et des basculos d’autrefois, traîtreusement remplacés aujourd’hui par les commandes électroniques et les écrans qui offrent tous le loisir aux pilotes de se gratter les couilles ou le minou, mais les submergent  d’un trop plein d’infos, Steve plaisantait sur le fait qu’à la Petro Jelly, la maintenance des appareils coûtait nettement moins cher que le prix du billet. Jack le sous-traita d’ingrat, vu que leurs salaires continuaient en général de faire sourire les banquiers. Enfin bon, les box dévoilaient minute après minute qu’on faisait son boulot et qu’on transmettait les informations, Steven ajoutant au passage que le score du match de foot constituait un bilan révoltant. En retour, le guidage au sol prouvait qu’il savait parfaitement réagir au type d’anomalie rencontrée, puisqu’il souhaitait plein de courage aux pilotes. Ensuite, on entendait quelques crouic … crouic… et puis plus rien. Les centrales de calcul des positions de l’avion le donnaient en dernier lieu pour quelque part au-dessus de la mer. 120 ordinateurs pour confirmer qu’en dessous, il n’y avait que de l’eau tiède à perte de vue et qu‘il fallait faire avec.

 

Après avoir construit sur la plage son temple de bambou avec l’aide de quelques fidèles, Eloi de Pouillet haranguait ses ouailles pour faire la chasse aux singes et les éliminer, vu que ces animaux scandaleusement pourvus de jambes, de bras et de mains n’étaient qu’une violation de sa loi divine, une offense évidente à la dignité humaine ; puisque ces sales bestioles témoignaient, en plus, d‘un certain degré de réflexion en s‘équipant d‘outils. Ils avaient même peinardement pris possession d’une rangée de sièges perdue dans la jungle, sur lesquelles ils prenaient du bon temps, poussant le vice jusqu‘à se mettre des casques glanés ici et là sur leurs oreilles décollées. Puisque Dieu avait créé par inadvertance ces créatures odieuses, il fallait réparer son erreur. C’est au cours d’une de ces battues aux simiens que son groupe tomba dans les buissons sur une sorte de totem sculpté dans un morceau de tronc, figurant un visage grossier dont les cheveux étaient réalisés par une couronne de vieilles brosses à dent. Ce portrait démoniaque n’était quand même pas l’œuvre des singes, c’est en tout cas ce qu’affirma Eloi à ses sectateurs apeurés, pour leur redonner confiance en lui. Il avait en effet le lourd fardeau de se charger d‘âmes. Le problème essentiel posé par ce diable exotique provenait surtout du fait que, si les brosses à dent étaient usées et relativement anciennes, la peinture qui recouvrait cette chose semblait sinon fraîche, du moins assez récente. Il garda cependant ses réflexions pour lui et céda même au désir insistant des autres qui voulaient ramener le fétiche au campement, en dépit de sa mise en garde sur le fait de pactiser avec le démon en accordant trop d’importance à leur découverte. On rajouta tout de même le totem aux trente singes tués à l’aide d’arcs et d’arbalètes improvisées. Lorsqu’il revinrent aux abris, le commandant Steven était absent, puisqu’il s’était éloigné dans les rochers pour taquiner le poisson. Un pilote de ligne peut très bien se reconvertir en pêcheur à la ligne, ce n’est après-tout qu’une question de matériel. Appelé à faire usage de sa science, Pierre Simon Langevin identifia immédiatement la trouvaille comme étant l’œuvre des Gouroungourous, la tribu autochtone de cette île que l‘on donnait pour complètement disparue. Il colla un brin de pétoche à certains en rejoignant Pouillet sur le fait que la sculpture n’était pas très vieille, mais cette affirmation redonna de l’espoir à d’autres, puisqu’elle suggérait que l’île puisse être habitée, quand bien même les locataires du coin auraient des plumes dans le cul et des os dans le nez. Loin de toute cette agitation, Steve surveillait son bouchon derrière ses lunettes noires à côté de Jack, lui-même en train d’essayer de percer quelque poisson nageant dans l’eau transparente, avec un harpon maison. Le suicidaire Louis de Bourvil flottait un peu plus loin dans sa brassière, maintenu ferment par le général Karl Ashnigof, dans l‘eau jusqu‘aux reins. On était aussi peinard qu’un jour de vote et Steve profitait du paysage enchanté, la mer le fascinait depuis toujours et pour l‘heure, il attendait qu‘elle fût nourricière pour la communauté.

 

– Tu sais Tintin, en général, la moitié des crash accuse des fautes de pilotage.

 

– Faux, les trois quart des accidents résultent d’erreurs humaines, ça inclut les passagers.
 
– Oh, tu joues sur les mots. Je crois qu’en mon fort intérieur, je préfère quand même être ici à cause d’un feu de réacteur qu’en raison d’une alerte à la bombe. Un accident mécanique, c’est franchement plus noble que l’absurde menace d’un délire terroriste.

