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Auteur Sujet :

La moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar.

n°57217205
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 01-08-2019 à 12:57:11  profilanswer
 

Reprise du message précédent :
https://zupimages.net/up/19/31/hm9j.jpg

 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Hector Nade.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Conrad de Brest.

https://zupimages.net/up/19/31/l3kp.jpghttps://zupimages.net/up/19/31/ekki.gif


Message édité par talbazar le 01-08-2019 à 13:48:54
mood
Publicité
Posté le 01-08-2019 à 12:57:11  profilanswer
 

n°57227799
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 02-08-2019 à 15:41:24  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/19/31/31x0.jpghttps://zupimages.net/up/19/31/axmx.jpghttps://zupimages.net/up/19/31/itzc.jpg

 

Salon des inventions

 

Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Nathan Dehors.

 

https://zupimages.net/up/19/31/0zjt.jpghttps://zupimages.net/up/19/31/f66r.gif

 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Gilles Désertes.

 

https://zupimages.net/up/19/31/l2kj.jpghttps://zupimages.net/up/19/31/2vo4.gif

 


Message édité par talbazar le 02-08-2019 à 15:50:45
n°57231975
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 03-08-2019 à 10:02:35  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Hugo Atschool.

 

https://zupimages.net/up/19/31/th3k.jpghttps://zupimages.net/up/19/31/1m01.gif

 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui :Nicodore de Piss.

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Message édité par talbazar le 03-08-2019 à 22:38:05
n°57322729
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 15-08-2019 à 12:27:15  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/19/33/6pr7.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/5k3h.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/w3g6.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/h8w4.jpg

 


Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Les frères Sèque.

 

https://zupimages.net/up/19/33/vtsb.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/ec7k.gif

 


Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Alfred Port.

https://zupimages.net/up/19/39/8021.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/sc7l.gif

 


Message édité par talbazar le 26-09-2019 à 08:00:42
n°57323726
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 15-08-2019 à 15:53:02  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 52.

 

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L’ancien professeur de mathématiques est effectivement devenu un vrai freak sans fric, un mec à la cool qui s’est allumé une lampe colorée dans la tête, le lampion d’un nouvel apôtre du psychédélisme refusant désormais de s’éteindre. Depuis le coup de gong du festival de Monterey en 1967, Jo Wronski est un type en liberté définitive. Drogue, musique et cheveux de sioux montés en parapluie contre la grêle des flics qui veulent museler la poésie. Impossible de revenir en arrière pour retomber dans le carcan rigide et étouffant de l’Éducation nationale, qu‘il vient de quitter définitivement au son des clairons issu de la fanfare des grèves. Il incarne dorénavant un digne fils de notre mère la terre, au look exotique d‘un habitant de l‘Inde, qui revendique avec fierté de camper à présent sur les pelouses interdites. Puisque, avec quelques copains habitués du Zanzibar, dont certains furent même ses propres élèves, il a décidé d’aller dans un coin peinard de la belle et paisible France profonde, pour y planter fermement le drapeau des idées de l’underground. Même si certains des volontaires doivent être pour très bientôt incorporables dans l’armée du diable fasciste, capitaliste et tricolore. En France on n’a pas de Vietnam, mais on a eu l’Algérie. C’est décidé, Jo fera de la poterie dans un coin de la grange transformé en atelier, pendant que les autres élèveront des chèvres dociles, dont sortiront les fromages du renouveau et qu‘on vendra ensuite sur les marchés locaux. Quand bien même ces braves bestioles restent pour le moment un mystère bienveillant de la nature et que la fabrication du fromage provenant de leur lait soit une énigme artisanale merveilleuse. Poterie, tissage et fromage, le triangle économique millénaire de toute civilisation pastorale, qui devrait servir de socle radieux aux projections paisibles de la nouvelle famille humaine. Une future communauté ardéchoise qui fonctionnera sans chef et sans lois liberticides. Pour en finir une fois pour toutes, au son du rock and roll et des bêlements de l‘étable, avec l’avidité destructrice des prédateurs ignobles qui veulent vous sucer le sang et la vie. Joseph Wronski a fumé de l’herbe et rêve les yeux ouverts, c’est sûr. Mais, alors qu’il affirme voir en couleurs ce que les autres matent en noir et blanc, Gaston et Angèle ne l’écoutent plus développer avec enthousiasme le futur mirifique qui l’attend. Avec la soudaine disparition d’Antigone, les jeunes gens sont ancrés dans un présent beaucoup plus menaçant. Ils n’ont pas comme lui attrapé le virus de la mutinerie joyeuse et campagnarde.

 

– Mais j’y pense, mon Gaston, pourquoi tu ne viendrais pas avec moi pour rejoindre la communauté ? dit-il, en pointant vers Gaston ses ongles aux coins noirs de shit.

 

– Remballe ton poème de l’exil, espèce d’apatride ! Je te rappelle que je suis mineur. Désolé de t’obliger à revenir vers la civilisation, Jo, mais il se passe chez nous des choses extrêmement graves, Antigone a disparue. Des types l’ont enlevée !

 

– Vous avez prévenu les flics ?

 

– Non, pas encore.

 

Jo Wronski comprend enfin que le dialogue est vraiment douloureux, la fugitive a complètement brûlé le sourire de ses amis, puisqu’on ne marche pas sans fin dans le royaume des morts. Lui préférerait chantonner pour sanctifier joyeusement la marche funèbre des heureux survivants : ceux de sa communauté ne feront jamais de bons martyrs. Il sent bien couler en lui le sang béni des rescapés élus, mais il enregistre aussi l’entêtement du monde à se muer en marqueur d’obstacle devant sa belle route fleurie. Le bonheur absolu, loin de la télé et des journaux, promis deux minutes avant devient tout à coup une valeur hautement suspensive. Lui, véritable négative du dandy, il jette un œil sur les grilles qui entourent le jardin comme une charmante prison privée, l’enfermement si rassurant de la société bourgeoise. Tout autour, la cité verticale observe sans répit, du haut de ses miradors de béton. En Ardèche, là où à la fois tout commence et tout finit, il n’y aura pas de barbelés, sauf pour les chèvres aux mamelles veloutées.

 

– Rentrons, fait Jo comme s’il était chez lui, on va discuter de ça devant un bon Armagnac et j’ai besoin d’un joint, aussi. Il regarde Angèle en la suivant et bon dieu, s’il pouvait faire l’amour à cette petite déesse de la sensualité, il le ferait. Au fait, tu en es où avec le concours Miss Blonde ? Elle se déplace avec grâce et sent très bon, aussi.

 

– C’est pour bientôt, répond Angèle sans se retourner. Faut qu’on retrouve Antigone avant. Il aurait fallut être une aveugle pour ne pas voir la bosse de son froc. Les hommes qui ne sont pas acteurs, elle en a ras-le-bol ; sans compter que celui-là, il n’est pas du tout lavé et pue la crotte comme ses chèvres.

 

L’Armagnac devient dangereux au cinquième verre, ils ne comptent pas aller jusque-là. La dangerosité des joints étant sans limite, Jo compte se faire sa propre comptabilité. Sur la table encombrée, il a commencé à s’en rouler un et Gaston a posé la carte postale de Saint Frusquin.

 

– C’est tout ce qu’on a.

 

– Et si c’était pas lui ?

 

– J’ai assisté à l’enlèvement, c’est bien lui. C’est là que Raymond Toupidor était en ballade pour la dernière fois. On trouverait peut-être des indices en allant là-bas, ce n‘est pas si loin.

 

Il y eut un type au téléphone et Angèle décrocha, elle espérait un coup de fil d’Emile, elle s’entendit réclamer sans détour 500 millions de francs contre la vie d’Antigone. L’ordure maquillait sa voix, sans doute à l’aide d’une écharpe posée sur sa bouche.

 

– Le libre-arbitre est une illusion, fit Gaston lorsqu‘il fut mis au courant, il faut prévenir la police, maintenant.

 

Comme il roule son troisième joint au quatrième Armagnac, Joseph Wronski observe que le monde qui l’entoure est animé d’une volonté et d’une existence qui ne provient en réalité que de son esprit. Cette grande baraque aurait de la gueule si un clan de pacifistes l’occupait, des gens difficiles à acheter. Libre et sans projet, on a pas de regret. Ainsi donc, Antigone Inseouine de la Nouille a bien disparue, cette fois on ne peut plus se contenter d’un simple mystère. Il l’imagine éveillée dans une cave du château en train de pleurer à la lueur d’une bougie. La police protège la censure capitaliste, il faut la prévenir le plus tard possible, pour empêcher le barrage fatal de leurs cerveaux. La réponse de Jo se pare donc de logique, avec le petit enthousiasme intime de s’évader bientôt sur la route, quitte à voir deux lignes obsédantes et jaunes sur la chaussée zigzagante :

 

– On va prendre ma caisse et faire d’abord un tour à Saint Frusquin.

 

L’engin garé dans la rue est une 2cv surpeinte, des roues aux phares, en œuvre d’art. De l’immense œil bleu d’un Bouddha fatigué tracé sur le capot, aux marguerites multicolores peintes sur les portes, La voiture de Jo exprime une sorte de poème urbain et son lot outrageant de propagandes visuelles invitant à célébrer le Flower-Power. Alors que dans sa peluche afghane, il complète tout à fait le tableau de sa bagnole en s’installant au volant, il invite ses jeunes passagers à contempler la générosité témoigné par l’environnement qui, s’affranchissant d’une absurdité hostile, leur offre sans caprice une route en face d’eux. Le chaos est une chose magnifique, certes, mais je dois dire qu’un certain ordre peut rendre parfois heureux, à condition de n‘être ni arrêté, ni verbalisé. A la grande surprise de Gaston et d’Angèle qui baignent dans une haleine d‘Armagnac, il ajoute aussi, en mettant le contact :

 

– Si on le rencontre à Saint Frusquin, Toupidor, on lui pètera les dents à la boule de pétanque, ça fera descendre les statistiques de la délinquance. Ce que je dis vous étonne ? mais sachez que même un gamin de primitifs sait très tôt lancer le javelot. Et moi, il y a bien longtemps que je ne suis plus une charge pour ma famille. Et puis là-dessus, comme il avait un autoradio, il envoya Joan Baez en prenant la route de Saint Frusquin, à 180 kilomètres de Paris.

 

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Message édité par talbazar le 15-08-2019 à 15:59:07
n°57332081
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 17-08-2019 à 11:53:16  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/19/33/bat2.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/oere.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/r21h.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/47j0.jpghttps://zupimages.net/up/19/33/tk4c.jpg

 


Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Louis Sioul.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Laurent Gédepoisl.

 

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Comme nous l'a enseigné L. Gédepois, n'oublions jamais que n'est tupide que la tupidité.

  


Message édité par talbazar le 17-08-2019 à 17:54:04
n°57342202
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 19-08-2019 à 10:41:05  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Chris Tal.

 
https://zupimages.net/up/19/34/8tu8.jpghttps://zupimages.net/up/19/34/smsy.gif
 
Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Serge Anchef.

 
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n°57353723
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 20-08-2019 à 14:53:36  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/19/34/std3.jpg

J'apprends à dessiner avec le pro-fesseur Talbazar.
 
Aujourd'hui : un ours.

 
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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Monsieur X.

 
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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Jean-Marie Tafille.

 
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Message édité par talbazar le 20-08-2019 à 15:23:57
n°57392650
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 25-08-2019 à 12:10:36  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : L'épilée du Nil. Extrait numéro 98.

 

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Ankhelkarton-Tulmé, tout le monde descend ! Dégoûtée des hommes, puisqu’elle n’avait plus d’œil à perdre dans ceux d’un être aimé, Néefièretarée se cabrait comme une chèvre sur les planches, elle mangeait une banane et cramponna ferme sa petite chatte sacrée, lorsqu’elle piétina la passerelle de son bateau qui devait la mener sur le quai. Déjà rendus à terre, trois gus en pagne de sa suite tapaient le gong à la ronde, pour obliger le quidam en ballade sur le port à baisser le nez devant sa noble reine, aimée des déesses et des dieux, scintillante et noblissime archétype véritable d’un rêve de bonheur. En dehors de la ville, un vent chaud soufflait sans répit sur les champs gorgés par les eaux bienfaitrices du Nil. Ayant terminé ses manœuvres, l’amiral Sésoscristop resta en arrière un instant, pour taper la causette avec le chef des rameurs. Juste derrière la pharaonne, le grand guépard royal Sâmgaratte lançait un regard explicite, pour prévenir qu’en cherchant la papouille avec lui, on risquait d’y perdre au moins un doigt. Ankhelkarton-Tulmé était la dernière étape de la croisière avant l’arrivée à Larnac et Néefièretarée commençait à être bien fatiguée de ce long voyage. Une fois débarquée sur les dalles de quai brûlantes, la fille des dieux au génie immortel récupéra un moment son équilibre terrestre et regarda pensivement, en prenant un air dégoûté, la fange des trottoirs, qu’animaient quelques chants de putes sortis d’un cabaret pouilleux. Une multitude de filets de pêche rapiécés courraient très haut sur les pauvres façades en briques, pour y sécher au soleil. Tout près d’elle, nullement gênés par l’atroce chaleur, deux macaques effrontés touillaient un paquet de merde, en la toisant avec dédain. Le guépard tira comme un dingue sur sa chaîne pour les boulotter, les deux singes prudents finirent par aller se réfugier sur un bateau amarré tout près. La cité portuaire n’avait pas de quoi garantir l’extase de la reine de l’Egypte, venue pour son ennui se perdre temporairement par ici. Ce bled n’avait pas l’air de couver la moindre procession religieuse et les rues semblaient calmes, encore heureux. Au cri de Sésoscristop, une deuxième passerelle fut abattue bruyamment au flanc du Pamalrâssé, ce géant des eaux aux rames de gouverne puissantes maniées par un seul homme et aux deux étages sur le pont munis de multiples colonnes, pour permettre aux portefaix de descendre le mobilier royal, si nécessaire au confort de la reine. Néefièretarée ajusta sur ses épaules sa vieille peau de panthère, qu’elle tenait de sa grand-mère Tuméménèrabou, puis elle tira sur les pans de sa robe en coton blanc bordée d’un charmant liseré rouge, un article phare de la saison coupé spécialement pour elle par l’ONS, un vêtement de conception et d‘exécution impeccables. Ici, ses valeurs esthétiques de haut rang ne risquaient pas de vaciller, mais elle ne risquait pas non plus de les imposer aux bouseux, puisque la plupart des hommes et des femmes de ce lieu se baladaient en slip de lin.

