http://www.solidarite-palestine.or [...] 329-1.html
pas mal ça
Encore quelques réflexions supplémentaires sur la guerre (3) :
* La coalition
Aucun mot ne serait mieux approprié pour désigner la coopération des États-Unis et de la Grande-Bretagne contre l'Irak.
Dans The Devil's Dictionary de l'humoriste américain Ambrose Bierce, publié il y a une centaine d'années, «coalition» est défini comme (je cite de mémoire) la coopération entre deux voleurs tellement inséparables qu'ils ne peuvent pas voler une troisième personne l'un sans l'autre.
* Reconstructeurs
Le problème des Britanniques et des Américains est qu'ils sont possédés par une soif inextinguible de reconstruction.
Ils en rêvent jour et nuit. Ils ne peuvent pas penser ni parler d'autre chose.
Le problème est que, pour rebâtir quelque chose, il faut d'abord le démolir. Pas de destruction, pas de reconstruction.
Donc les Britanniques, avec les Américains, s'emploient à démolir l'Irak systématiquement. Missiles et bombes, tanks et artillerie, marine et infanterie - tout est utilisé pour faciliter la reconstruction du pays.
L'objectif principal de l'envie de reconstruire est, bien sûr, Bagdad. Une ville de cinq millions d'habitants, des kilomètres et des kilomètres d'immeubles et de rues, qui peuvent être reconstruits après leur démolition. Si Bagdad devient effectivement le lieu de combats de rues style Stalingrad, maison après maison, rue après rue, il y aura évidemment énormément à reconstruire.
* Les nouveaux Mongols
L'appétit pour reconstruire distingue les nouveaux conquérants de leurs prédécesseurs, les Mongols, qui ont conquis Bagdad en 1258, tué le calife (qui s'était déjà rendu) et détruit complètement la ville après avoir massacré tous les habitants, hommes, femmes et enfants.
Ils n'avaient pas amené avec eux des équipes de reconstruction, mais laissé l'Irak en ruines. Les canaux d'irrigation qui avaient été construits au cours de milliers d'années de civilisation étaient dévastés. L'événement est passé dans l'histoire comme l'un des plus grands désastres ayant touché le monde arabe.
À ce propos, deux ans plus tard, les musulmans annihilaient l'armée mongole à la bataille de Ein-Jalud (aujourd'hui le kibboutz Ein-Harod), un chapitre majeur de l'histoire palestinienne. C'était la fin des Mongols au Moyen-Orient, mais la région ne s'est jamais remise de la dévastation mongole jusqu'à aujourd'hui.
* Démolir et profiter
En dehors de l'objectif idéaliste d'aider le peuple irakien, il y a également un aspect plus matériel à la reconstruction. Ce sera un énorme business. Les grandes firmes américaines - certaines sont connectées aux paladins de l'administration Bush - se disputent déjà les dépouilles. Ils ne permettront bien sûr à aucun étranger de s'en mêler. Pour citer un dicton américain: «C'est aux vainqueurs qu'appartient le butin.»
Un aspect plutôt nauséabond: avant même que les villes irakiennes soient détruites, les grandes firmes se partagent déjà les bénéfices de leur reconstruction.
* Les humanitaires
L'idéalisme incorrigible des Anglo-Américains trouve aussi son expression dans l'aide humanitaire. Elle devient une obsession. L'aide humanitaire doit être apportée au peuple irakien, qu'il le veuille ou non.
Les habitants de Bassora ne veulent pas de l'aide promise? Ha, on va bien voir. Nous allons les bombarder, les affamer, jusqu'à ce qu'ils ouvrent leurs portes à l'aide humanitaire. On ne peut pas non plus aider le peuple tant que la ville est contrôlée par ce diable de Saddam - maudit soit son nom - dont le seul but est d'empêcher l'aide humanitaire de parvenir à son peuple.
La coalition pourrait, naturellement, larguer nourriture et eau - au lieu de bombes. On pourrait également décréter un court cessez-le-feu afin d'apporter l'aide humanitaire dans la ville assiégée. Mais cela a été interdit par Donald Rumsfeld, un autre grand humanitaire. Donc il n'y a vraiment pas d'autre alternative que de les bombarder jusqu'à ce qu'ils soient mûrs pour accepter l'aide.
* Maîtres et autochtones
En vue de l'aide humanitaire à venir après l'occupation de Bassora, les Britanniques ont distribué un film sur l'arrivée de l'aide dans un village sur leur route. Ils étaient tellement satisfaits de ce reportage qu'ils l'ont présenté des dizaines de fois à la télévision.
Voilà ce qu'il montre: un camion britannique apporte de la nourriture et de l'eau. Les villageois, principalement des femmes et des enfants désespérés, assiègent le camion. Ils mendient de l'eau. Les soldats distribuent de l'eau minérale à la foule excitée - une bouteille pour chaque enfant et femme. Après des jours de soif, un (un!) litre par famille.
Toute la scène est éc?urante. La faim et la soif de la population, coincée au milieu du combat, sont exploitées uniquement à titre de propagande. Les Britanniques redeviennent ce qu'ils ont toujours été en Irak: des maîtres coloniaux dominateurs faisant une faveur aux autochtones. Pour tout assisté arabe, c'est l'humiliation ultime.
* Voler pour celui qu'on a volé
Afin de tout financer - la destruction, la reconstruction, l'aide humanitaire et ainsi de suite - on a besoin d'argent. D'où viendra-t-il? Du pétrole irakien, bien sûr.
Donc il est du devoir humanitaire des Américains de s'emparer des champs de pétrole aussi vite que possible. Pas pour eux, jamais de la vie, mais pour les Irakiens. Pour les aider et faire le bien.
Même un enfant sait aujourd'hui que cette guerre est pour le pétrole. Les USA veulent s'emparer des réserves irakiennes, les deuxièmes plus importantes au monde (après les réserves saoudiennes), et contrôler les réserves voisines de la mer Caspienne, de l'Iran et du Golfe. Il semble maintenant que tout est au bénéfice du peuple irakien lui-même. Afin qu'il ait quelque chose à manger et des médicaments pour les enfants.
Tout ceci après les sanctions de l'ONU, imposées à la demande des Américains, qui ont pendant de nombreuses années provoqué la malnutrition généralisée, la mort par la famine et la maladie de centaines de milliers d'enfants et la destruction de l'infrastructure irakienne - le tout au nom de «pétrole contre nourriture».
* Oh, Orwell, Orwell
Qu'aurait-il dit sur cette guerre?
Dans son livre 1984, il faisait dire au ministre de la Vérité des phrases du genre «la guerre est paix», «la liberté est esclavage», «l'ignorance est pouvoir». Il serait tout à fait à sa place dans cette guerre.
L'occupation est libération, la guerre est devoir humanitaire, renverser un gouvernement étranger est changement de régime, la famine est aide humanitaire, lutter contre un envahisseur étranger est servir un tyran, bombarder une ville est servir le peuple.
La vérité est toujours la première victime de toute guerre. Mais il semble que dans cette guerre-ci ce soit encore pire que d'habitude. Mensonge, hypocrisie, désinformation et lavage de cerveau s'en donnent à c?ur joie. Des généraux quatre étoiles répètent comme des perroquets des slogans manifestement mensongers, des journalistes vedettes du monde entier les acceptent avec empressement, les chaînes de télévision dans le monde les relaient avec zèle et les médias israéliens s'en délectent.
Bon appétit.