Goret a écrit :
Ce qui peut être davantage intéressant, ce serait de se demander dans quelle mesure ces différentes attitudes possibles vis-à-vis de la sexualité sont conformes d'une part à la nature/à l'animalité, d'autre part à la société.
A priori, au niveau sexuel, l'animal est régi par la pulsion reproductive. Or, si l'acte sexuel avait pour fonction de base cette reproduction, force est de constater qu'avec les progrès en matière de contraception, ce n'est plus le cas.
Cela implique-t-il pour autant que copuler pour le plaisir (comme le font la quasi-totalité des gens) est un acte s'effectuant contre la nature ? A mon avis, non, parce que l'effet de plaisir physique est déterminé par la nature de l'être humain, et n'est donc pas une invention de ce dernier. Je dirais même que, d'un certain point de vue, l'existence de ce plaisir physique servirait, originellement, à inciter cet être vivant à se reproduire (i.e. : si l'acte était extrêmement déplaisant pour les deux parties, et ce pour des raison physiques donc induites par la génétique, le taux de reproduction serait nul, d'où disparition). Autrement dit, "baiser comme une bête" serait en effet un comportement animal, car conforme à l'animalité de l'homme qui lui confère un plaisir gratuit, et ce malgré l'absence de volonté reproductive (noter, d'ailleurs, la similitude avec le bonobo).
Par contre, "ne pas copuler jusqu'au mariage" serait-il pour autant un refus de l'animalité naturelle ? A mon avis, ce n'est pas non plus le cas. L'acte de copulation surviendrait tout de même, avec des fins reproductives, donc serait in fine conforme. Voire plus conforme, car la transmission efficace du patrimoine génétique implique souvent la recherche d'un "meilleur" partenaire. (C'est toujours le cas pour les femelles, qui disposent d'une vitesse de reproduction limitée. Ce n'est pas le cas pour les mâles, qui peuvent être enclins à préférer la quantité plutôt que la qualité, mais les contraintes sociales (coût d'un enfant notamment) induisent un besoin de qualité, et empêchent une stratégie basée sur la quantité de descendants).
Le mariage, d'ailleurs, est parfaitement explicable d'un point de vue de la transmission des gènes : il évite (en sanctionnant l'infidélité) que le mâle cocu contribue (en termes de ressources) à l'éducation d'un rejeton qui est celui d'un autre (ce dernier ne contribuant en rien). Dans le cas d'une société où les revenus provenaient principalement des activités de la partie mâle du couple, c'est parfaitement compréhensible. Noter aussi que le mariage empêche le phénomène existant fréquemment dans les sociétés animales d'un (ou de quelques) mâles dominants, et de femelles reproductrices, en permettant à plus d'individus de se reproduire - c'est en quelque sorte une institution démocratique. Cepandant, je ne pense pas que le mariage soit pour autant une insitution contre nature, pour la simple raison que c'est une mesure naturelle pour permettre de continuer le développement d'un animal social, conscient, et technologique (i.e. sans institution pour assurer que le "père" soit celui contribuant au développement de ses rejetons, il serait plus efficace aux individus mâles, pour transmettre leurs gènes, de coucher à tout va pour faire des gosses partout, que de travailler pour assurer la survie de ses héritiers).
La sacralisation de la virginité féminine (par la société il y a quelque temps) n'était que le prolongement de cette insitution du mariage. Elle évitait, d'une part, que la famille élève seule les rejetons de la fille mère, sans que le père ne contribue. Surtout, elle contribuait à renforcer le mariage, en essayant d'assurer à l'époux que les risques d'infidélité seront plus faibles (ce qui est plutôt psychologique que statistique). Note que la virginité masculine, par contre, n'a jamais été sacralisée par la société, en tout cas officieusement.
Avec les progrès contraceptifs, et les textes de loi mettant les enfants hors-mariage et les enfant adultérins au niveau des enfants légitimes, ces conceptions ont volé en éclats. D'où la débauche de sexe actuellement présente dans la société, avec la bonne dose d'hypocrisie qui va avec (i.e. on s'offusque encore d'entendre des gémissements orgasmiques sur place publique, mais on vend à tour de bras avec des publicités utilisant de la chair fraîche comme principal argument). L'attitude socialement conforme consistant donc à coucher à tour de bras, pour prouver une forme de "virilité" ou de "féminité" exacerbés par les media - avec un petit vernis sentimental pour gommer le pragmatisme.
Quid donc des sentiments dans tout ça ? Dans ma grande misanthropie, j'aurais plutôt tendance à penser que ces sentiments sont une sorte de cache-sexe ( ) par rapport à la pulsion sexuelle. Autrement dit, non pas quelque chose existant hors de la nature, voire contre la nature, mais au contraire, un moyen de cacher l'impulsion véritable sous un vernis paraissant plus avancé et moins animal. Bref, une fois ce vernis romantique effacé, ne subsiste plus grand chose d'autre que l'aspect purement physique (qui, de plus, se fâne avec le temps), d'où forte probabilité de rupture.
Que serait donc une relation hors de la nature, pour ne pas dire contre la nature ? A priori, ne pourrait subsister que la relation purement intellectuelle (qui, donc, ne serait pas animale par essence), avec abstinence complète (donc, là aussi, refus complet de l'animalité). Bien évidemment, en termes reproductifs, ça n'irait pas bien loin, mais ce serait peut-être pour le meilleur : la souffrance de l'homme ne viendrait-elle pas de sa nature, et la supression de cette souffrance ne reveiendrait-elle donc pas à supprimer l'homme lui-même ?
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