 

 La fille d’Horus décala un peu sa vue pour admirer le palais qui l’attendait ; à l’image du bourg, il n’était pas très grand.  Elle avait pourtant plutôt hâte de s’y poser et livra à tous, dans ce but, ses admirables instructions et autres menaces. Il fallait d’abord commencer par virer toute cette vermine encombrante de la haute bourgeoisie qui vivait habituellement dans ce bâtiment luxueux, gratuitement et toute l’année, pour ensuite reblanchir totalement les murs. On garderait tout de même quelques exemplaires de ces feignasses privilégiés au sein de la cour, disons les plus riches, mais uniquement dans le but de faire à la fois local et joli, bien qu’ils soient tous sévèrement alourdis par l‘inaction. Néefièretarée marchait lentement, pour mieux savourer le plaisir de contempler les nuques baissées servilement sur son passage. Seuls les habitants aux tronches de parchemins secs qui naviguaient sur le Nil gardaient leur flegme, menant leur barque de roseaux en toute impunité et avec une feinte indifférence, tout en préférant tourner la tête pour guetter les gros crocodiles verts nichés dans les roseaux. La taille imposante du Pamalrâssé et des bateaux suiveurs les avaient tout bonnement virés sans façon des pontons, rien d’étonnant à ce qu’ils traitent entre eux, à voix basse, leur reine de grande perche huilée, de greluche perruquée, de suceuse d’encens et même d’empaffée thébaine. De longs drapeaux blancs et bleus flottaient malgré tout sur les toits du palais, prouvant que la pharaonne avait effectivement posé sa grosse valise chez eux, avec le but de séjourner dans la ville un moment. Pleins de sollicitude baveuse, le maire de l’agglomération et ses adjoints l’invitèrent d’ailleurs à les suivre jusqu’à destination, sous la forêt des éventails en plumes d‘autruche aux couleurs pâles et douces. La porte du palais donnait tout bonnement sur la rue, les shardanes la dégagèrent en cognant au passage des nanas en train de coudre ou broder sur le sol et quelques porteurs d‘eau, reconnaissables à leurs pagnes jaunes. Ici comme ailleurs, couvaient des relents de méchante agitation sociale, en raison de la crise économique qui perdurait. En attendant que les murs furent totalement blancs, Néefièretarée bu un savoureux café-crème dans le salon posé sur une large terrasse, un bel ouvrage dont les murs épais et droits baignaient dans l‘eau, elle y joua une interminable partie de dominos avec son chambellan suprême Tâtsamoul. C’était pour l’instant tout ce qu’elle pouvait espérer de mieux en guise de paradis familial. Il furent dérangés un court moment par des esclaves habillés de chiffons qui transportaient encore des chaises magnifiques provenant du bateau. Le soir, alors que les hauts murs rosissaient, tout fut enfin prêt pour donner à la reine le sentiment qu’elle était chez elle. Elle l’avait échappé belle, une procession d’Amon était prévue pour le lendemain, au quinzième sablier. Entre les danseuses et les joueurs de tambourah, sans parler des porteurs de la lourde barque et de la masse des curieux innombrables, il aurait été bien difficile à la suite royale de tracer son chemin dans les ruelles. La reine présiderait bien entendu en riche litière l’importante cérémonie, elle espérait fort que cette activité se montrerait suffisante pour coller une bonne brèche dans sa solitude. Lascive et étendue entre les cloisons de bois tressé, elle regarda l’envol des oiseaux blancs dans le ciel rougissant, puis elle caressa la tête de son guépard. Sâmgaratte se léchait soigneusement les babines, car il venait de savourer, en frisant l‘indigestion, un crétin qui avait, en dépit des ordres, repeint tout son pan de mur en jaune. Néefièretarée se prépara à ruminer un bon moment seule dans son lit, elle détestait l‘obscurité, craignant l‘errance des damnés qui n‘ont pas eu de sépulture.

 

En bon marin, l’amiral Sésoscristop aurait sans doute préféré rester à bord de son navire géant, mais il avait un rang à tenir et se devait de loger dans le palais avec la cour. En dehors des chefs rameurs, il laissait donc dans la nuit des navires bourrés d’hommes d’équipage aux prunelles fauves, occupés à bénir dans la bière une hiérarchie insuffisante à maintenir paix et ordre. Habituellement en situation de soumission et débordés de travail, tout en méprisant souvent leurs maîtres oisifs, les hommes étaient en revanche particulièrement soudés les uns avec les autres. Il n’y avait pas de raison que les choses soient différentes, au cours de la beuverie qui s’annonçait. En moins d’un sablier, derrière les voiles noirs de la nuit, la nouba se déchaîna. Les marins avaient choppé des filles alertes sur la promenade, pour les inviter à grimper à bord, des nanas du peuple consentantes, plutôt excitées à l’idée de s’offrir du personnel royal. Dans le vertige d’un érotisme aviné, on tapa des danses endiablées au son de la flûte séby, l’un des plus anciens instrument de l‘Egypte, pour mieux faire exploser le carcan social d’une vie d’esclave sclérosée. Dans toutes les cabines des bateaux, on dénicha dans la pénombre des trucs sous les robes plissées, en projetant ses sandales loin du lit. Temporairement, alors qu’elle laissait tomber ses breloques de cuivre et de verre sur le tapis, ses cheveux détressés, l’épouse officielle de monsieur Machin ne l’était plus. On s’accrochait fiévreusement les lèvres pour satisfaire sous les ponts un plaisir brutal. Les fêtards déshabillaient le désir avec avidité, pendant qu’au sein du palais endormi, toute la cour roupillait au contraire à poing fermé dans les beaux jardins aristocratiques. Les domestiques qui ne dormaient pas entendaient pourtant en provenance du port les bruits joyeux d’un barouf d’enfer. N’y tenant plus, beaucoup d’entre eux délaissèrent leur veille pour s’échapper et rejoindre la fête, en compagnie de plusieurs gardes hilares qui désertèrent scandaleusement leur poste. A bord du Pamalrâssé et des autres navires du convoi, on trinquait la bière à grands flots en oubliant la vie réelle, personne n’était là pour se balader tranquillement sous les palmiers ; parce que pour une fois, chacun se sentait beaucoup plus qu’une simple marchandise déshumanisée, dominée sans pitié par la ronde intransigeante des clepsydres. La reine n’était pas là, les rameurs dansaient donc au son des sistres avec une bonne partie des serviteurs et des bonniches du peuple de la cité. Fiers d’adopter pour un moment une attitude antibourgeoise, les gars sans vêtement ou habillés d’une simple ceinture pissaient leur trop-plein dans le Nil, les corps titubants figés en rang alignés par dessus les plat-bords. Un ou deux tomba même à l’eau, sous les quolibets de ceux qui les visèrent aussitôt et des filles aux yeux doux qui rigolaient en retrait, tout en admirant le tableau. On se serait crû en Gaule ou dans un festival interceltique de l‘Armorique.

 

Il y eut également des bagarres d‘ivrognes, des tensions jalouses, des antagonismes, certains orchestres se firent alors plus guerriers, mais dans l’ensemble, la joyeuse compagnie débraillée cueillit d’avantage au cours de la nuit d’heureuses fleurs d’amourettes, protégée par la pénombre qui régnait dans les entreponts. Tous tombèrent peu à peu dans des songes dorés, en se tournant cette fois-ci sur la couche pour de bon, en riant. Un peu plus tard à l’aube et sur le Pamalrâssé, les noceurs furent tout à coup réveillés par une épaisse fumée, puisque le bateau amiral était en train de brûler. Sous la terrible menace des flammes dévastatrices, la fuite s’organisa dans la panique. Pour échapper à l’atroce piège de feu, beaucoup plongèrent dans les roseaux émergeant de l‘abondante végétation aquatique qui léchait la coque embrasée. Des malchanceux tombèrent hélas dans les gueules grandes ouverte de Sobek, des crocodiles ravis de s’offrir pour une fois de l‘humain cuit à point. Sur le grand pont, gueulant comme des oies au milieu des amphores vides et des sandales en cuir éparpillées, on ne laissa précisément dans le bateau que les oiseaux prisonniers dans leur cage. Tous, pourtant, ne furent pas sauvés, principalement ceux qui avaient choisis de cuver leur vin dans les cales les plus profondes, ils furent asphixiés dans leur sommeil. Les officiers de police d’Ankhelkarton-Tulmé, fringués comme des éthiopiens et bâton à frapper ou de jet à la main, rappliquèrent sur le quai pour tenter de maintenir l’ordre et contenir la fuite des responsables, mais le mal était fait, le splendide et précieux navire de la reine était en train de couler.  

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 25-08-2019 à 22:55:36
n°57429545
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 29-08-2019 à 12:36:13  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Jérôme Miladose.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Esmée Tapoil.

 

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Message édité par talbazar le 30-08-2019 à 10:46:22
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Posté le 29-08-2019 à 12:36:13  profilanswer
 

n°57441847
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 30-08-2019 à 15:03:02  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Arthur Binagaz.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Valentin Téresse.

 

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Message édité par talbazar le 30-08-2019 à 15:12:58
n°57454008
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 01-09-2019 à 15:00:26  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion - Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 51.

 

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L’Ovoïde Vazy Métoian LXIX, empaleur de Kiess et roi de Mouyse, avait invité sa nouvelle dulcette Blancheflore Vaginale à collationner sur l’herbe tendre et la nappe à carreaux, en sa compagnie. La nouvelle épouse du monarque était une charmante gosse de seize ans, aux yeux d’enfant immenses et pour tout dire, vraiment un beau gabarit de bachelette grainée de bonne noblesse. Ils ripaillaient tous deux en piochant dans les paniers des oiseaux frits au pied d’un grand tilleul, où des bourreaux aux mines dures pendaient les suppliciés de l’après-midi. La petite en avait l’estomac tout retourné et refusait de manger plus avant ses bonnes cailles en sauce, arguant que la vision des pauvres arboricoles en infortune lui mettait pour tout dire le cœur au bord des lèvres. Vazy admirait plutôt la science prodiguée par l’un des bourreaux, en le regardant avec plaisir faire basculer avec son pied les nombreux tabourets. L’homme cagoulé profitait au passage de cette action fatale pour enseigner doctement à son jeune apprenti les rudiments de leur métier. Émue par le sort cruel des gueux sacrifiés, aussi innocents que maltraités, la pâle Blancheflore tremblait de tout son corps et ne semblait pas prendre des vacances. Depuis sa rencontre avec le tyran qui partageait sa couche, elle était loin de vivre des heures féeriques. Elle n’avait pas d’amie, son mari ne lui donnait que de vieilles lunes en guise de dames de compagnie, des mégères de méchants ragots, plutôt chargées de la surveiller étroitement que de lui servir de bonnes confidentes. Sa nouvelle histoire d’amour avec l’Empereur de Mouyse n’en finissait plus d’être sombre et violente. Elle-même soignait ses cheveux et sa tenue pour lui plaire et être la plus mignonne reine qui soit, mais lui avait grosse bite, le coup de fouet féroce, les mains grasses et le cœur venimeux. Son amour orageux rugissait constamment à longueur de journée, puisqu’il savait que les armées du Fion marchaient vers lui à travers les immenses vallées du Minouland, afin de mieux lui prendre sa couronne par le fer de l‘épée. L’une de ces fortes troupes envoyées par la reine du Fion courait d’ailleurs la plaine et le dangereux Marais-Jean, aux portes duquel l’armée de Gaultier Quilamolle, comte de Septizémie, margrave de la Sianusite et sénéchal de Fion avait subi heureusement une grave défaite, on disait que les vaincus couraient maintenant très haut vers le nord, en direction de Kiess. Il n’était pas douteux que cette ville de taille moyenne soit bientôt assiégée, par simple vengeance des troupes humiliées. Le roi de Mouyse venait de l’apprendre grâce à la courte missive d‘une grouse messagère, envoyée spécialement depuis le champ de bataille par messire Vallombreuse Fouettequeue. Le roi attendait justement la venue de ses brillants barons, pour qu’ils confirment par leurs propres mots l’heureuse victoire de Mouyse sur le trône de Fion. De son côté, n’ayant plus de parents, la pauvrette Blancheflore était à la merci de son terrible et prestigieux amant, avec qui il fallait bien se forcer à construire une famille ; en dépit des déballages journaliers de vilaine et triste cruauté, qu’elle devait subir sans broncher. Elle se trouvait bien éloignée d’une passion extrême, mais il fallait bien faire avec ce que Kramouille a décidé pour votre destinée, même si elle payait cher d’elle-même pour que Vazy Métoian ait son extrémité coquine toujours bien au chaud. Rempli d’une soudaine exaltation romantique, ce dernier se tourna un moment vers elle et lui parla avec le ton d’un aimable gentilhomme, tout en lui pressant la main en exprimant une certaine tendresse :

 

– Ma mie, savez-vous que le tilleul est un arbre recommandé pour le traitement des affections nerveuses ? Il est vrai que ces encordés qui s’agitent sous les branches m’ont tout l’air d’avoir gagné ici un repos aussi éternel que bienfaisant.

 

Sans transition, Vazy ria ensuite de voir l’un des pendus crier en produisant par sa gorge étranglée un crissement d’essieu, puis il en eut l’appétit aiguisé ; il s’essuya donc les doigts sur le cuir de ses braies et se jeta aussitôt comme un ogre affamé sur les harengs. L’autre agité vaincu qui tournait dans le vent fixait à présent le ciel gris, avec ses blanches prunelles immobiles où la vie ne miroitait plus. On lui voyait le col serré par un gros lien de chanvre. Blancheflore en resta blême et silencieuse, serrant juste plus fort le feutre de sa coiffe, magnifiée qui plus est par un jeu de tresses brunes très compliqué. Sur la cime de l’arbre majestueux que le soleil dorait, une nuée de corbeaux noirs et de pies aux becs durs attendait de pouvoir à son tour festoyer toutes ces bonnes viandes, emballées comme des friandises dans leurs longues robes de bure. Tout à coup, Métoian tendit le doigt devant lui pour se mettre à compter les pendus, il y en avait treize, pas un de moins, pas un de plus. Perplexe, il fit signe au bourreau de s’approcher, alors que la tâche de celui-ci semblait être achevée. Son apprenti avait même déjà retiré l’habit de sa sinistre profession, dont l‘usage ordonnait qu‘il fut taillé dans un tissu imitant la couleur du sang.

 

– Dis-moi mon brave, combien comptes-tu de nos pendus ?

 

– Treize au total, votre majesté, répondit le taciturne, c’est tout pour la journée. Je fais avec ce que sainte Kramouille m’a donné et je n’ai pas toujours ces marauds en vivier.

 

– Si fait, mon brave, ils sont treize.

