|
Auteur | Sujet : La moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar. |
---|
talbazar morte la bête, mort le venin | Reprise du message précédent : |
Publicité | Posté le 16-01-2021 à 09:33:05 |
talbazar morte la bête, mort le venin | Salon littéraire 69, année érotique, tu parles. Dans l’ombre de la salle obscure qui leur épargne la chaleur estivale en train d’assommer Paris, Angèle, Brigitte et Gaston assistent à la projection du film « Slogan » de Pierre Grimblat, un homme que par ailleurs Angèle a croisé quelquefois dans les couloirs enfumés de l’agence Pubisix, puisque il fut également l‘auteur de plusieurs campagnes publicitaires. Tu es faible tu es fourbe tu es fou Tu es vil tu es veule tu es vain Après le tragique événement du kidnapping, Emile n’a finalement pas loué une villa à Saint-Tropez, mais comme il le dit, en insistant avec le sourire, ce n’est que partie remise. Tant bien que mal, il tente de réconforter Gaston de la perte de sa petite amie et Antigone n’est pas avare non plus de prévenances. Monté au grenier, leur fils adoptif va simplement prendre refuge dans les couleurs de ses tableaux, qu’il étale à grands coups d’un pinceau quelque-peu rageur. Il s’agit avant tout pour lui de saborder la blancheur virginale de la toile par une transcendance salvatrice et multicolore. Je t’aime, moi non plus. Elle la belle et lui la pauvre bête qui refuse qu’on l’achève. On est encore loin du règne des looks intimes masculins et de la guerre fratricide du slip et du caleçon, c’est donc vêtu de son seul kangourou blanc taché de peinture bleue que Gaston ouvre la porte du grenier. Angèle qui vient de frapper lui annonce qu’il a reçu du courrier. En ouvrant la lettre qu’elle lui tend, il voit qu’elle est signée par Véronique Taloche. La vision des mots draine d’abord en lui un souvenir déplaisant, il se force pourtant à lire et son ancien amour qui l’avait si durement trahi se voulait au contraire agréable. Elle rasait le passé avec grâce et en toute innocence, pour lui donner des nouvelles d’elle-même et de sa petite famille. Sa gamine Geneviève va bien, elle a fait des dents et ressemble beaucoup à son père. Jean justement salut bien, son patron Gabriel Gromanche du garage Fina a eut un accident du travail et comme il en a perdu sa main droite, il a proposé à son employé de reprendre son affaire. La banque a donné son accord et Jean sera prochainement aux commandes de la station-service, quand à elle, elle deviendra sa secrétaire. Tout va donc bien pour eux et elle espère que Gaston et Angèle se portent à merveille. Elle serait ravie de les revoir et lance dans ce but une invitation en règle. Signé Véronique et Jean, sans oublier Geneviève. Peut-être que Angèle a vibrée un peu elle aussi, au souvenir de Jean, ses pensées pour autant ne font aucun tapage apparent, elle s’est juste adossée au chambranle. – Moi j’ai rendez-vous avec Mémet Çapùt et je dois rester ici ; mais toi, du devrais y aller et faire la paix avec eux. Le passé c’est le passé et Jean, après-tout, c’était ton meilleur ami. Revoir Troulbled et Bripue, respirer un autre air que celui de Paris, sanctifier par le pardon la lune de miel du couple et embrasser chaleureusement leur fille. Donner à Véronique sans faiblir d’autres sortes de baisers, lui lancer quelques compliments dans ses oreilles chastes. Elle lui tendait la main sans rancune, il avait le loisir de rompre le barrage installé contre ses sentiments bafoués et pactiser enfin. Il pourrait combler le vide d’un amour perdu par un autre, cicatriser en pactisant avec Véronique la plaie de son désamour avec Brigitte, pour aborder à nouveau l‘île des braves et songer au futur. Angèle sourit devant lui, il dit qu’il allait répondre, que peut-être il irait chez eux. Elle comprend, sans qu’il le dise, qu’il aimerait beaucoup revoir la vieille ferme de mémé Ernestine et retrouver les chemins creux autrefois arpentés en compagnie de Papi Léon. Elle aussi en aurait le désir. C’est ainsi que, tout bien pesé, Gaston se retrouve un jour au fond d’un train en direction de Bripue ; puisque Véronique s’est dit en retour enchantée de le revoir et qu’ils ont bien entendu une chambre toute prête à lui offrir. Elle regrette que Angèle ne puisse l’accompagner. On comptait encore 3049 locomotives à vapeur en 1962, et la dernière sera retirée du trafic qu’elle assurait sur la ligne Lyon-Grenoble en 1972, mais celle-ci est tractée par un moteur diesel. Par la grande fenêtre, le long paysage monotone défile à toute allure la ligne fuyante des champs. Gaston, bercé par le bruit continu du roulement, est assis en face d’un type