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" Le racisme anti-italien, dans le sud de la France, était équivalent au racisme anti-belge dans le Nord du pays, et pour les mêmes raisons. Les Italiens étaient affublés de surnoms déshonorants par leurs homologues provençaux : "bachins", "babis" ("crapaud" en provençal et... en langue piémontaise), "christos" et "macaronis". Le terme "rital" était alors inusité. Plusieurs événements dramatiques motivés par la haine des étrangers ont ensanglantés les campagnes de Provence et terni de manière honteuse la réputation de nombreux Provençaux : en juin 1881, lors de ce que l'on nommera les Vêpres marseillaises, des émeutes anti-italiennes provoquèrent la mort de trois personnes, tandis que vingt-et-une autres furent blessées. La police procéda à deux cents arrestations.
Les journaux locaux jetaient souvent de l'huile sur le feu. On pouvait lire dans Le Mémorial d'Aix : « Les Italiens commencent à pousser trop loin leurs prétentions. Ils nous traiteront bientôt en pays conquis (...). Ils font une concurrence à la main-d'oeuvre française et drainent notre argent au profit de leur pays (3). » Le journal Le Jour, quant à lui, n'hésitait pas à parler de « cette marchandise nuisible, et d'ailleurs frelatée, qui s'appelle l'ouvrier italien ». (4) Comment ne pas voir sous la plume de ces journalistes haineux un véritable appel au meurtre, ou, au minimum, une justification des atrocités commises ?
Les émeutes d'Aigues-Mortes du 17 août 1893
Le pire événement lié à la haine anti-italienne s'est déroulé le 17 août 1893 à Aigues-Mortes (Gard), en Camargue (5).
Dès le matin de cette sinistre journée, des litiges éclataient sans cesse entre ouvriers français et italiens dans les salins de la Fangouse, au sud des murailles de la ville. Les rapports de police évoquent « un ouvrier italien qui reproche à un ouvrier français de son équipe de ne point charger suffisamment sa brouette, (...) un ouvrier français qui se plaint d'un ouvrier italien manoeuvrant intentionnellement sa brouette de manière à la frôler à chaque instant au talon... » Des chicaneries en somme qui vont peu à peu exacerber des sentiments haineux de part et d'autres. A la pause de midi, quelques Français jettent du sable sur les Italiens. Un Italien va laver son mouchoir dans un baquet d'eau potable. Un Français lui en fait le reproche. «Je m'en fous de toi et de tes camarades», rétorque l'Italien. Un bagarre éclate alors. Sept Français sont blessés (dont un a reçu trois coups de couteau).
Vers deux heures, le juge de paix d'Aigues-Mortes se rend sur les lieux avec trois gendarmes et parvient à ramener tout son monde à la raison. Le travail reprend. L'excitation des esprits reste pourtant à son comble.
En ville, les habitants ont appris les événements de la Fangouse.
Une bonne partie d'eux décident de s'associer à des ouvriers des salins et entament une chasse à l'Italien. Des centaines de personnes s'affrontent dans les rues, déchaînant une violence sans limite. Puis la foule décide de sortir des remparts de la ville et d'aller régler leur compte aux Italiens qui se trouvent toujours dans les salins. L'affrontement a lieu à proximité du mas Méjan."