 

Le souverain avait planté ses yeux froids, où régnaient d’inquiétantes et  scintillantes lueurs d’épée, en plein dans ceux du bourrel qui grattait sa cagoule rouge comme un idiot, parce qu’il se sentait entrer subitement en agonie ; il gigotait des genoux de façon fort pathétique, en attendant de voir venir. Les chiffres, parfois, c’est de l’émotion pure. Il n’était jamais bon pour votre santé que l’Empereur vienne à se fâcher contre vous. Lui déplaire ou avoir tort, c’était pareil, puisque le contrarier pouvait vous conduire tout droit au catafalque planté dans l‘herbe drue. Enfin, pour l’instant, le monarque semblait juste perplexe. Vazy fit régner un moment le silence, torturant de ce fait son vis à vis sans secours et sans grâce, avant de reprendre le dialogue :

 

– Ignores-tu que depuis la naissance de Kramouille, le chiffre treize est rempli de présages inquiétants ? Qu’il pourrait me promettre avec certitude que je vais mourir dans l’année ? Voudrais-tu que le malheur s’abatte sur mon royaume à cause de ta négligence ? On ne peut plus en avoir un de moins, mais il va falloir que tu m’en trouves un de plus ! J’en veux quatorze ou c’est toi que je choisis, pour affermir le compte et me prévenir de la malédiction.

 

– On n’a qu’à prendre mon apprenti, il vaut rien.

 

Et c’est ainsi que, pour éviter la guigne posée en certitude et satisfaire tout le monde, le jeune Gaspard Looser plongea son nez dans le réel pour aller rejoindre les autres pendus et faire le quatorzième à leur côté. Il bouclait dignement son apprentissage, par la pratique d’un accrochage parfait de son tendre col au filin meurtrier du gibet.

 

Pendant ce temps-là, environnées d’une nuée de chaloupes bondées, trois caravelles d’expédition remontaient lentement la Louise avec de blanches fleurs à bord, sous les vivats de la foule en liesse massée sur les quais du port, venue en masse les applaudir au bruit des cymbales et des tambours ; car les preux barons en délégation transportés sur la grande rivière qui irriguait la ville avaient temporairement vaincu l’armée du Fion. En effet, répondant par leurs mains gantées aux hurras d’enthousiasme lâchés par les gorges réjouies, se tenaient sur les ponts de ces nefs les nobles seigneurs Geoffroi de Moumouth et Bertrand Dudéclin, Gilles, le bâton de la Raie, mais aussi le sénéchal Vallombreuse Fouettequeue et le marquis Savorgnan de Bésil. De sages, braves et courageux chevaliers, tous bien entendu très fiers d’avoir aussi vaillamment bataillé en périlleux poste avancé, pour l‘honneur de la noble couronne de Mouyse. Ils furent sans attendre reçus dans la salle d’honneur du château, où Vazy Métoian était déjà monté sur son trône doré pour les recevoir. Avant de festoyer, il prit le temps d’écouter patiemment le seigneur Bertrand Dudéclin, dont le fief situé tout près de Kiess semblait par ailleurs à présent menacé, raconter sa bataille et le rôle mémorable qu’il avait joué :

 

– Mes cavaliers étaient impatients de se battre et brandissaient leurs boucliers, car la devise leur chatouillait la gorge. Ils se lancèrent d’un coup, en piétinant sous leurs sabots les fantassins, pour fondre en bloc sur les archers de Jean Bon de Always, chevauchant sans faillir sous une énorme pluie de flèches. Ainsi commença ma bataille, car je fus à leur tête. Croyez-bien que mes frappes furent désastreuses, puisque je suis encore vivant. Les lanciers d’Amanda ne brisèrent que le harnais de mon pauvre cheval, alors que moi, je leur fracassais le crâne en tapant sur eux comme un forgeron ! Vous auriez dû être avec moi, pour les entendre mugir et demander retraite !

 

Le dos bien droit dans sa robe de violet clair, son cou épais portant le médaillon à chaîne aux armes de son fief, il fut salué par tous en contant ses exploits fameux et la féroce puissance de son engagement. Tous les nains relevèrent de loin leur chapeau en hommage, on porta haut les coupes en l‘honneur de sa renommée ; lui disait sans trop rire que Kramouille elle-même avait tenu le manche de sa hache, afin de mieux cogner sur les armures ennemies. Il racontait et pour mieux impressionner l’auditeur, il avait sorti sa grande épée, dont il avait posé la pointe sur la dalle, tenant l’arme bien droite devant lui ; tout en riant, il croisait fièrement les bras en prenant appui sur la garde solide, parce que la poignée lui arrivait facilement au niveau de son cœur. On lui serra chaudement les épaules en frère de bataille, en piétinant les drapeaux de la victoire qu‘ils avaient étalés sur le sol ; Geoffroi rajouta même qu’en plus d’être vaillant et plein d‘ardeur, l’ami Bertrand était un chevalier fin et rusé. Car tous ici ne reculaient jamais devant la guerre, quand il fallait la faire. Lui-même de race vive et têtue, Savorgnan exhiba à son tour son heaume, pour qu’il fut admiré par l’assemblée, car une flèche entière s’y trouvait toujours profondément plantée. Vazy toisait la foule de ses courtisans entourant les barons, il ordonna qu’on fasse venir des coffres remplies d’argent et de pierres précieuses, pour qu’on les donne en récompense à ces preux vassaux. A ses côtés, Blancheflore Vaginale avoua tout à coup se sentir mal, elle avait subitement sur le front une inquiétante rosée qui lui perlait jusqu’au fond de ses yeux rougis. L’une de ses vieilles chaperonnes diagnostiqua sur le champ une hernie du vagin, assurant sérieusement à sa voisine que les viscères poussaient sans doute dessus. Fiévreuse, épuisée, tremblante et saisie de frissons, la malheureuse se leva en essayant de gratter ses abcès, elle chuta simplement de son long, évanouie au pied du trône marital. Conduite dans sa chambre dans les bras secourables d’un écuyer corpulent, elle fut mise par lui dans son lit, en attendant la prompte venue des médecins royaux. Quand les docteurs aux manches retroussées se pressèrent au chevet de l’infortunée, il n’y avait selon eux aucun doute sur leurs conclusions, la princesse de Mouyse était très certainement atteinte par la noire wérolerie. Car loin des ors du palais, dans les bas-fonds des faubourgs de Mouyse, rampait effectivement depuis quelque temps ce mal grandissant. Il était arrivé au fond des cales d’un esquif portant des rescapés qui fuyaient l’île de Godapat, en raison justement des coups de glaive portés dans ce royaume marin par la foudroyante épidémie. L’Ovoïde Vazy Métoian LXIX resta regarder sa mie au front pur qui posait la tête sur son oreiller blanc. Il n’était plus question de lui donner baiser. En se bouchant la vue avec sa main, une des servantes fit glisser doucement le lourd rideau en tapisserie qui se referma sur le triste tableau, mais pour l’Empereur de Mouyse, sa petite Blancheflore était déjà cannée, quand bien même brûlaient à côté de son lit les bougies de sauvegarde consacrées sur l’autel de Kramouille. Déjà, la lourde herse du château était tombée devant la face des rues parcourues par les habitants inquiets, tristes ombres apeurées glissant sous les arcades. La wérole était un général aussi impitoyable qu’invisible qui marchait à présent sur la cité, alors qu’il pouvait en peu de temps décimer complètement n’importe qu’elle armée, quand bien même leur chef porterait l’armure d’or, des cornes sur le casque ou le cimier de crins rouges, pour mieux s’octroyer au final l’orgueil cruel de victoires faciles. Sur les quais jalonnés de fontaines où venaient de s’amarrer les trois caravelles étrangères, grimpaient déjà en toute hâte les nouveaux-venus. Les chevaliers avaient délaissé pour le coup leurs précieux cadeaux. Entre charrettes et barriques, un chantre du malheur, un obscur travailleur du cuivre, braillait aux quatre vents du port, en essayant de couvrir par sa voix le bruit des cloches affolées :
 
– Fuyez dans les forêts tant qu’il est temps, embarquez rapidement vers d‘autres cieux, pauvres fous ! Seule la fuite vous sera secourable, car dans peu de temps, cette ville et le royaume de Mouyse n’existeront plus !

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 01-09-2019 à 23:36:27
n°57465389
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 02-09-2019 à 21:12:00  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Florence de Tasse.

 
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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Chantal Gique.

 
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n°57471719
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 03-09-2019 à 14:18:05  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : André Sagedephoque.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Janette Toyé-Lescalier.

 

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Message édité par talbazar le 03-09-2019 à 14:19:04
n°57490088
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 05-09-2019 à 11:01:31  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Marc Chamdebière.

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Victoire Surleboche.

 

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Message édité par talbazar le 07-09-2019 à 05:15:21
n°57504968
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 06-09-2019 à 20:42:50  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Igor Dechasse.

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Marco Tique-Bureau

 

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Message édité par talbazar le 07-09-2019 à 04:56:35
n°57507418
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 07-09-2019 à 11:32:08  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Tim Akulé.

 

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Ndlr : Les fumaisons d'Akulé étaient faites-maison.

 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Jhon Effronté.

 

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Message édité par talbazar le 07-09-2019 à 12:20:24
n°57513126
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 08-09-2019 à 12:19:58  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole. Extrait numéro 70.

 

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Dans les profondeurs de Mars, au sein d’un spacieux compartiment blanc du 400 qui n’est pas ruiné, la haute silhouette d’Adriena Karembar observe le long panorama du paysage martien, relayé par l’objectif d’une sonde rescapée ; un minuscule espion épargné justement parce qu’il se trouvait très loin de l’impact, lors de la colossale déflagration. Revenue docilement près des éboulements informes qui bornent maintenant l’entrée du camp de base indépendantiste, elle devient à présent un œil précieux pour le commandement, alors que la sortie semble se décider, pour échapper peut-être au guêpier souterrain. Le spectacle projeté sur six mètres de long par l’écran géant n’annonce rien de menaçant, mais présente au contraire un paysage paisible et majestueux. On ne voit qu’un immense champ de sable rose dénudé et tranquille, qui s’étale au loin vers une longue barrière rocheuse pas très élevée, avec une légère brume accrochant les sommets. Le terrain exclut pour l’instant la présence des hommes. Si l’entrée de la base elle-même s’incrustait, avant sa destruction, dans une haute falaise flanquant un réseau de canyons creusés par une ancienne rivière, la région qui lui fait immédiatement face est aussi uniformément plate que dégagée. Fanch Yolande et Karela Borounie l’ont d’ailleurs choisie à dessein pour cette raison. Le grand désert mauve s’encombre bien sûr à présent d’une multitude de roches noires expulsées par l’explosion. C’est évidemment sur cette plaine au sol inconsistant que devrait surgir, d’ici peu, le danger d’un déferlement ennemi, s’il ose braver en chemin les perfides mines traçantes toujours actives. Cet hallali flanqué de Panzigs signifierait bien entendu une victoire totale pour le général Digoule, lequel aurait alors gagné, en se jouant impunément des lois galactiques régissant la guerre. C’est l’été austral et la petite sonde annonce sur l’écran la venue imminente d’une tempête aux poussières redoutables, un maelström minéral monstrueux qui va venir balayer le coin dans quelques heures. Le ciel, au-dessus du repaire détruit, n’en montre pourtant rien aux yeux d'Adriena : il est sur les images d’une pureté orange et absolue ; mais elle sait que la sonde dit juste. Adriena à la chevelure brune et libre voudrait juste se repaître de l’admirable vision extérieure aux coloris subtils, dissiper ses pensées inquiètes, accompagnées d’une certaine tristesse liée au souvenir des compagnons morts ; mais l’écran n’offre finalement pas le bon espace pour une méditation sereine. A ses côtés, un grésillement disgracieux se fait au contraire entendre, alors qu’un de ses hommes tente de rendre le signal le plus audible possible. Ils écoutent alors la bouillie sonore déclinée par un long tract numérique de la SGL (Sanchez-Gomez-Lopez) Corporation, lequel décline d’une voix monocorde son sempiternel laïus de propagande, en exhortant les rebelles à la reddition. Ce message déprimant, qui ne varie jamais, est aussitôt suivi d’un très officiel Gaaav…arit Maaa…skkk…vva, largement déformé par les efforts du brouillage et qui le laisse passer malgré-tout assez clairement. De toute évidence, les fameuses filtrations de fréquences sont mises à mal, ce n’est pas bon signe et témoigne d’un affaiblissement désastreux des forces indés. Puis arrivent subitement d’autres sons, des propos désordonnés et chuintants. Adriena éteint aussitôt l’écran et va s’asseoir aux côtés d’un autre opérateur, puisque celui-ci est en train de l‘informer, à force de gestes explicites, que les efforts pour joindre les chefs viennent enfin de payer, d‘une manière sans doute inespérée. Avec un sentiment de joie et de soulagement mêlés, elle peut de cette façon brièvement parler avec Karela, prendre précieusement note de sa position exacte et l’informer des tragiques nouvelles qui la concernent directement, en tant que chef de la base ; elle livre aussi ses regrets auprès de Fanch et Karela pour l‘état actuel du QG. Reste que l’essentiel, à présent, est qu’ils sont en mesure de rester en contact permanent, même si le brouillage affaibli rend toute communication potentiellement dangereuse. Il faudra par prudence les réduire au minimum dans un proche avenir.

 

– C’est bien mes gars, dit-elle en posant son coude sur la table pour se tenir le front,  nous avons finalement la jonction avec Fanch et Karela. Vous avez-vu ? une grosse tempête va se ramener là-haut. Du sévère, apparemment. Du coup, on devrait obtenir un peu de répit pour raison météo, m'étonnerait que les bidasses veuillent se trimballer dans les murs de sable en mouvement !

 

– Envoie la sonde pour voir la tête qu’elle a déjà, lui suggère Jacky Villerette, le capitaine et chef de division qui semble être son bras droit depuis la catastrophe. Elle sait aussi qu’il aimerait bien être son amant, même s‘il ne l‘a jamais dit.

 

– Ok, si tu veux. Elle dévisage un moment son vis à vis. Bel homme, ancien mineur actif et bien équilibré, qui a rapidement gagné ses galons. Peut-être a t-il deviné depuis un bon moment qu’elle pourrait bien lui dire oui. Elle lui accorde en tout cas un gros capital de sympathie. Niveau opérationnel, ils sont pratiquement toujours raccords. Adriena reprend la conversation avec lui sans ciller, sur un ton sans doute trop martial, elle s’en rend même un peu compte : Fanch et Karela se trouvent au milieu de nulle part, dans une barge commerciale endommagée et bourrée de civils qui sillonne la grande piste vers Marte Vallis ; ils sont probablement désormais repérés, puisque Flash Gourdin aurait abattu les deux seuls Panzigs de l’escorte. C’est donc nous qui devons les rejoindre, si nous parvenons à sortir d‘ici. Est-ce qu’on a enfin fait le bilan véhicules dans les planques de surface ?

