Bon, puisque l'on débat du tour de tête de Jules César, je propose une pause
En effet, aujourd'hui, j'aimerais vous parler de ceci :
Pourquoi est-ce que des gens viendraient se faire prendre en photo avec une tombe parmi tant d'autres d'un cimetière américain ? En plus, avec un nom de latino qui aurait passé le mur ?
Alors parlons de Roy Benavidez, un hispanique qui aimait son drapeau si fort qu'il en a retrouvé l'usage des jambes
Et il ressemblait à ça :
Et il a mal commencé dans la vie.
En effet, Roy naît en 1935 dans une famille de pauvres fermiers hispaniques du Texas. Déjà, ça commence mal, mais très tôt, Roy perd son père de la tuberculose. C'est ballot et... ah ben tiens, sa mère aussi. Roy se retrouve ainsi très tôt pauvre, orphelin, et en plus pas très blanc dans le Texas d'avant-guerre. Ah, oui, et en plus, il a aussi du sang indien.
Autant dire que Roy commence sa partie en hardcore
Mais ce n'est pas fini. Car bien que recueilli par un oncle, il doit aider à subvenir aux besoins de son frère et de ses cousins, et fait quantité de petits boulots, dont cireurs de chaussures. Le tout en allant à l'école, donc quand tu cires les grolles des papas de tes camarades après la classe, autant dire que Roy a sa photo sous la définition de "harcèlement scolaire". À tel point qu'il finit par quitter l'école pour aller bosser à plein temps, et un jour, découvre un endroit où tu peux être payé et avoir un toit pour pas trop cher : l'armée.
En plus, après ce qu'il avait vécu, le sergent instructeur qui lui gueulait dessus, ça le faisait marrer
D'abord dans la réserve, Roy se montre très motivé à sortir de la merde, et passe dans l'active, avant de carrément demander à rejoindre les paras. Ce qu'il fait. Et comme pour lui, les paras, il trouve ça un peu mou, il décide de rejoindre les forces spéciales. Et y parvient là encore. Ça tombe bien parce qu'il y a une guerre en cours du côté du Vietnam. À ce stade, Roy ressemble à peu près à ça :
Roy arrive donc en 1965 au Vietnam et ça va chier
Sauf qu'en fait, avant d'avoir pu faire grand chose, il part en patrouille, et paf, marche sur une mine. Désolé Roy, la guerre est finie, tu rentres au pays
"Remboursez Monsieur Stukka, votre histoire est nulle ! Le mec n'a rien fait !" me direz-vous.
Soyez patients et lisez un peu
Roy se retrouve donc à l'hôpital avec un diagnostic clair : il ne marchera plus jamais.
Sauf que quelqu'un va commettre une terrible erreur : on l'installe dans la chambre des paralysés... avec pour seule distraction la télé
Roy peut donc voir sur le petit écran des babas qui disent "Ouaiiis heu la gueeerre là, c'est trop nul, c'est pas nos affaires, de toute façon, on est un pays de fachos, là ". Pire encore, et comme le racontera Benavidez, non seulement il doit se taper des heures de discours pacifistes, mais en plus, on brûle des drapeaux américains.
C'en est trop pour Roy
Le margoulin se tire de son lit en rampant, va se coller à un mur sous le regard stupéfait de ses camarades, et essaie de tenir debout. Il en chie comme un âne, racontera qu'il en a pleuré, mais ses camarades se mettent à l'encourager. Et toutes les nuits, Roy va répéter ce petit rituel : alors qu'il a interdiction de quitter le lit, il va s'exercer pour se remettre debout. Jusqu'au jour où l'infirmière rentre dans sa chambre et...
"Monsieur Benavidez, c'est l'heure de votre suppositoire
- Viens essayer de le mettre "
Benavidez est debout. Et personne ne va lui mettre de suppositoire. C'est lui qui veut retourner en distribuer. Il demande donc à retourner au Vietnam, et y parvient en 1968
"It's a flesh wound" - Roy Benavidez
Et ça tombe bien, puisque le 2 mai 1968, le sergent des bérets verts Roy Benavidez est à la messe dans sa petite base américaine à remercier Djizousse de lui avoir rendu ses jambes pour botter des culs. Lorsque des hélicoptères approchent dans un sale état : ce sont des appareils d'évacuation qui viennent de tenter sans succès d'aller chercher une patrouille de 12 hommes entourée par un bon millier de communistes vietnamiens. Les appareils ont subi un sévère mitraillage lorsqu'ils ont tenté d'approcher, et sur leur radio, Benavidez peut entendre les gars au sol qui hurlent qu'ils sont foutus.
"Décollez
- Mais sergent Benavidez, on vient à peine de revenir et on vous dit que...
- Dieu m'a rendu mes jambes pour les coller au cul d'autrui, alors si tu veux pas que je commence par le tiens... "
Et Roy part.
Seul
Roy Benavidez : le seul mec qui utilise l'hélicoptère d'évacuation pour se faire évacuer des zones paisibles
Seul, pas tout à fait, car à part l'équipage de l'hélicoptère qui lui explique que non, ça va, merci, ils ne l'accompagneront pas au sol, Roy s'équipe tout de même de trois choses :
- Sa bite
- Son couteau
- Du matériel médical
Puis il se fait dropper non loin de la zone des combats
Benavidez entreprend alors de rejoindre la patrouille, qui a de nombreux blessés. Pour ce faire, il doit traverser l'encerclement vietnamien. Et les soldats sur sa route.