 

– Le résultat est le même, en tout cas, mais autant vivre cette aventure à fond pour le moment. On finira bien par nous retrouver. L’AIS a dû transmettre notre nouveau plan de vol à tous les organes de sécurité. Les secours savent où on est.

 

– Je te signale qu’on a plongé dans un espace non contrôlé, hors des zones d’activité. C’est pas demain la veille qu’ils vont se pointer ici, même en surfant comme des dingues sur le jetstream !

 

– On transportait quoi pour l’émir du Boukistan, d’après-toi ? on a rien retrouvé, ou le truc a cramé.

 

– Je n’en sais rien, on ne m’a pas donné l’info avant le départ.

 

Dominique Quenique vint les prévenir de la découverte insolite faite dans la forêt, ils retournèrent avec lui au campement. Tous les trois suaient à grosses gouttes en marchant sur le sable brûlant et Jack enleva sa chemise. On avait survécu à l’accident, mais on allait peut-être crever de chaud ! Loraine Careaway fut la première sur laquelle ils tombèrent en arrivant aux cabanes. Elle discutait avec Jenifer Hardy au longs cheveux rendus collants par l’air poisseux, qui lui demandait ce qui était prévu pour le repas.

 

– Du singe.

 

– Encore ! Putain j’en ai marre. Ces bestiaux là me font des hanches. C’était chez le mannequin une sorte de règle, elle ne disait du bien que de ceux qu’elle aimait. Pourtant, la viande de singe n’était pas plus mauvaise que les bigorneaux ramassés à foison par tous les ramasseurs-cueilleurs improvisés.
 
 Une tension métaphysique barra tous les fronts et tirailla toutes les lèvres, lorsque Steven examina soigneusement le totem sous toutes les coutures. Il attarda longuement son regard sur les brosses à dents, mais la coiffure multicolore et incongrue ne semblait pas propre à lui faire pratiquer l’humour.

 

– Oui, effectivement, il y a quelque chose qui cloche avec ce bidule, il n’a pas l’air d’être très vieux.

 

– En tout cas, fit le multi-millionnaire Michel Tatol, si ces Gouroungourous ont le temps de s’amuser à faire des trucs pareils, c’est qu’une classe moyenne avide de loisirs a du émerger récemment dans la tribu. C’est moche et inutile, ceci étant dit.

 

– Ben, la pensée symbolique de l’art était aussi contemporaine de l’industrie chatelperronienne, pourtant ces gars là ne chômaient pas vraiment pour trouver à bouffer.

 

Langevin voulait lui répondre juste pour le contredire, parce qu’il n’aimait pas vraiment le riche héritier. La science aime le pognon, mais pas toujours, surtout si les enveloppes officielles des subventions vont dans les autres services, ou dans les autres poches.

 

– Contrairement à moi, le toisa Tatol, vous les savants vous n’êtes que les rouages du système, mais moi je suis ce système. Une entreprise, ça s’achète ou ça se détruit, et en fin de compte, les gens c’est pareil, qu‘ils soient chercheurs au CNRS ou pousse boulons. Ce sont les gens comme moi aux mégaprofits qui décident comment doit tourner ce monde, pas vous.  

 

– C’est ça. On fait les guerres, on les arrête et tout va bien, puisque le commerce en profite. Et bien entendu, les habitants des pays émergents que vous pillez sortiront de la misère quand ils apprendront à placer correctement leurs économies. Vous êtes pitoyable et malsain. Chômage, inégalités, climat pourri, corruptions, c’est pas votre came, hein ?

 

– Sale gauchiste. Et diplômé, en plus, un comble.

 

– Belle déclaration finale, qui pourrait bien être le faire-part de naissance de mon poing sur ta gueule. Ici tu es comme les autres et finalement tu vas payer comme tout le monde, en te salissant les mains, le renouvellement du bail sur cette île. Si tu bosses pas comme les autres, ça tournera vinaigre, te voilà prévenu. Terminé de glander sur la plage pour tracer des SOS pendant qu‘on s’échine à te nourrir. Des signaux auxquels tes petits copains de la finance n’ont pas l’air de porter grand intérêt, soit-dit en passant.

 

– Ah, mais il va bientôt me bassiner avec son manque de liberté, la censure et les suppressions de postes chez les enseignants-chercheurs ! Mon pauvre mignon, le savoir n’est rien d’autre qu’une marchandise comme une autre. Vous, le castriste à propagande, je fais ce je veux sur cette île et votre responsabilité collective, vous pouvez vous la coller bien profond.
 
 Loin de ce débat houleux, alors qu’elle triait ses affaires dans la case qu’elle partageait parfois avec Steward, Shirley maintenait ses vols, car la jeune hôtesse cleptomane venait de se rendre compte qu’elle avait subtilisé sans l’avoir voulu le pistolet de Moktar Bouif pendant le vol. Il y avait une logique dans l’enchaînement des faits, puisqu’elle lui avait aussi inconsciemment piqué les munitions

 

https://zupimages.net/up/18/03/y3m3.jpg

 


Message édité par talbazar le 17-01-2018 à 08:45:43
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