 

– Pas folichon, estime l’homme du rang en face d’elle, les données signalent à notre disposition un seul Whale Ship à ouverture frontale, doté il est vrai dans ses tripes d’un Cragstan Space Tank volé à l’ennemi. Les deux paraissent en parfait état de marche, ils sont garés dans le seul hangar encore intact, à trois kilomètres d’ici, mais le tunnel qui pourrait nous y mener directement est encore inachevé et son imprimante est hors-service, cette voie-là est bouchée.

 

– Le très gros volume d’un Whale pourrait nous contenir tous si on se serre un peu, ces engins sont lents, mais ils ont de bons canons et le Cragstan bien armé nous servirait d’appui efficace, si nous prenons la route pour retrouver Fanch et Karela. Elle semble tout à coup avoir cessé de flotter dans ses pensées négatives.
 
– Faudrait courir en surface pour aller les chercher et les ramener, dans ce cas, ajouta l’autre, les tunnels sont impraticables, je vous l’ai dit, même si la bombe ne les a pas directement atteints. Pour la maitrise du Cragstan, pas de problème, il nous reste encore des gars ici ayant reçu une solide formation de Gebirgsmütze, pareil pour le Whale, on ne capture pas des véhicules qu’on ne saurait pas piloter. En tout cas, c’est tout ce qui nous reste de consistant, pour ce qui est des transports qui peuvent encore rouler, mais ils sont fonctionnels et chargés, le bilan est formel.

 

Pour Jacky Villerette, en plus d’être une femme élégante, Adriena Karembar incarne un phénomène d’intelligence. Il comprend parfaitement que les chefs lui aient confié le commandement de la base. Il aimerait recevoir d’elle le maximum de confiance et s’arrange habituellement pour ne jamais trop s’éloigner d’elle, afin de rester à portée de sa voix, puisque les rebelles n’ont plus d’implant. A chaque fois, en plein voyage sensoriel, il capte chacun de ses pas avec un plaisir muet et reconnaît que la jeune, grande et belle femme allume une flamme amoureuse en lui. Sans nuire à son autorité et bizarrement, la voix d’Adriena est un brin fêlée, ce doux son brisé lénifie avec bonheur le moindre de ses mots, d’une façon extrêmement charmante. Lorsqu’elle le regarde un peu longuement, en lui offrant à chaque fois une vision perlée de magie, il n’est pas loin de se sentir extatique. Bon, c’était bien beau de se parler d‘amour à soi-même, en rêvant de poinçonner comme un curé de son éminence, mais maintenant, il fallait se préparer avec frénésie et sans attendre, pour quitter le QG et matérialiser au mieux la théorie. Il était galonné, on ne manquerait pas de le consulter pour qu’il donne son avis. Justement, il en avait un.

 

– L’atmosphère est pour le moment dégagée, mais une bonne tempête arrive, il faut en profiter. Elle réduira radicalement la possibilité que l’on soit repérés de l‘espace ou du ciel.

 

– Pas question ! On va pas se coller là-dedans ! C’est Youg Garante qui l’interpelle, un adjudant-chef costaud connu pour ses colères intempestives. Il s’est subitement dressé en lâchant sur l’état major réuni sa puissante voix de tonnerre.

 

– Nous n’irons pas tous, fait Adriena, en le regardant faire des efforts pour se calmer, une vingtaine seulement, je prendrais la tête de ce commando. Le danger n’est qu’à l’aller, quand on grimpera les plateaux, mais au retour les engins nous protégeront en filant sur la plaine. On n’a pas le choix, il nous faudra agir tant que la tempête sera en cours. Ensuite, on embarque toute les troupes dans notre Space Whale Ship et on file à toute berzingue vers Marte Vallis, en espérant échapper aux Panzigs Space Rocket, aux Cragstans Space Tank et autres Stratosniffs Powerjet XT de l’armée qui tenteraient de nous barrer la route. Digoule n’agira pas de l’espace, si ses troupes se déploient au sol. En ce qui nous concerne, advienne que pourra !

 

 Le fâché recule un peu en abaissant les bras. Le plan ressemble un peu à un suicide collectif. Mais après-tout, il vient de remettre lui-même dans le droit chemin pas mal de défaitistes prêts à se rendre, il ne va pas maintenant jouer les troubles-fêtes en personne, au moment où la situation peut être sauvée. Il se rassoit et rajoute seulement son grain de sel en bougonnant d’une manière plus positive, rappelant à l’assemblée que les mines devront bien entendu être désactivées, en préalable de toute sortie. Sous le faisceau du plafonnier, les autres officiers présents approuvent, mais ils ont tous l’air un peu perdus dans les vapeurs d’un songe lointain. Un flottement cérébral collectif et passager sans doute causé par la précipitation des événements. Vingt hommes se désignent aussitôt pour suivre Adriena, le colérique compris ; puis cette équipe, dont Jacky Villerette fait également partie, bien armée avec des Astroray Guns, des Metralin Soniluz Guns, des Atom Flash Zoomrays et autres Renwal Roto Blasters, remonte au 300 par les échelles, après avoir enfilé les noirs scaphandres d‘assaut, tous réglés en perceptivité maximum. La commandante garde au poignet un contact avec la sonde, déjà en train de voler à l’ouest vers les prémices de la tempête. Ils contemplent par la porte éventrée les nombreux décombres qui parsèment les tunnels incendiés, et qu’il va falloir traverser un à un pour remonter et sortir sur la crête. Le chef de division Villerette se tourne avec bienveillance vers sa chef, le capitaine s’avoue alors que le casque profilé et lumineux d’Adriena n’est qu’un écrin supplémentaire posé sur son visage, afin de venir magnifier encore davantage sa beauté.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 11-09-2019 à 07:19:42
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talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 09-09-2019 à 21:47:33  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La jet larguée. Extrait numéro 44.

 

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Dans le coin des comateux du service réa, où se rendirent dans la précipitation Bobby Fiermongol et son épouse Anicette Fiermongol, le corps de la pauvre Marithé Konerie était plus tuyauté qu’une fusée lunaire. Sur la gauche, juste à côté de son lit, un écran multicolore affichait les données fréquentielles : FC : 75, SF : 0,9, Sp02 : 93, le système respiratoire fonctionnait en sourdine et la tête de la patiente était enrubannée dans un bandage blanc volumineux. Derrière la vitre et empli d’une profonde tristesse, Bobby observait sans rien dire la silhouette immobile de la secrétaire de direction de la Petro Jelly. Elle était également sa maîtresse depuis longtemps, mais Anicette, les larmes aux yeux, partageait de manière visible le chagrin de son mari. Devant cette âme inerte violemment accidentée, ils se prirent la main conjointement, campant deux silhouettes silencieuses recueillies en face de leur amie commune, au sujet de laquelle les médecins réservaient toujours leur pronostic. Dans la chambre qu‘elle partageait avec une autre patiente dans le coma, séparée d‘elle par un simple paravent, les endormies traitées à l’américaine profitaient d’une télé allumée en permanence ; de sorte que les rêveuses médicalisées puisse inconsciemment profiter des programmes de TFI et des pubs, afin de ne pas perdre complètement le contact avec une certaine réalité. Des causeries bleu-lagon scrupuleusement orientées vers le luxe et les destinations de rêve. Des coins épatants du tiers monde fourmillant de compatriotes parvenus, créateurs de leur richesse qui branlent apparemment pas grand chose, à part râler sur la France impossible, ou qui vivent de combines avec plus ou moins de profit en pourrissant parfois la planète, mais toujours au soleil. Là, l’écran visitait les cases cinq étoiles pieds dans l’eau d‘un ancien parigo, installé avec ses trois gosses blonds au Vénézuéla, sans difficulté. Au moins, la chaîne ARTE c’était plus culturel, il y avait parfois les amours d’Hitler, avec des reportages colorisés sur ses femmes et son chien, en passant par sa pipe. Au mieux, tant que la nuit n’était pas tombée, on découvrait en boucle le lointain Tibet ou les proches Bonobos. Oui, sans doute, à cause de la télévision qui ne s‘éteignait jamais, il y avait des comas moins sereins que les autres. Lorsque Bobby avait demandé qui était l’autre inconnue, un soignant lui avait répondu que la voisine de Marithé était la célèbre avocate Sonja Sweet Petitcoeur, laquelle cicatrisait pendant son long sommeil artificiel de son vilain trou dans la poitrine. Son trou de balle dans la poitrine, avait tenté le jeune infirmier, dans une vaine tentative d’humour mal embouché, parce qu‘il venait de fumer un joint en douce dans la cour. C’est ainsi que Bobby apprit que les cadres en toile immaculée masquaient l’avocate des familles des victimes du vol PJ 612 Paris-Kilapile de la Petro Jelly, une compagnie aérienne dont Fiermongol figurait justement le président directeur général ! Le monde était vraiment petit, ou alors c’était cette foutue ville, elle n‘en donnait pourtant pas l‘air. Au bout d’un moment, Anicette relâcha un peu la pression de se ses phalanges sur les doigts raidis de son mari, tout en collant un regard chagriné sur la vitre. Elle garda tout de même sa fine main dans celle plus large de Bobby, puis, se tournant vers lui, elle exprima le besoin de parler.

 

– Tu te rappelles quand je t’ai présenté Marithé ? Elle ne faisait pas partie de ton équipe, en ce temps-là. Le temps passe si vite, j’ai l’impression que c’était hier. J’ai compris tout de suite que tu allais l’aimer, j‘ai eu un peu mal à l‘époque, tu sais. Elle m’était une amie si chère, déjà ! Et puis, j’avais encore besoin de te faire l’amour, mon amour.

 

– Comment pourrais-je oublier ? Cette rencontre n’a jamais été une pierre pénible à porter, comme tu sais. C’est triste et horrible, ce qui vient de lui arriver. Depuis ce crash, j’ai tellement besoin de vous-deux ! Il n’est pas encore dit que la prison ne m’attende pas dans un proche futur.

 

Une femme élégante vint les rejoindre, c’était Vanessa Erelle, directrice générale adjointe chargée des avions égarés pour la Petro Jelly. La numéro trois de la boîte, en réalité. Une grande partie de son charme roux, n’en déplaise aux féministes, tenait à l’hypnose provoquée sur les mâles par ses fesses opulentes. Deux phénomènes ondulatoires articulés, à l’aide de jolies jambes de nageuse gainées de bas noirs, par un déhanchement admirable, même pas étudié. Elle n’avait pas son pareil pour ralentir d’un coup le flux des trottoirs, en sortant de sa Mercedes devant le piéton membré. Elle se savait éblouissante et luxueuse, elle savait aussi que ça ne durerait pas toujours et quand elle y pensait, elle faisait exprès de se rendre encore plus aguicheuse. C’était comme ça depuis qu’elle avait quatorze ans, lorsqu’elle s’était faite prendre bêtement à tailler des pipes tarifées au collège, d’où, au grand dam de ses parents, on l’avait bien entendu renvoyée. Deux ans après, elle avortait de son prof de math et depuis ce funeste événement, les besoins d’argent et de séduction avaient dominé toute son existence. Elle gagnait aujourd’hui fort bien sa vie et la dilapidait avec entrain dans les boîtes de nuit, parce qu‘elle adorait danser bourrée, même quand des saligauds aux idées claires lui touchaient le cul. Elle avait 42 ans, de très jolis seins et sans aucune retouche, du haut jusqu’en bas elle faisait dix ans de moins. Elle n’en avait pas forcément marre, mais beaucoup trop de mecs de tous les âges la courtisaient, avec une forte proportion de prétendants qui confondaient les fesses avec les joues. De son côté, le personnel de la Petro Jelly, des pilotes aux bagagistes, l’appelaient entre eux la Balançoire. Les pires, c’étaient les hôtesses, elles racontaient, en riant de leur calomnie instituée il y avait des années de ça par l’hôtesse de deuxième classe Lola Dream, que Vanessa la blonde prenait pas mal de gouttes à chaque repas. La fameuse Lola faisait hélas partie des disparus du PJ 612. La nouvelle venue prit la nuque d’Anicette en ciseau pour lui faire la bise, tendant les bras pour les croiser sur les épaules de l’autre, comme une copine. Elle rougit et retira sa bonne poitrine en arrière, confuse de n’avoir pu contenir un tel élan dans un tel lieu. Ce n’était pourtant qu’un simple saut de joie de pure sympathie entre femmes qui se connaissaient. Vanessa aimait entraîner tout le monde dans sa vie peinte en rose où brillait l‘or vrai. Elle salua ensuite Bobby, avec plus de réserve, parce qu’elle avait encore la lumière dans la salle à manger et que ce bonhomme était son patron. Alors seulement, elle se pencha pour regarder au-delà de la fenêtre intérieure la raison de sa venue. S’identifiant probablement avec l’alitée sous perfusion, elle se serra spontanément le cœur, en laissant échapper un poignant flot de larmes et sa lèvre inférieure trembla un peu. Elle ne cherchait pas à cacher qu’elle était profondément bouleversée par le sort de sa collègue. Ses pleurs sincères n’étaient pas roses, mais si elle exposait pas mal de gentillesse et d’émotions intelligentes en rayon, les seuls désagréments que Vanessa Erelle admettait en général dans son existence, c’étaient à la limite les retards de train et rien d‘autre.

 

– Comme elle est pâle, on dirait une naufragée, la malheureuse, c’est affreux, elle ne dit vraiment rien ?