Les Vietnamiens sont très surpris lorsqu'arrive dans leur dos un gros chicanos qui se met à user de sa bite et de son couteau sur tout ce qu'il croise, et pas toujours dans l'ordre
Benavidez finit par se faire repérer, et les communistes l'arrosent... et touchent. Mais ce n'est pas grave : officiellement, il a déjà perdu les jambes une fois sur une mine, alors quelques balles de plus ou de moins... et notre sergent court jusqu'à la position de la patrouille, où il prend les choses en main.
Il prend le commandement, ordonne aux gars de couvrir telle ou telle direction, et réorganise l'unité dont il devient le chef, malgré les balles et shrapnels qu'il a déjà reçus
Ses nouveaux copains ne discutent pas, leur nouveau sergent n'a pas l'air d'être un rigolo
Il aide à soigner les blessés, puis couvre l'unité avec un fusil ramassé, puis un AK "emprunté" à un soldat ennemi (l'histoire ne dit pas s'il eut la bite ou le couteau en échange), pour permettre à ses gars de filer vers une zone plus sûre. Puis, il envoie lui-même les fumigènes pour signaler aux appareils d'évacuation de venir chercher ses gars. Oui, qu'il va aider à charger, bien sûr, comme sur ce dessin le représentant :
Sauf qu'alors qu'il fait ça, il se prend une grenade, une balle... et l'hélicoptère d'évacuation est abattu.
Benavidez, salement amoché, s'effondre, les Vietnamiens sont heureux
Les communistes peuvent approcher de l'appareil où il y a encore des Américains en vie. Par l'arrière, là où les types à bord ne peuvent pas couvrir. Malin !
Sauf que Benavidez se relève
Et tue les ennemis qui menaçaient l'équipage de l'hélicoptère. Cela fait, il couvre ses camarades pour les aider à sortir de l'appareil abattu, et tout ce petit monde se dirige vers une autre zone où ils pourront être - à nouveau - évacués.
Par ailleurs, Benavidez a récupéré une radio. Et s'en sert maintenant pour diriger les avions qui viennent envoyer du napalm sur les margoulins qui n'arrêtent pas de l'embêter
Finalement, un autre appareil vient récupérer tout le monde, alors que Roy reste à couvrir.
Oui mais les Vietnamiens en ont marre. Et chargent !
L'un d'entre eux parvient ainsi à planter Benaviez. La baïonnette en plein dans la bonhomme. C'est bon, il est mort
Sauf que... le Vietnamien constate que Benavidez vient d'attraper son arme. Et commence à se la ressortir du bide.
Le Vietnamien :
Benavidez :
Et devinez qui avait encore son couteau ?
Benavidez laisse son couteau dans le Monsieur, et ne repart qu'avec sa bite dans l'hélicoptère. Où on constate les dégâts reçus durant 6 heures (oui, 6 heures contre 1 000 mecs) de combat :
- 7 balles lui ont fait de gros bobos
- 1 est passée près de son coeur avant de ressortir
- 28 shrapnels se sont logés un peu partout
- Il a reçu un coup de baïonnette
- Un coup de crosse de fusil lui a défoncé la mâchoire
- Il n'a plus de poumon droit.
On ne va pas se mentir : il meurt avant d'être arrivé à la base
Le médecin de la base confirme sa mort
Attendez, un ami vient à son chevet et... ah non, il est bien mort
Le médecin referme donc le sac sur son corps, lorsque soudain, il se prend un vieux glaviot sur la truffe. Qui a fait ça ?
Hé bien c'est Benavidez. Qui n'est pas mort, mais complètement paralysé, il est juste parvenu à faire ça pour signifier qu'il était en vie
Envoyé en urgence à l'hôpital, on veut lui donner la Medal of Honor, mais comme la procédure est longue et qu'il mourra avant la fin à coup sûr, on ne lui donne que la Distingued Cross Service, plus rapide à décerner.
Sauf qu'évidemment, Roy s'en tire
"Bien joué Benavidez, vous avez bien mérité cette médaille !
- Boh, c'était facile, j'avais mon couteau et ils n'étaient que 1 000."
En 1973, ses anciens supérieurs insistent : il a survécu, donnez-lui sa Medal of Honor ! Mais non, maintenant, c'est trop tard, et puis il n'y a pas de témoins : toute la patrouille est morte par la suite.
Et puis en 1980, des journaux en parlent... et quelque part en Australie, un mec tombe sur l'article : c'est l'ancien radio de la patrouille, que tout le monde pensait mort, qui lit que merde, on refuse la médaille au mec qui lui a sauvé les miches ! Il rentre au pays illico presto et va faire office de témoin pour confirmer tout ce que les rapports disaient déjà.
Ce n'est donc qu'en 1981 que Benavidez reçoit sa Medal of Honor, des mains de Ronald Reagan, qui bien qu'acteur de métier, dira que si Hollywood en faisait une histoire, personne ne voudrait y croire.
"Qu'est-ce qui vous a motivé à tant d'héroïsme pour votre pays, Sergent ?
- Faire chier les Zadistes, Président."
Il est mort en 1998, parce que même avec un poumon et plus de métal dans le corps que sur la poitrine durant les cérémonies, Benavidez n'était pas du genre à se coucher, non mais ho.
Voilà pour aujourd'hui