kley a écrit :
Merci beaucoup pour ce résumé détaillé, très intéressant !
J'ai toutefois quelques questions qui en découlent ou qui font partie de mes interrogations actuelles :
- quid de la longévité ? Les égyptiens avaient peut-être plein de problèmes de santé liés à l'alimentation, mais ils vivaient assez vieux hors infections et maladies, non ?
Ca rejoindrait les études sur l'alimentation des centenaires, s'ils étaient tous carnivores, ça se saurait...
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Hum je doute que la longévité de personnes souffrant de diabète et de problèmes coronariens soit exceptionnelle et le truc c'est qu'ils avaient tous l'air d'avoir plus ou moins des problèmes au vu des momies étudiées et des statuettes. Après on n'a pas vraiment un état-civil précis de l'époque, sauf pour les pharaons dont on sait qu'ils ne vivaient pas tellement vieux puisque Ramsès II avec ses 66 ans fait un peu figure d'exception.
Ce qu'on sait principalement de l'alimentation des centenaires c'est ce qu'ils ne mangent pas : produits ultra-transformés composés majoritairement d'huiles végétales, de farine, de sucre et d'acide gras trans.
La longévité n'est d'ailleurs pas seulement une affaire d'alimentation : l'environnement et le mode de vie influent aussi largement sur elle. Vivre entouré de sa famille et de ses amis, au sein d'une communauté solidaire (village, vallée, petite île) , boire une eau de bonne qualité, respirer un air pur, avoir une vie active (marche, travaux des champs) mais sans stress (pas de deadlines ou d'objectifs de ventes) et sans excès (pas d'ultra-trail 2 fois par mois!) ça joue énormément. Ensuite un facteur qui doit jouer à fond c'est la génétique et il est très difficile à évaluer. De plus n'oublions pas que l'étude des centenaires est une étude observationnelle par essence et qu'elle ne peut donc absolument rien démontrer. Il faudra donc se contenter d'émettre des hypothèses... On a même vu des centenaires qui avouaient avoir fumé jusqu'à leurs 70 ans. Peut-on en conclure que fumer peut augmenter l'espérance de vie?
Par ailleurs de nombreux biais ont pu être introduits dans les études sur les centenaires : si on prend le cas d'Okinawa, la principale étude qui vantait les mérites du régime d'Okinawa a été faite peu après la fin de la 2nde guerre mondiale.
Pour ceux qui ne connaissent pas trop, Okinawa ça a été un enfer, il y a eu des combats acharnés, beaucoup de morts des 2 côtés. C'est peut-être d'ailleurs ce qui aurait contribué à décider les américains d'utiliser la bombe A.
Après la guerre il ne restait plus beaucoup d'animaux vivants et reconstituer un cheptel ça prend du temps. Il s'est donc trouvé qu'au moment de l'étude, fortuitement, les habitants d'Okinawa consommait peu de viande et se rabattaient vers une alimentation de subsistance où la patate douce avait la part belle. Je ne dis pas que la patate douce soit à proscrire ou à consommer sans modération, je dis juste que si un centenaire d'Okinawa a consommé beaucoup de viande pendant 90 ans et peu de viande avec beaucoup de patates douces pendant 10 ans il conviendrait d'être prudent avant d'attribuer son exceptionnelle longévité à une faible consommation de viande (ou aux bienfaits de la patate douce).
Pour Okinawa on dira que c'était la faute à pas de chance, encore qu'un scientifique curieux aurait pu demander aux habitants s'ils avaient toujours mangé comme ça. Mais on peut évoquer aussi des biais qui auraient pu être introduits, volontairement, ou inconsciemment (soyons gentils), par des végétariens convaincus. Parce que cela correspondrait mieux à leur vision des choses, ils pourraient minimiser les apports en protéines et graisses animales des populations étudiées ou omettre d'étudier un groupe similaire à celui de leur étude mais qui, bien que s'alimentant différemment, obtiendrait les mêmes résultats. C'est un peu le genre de biais (on appelle ça en langage savant un biais de confirmation) qu'on constate avec les trop fameuses Blue Zones. Dans le cas des Blue Zones on met par exemple en avant la longévité des adventistes végétariens mais, étrangement, on oublie de s'intéresser aux mormons. Ces derniers ont pourtant un mode de vie très similaire aux adventistes, vivent aussi vieux que les adventistes, mais ils n'ont pas eu la bonne idée d'être végétariens et donc ne méritent de figurer dans une étude vantant les mérites d'une alimentation sans viande.