 

Dans le cadre de la porte restée ouverte, en écoutant cette Marilyn chicos qui n’avait pas l’air pour autant de se gaver trop longtemps de conventions, le jeune infirmier camé pouffa de rire ; si seulement il pouvait perdre cette place de merde dans cet hôpital, il en serait ravi. Il tourna la tête pour regarder passer rapidement dans le couloir un type avec une drôle de bobine, cachée derrière des lunettes de soleil ; ce gazier-là s’habillait d’un costard sombre et d’un long imperméable, comme on en voit dans les séries. Un visiteur de malade, sans doute, peut-être s‘était-il trompé d‘étage ? Le mec louche disparu au proche tournant, en faisant voler les pans de son manteau. La colombienne qu’il venait de fumer était un must, le jeune homme imaginait les larges poches de l’inconnu pleines de fioles de Penthotal, comme dans les films d’espions qu‘il affectionnait. Il ne croyait pas si bien dire et s’il l’avait su, il aurait ouvert encore plus grands ses yeux injectés par la drogue. Cette silhouette fugace était en effet celle de l’homme remplaçant le défunt Igorson dans ses fonctions. En l’occurrence, l’agent secret russicain Alexei Volodbrown, missionné par son chef, Derek Boututsov, le chef du discret GBT, le Général Bureau des Triturations, pour zigouiller dans son lit Sonja Sweet Petitcoeur, plutôt appelée Polichinelle dans le jargon du bureau. Le nettoyeur de l’Etat n’en était encore qu’au repérage de la cible et constatait amèrement que, dans la foutue piaule où il devrait effectuer son travail, c’était un va et viens continu de curieux, aussi bavards que gênants. Il se demandait si tous ces gens qui se pressaient dans la pièce occupée par l’héroïne du jour n’étaient pas plutôt venus pour regarder la télé. Après l’arrivée de Vanessa, une dame d'ailleurs très bien tournée et aussi fraîche qu‘une savonnette parfumée à l‘amour, ce fut rogers à la base, il décida de quitter sa faction un moment pour descendre à l’étage 0 y boire un café. Il fallait qu’il se change les idées, il n’avait pas non plus aimé le regard que lui avait jeté au passage ce petit branleur d’infirmier, avec sa gueule ouverte sur ses dents de lait déjà cariées. Personne ne l’avait prévenu jusque-là de l’arrivée au petit matin de Marithé Konerie dans la chambre de Polichinelle et les choses étaient restées ainsi. Le tueur croisa le commissaire Bergougneux devant l’ascenseur, il se saluèrent poliment entre gens bien élevés, Volodbrown ne savait pas encore qui c’était. Des grêlons tombèrent brusquement sur le toit de l’hôpital, des malades à perche et autres fumeurs se rapatrièrent dans le cocon du hall pour éviter l‘averse, pendant que Alexei collait sa monnaie dans la machine. Finalement, après avoir par prudence jeté un œil sur sa voiture garée sur le parking, juste en face de l‘entrée, il tapa brutalement sur l’appareil pour lui faire pondre son café de pauvre, vendu selon lui bien trop cher. Au fond de sa poche, il n’avait pas de Penthotal, mais un puissant antiphlogistique osmotique d’action ultra rapide et définitivement sédatif de la douleur globale, un outil qui pesait 1,2 kg, avec sept balles dedans.  

 

A l’étage, Bergougneux resta un bon moment comme les autres, à regarder le visage tavelé d’ecchymoses de Marithé, avant de se présenter enfin. Il se montra enchanté de rencontrer Fiermongol, impressionné d’échanger avec une célébrité qu‘il voyait ces temps-ci à la télé. Lui disait venir pour la voisine, qu’un inconnu avait tenté d’assassiner. Il était chargé de l’enquête et se demandait si Sonja devait bénéficier d’une protection particulière. Il rendait visite à la rescapée à tout hasard, avant de se faire un avis, sachant qu’il y avait pourtant bien un criminel impuni qui courait toujours les rues. Pour l’instant, Bergougneux avoua que son équipe traçait le simple cambrioleur. Bobby fut soulagé de voir le flic les quitter pour disparaître derrière le paravent. Le Pdg de la Petro Jelly ne tenait pas à ce qu’on vienne le cuisiner sur les petits secrets de sa compagnie, dont Sonja ne faisait pas partie, bien au contraire. Après avoir aboyé sur le jeune infirmier dégommé, un docteur au poil gris qui devait recommander l’adultère se pointa d’un pas alerte, en demandant aimablement au trio de bien vouloir sortir dans le couloir. Le médecin désirait organiser sur le champ le transfert de Sonja Sweet dans une autre chambre et regardant sa montre, il pesta tout haut qu’il était déjà onze heures du matin.

 

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Message édité par talbazar le 10-09-2019 à 08:46:32
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talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 12-09-2019 à 12:26:04  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Laetitia Tique.

 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith. Extrait numéro 64.

 

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Naturellement, chacun avait sa seringue bien planquée contre le gilet pare-balles, mais le mariole d’en face n’avait pas l’air armé. Il s’agissait d’une chose qu’un flic doit pouvoir sentir en toute circonstance. En face d’eux, c’était bien le beau gosse dans sa liquette criarde, mais avec les grands yeux d’ahuri qu‘il lança sur eux en les voyant venir, il donnait l’air d’être traqué comme la proie misérable d’un chat. Jess Rosse s’engagea d’un pas résolu vers le fond du troquet, tout en badinant avec Gilbert, il lui disait qu’il ne fallait jamais regarder dans les yeux le mec qu’on devait descendre. Quand on était de la police, ça filait toujours un peu plus tard son lot de cauchemars. Étant toujours activement recherchés par les forces de l’ordre hawaïennes, en dépit de la protection de Roy Larymore et du FBI, ils étaient tous d’accord qu’on ne pouvait se permettre de rester trop longtemps dans ce bar. Pour sa part, Angèle jugeait que ce Goldwind devait vraiment se coller les jetons, pour faire maintenant appel à eux, alors qu’il avait si salement faussé compagnie à Jess après son accident.

 

– Ce type n’a aucune fierté.

 

– Ho tu sais, fit Gilbert en la poussant gentiment pour qu‘elle avance, la fierté, des fois on la met dans son cul, quand il s‘agit de sauver sa peau.

 

– Oui, peut-être, mais alors ce n’est plus de la fierté. Elle se cambra un peu vers l‘avant, elle ne voulait pas que Teddy en profite pour lui caresser le dos.

 

A l’extérieur, le quartier grouillait d’agents du FBI sans uniforme, mais on s’était mis d’accord pour qu’ils se tiennent très éloignés du Swordfish. Histoire de nager plus tranquillement dans les confidences. D’ailleurs, ils étaient peut-être eux-même observés, et pourquoi pas ? par cet enculé de Gros Bill par exemple, si ça se trouve ? Une aubaine, ça, on le descendrait simplement illico à trois mains et dans la rue ; avec ses potes en plus, il traînait jamais seul. Sur la table en vrai bois vernis occupée par Elliot, le journal local étalé relatait en détail l’incendie de la Samsara Foundation, avec en Une des photos des ruines carbonisées, l’article devait en plus faire état de la mort horrible de son directeur et de celle du gardien tué par balle, sans parler de toute la ménagerie. D’après les premières conclusions des enquêteurs, les traces d’hydrocarbures ne laissaient cependant aucun doute sur l’intention criminelle des incendiaires. Un drame pour Honolulu, puisque les laboratoires dirigés par le défunt professeur Brüder Karamasow employaient plus de soixante chercheurs et cinq cent employés, qui se retrouvaient à présent au chômage. En réalité, Angèle, Teddy la Fouine et Jess l’avait déjà lu, ce canard. C’est pour ça qu’il préférèrent se planter tous les trois devant le gugus, sans donner l’impression de vouloir s’asseoir. L’autre ne lâchait pas sa gueule de parano, il parut pourtant légèrement soulagé de ne plus être seul, ses yeux l’exprimèrent avec éloquence. Jess attaqua le premier :

 

– Elliot Goldwind ?

 

– Ou on devrait plutôt dire Cheebe Surger, officiellement mort en 2005 ? ironisa Angèle, en décidant de prendre une place au côté du quidam. Il avait l’apparence d’un athlète et d’un jeune premier, mais c’était un très grand vieillard, elle le savait.

 

– Les deux conviendront, vous l’avez deviné. Il replia le journal pour se donner une contenance, puis il le balança sur la banquette voisine, comme on jette un déchet. Malgré cet aveu, il ne semblait pas parti pour faire le volubile.

 

– Alors comme ça, grand-papa, fit Gilbert en s’asseyant à son tour près de lui, Van Degaffe t’a injecté son fameux carburant de jouvence ? T’aurais pas choppé la formule en passant, des fois ?

 

La petite serveuse aguichante arriva vers eux tout sourire, elle se rappelait avoir déjà vu ces gens, il y avait alors en plus un homme et une femme avec eux. Elle aimait bien revoir ses clients. Le Swordfish en voyait pourtant passer beaucoup dans la journée, qui ne revenaient jamais. Goldwind, le beau garçon, il devait habiter dans le coin, parce qu’il venait de temps en temps se coller contre le zinc, il la draguait même un peu et franchement, ce mec n‘était pas mal du tout. Elle repartit, avec dans un coin de sa mémoire un Honolulu Cooler, un Scarlet O’Hara et un Ordinary Collins, elle ne prenait jamais de notes. Quand à lui, Elliot en était à la moitié de son Gimlet, il le termina d‘ailleurs d‘un trait sans attendre les autres.

 

– Raconte-nous, papy, les infirmières de monsieur Hubert, elle étaient canons, t’en as sauté combien, une fois qu’il t’a rajeuni le braquemart ?

 

– Tais-toi, s’il te plait Teddy, le coupa Angèle, un peu énervée. C’est à monsieur de parler. Monsieur Goldwin, vous nous avez donné rendez-vous ici, pourriez-vous nous dire pourquoi ?

 

– Je suis très pessimiste sur mon avenir, je suis persuadé que Gros Bill cherche à me tuer, depuis mon hospitalisation et ma déclaration d’accident. À la suite de cet événement, j’ai subi des examens aussi complets qu’officiels, les analyses qui en découlent peuvent être très compromettantes. Je pense que de ce fait, je suis devenu très gênant pour l’organisation. C’est pourquoi, je réclame votre protection et en échange, je vous raconterai beaucoup de choses qui peuvent vous intéresser.

 

– Ils vous ont pourtant permis de fuir l’hôpital. Si Gros Bill l’avait voulu, vous seriez probablement déjà mort. Cette ordure tue par plaisir, mais pas sans raison, ou sans l’ordre de son cinglé de mentor, plutôt.

 

– Non, parce que lorsque Gustavo Piccolini est venu me chercher pour me soustraire à vous, je lui ai échappé tout de suite après. Je me cache sur un bateau depuis, parce que les paroles de ce gars-là ne laissaient planer aucun doute. Gros Bill veut ma peau, mais c’est certain, il finira par l’avoir, si vous ne m’aidez pas.

 

La jeune fille revint pour les servir chacun leur tour, avant de repartir dans un silence de mort. Jess Rosse laissait traîner son regard sur l’espadon accroché au mur, ce poisson qui donnait son nom au bar faisait un belle taille, son œil artificiel était si expressif qu’on aurait dit l’animal bien vivant. L’agent baissa finalement la tête en lâchant la poiscaille empaillée, pour rester fixer Elliot.

 

– Qui vous a dit que nous serions chez l’attorney Larymore ?

 

– Dans la ville, on l’appelle le white lion, l’incorruptible, ce n’était pas difficile de le déduire, la meilleure preuve est que vous m’avez répondu et que vous êtes ici.

 

– Ben merde alors, fit Gilbert. Si ce crétin le savait, les autres aussi probablement, en ayant tenu le même raisonnement.

 

– Racontez-nous un peu votre histoire, Surger, si vous le voulez bien, questionna Angèle. Comment avez-vous rencontré le docteur Hubert Van Degaffe ?

 

– C’est une longue histoire. L’année de mes 83 ans, on m’a diagnostiqué une maladie incurable. Les médecins me donnaient six mois à vivre. Je cherchais un endroit idéal pour en finir, c’est ainsi que je suis tombé sur la publicité des Flocons d’Argent, une maison de retraite luxueuse perdue dans les Alpes. A mon arrivée, le directeur de l’établissement, Strazdinovsky, m’a présenté à un certain Doc Morgan, un maestro du bistouri. Mais celui-ci ne m’a pas seulement proposé un traitement miraculeux pour me soigner, il m’a aussi fait part d’une méthode révolutionnaire permettant de rajeunir, d‘au moins cinquante ans. Moyennant un prix très élevé. Vous vous doutez de l’homme qui la mise au point, n’est-ce pas ? Ce fut une parfaite réussite et c’est comme ça que je suis devenu Elliot Goldwind, le jeune homme que je suis aujourd‘hui. Mais je n’ai jamais rencontré Van Degaffe, jamais.

 

– Il est devenu quoi, ce Doc Morgan, après la méga-descente de la police aux Flocons d‘argent ?

 

– Il est ici, avec Van Degaffe, à Honolulu. Mais ce n’est qu’un simple exécutant des méthodes de rajeunissement mises au point par ce dernier. Les protéines ETS ne vous disent rien, évidemment, ni l’axe Aop-Foxo-Pnt ou les enzymes clés, mais c’est en piochant dans ce contexte cellulaire que Degaffe est parvenu à faire des miracles, dans la gestion du vieillissement humain et les désordres métaboliques qu‘il entraîne. Savez-vous qu’en plus d’être rajeuni, je ne ressens que très peu la douleur, que je cicatrise instantanément ? Les protéines qui régulent mon espérance de vie ont été stabilisées et mon système immunitaire est quasiment hors-norme, comme tous ceux que Doc Morgan a déjà traités. Qui peut résister à la fascination de retarder l’inéluctable ? Les résultats de Van Degaffe sur le vieillissement réversible et son combat contre la sénescence sont vraiment spectaculaires ! J’ai peut-être gagné plus de cinquante ans d’espérance de vie et je conserve l‘aspect de mes trente ans, au prix fort, certes, car je n’ai plus un rond. Il me faut cependant encore de temps à autre le sang frais de très jeunes donneurs, à raison d’1,5 L de plasma, sous peine de subir d’atroces douleurs musculaires et des pertes de mémoire, mais ce suivi était garanti formellement dans le contrat et ne me coûte presque rien. Ma dernière transfusion et le contrôle de mes cellules pluripotentes reprogrammées ont étés effectuées par Doc Morgan lui-même. Elles remontent à deux mois et ont eu lieu discrètement au sein des locaux de la Samsara. Je suis à présent tranquille pour à peu-près un an.

 

– Nous ne pouvons pas rester ici, fit brusquement Jess en lui coupant la chique, vous allez nous suivre, nous retournons tous ensemble chez Larymore.