sale et bourru d'une froideur effarante. L’assurance et la sourde violence qui sommeille dans son regard sont très impressionnantes. L’homme a les cheveux blancs, quelques rides sur le front, mais son œil est vif et perçant ; on dirait malgré-tout une pauvre cloche mal rasée et même un peu saoule. Au majeur gauche, il porte une grosse chevalière en or au chaton d’ivoire, où figure incrustée une croix de Malte rouge. Il regarde son vis à vis fixement, ce qui ne manque pas de mettre Gaston mal à l’aise ; puis au bout d’un moment, l’autre sort un crayon de bois et un calepin qu’il pose sur ses genoux, en repoussant l’imperméable jeté sans ordre près de lui. – Jeune homme, je suis peintre, me permettez-vous de dessiner votre portrait ? s’il est à votre goût, je vous l’offrirai à l’arrivée. Il faut bien s’occuper, le voyage vers Bripue risque d’être très long. Sa voix douce et son air plus aimable viennent un peu briser la mauvaise et première impression présentée au départ. – Si vous voulez, répond Gaston soudain piqué de curiosité, comme vous le dites, nous avons de la route à faire. Je dessine aussi, vous savez. – Ah ? C’est très bien. Je m’appelle Jean-Pierre Graingris, dit-il, en présentant cordialement sa main grêlée de taches brunes. Elle assure étrangement une prise très ferme. – Gaston Boudiou. Loin derrière eux, des enfants piaillent et se chamaillent, grondés par leur mère excédée. Le reste du wagon enfumé par différents tabacs est plutôt silencieux. Graingris fixe toujours Gaston, mais cette fois le regard concentré qu’il porte est différent, son poignet s’agite en arabesques rapides sur le papier, alors qu’il fige les premières grandes lignes du portrait. Parfois, il s’arrête et prend un air de philosophe. Il gratte son début de barbe en répondant, un peu endormi, aux questions que lui pose son modèle. Un artiste acariâtre et misanthrope, au sourire presque absent et à la parole rare, mais il répond toutefois à chaque fois avec civilité. Il a débuté en faisant des décors de théâtre, Gaston finit par comprendre qu’apprivoiser la beauté a été pour ce type une sorte de revanche. Une vie entremêlée des vices de boire et de fumer. Un maigre cou qui a peut-être imaginé plusieurs fois s’entourer d’une corde, au fond d‘un atelier. Gaston regarde et jette un œil, la performance attendue est ahurissante, son visage est en train d’être brossé avec une maestria inouïe. Puis il n’a pas le temps de comprendre ce qui arrive. Deux minutes plus tard, après l’extinction des crissements odieux, le wagon éventré ne forme plus qu’un amas de câbles et de débris. Quittant les rails, la longue course du train vient de stopper brutalement sur le bord d‘un champ. Au cours de l’impact, Gaston vole avec violence sur le sol de l’allée, Graingris aussi, mais sa tête blanchie heurte au passage le montant d’un siège, ils s’affalent côte à côte dans l‘épave éclatée. En réalité, ce n’est pas le plancher qui les reçoit à l’issue d’un choc implacable, mais l’une des parois de la voiture renversée sur un flanc. Un des gamins hurle près de sa mère inanimée, dont il manque une jambe, son petit frère inerte projeté à cheval sur une banquette pliée parait sans vie. Partout, des morceaux de ferraille perforant les sièges broyés témoignent de l’horrible intensité du choc, les corps des passagers blessés ou morts s‘étendent au milieu du désastre. Des cris effrayants sortent enfin de ce sinistre fumant, des hurlements abandonnés au désespoir venus de toutes parts, que les oreilles de Gaston ne veulent pas encore entendre. Son cerveau peine à se rallumer, il n‘a que des flashs de lucidité. Le jeune Boudiou souffre vivement de l’épaule et du bras, mais d’aucune autre blessure apparente et il est vivant. Étrangement, Graingris qui gémit faiblement auprès de lui tient toujours le formidable portrait dans sa main crispée, mais de vilaines coulures de sang maquillent à présent, sur le blanc de la page, les belles traces de crayon. La tête de l’homme saigne abondamment. Horrifié, Gaston constate qu’une tige d’acier s’est plantée dans le ventre de l’artiste, sans doute moribond.
Bon dimanche à tous. Message édité par talbazar le 16-01-2021 à 19:16:16 |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
Homerde Gonadoclaste apocryphe | C'est toujours un plaisir que de lire vos élucubrations venues d'une autre planète --------------- J'ai les bonbons qui collent au papier :/ |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
Publicité | Posté le 23-01-2021 à 18:07:07 |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
talbazar morte la bête, mort le venin |
Publicité | Posté le |