Après l'étude des centenaires c'est bien mais les résultats de l'ensemble d'une population pour une région donnée c'est mieux car on change vraiment d'échelle pour la taille des échantillons (les centenaires ça reste quand même un petit nombre de personnes par rapport au reste de la population).
Savez-vous où l'espérance de vie est actuellement la plus longue?
Réponse :
Savez-vous où est-ce qu'on mange le plus de viande par habitant?
Réponse :
Spoiler :
et bien oui vous l'aviez deviné, c'est aussi Hong-Kong. |
Des tribus qui ne mangent pratiquement que de la viande et des produits animaux ça existe ou a existé (inuits, masaïs... ) d'autres qui mangent beaucoup de produits d'origine animale (hazdas) on en trouve aussi.
Des civilisations ou des sociétés entières qui n'auraient consommé que des végétaux et bien il n'y en a tout simplement pas et il n'y en a probablement jamais eu.
Ha si j'oubliais il y a une exception (pour ceux qui ont vu la vidéo ) : les australopithèques robustus mais ceux-là ont disparu.
kley a écrit :
- OK les humains sont plus faits pour manger de la viande selon l'alimentation de nos ancêtres (même maintenant, je regardais un docu sur un chasseur-cueilleur sorti de la forêt amazonienne, qui racontait que pendant sa vie dans la jungle, il ne mangeait quasiment que des animaux -- il fallait le voir citer toutes les espèces qu'il mangeait --, mais une fois hors de la jungle et sédentarisé, il mangeait surtout du manioc... pas vu si ça avait un impact sur sa santé)...
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Le manioc ce n'est vraiment pas top je te le confirme, ça contient des glycoside cyanogènes, il faut vraiment bien le préparer pour ne pas s'empoisonner avec! J'imagine que le chasseur-cueilleur sait cela et qu'il a appris à préparer son manioc correctement. C'est dommage mais d'ex-chasseurs-cueilleurs ne peuvent plus vraiment se nourrir comme leurs prédécesseurs. Ils doivent maintenant se rabattre sur un mix diète ancestrale (quand c'est encore possible) / produit de subsistance (manioc, patates, patates douces...) / produits industriels. On peut voir les résultats de ce changement d'alimentation chez les inuits et les aborigènes en particulier.
kley a écrit :
...mais quid de l'impact environnemental si 7 milliards d'humains devraient manger de la viande et du gras animal pour leur santé ? Déjà que la situation actuelle n'est pas terrible... surtout si là c'est présenté par des chercheurs américains WASP qui ont les moyens de suivre l'alimentation qu'ils préconisent...
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La question environnementale est essentielle et je vais tenter d'y répondre brièvement, mais je pense qu'il faudrait y consacrer un livre.
L'agriculture ultra-mécanisée et industrielle n'est pas la solution. Bien au contraire, elle nécessite l'usage sans cesse croissant d'engrais chimiques, de pesticides (insecticides, fongicides, herbicides bref des poisons pour l'environnement... et pour nous), fait la part belle aux OGMs et est aussi grosse émettrice de carbone. Comme si ce n'était pas suffisant elle entraine aussi et surtout un appauvrissement progressif des terres jusqu'à, à terme, les transformer en un sol mort où aucun organisme ne vit et plus rien ne pousse. La terre devient de plus en plus claire et se transforme en une fine couche de sable qui ruisselle à la moindre pluie. Au final on obtient la roche à nue ou un désert et même les engrais chimiques n'y permettront plus la moindre culture.
L'élevage pratiqué intelligemment lui est tout le contraire : pas besoin de tracteurs consommant du gasoil pour labourer, pas besoin d'engrais chimiques (la bouse de vache c'est bien mieux), surtout pas de pesticides, de fongicides et d'herbicides, encore moins besoin d'OGMs, un bilan carbone positif (plus de carbone stocké dans les sols) et surtout il régénère les sols. La partie du sol riche en éléments organiques devient plus profonde, plus foncée (presque noire), plus riche en organismes vivants et mieux à même d'absorber l'eau et d'empêcher ainsi le ruissellement (et la désertification qui en découle) grâce à la présence des racines et des galeries creusées par les vers.