 

Aussitôt dit aussitôt fait, puisque tout le monde avait terminé son verre. Grâce à son téléphone sécurisé, Jess informa les gars du Bureau qu’ils décanillaient. Gilbert prit le volant, en affirmant à Angèle que faire l’amour chassait les nuages. Assise à l’avant à ses côtés, elle lui répondit qu’elle venait de voir voler un truc très haut par-dessus le mur de son ivresse et réduisit l’espacement de ses jambes au minimum, alors qu’ils prenaient la direction de l’Harbor Fishery. Ils étaient seuls. Approuvés et rassurés par Jess Rosse, les hommes du FBI avaient décider de les devancer chez l’Attorney, en abandonnant leur surveillance. A l’angle de Cora Street, dans un coin où poussaient de longs palmiers déplumés et minables, les français furent bloqués par un feux rouge. Quand une grosse Porsche s’arrêta sur la gauche à leur hauteur, le passager avant de celle-ci baissa sa vitre, avant de percer de bastos la tête de Cheebe Surger par trois tirs fulgurants. Un mitraillage d’une précision étonnante. Le mort ensanglanté glissa contre l’épaule de Jess Rosse, lequel était indemne, alors que les tueurs mettaient la pleine gomme, pour mieux s’enfuir en crissant des pneus au mépris du code de la route. Sans hésiter une seule seconde, Gilbert appuya à son tour sur la pédale pour les prendre en chasse, au risque de recevoir leur prochaine salve à travers le pare-brise. Les lèvres d’Angèle avait un goût de poussière, elle dégagea comme les autres son pétard pour le tenir en main, en tâchant de rabattre en sourdine le diabolique chant des billes de plomb qu’elle avait dans les oreilles, mais son cœur battait tout de même très fort. Dressée droite sur son siège et la crosse dans son poing, un peu de sa panique mal contenue lui fila tout d’un coup des frissons désagréables dans les entrailles, qui lui criblèrent les seins.

 

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Message édité par talbazar le 14-09-2019 à 14:27:03
n°57571241
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 14-09-2019 à 13:48:51  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Alexandra de Satin.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Abraham Seter.

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Message édité par talbazar le 15-09-2019 à 05:34:04
n°57576607
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 15-09-2019 à 15:01:33  profilanswer
 

Bon dimanche les gars, j'ai la flemme de romancer, on retrouvera Boudiou plus tard.
 
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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Silvie le Loup.

 
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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Richard Ilga.

 
 
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n°57595764
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 17-09-2019 à 17:06:59  profilanswer
 

Enfin disponibles, les ouvrages écrits par les grands inventeurs mis en fiche à ce jour, chouette !
(chaque livre coûte environ 422 euros TTC, dont quinze centimes sont versés à la ME du PT)

 

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Message édité par talbazar le 17-09-2019 à 17:10:40
n°57613049
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 19-09-2019 à 13:05:16  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Ophélie Décâlins.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Berthe Olerie-Chaudronnerie.

 

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Message édité par talbazar le 26-09-2019 à 07:40:48
n°57624675
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 20-09-2019 à 15:14:04  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Frédéric Pétrolier.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui :Yon Kippour.

 

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Message édité par talbazar le 21-09-2019 à 11:53:30
n°57630622
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 21-09-2019 à 11:55:25  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui :Les époux Zailles.

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui :Thomas Tismecranien.

 

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Message édité par talbazar le 26-09-2019 à 07:40:16
n°57637535
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 22-09-2019 à 15:26:52  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Marie-Laure Dunsketch.

 

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Le congélateur muséographique

 

Aujourd'hui : Saul Tepper (American, 1899-1987).

 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 53.

 

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Tout le long de la route, ils reçoivent des appels de phare de la part de jeunes conducteurs qu’ils croisent, il est vrai que la 2cv de Joseph Wronski n’est pas très discrète. Ils suivent même pendant vingt kilomètres un magic-bus encore plus coloré que leur bagnole et qui file sans se presser vers Goa, les mecs et les filles défoncées à l’arrière leur font de temps à autre des grimaces hilarantes. Dans leur dos, le linge probablement lavé dans une mare sèche tranquillement au-dessus de l’allée. On nage alors en pleine fraternité des enfants-fleurs. A l’occasion d’un arrêt commun, Gaston immortalise tout ce beau monde avec le Nikon F (reflex 35mm) qu’il a emporté. Nous avons vu ces photos en couleurs, aimablement prêtées par la dernière veuve de Boudiou, on voit tout de suite que le chauffeur devait prôner haut et fort l’autogestion révolutionnaire, alors que les autres, aussi barbus que chevelus, semblent tellement stones qu’on les croirait en métal ou en plastique. Quand aux nanas, elles montrent bien qu’elles rêvent de coucher sur autre chose qu’une pellicule, par esprit de liberté. Le trio et les hippies se quittent ensuite en se souhaitant mutuellement bonne chance, après avoir partagé un cocktail martien et quelques bonnes pipes de marijuana, qu‘Angèle refuse pourtant obstinément de porter à ses lèvres. Une dernière fois, Gaston fait la grenouille au pied du bus pour faire rire l’assemblée. Assise à l’arrière de la voiture qui repart désormais seule, Angèle trouve ensuite que Jo est bien meilleur comique que pilote, alors qu’il illustre sa conduite par des « Puissance 7 maximale  enclenchée», « Joseph appelle la base », « Position galactique demandée », ou bien encore « Demande analyse et confirmation », qu‘il prononce à l‘aide d‘un micro fictif. Après-tout, il n’a pas vraiment tort, sa deux-pattes multicolore a tout d’un OVNI circulant sur les départementales étonnamment étroites de 1968. Néanmoins, pour la sœur de Gaston, ce voyage vers Saint Frusquin semble interminable. Elle reste avachie sur son siège, répond à peine aux deux autres et regarde pensivement défiler les ombres vertes des collines, en rêvant de gagner six millions et demi de dollars par film. Lorsqu‘elle sera enfin devenue une vedette internationale, elle sait que les pièges seront nombreux et qu’elle devra faire très attention pour ne pas tomber dans le panneau hollywoodien. Le pire étant sans doute la faute de goût vestimentaire. Elle trouve qu’il serait somme toute dommage qu’elle ne devienne pas une star avant que sa peau ne se recroqueville, sans avoir le plaisir de ramasser au passage un peu de l‘argent du show-biz, pour s‘acheter un chiot. Ce qui serait plus grave pour elle que de mourir à trente ans du tétanos, ou d’observer chaque matin au petit déjeuner la petite bouche sévère d’un mari radin, que dieu lui pardonne. Au sortir d’une station-service Fina, Gaston repère une boîte aux lettres, où il dépose la lettre qu’il a écrite à l’intention de Brigitte Parade et dans laquelle il lui explique la situation, tout en l’informant de son départ de Paris et sa destination. Il rajoute qu’ils se verront naturellement à son retour et l’embrasse tendrement sur des zones inavouables.

 

Dans le château en ruine de Saint Frusquin, l’ambiance est tout autre. Surtout pour Antigone qui enchaîne les idées noires et n’échappe pas aux crises de larmes. Elle n’est pourtant pas ligotée et Raymond Toupidor et ses complices la laissent simplement tranquille, dans le coin de la chambre sordide qu’elle occupe. Elle est juste séparée d’eux par le paravent. Ses pensées se tournent sans arrêt vers Gaston et Angèle, puisqu’ils doivent commencer à se faire beaucoup de mouron à son sujet. Elle s’en veut tellement d’avoir pris un amant, une faute qu’elle paye à présent bien cher ! Ces types armés sont trois fous psychopathes et dangereux, entrés en synergie pour plumer Émile jusqu‘à l’os ; mais elle préférerait mourir que de voir son pauvre homme céder à leur odieux chantage. A présent allongée sur le lit de camp pouilleux, elle sent qu’ils sont très près d’elle et sait qu’elle ne peut pas leur échapper. Comme à n’importe qui, il lui en aurait fallu beaucoup moins pour lui transmettre d’inquiétants troubles nerveux. Elle se met donc à pleurer encore plus fort, dévastée à l’idée que sa prochaine rencontre avec Emile puisse se transformer en rendez-vous post-mortem, si jamais il refuse de payer les cinq cent millions de francs. Après-tout, qui peut savoir ce qui se passe dans la caboche d’un conjoint trompé ? La situation étant d’autant plus ubuesque qu’elle vient d’être enlevée par son ancien amant. Les hommes sont tous des salauds. Sa main tremble un peu lorsqu‘elle la passe sur sa figure pour essuyer ses larmes, elle roule sur le flanc gauche et réclame une cigarette qu’elle obtient. Lorsqu’il vient lui donner une Gitane sans filtre, elle n’échappe pas au regard pervers de Christophe, il la déshabille de son regard libidineux sans se gêner. Derrière le paravent, la voix de Gilles est celle qui parle le plus fort, il est probablement en train de siffler sa sixième bière, puisqu‘il semble depuis longtemps descendu dans l‘enfer de l‘alcool. Antigone entend très peu celle de Raymond, mais il y a peu à parier que cette saleté qui a lâché le monstre en lui puisse se morfondre dans la culpabilité. Il est après tout l’instigateur principal de ce crime dément, puisqu’il n’a fait qu’entraîner les deux autres crétins dans son délire sournois de richesse mal acquise. Le fait qu’elle ait été séduite par cet odieux bourreau est une flèche encore profondément plantée dans son cœur, il y a de ces amours qui font vraiment super mal. La prisonnière se lève un moment. Par la fenêtre aux vitres souillées, elle aperçoit la voiture de ses ravisseurs garée au pied du château en ruine. Même si elle parvenait à s’évader, elle ne saurait qu‘en faire, parce qu’elle ne sait pas conduire. Les heures passent, puis un jour, puis deux, Antigone oscille dans la chambre crado entre la peur et une sombre fatalité.

 

A leur arrivée à Saint-Frusquin, hameau abritant tout au plus 300 habitants et dont la place centrale ouverte sur trois ruelles est conforme à la photo de la carte postale, la 2cv colorée attire quelques remarques malveillantes de la part de deux ou trois passants. Joseph Wronski le devine et ricane qu’ils n’ont qu’à aller se faire foutre avec leurs costards-cravates. Il n’y a qu’un seul café où les paysans viennent sans doute boire leur canon de rouge le soir après le boulot, ou taper le carton le dimanche matin après la messe avec les chasseurs. Angèle fouille ensuite du regard les maigres rayons de la petite épicerie du bourg, où la patronne n’en a visiblement rien à faire de fidéliser sa cliente de passage. Celle-ci passe en revue le savon Palmolive à 6 Francs, les boîtes de lessive Bonux avec des jouets dans chaque paquet, puis s’écarte des pots de Vim pour acheter de quoi confectionner un repas frugal, des sandwichs qu’elle et les deux autres vont finalement dévorer sur le pouce dans la voiture. Pendant ce temps-là, Gaston s’est déjà renseigné sur la direction qu’ils doivent prendre pour se rendre au vieux château. Il règne ce jour-là un soleil écrasant et Joseph tente d’argumenter qu’il fait un temps de sieste, mais Gaston et sa sœur ont hâte de visiter le bâtiment en ruine, en espérant sans trop y croire que Raymond aura laissé sur place quelques indices de sa présence. Pour eux, cette virée représente un parcours tragique et s’ils ne découvrent rien, il leur faudra bien appeler la police. Passé le cœur de la bourgade, chaque maison à son petit jardin où ils ne distinguent aucune âme qui vive. Cette petite ville de province, inconsciente des actuelles folies parisiennes, possède de nombreux points communs avec la Troulbed de leur enfance, chaque baraque qui se colle près de l’église doit abriter son lot de familles de notables engoncées dans leur médiocrité hautaine. L’ambiance de ce patelin est un brin étouffante, il y peu de chance que les évènements de mai pulvérisent un jour le carcan idéologique des habitants bien nés. On passe un champ de betteraves, Joseph envoie le bonjour aux vaches et puis suivant les indications de l’habitant, sans doute bon jardinier, ils arrivent sur un carrefour qui les conduit sur un chemin de terre. Normalement, au bout de cette piste perdue, doit se trouver l’ancienne propriété du Comte de Saint-Frusque, dont la veuve et la domestique du dernier propriétaire furent tondues sur la place du village pendant la dernière guerre. En apercevant les hautes grilles ouvertes et rouillées qui racontent en silence leurs trois siècles d’histoire, mais qui ont depuis longtemps lâché leur garde du bâtiment, Angèle n’est pas très rassurée. Elle aperçoit la tour branlante du château, l’épicière qui lui a vendu son jambon lui a dit que pendant la révolution, sa cave aurait servie de prison pour les aristocrates et toujours selon son récit, les allemands auraient fusillé dans la cour plusieurs maquisards. Mais la sœur de Gaston ne goûte guère les sordides légendes militaires que les gens du coin prêtent à cette vieille bâtisse. Elle ressent au fond d’elle autant de défiance que d’amertume, à l’idée de mettre en quelque sorte ses pas dans les méandres de la mafia. Tripoter une archive photographique est une chose, pousser la porte de ce château abandonné en est une autre.

 

– Faudrait quand-même qu’on arrive à le joindre, Emile.

 

– Bon dieu ! s’écrit Gaston lorsqu’ils approchent enfin, en poussant sa voix comme s’il faisait face à une brusque menace, regardez, y’a déjà une bagnole !

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 26-09-2019 à 07:08:46
n°57645155
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 23-09-2019 à 13:46:48  profilanswer
 

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Salon des inventions.

 

Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar.

 

Aujourd'hui : le sac de tête.

 

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C’est au retour d’un voyage d’intégration au Cameroun du petit personnel de la Moyenne Encyclopédie, (au cours duquel toutes les participantes approchant 40 ans sont d’ailleurs revenues enceintes), qu’a été développé l’idée d’un sac de transport pratique, pouvant permettre de faire ses courses en gardant les mains libres. Le concept étant de parvenir à déambuler de manière consumériste dans les centres commerciaux en téléphonant avec la main droite, tout en caressant son ventre arrondi de la main gauche. Sous l’action à peine contenue du contenu conséquent de notre incroyable sac de tête, voilà pour tous l’occasion inouïe de montrer un nouveau visage, en faisant sans souci des emplettes plus ou moins nécessaires. L’adage séculaire nous dit qu’il vaut mieux posséder une tête bien remplie qu’un visage bien fait. Certes. Et bien la startup sponsorisée Talbazar est très fière de pouvoir enfin vous offrir la possibilité de combiner les deux, à condition de ne pas être trop moche à la base, bien entendu. Muni de notre invention permettant le port sans effort d’une quinzaine de kilos excellemment équilibrés, vous voilà par un judicieux empilement crânien prêt à défier les défis effrayants de notre société, puisque ce cabas révolutionnaire vous offre la possibilité de faire des bras d’honneur dans la rue à tout moment et à tout le monde, sans réduire en aucune manière vos habitudes de consommation. Sous le soleil généreux de l’Afrique, nos collaboratrices n’ont donc pas chômé pour se mettre à leur retour au service de notre avenir, car la Moyenne Encyclopédie sait toujours trouver les bonnes solutions qui vont nous soulager à tout instant de la vie. Le Conseil National Sport et Courses-Santé vient d’applaudir à notre dernière création, puisque l’idée du sac de tête offre enfin aux consommateurs une activité physique très porteuse, peut-être même porteuse d’égalité, de tolérance et d’un incomparable vivre ensemble.

 

Ici, pas de solution numérique, le public jeune ou vieux progresse concrètement sur les trottoirs ou autres lieux d‘achat, en joyeux usagers satisfaits de voir enfin leur solide caboche employée en espace-ressource. Voilà l’outil que béniront à l’unanimité les étudiants trop chargés ou les femmes au foyer, qui ne savent jamais comment ramener sans fatigue toutes leurs boîtes de conserve à la maison. Ce nouveau produit rencontre évidemment un succès fou chez les adolescents, ces gens n’ont plus la tête vide, grâce au sac de tête qui saura protéger si bien toutes leurs prises personnelles, qui ne sont d‘ailleurs en général pas données. Le gouvernement vient de placer la santé en tête des secteurs prioritaires pour le développement, la Moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar préfère mettre en tête de sa priorité le sac à commissions, pour augmenter ses ventes. Ce sac de dimensions 51 x 30 x 32, 5 x 40, 6 à été conçu grâce au développement d’une IA, dont les algorithmes ont pioché avec succès dans une base de données essentiellement fournie par le panier de la ménagère de moins de 50 ans. Avec l’usage du sac de tête, il n’y a aucun risque de se voir atteint par une pathologie commune, puisqu’il possède à la base de son fond renforcé un ingénieux coussinet invisible et gonflé en feutrine, lequel permet sans effort aux cervicales et aux vertèbres du porteur de s’adapter au poids de la masse transportée, il n’y aura que les fans de brushing impeccable qui pourront éventuellement refuser de l’adopter. La ME du PT en a déjà vendu 350 millions, dont 30% en téléchargement, et tous les utilisateurs ont salué le gain de productivité que leur a offert ce cabas de tête, plus gracieux et utile qu’une inutile toque de cuisinier qui se la pète à la télé.

 

L’allure de ce produit est noble et ne nécessite pas la moindre éducation posturale au préalable, il suffit seulement d‘ajuster la jugulaire au menton et d‘avancer après la prise en charge. Le sac de tête, qui malgré son nom ne doit pas se confondre avec la cagoule de braqueur, est bien sûr complètement pliable et se met dans la poche avant de partir faire ses courses. Sa conception révolutionnaire en plastique durable est si innovante qu’il saura rapidement se faire oublier. Une fois posé sur la tête, son équilibre parfait élimine d’emblée tout risque de chutes liés à son utilisation et s‘adapte même au faux pas, grâce à son élégant rabat muni d’un gyroscope : on peut grimper les escaliers en vapotant tranquille et il peut même être porté à charge maximale en faisant du rameur ou du vélo elliptique (Test INC 658 réalisé avec un parpaing). Il n’est cependant pas conseillé de le garder sur soi au cinéma, par respect pour les autres spectateurs. On le voit, voilà une nouvelle invention très pratique, aux poches optionnelles, qui saura à tout instant favoriser la gratifiante pratique sportive de l’achat de proximité. Une action que l‘on fera désormais avec joie sur un plaisant coup de tête.

 

NB : Le sac de tête ne fonctionne pas à charge zéro, en raison d’un risque d’aveuglement temporaire.  Livraison gratuite également impossible.

  


Message édité par talbazar le 23-09-2019 à 14:21:51
n°57657230
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 24-09-2019 à 15:27:20  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Emilie Tantécolo.

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Béatrice Ephale.

 

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Message édité par talbazar le 25-09-2019 à 11:17:49
n°57668502
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 25-09-2019 à 16:29:19  profilanswer
 

"Si rien ne sert à rien, tout sert à tout."

 

Potka Glaisan.

 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Forrest Trump.

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Dominique Tonpère

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Message édité par talbazar le 25-09-2019 à 17:38:34
n°57677790
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 26-09-2019 à 14:34:32  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Rémi Dicinq.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Alphonse Dehors.

 

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Message édité par talbazar le 26-09-2019 à 19:14:28
n°57687240
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 27-09-2019 à 14:53:49  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Pascal Ibredouze.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Klauss Trophobe.

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Message édité par talbazar le 27-09-2019 à 15:08:51
n°57700933
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 29-09-2019 à 14:07:36  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : L'épilée du Nil. Extrait numéro 99.

 

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Un véritable désastre. Lorsque Néefièretarée arriva au petit matin sur les quais pour constater les dégâts et la perte définitive de son bateau, plusieurs pleureuses professionnelles engagées par la compagnie d’assurance étaient déjà au boulot, en train de pleurer sur les frais remboursement qu’allait occasionner la catastrophe. L’expert local Samser-Amon-khû, dépêché aussitôt en urgence, l’avait bel et bien dans ses fesses, la carcasse calcinée du Pamalrâssé et de quatre autres bateaux gisaient au fond des eaux du Nil ; alors que les clauses du contrat signé par la pharaonne au départ de Thèbes stipulaient formellement un dédommagement intégral, en cas d’incendie volontaire. Sur ce dernier point, plusieurs témoins pouvaient prouver avec certitude que l’incendie ne devait rien à une action de la foudre, ou à une simple irration des dieux, deux évenements naturels sur lesquels ont aurait pu finauder au mieux. Ces foutus connards d’esclaves insolvables, présents à bord cette nuit-là pour se déchaîner au cours de leur nouba d’enfer, étaient les seuls responsables de la tragédie. L’assureur pouvait déjà rager sur sa banqueroute imminente, s‘il devait rembourser les dégâts. Cependant, la colère de ce dernier ne pouvait se comparer à la rage qui taraudait la reine, alors que même le guépard Sâmgaratte venait prudemment de se planquer dans un coin, en constatant les éclairs meurtriers décochés sur tout le monde par les yeux fardés de sa noble maîtresse. Même les morpions sacrés de l’épilée du Nil évitaient pour une fois de l’irriter outre-mesure. Assis sur une grande caisse de citrons non traités importés de l’Ibérie, Samser-Amon-khû était absorbé dans la lecture de ses papyrus, il ne pouvait considérer l’événement comme un dommage de guerre, une clause alourdie dans ce cas-là d’une franchise de ouf. Non, des irresponsables en java, sans doute trop occupés à baiser sur et sous les ponts des servantes de communs, avaient foutu le feu au navire royal délibérément, et les coûts engendrés par la reconstruction de la flotte allaient probablement ruiner la compagnie. Ce qui entraînerait hélas de ce fait pour les collègues des licenciements massifs sans aucune garantie de reclassement. L’expert releva tout de même un œil à l’arrivée du cortège pharaonique, alors que le chef des pompiers à genoux était en train de racler le sol avec son front pour rendre hommage à Néefièretarée. Ce type-là non plus n’en menait pas large, avec ses cheveux roussis et sa peau noire de suie, il affichait la tronche apeurée d’un mouton qu’on mène à l’abattoir. Il importait finalement peu que par l’excellence du travail effectué par ses troupes dans la nuit, l’action des pompiers ait sauvé pas mal de victimes d’une carbonisation aussi tragique que mortelle. On voyait surtout que cet officier du feu harassé de fatigue était, à l’instar de ses hommes valeureux, en train de vivre son propre drame psychologique. Parce que dans l’enchaînement des événements qui allaient suivre, lui et tous les gars de sa caserne pouvaient très bien finir dans le bide affamé d’un crocodile de justice. On pouvait même penser que le courroux de la reine allait d’ici peu bouleverser le destin de la cité d’Ankhelkarton-Tulmé et que le programme des jours à venir allait s’orienter par un bon nombre d’éventrations des notables en série. Les bourreaux de la pharaonne ne manquaient jamais d’imagination pour jouer les assassins et leurs méthodes officielles n’avaient rien à envier à celles des vulgaires chefs de gangs qui trafiquaient la dope dans les bas-fond de Memphis. L’expert aux assurances Samser-Amon-khû se leva à son tour, pour aller servilement plier ses genoux devant la patronne du pays. A cet instant précis, il aurait bien eu besoin de se défouler, en coloriant au pinceau un de ces rouleaux anti-stress que vendaient à la sauvette certains scribes dans la rue.

 

– Alors, fit Néefièretarée, en le toisant avec une moue dédaigneuse, c’est donc toi l’expert et l’agent mandaté de la Maât-Mout officiant dans cette maudite ville de nazes ?

 

– Oui, ma glorieuse reine, resplendissante émanation terrestre de Bastet la féconde à la tête de chatte, voir de lionne, symbole de douceur et de féminité, vous la couronne vertueuse et bras secourable de l’incarnation féminine d’Horus et des autres, je m’appelle Samser-Amon-khû, pour vous servir. D’après ce qu’on sait déjà, l’incendie causé par des noceurs et qui vient de détruire vos navires se serait déclaré à la quatrième heure de gnomon. J’ai le plaisir de croire que la Maât-Mout va sans doute devoir raquer. Probablement sept millions de chèvres et autant de bœufs blancs, plus sept-cent mille chameaux véloces et trente cinq mille oies bien grasses, rien que pour le navire amiral Pamalrâssé. Sans trop de doutes. Bien que…

 

– Bien que quoi ?

 

– Ben, si je relis le contrat signé à Thèbes avant votre départ, je vois que ma compagnie n’assure que les sinistres résultant d’aventures en mer ou en fleuve (Article 312-4 acté dans le papyrus général du code égyptien des assurances). On note bien sur le document le risque d’incendie causé par la main d’homme en cours de route, mais si on se limite à ces périls, je constate aussi que vos bateaux étaient à quai, qu’ils ne transportaient aucun fret, qu’ils ne naviguaient donc pas et qu’ils étaient en plus laissés sans protection de gardes. L’appréciation des risques pointerait ici pas mal de négligences de la part du capitaine Sésoscristop. Notez que je ne cherche que des réponses adaptées à vos besoins, mais compte tenu des termes contenus sur cette police et des lois égyptiennes, voir internationales, je me demande si…

 

– Hé, toi, Samser-Amon-khû, tu sais quoi ? Si tu prononces encore seul un mot pour m‘expliquer que tu veux m‘entuber, je vais t’empaler.

 

Le représentant de la Maât-Mout et le chef des pompiers, toujours penché en train d’embrasser le sol, échangèrent à la dérobée un regard terrifié, alors que le guépard Sâmgaratte aux crocs baveux était déjà en train de les renifler. Dans un seul petit trait de clepsydre, l’équipe fort compétente de la Maât-Mout risquait sans procès d’être brutalement dessoudée, amputée ici-même d’un de ses agents le plus compétent, si la reine venait à claquer du doigt pour l’ordonner. Samser-Amon-khû fut sans doute sauvé de l’atrocité d’une mort imminente et pénible, par l’arrivée d’un messager en provenance de Nikzem, lequel stoppa sa monture épuisée pour en descendre et confier à la reine le rouleau de papyrus qu’il tenait dans sa main. De ce côté-là, les nouvelles étaient on ne peut plus réjouissantes, puisque le général Merdenkorinnanâr y retenait dans cette petite bourgade lointaine, consignés et parfaitement vivants, toute la bande de traîtres composant l’ONS et les saletés de romains, dont l‘un deux était formellement considéré à présent comme un vil espion de Rome. Mais par dessus-tout, l’armée avait enfin gaulé le môme de Schrèptètnuptèt, l’erpatrès, l’héritier potentiel de l’Egypte, dont la seule existence représentait tant de menaces pour le trône de Néefièretarée ! L’avenir se dessinait sous des augures nettement plus favorables et en se déployant dans le bon sens, le récit palpitant raconté ensuite de vive-voix par le cavalier inaugurait enfin des jours meilleurs pour la couronne. Le soldat envoyé par Merdenkorinnanâr pour la prévenir employait des paraboles simples pour s‘exprimer, afin de faire comprendre à sa majesté que les marchands de tissus l‘avaient bel et bien dans leur cul et qu‘ils seraient très bientôt à sa disposition ; alors elle donna à ce bidasse sa bénédiction tombée du plus haut des cieux et le complimenta personnellement, en précisant que son chef des armées savait bien s’entourer. Elle n’alla toutefois pas jusqu’à lui baiser le front, mais comme il racontait que ses pauvres parents cultivaient des bananes du côté de Patatra, elle lui fit la promesse de bien garder en tête qu’elle leur ferait cadeau d’une pompe à eau et même de l’âne chargé de la faire fonctionner. Le messager lui baisa plusieurs fois les sandales et comme il ne tarissait pas de ses remerciements, elle congédia tout le monde avant de retourner dans son palais aux toits fumants, y compris le pompier et l’expert de la Maât-Mout, lequel tourna les talons sans demander son reste, tout en pestant discrètement dans sa barbe sur la pingrerie et l’excès de froideur du monde politique.