Evidemment dans ce type d'élevage il s'agit de faire consommer de l'herbe aux ruminants, pas de cultiver à côté des céréales et du soja OGM pour les donner à manger aux bêtes. D'abord ce n'est pas leur nourriture naturelle, ça les rend malades (d'où la nécessité d'utiliser des antibiotiques avec le risque de produire des souches résistantes). Et surtout cela n'est pas très écologique. On compare souvent à tort la quantité de nourriture fournie par un boeuf avec la quantité de nourriture qui pourrait être utilisée par des humains (céréales et soja) si l'animal était uniquement nourri de céréales en disant que ce n'est pas efficace parce qu'il faudrait par exemple 1kg de céréales ou de soja pour faire 100g de viande. Mais ce calcul est totalement faux et propice à induire les gens en erreur. Rappelons qu'à près de 90% la ration alimentaire des bovins est constituée d'herbe, de fourrage et de sous-produits issus de l'agriculture, tous non comestibles pour nous. Même dans les pays où l'on pratique l'élevage intensif dans les feed-lots à grand renfort de soja transgénique, l'étape feed-lot ne constitue en fait que la dernière phase d'engraissage avant l'abatage.
En fin de compte les ruminants transforment pour nous, avec l'aide des bactéries de leur système digestif, une plante pauvre en nutriments et riche en fibres indigestes en un aliment riche en protéines de qualité et en bonnes graisses (des acides gras saturés, des acides gras monoinsaturés et une petite quantité d'omega6 et d'omega 3 en proportions équivalentes, exactement ce qu'il nous faut). A quoi bon s'embêter à faire pousser des céréales à grand renfort de pesticides et d'engrais quand on sait qu'on n'en retirera jamais un produit comparable à la viande en terme de qualité nutritionnelle et que cela sera toujours plus coûteux que de laisser pousser de l'herbe, qui a, on l'oublie trop souvent, le gros avantage de pousser toute seule?
Il faudrait aussi comparer les qualités respectives des protéines fournies. Non seulement il y a moins de protéines dans les céréales que dans la viande mais en plus dans le blé la qualité des protéines est médiocre (pour être gentil) et il convient de diviser par deux (très schématiquement) la quantité qui sera réellement utilisée (100g de blé c'est 12g de protéines mais cela correspond à 6g de protéines issues de viande soit environ 30g de viande). Et ça c'est sans compter les problèmes intestinaux et les réactions immunitaires que peuvent provoquer les protéines du blé (gluten, gliadine, agglutinine du germe de blé) ou les dérèglements hormonaux provoqués par les phyto-estrogènes du soja.
Last but not least, rappelons que la plupart des terres ne se prêtent de toute façon pas à l'agriculture mécanisée alors que l'élevage y est possible : on ne va pas faire pousser du blé dans les alpages, ni du maïs (gros consommateur d'eau) sur des terres semi-arides et encore moins faire passer des moissonneuses dans une garrigue caillouteuse là où les chèvres et les moutons peuvent se nourrir sans peine.
Pour l'aspect économique, je crois que si on continue dans la voie actuelle, en appauvrissant les sols, en transformant les terres les plus fertiles en désert, en faisant une confiance aveugle à ceux qui poussent à l'usage des OGMs et des pesticides et en abandonnant les pâturages, je crois que c'est là que nous aurons vraiment des problèmes pour nourrir tout le monde.
kley a écrit :
- Que penses-tu du cétogène vert si tu en as entendu parler ?
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Et bien je ne connaissais pas, je regarderai un peu plus en détail pour voir ce que c'est et te dire ce que j'en pense.
Je connaissais par contre la diète cétogène vegan, ça peut sembler un peu inconciliable, mais, sur le papier au moins, c'est jouable.
Après il faut quand même être capable de manger des quantités importantes de fruits à coque comme les noix de macadamia et les noix du Brésil.
Personnellement j'adore les noix de macadamia mais mes intestins semblent beaucoup moins apprécier...
J'ai peur qu'à long terme il soit difficile de maintenir une telle diète : trop de fibres, trop de fodmaps, trop de lectines, ça doit être usant pour le système digestif.
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