 

Dans la ville de Nikzem située plus au nord, les soldats avaient fait main-basse sur la moindre denrée disponible, pour bien faire comprendre aux habitants qu’être patriote, c’est avant toute chose se serrer la ceinture. Les bidasses fiers de servir la reine avaient bien entendu pris quelque plaisir à coller au passage de bonnes tartes aux bouviers, avant d‘embrocher leurs bœufs ou de leur carotter toutes les amphores de miel qu‘ils avaient pu trouver. Le général Merdenkorinnanâr ne voulait rien savoir, voir ou entendre, alors il laissa faire. Bien sûr, même s’il avait passé sa vie à étriper des gens pour la gloire de l‘Egypte, en priorité des Hittites et des Hyksos, au fond de lui il savait désirer l’avènement de gens qui placeraient enfin l’humain au cœur de la société, mais il savait aussi qu’il lui faudrait alors attendre encore une centaine d’années et qu‘il serait mort bien avant. Il laissa donc sa troupe se délasser et trotta lui-même vers le meilleur troquet de Nikzem, afin d’y siffler deux ou trois canons de rouge d’un bon Burdigala coupé à l’eau de mer. Il avait hâte de prendre sa retraite et d’épouser une jeunesse de 13 ans, parce c’était l’antiquité et que dans un monde ou l’espérance globale de vie était de 25 ans, ce n’était pas les parents de la mioche qui allaient râler. La pauvre taverne était sombre et tristounette et son patron échoua à proposer au palais de son client prestigieux le parfum d’une autre bibine en provenance de ses amphores invendues. Aujourd’hui, on collait du bio partout et le pinard n’était pas franchement meilleur, mais Merdenkorinnanâr n’était pas du genre à brandir le panier militant. Manquerait plus que sa future petite épouse soit une adepte des nouvelles gyms ! Accoudé au comptoir, le militaire rabroua une petite pute fort jolie qui essayait en vain de l’aguicher, en remuant devant son nez son lourd collier en forme de tête de faucon, orné des hiéroglyphes figurant ses tarifs et ses prestations. Dans la rue, le gradé entendit tout à coup un remue-ménage insolite et les cris d’un de ses officiers qui tentait de maintenir l’ordre, mais ce n’était pas le barouf habituel produit par le pillage. Un fort coup de corne de zébu décida la sortie du général. Il vit alors qu’un riche train de litières tentait de se frayer un passage devant les étals désormais vides. Brisant les amphores et les gros vases en céramiques, bousculant les paniers alignés, un bel ensemble monocoque d’une luxueuse Simkâ GL rouge, avec suspension arrière et tirée par de solides porteurs entrainés par chaînes en bronze tentait de se frayer un passage difficile, compte tenu de la largeur conséquente de ses flancs. Assis sur la calandre, un esclave préposé au klaxon souffla de nouveau dans sa corne pour dégager la foule effrayée. Les litières qui suivaient affichaient également leur lot de porteurs de prix venus principalement de germanie et le design fameux de beaux châssis à bras rutilants. Sans nul doute, il s’agissait là d’un convoi princier. Amateur de belles litières, Merdenkorinnanâr adopta d’abord l’attitude hiératique du connaisseur admiratif, dont la curiosité fut immédiatement titillée par les porteurs musclés probablement gorgés au pseudo-méthanol assyrien, des athlètes de bolide puissants qu’un super-carburant transformait en véritables titans mécaniques. Précédés d’une fanfare qui tentait de couvrir la cacophonie ambiante de la rue, les porteurs qui valaient sûrement une dizaine de chevaux levaient à peine les pieds, marchant au pas en cadence et levant les bras pour répartir les poids en tenant compte des effets de la force centrifuge. Les gars baraqués fonctionnaient sans défaillance et vrombissaient de la bouche, en soulevant leur belle et lourde guimbarde, dotée sans aucun doute d’un embrayage hydraulique à l’eau minérale. Le général avait bien envie d’applaudir pour saluer leur formidable effort de flexibilité. Alors que la litière imposante malmenait devant elle les rebuts de bidonville au risque de les écraser, le galonné se demanda enfin qui pouvait se cacher dans l’habitacle fermé par de splendides rideaux de velours, sans craindre d’embouteiller avec autant d’audace le patelin au son des flûtes et des harpes ; avec en plus son lot de gamines vierges et endimanchées sur les deux ailes qui balançaient des fleurs. Le chef de l’armée égyptienne se planta donc d’autorité devant le cortège, pour demander les papiers du véhicule au chef des porteurs de la première litière. Dans le même temps, les yeux du général tombèrent sur le beau cartouche ornant la litière à couchettes baquet et qu’il déchiffra aussitôt sur le champ :

 

– Nom d’Anubis de bordel de merde, c’est la litière royale et personnelle de la belle-sœur royale Schrèptètnuptèt !

 

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Bon dimanche à vous.

 

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Message édité par talbazar le 04-11-2019 à 08:45:36
n°57707383
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Posté le 30-09-2019 à 10:34:56  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Roseline Ondation..

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Laurent Goutant..

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Message édité par talbazar le 30-09-2019 à 17:18:42
n°57716882
talbazar
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Posté le 01-10-2019 à 08:21:04  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Nadine Osaure.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Simone Aster.

 

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Message édité par talbazar le 01-10-2019 à 08:31:38
n°57721071
talbazar
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Posté le 01-10-2019 à 14:59:09  profilanswer
 

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Courrier des lecteurs.

 

Aujourd'hui : spécial problème/Verre franchissable.

 

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Message édité par talbazar le 01-10-2019 à 15:08:19
n°57729394
talbazar
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Posté le 02-10-2019 à 11:35:30  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Philippoderme Atologue.

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Henri Bouldingue.

 

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Message édité par talbazar le 02-10-2019 à 16:36:00
n°57739547
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 03-10-2019 à 10:56:28  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Jean Tasse.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Alex Ception.

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Message édité par talbazar le 03-10-2019 à 11:11:14
n°57747722
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 04-10-2019 à 08:26:15  profilanswer
 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Cécile Abique.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Thiérry Golpa.

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Message édité par talbazar le 04-10-2019 à 08:49:07
n°57759899
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 05-10-2019 à 15:10:05  profilanswer
 

Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Sandrine Dring.

 

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Salon des inventions
 
Fiches mémo des grands inventeurs.
 
Aujourd'hui : Yves Ress.

 

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Message édité par talbazar le 05-10-2019 à 15:29:50
n°57764515
talbazar
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Posté le 06-10-2019 à 10:39:47  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion - Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 52.

 

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Dans le château bancal de Camelote décoré de jolis lys des champs, on ribaudait. Au nom de tous les citoyens mâles de sa cité, le roi Vladimir le Gland tendait sa coupe incrustée de beau nielle en l’honneur de Mirlen et du chevalier Erald, avec le désir fort de s’échauffer la couenne à coup d‘un hypocras fameux. Tant il est vrai que la meilleure victoire est celle qui pousse en gloire un homme à se vaincre lui-même. Il torchait sans faiblir depuis trois heures et demie, sans montrer encore signe qu’il serait jeté bas, sous les yeux langoureux de sa glorieuse mie Berthe de Boucogne. Sourire aux lèvres, celle-ci coursait de même en grande merveille sur le chemin de la picole, car elle levait en effet haut sa corne, ordonnant qu’un page affairé la remplisse à mesure que sa reine la vidait. Démontrant l’allégresse d’une princesse aussi jeune que fougueuse, la bonne joie de l’ivresse courait sur son poil dru, puisqu’elle n’avait de femme que la perruque à tresses et les habits. Berthe maîtrisait pourtant sans doute au plus haut point la science fort amusante des petites levrettes, que coursent sans faiblir leurs couillus à oreilles dans l‘alcôve du terrier. En grande liesse, les courtisans glapissaient haut et fort dans la salle enfumée, à la santé des majestés et de leurs invités fionnais. Les convives dégrafaient en rigolant les larges boucles de leurs ceintures, pour mieux roter son saoul et faire passer les plats en quantité, qu‘il faudrait digérer. Les ripailleurs avaient mangé des œufs tout juste sortis du poulailler et nombre de poissons de lac venaient de trouver au milieu des écuelles une fin honorable. Les mets étaient parfois accompagnés des bons pâtés de lièvres doux, qu’on avalait à grandes bouchées, pour faire passer le rouge des coteaux que les petits servants soutiraient des barriques. Le chevalier Erald craignait un peu que, par idée fulgurante de noble pochetronne, Berthe de Boucogne ne vienne à sauter brusquement sur la nappe brodée, en ayant dans sa tête de vouloir danser nue. En attendant, piochant sans compter dans les gros brocs, le mage Mirlen et lui montraient un cœur joyeux, ils serraient tant eux-mêmes leurs hanaps de vin blanc pour rendre hommage à ce royaume, qu’ils en tiendraient demain les jointures de leurs doigts forcément douloureuses. Chaque plat était salué par le son des cloches argentines et les gens de l’assemblée coiffés de chèvrefeuille jacassaient de plaisir comme des lavandières pérorant au lavoir. Bien qu’il n’y eut dans ce château que des mâles et aucune jouvencelle, puisque Berthe de Boucogne ne l‘était pas vraiment. Attendu que les Amazonardes, une fois leurs pauvres proies masculines conquestées, se gardaient uniquement pour elles les rejetons femelles qu‘elles produisaient en retour de mêlée, maillotant les petites en jouant doctement les nourrices, afin de les élever elles-mêmes dans leur propre cité. Les gamines de Lukycuni de la vallée du Mikosik ne trouvaient pas ensuite de gagne-pain dans les jeux de l’aiguille comme bonnes damoiselles, mais dans ceux de l’épée qu’elles apprenaient à brandir fort tôt. Voilà pourquoi les gars de Camelote les traitaient de sales piches, car chaque guerre qu’elles leurs faisaient de temps à autre avait pour seul but de faire descendre leurs braies pour leur vider les burnes, à coups de caramboles et de torgnoles sanglantes, sans demander jamais le moindre des avis. En attendant, dans la salle d’honneur que cette pièce magnifique composoit, toute bien fermée entre les faibles courtines du castel des Frissons, chacun vidait chopines et picolait sans déconfier sa soif, comme le font les lits tumultueux dont se gorgent les petites rivières, car la plupart des noceurs en bons-vivants étaient encore fort loin de crier Kramouille-grâce.  

 

– Ainsi donc, maraudeurs de mes deux, lança Vladimir le Gland dans son étrange langue, en s’adressant aux invités. Si je pige bien les clapeteries bizarres que vous jactez dans mes esgourdes, vous auriez séjournés chez ces saucissonneuses du dimanche qui crèchent dans Lukycuni ?

 

– Si fait, mon sire, répondit poliment Mirlen après sa nouvelle lampée, et point n’en n’avons eus grand’peur, car elles furent fort charmantes à nous héberger. Voyez : nous avons même pu caresser en franchise d’amitié leurs beaux lévriers blancs. Pour qui veut les connaître, elles sont joyeuses et gaies, bien qu’elles soient également très habiles à vous tirer des flèches, je veux bien le reconnaître.

 

– Maudites soient-elles, lâcha Berthe en prenant voix aiguë, rien que des salopes affublées de leur guiboles en forme de manchon de chiottes, promptes à nous faire pisser de l’œil, voilà-tout ce qu’on peut en dire ! La seule chose qui semble amuser ces queutardes, c’est de coller des baffes à mes pauvres sujets, pour ensuite leur presser les joyeuses. A chaque fois qu’on a protesté contre leurs sales manies, les choses ont vite tournées pour les Frissons en vilaine eau de boudin.

 

– En voilà bien de durs sizains contés dans mes oreilles, malgré tout le respect que je dois à votre majesté, fit Mirlen, en reprenant du vin. Il se demandait surtout s’il n’oyait pas ici des dires de jalouse. L’aube vous guerroie lorsqu’elles vous apparaissent au-delà des créneaux, mais bien ai veü, moi j’affirmerai plutôt que la reine Daenerysk Lémésté de biauté la monjoie, qui ne demande en fait que vous ayez seulement repos. Tout est en fait dans l’art de quémander.

 

Un grand silence de méchante augure se fit par-dessus les tablées. Seul un homme garda la tête basse, il s’appelait le seigneur vicomte Benoît Taillenfer. Si douloureuses et dures que furent ses vieilles bastailles, qu’il en ornait à la main gauche, par signe de bravoure, deux de ses doigts coupés. Ce grand héros était lassé de guerre. Lui seul semblait goûter en grande merveille ce que jasaient les gens du Fion, car il rêvait dans son âme de rendre pour toujours sa paix à Camelote, en trouvant le moyen d’aborder les Amazonardes de manière plus sereine et sur une base d’amicale mesure. Il était donc très important pour sa cause que les étrangers soient venus chez lui afin de jouer les diplomates. En attendant, les suaves paroles de Mirlen n’avaient pas l’air d’enchanter grand-monde, tant était chevillée depuis trop longtemps la haine qu’inspiraient dans cette ville les femmes guerrières de Lukycuni. Le mage du Fion jugea plus prudent de tarir aussitôt son sujet, mais l’approbation muette de sire Benoit ne lui échappa pas. En levant haut son bras, Mirlen choqua sa coupe dans celle de chevalier Erald, à la santé des gens d’ici. Le vin en joie et les chants des trouvères firent qu’on oublia rapidement le sujet des voisines détestées, on reprit les agapes où elles étaient laissées. Les serviteurs firent circuler les entremets et puis, basculant ses fausses nattes blondes dans ses gestes endiablés, Berthe de Boucogne s’essaya même personnellement à faire des jongleries avec de petites balles en cuir, sous les premiers applaudissements du roi, avant de voir la foule entière déchaîner les bravos. Paroles, paroles, Vladimir le Gland n’avait pas l’intention dans la nuitée de les dires à une autre. Caramels, bonbons et chocolats et par moments, elle lui disait souvent qu’il ne comprenait pas, lui qui aimait pourtant le vent et le parfum des roses, que les mots tendres enrobés de douceur se posât sur sa bouche mais jamais sur son cœur. Ce qui bien entendu chantait très faux.
 
 Le lendemain, évidemment, il y eut gueule de bois et Camelote se réveilla dans la tourmente des tripes torturées. Moustaches tordues et l’échine brisée d’avoir par trop dansé, on s’étira dans la châtellenie avec le sentiment d’avoir tout de même passé une chaude soirée. Beaucoup auraient tiré la Nicolette, bien cent deux fois, s’il avaient eu quelque femme à s’attacher au cou pour leur secouer maçue, au lieu de ça, on avait roupillé comme des souches, sans même tomber jambières ni défaire les souliers. Parce que des amoureuses, dans Camelote, il n’y avait que nenni. Erald de Bavevieux, même lui, ne me li manbre de son non, ni set s’il est armez ou non, et il dut plonger sa tête toute entière dans un baquet d’eau froide, pour remettre son esprit à l’endroit. Mirlen vint le rejoindre dans le petit verger verdoyant et fleuri enfermé dans la cour, chassant des poules qui picoraient le bout de ses bottes comme si c’était du grain. Ensemble, ils allèrent voir aux écuries si leurs chevaux faisaient l’objet d’un traitement correct de la part des Frissons. Rassurés sur ce point, car les deux destriers portaient chacun les marques de la bienséance, les étrangers dirent bonjour en passant aux tonneliers, aux charpentiers, puis profitèrent ensuite avec langueur du bon matin pour remercier notre bonne Sainte Kramouille, laquelle collait en sa bonté un soleil généreux sur les remparts vides. C’est au détour d’un jardinet qui donnait fleurs en abondance à la petite société, que les deux hommes tombèrent sur sire Benoit, car le vicomte Taillenfer semblait en fait les rechercher. Il était seul et tout dans sa tenue prouvait la prestance d’une marque nobiliaire, il ne lui manquait plus pour le parfaire qu‘un cheval de combat, un écu de quartier et une lance dans la main. Il ne trahissait pas sur ses traits les fatigues de la nuit, car lui avait peu bu. Erald le vit venir de loin, et murmura dans l’oreille de Mirlen qu’il plaignait bien ce bougre, car ce preux devait bien souffrir de ses doigts perdus, au moment de satisfaire le curage de son nez. Ils gloussèrent et se turent, quand l’autre vint les trouver. Au moment de dire bonjour, tous trois levèrent la tête après l’usage des saluts, puisqu’ils virent Berthe de Boucogne en train de les regarder intensément par la fenêtre du donjon. Si du bas on constatait bien ses belles nattes blondes, son teint frais éclatant, sa bouche rieuse et son corps bien paré, ils virent aussi que son visage changea brutalement, en constatant que les trois autres parlementaient. Du coup, elle donna l’air d’en être plus que soucieuse, les rides qu’elle traça sur son front chagrin ne pouvaient plus permettre à personne d’en douter.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 11-10-2019 à 05:45:03
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