Citation :
L'Union pour la Méditerranée naît sous de bons augures
PARIS (Reuters) - Syriens, Palestiniens et Israéliens ont multiplié dimanche les gages de bonnes volonté en guise de cadeaux de naissance de l'Union pour la Méditerranée (UPM), qui se veut vecteur de paix et de prospérité.
Les 44 pays représentés au sommet inaugural de l'UPM ont porté sur les fonts baptismaux cette nouvelle alliance Nord-Sud née à l'initiative de la France sous les meilleurs augures.
"A travers nous, près de huit cent millions d'humains se retrouvent en paix", a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, en ouvrant le sommet au Grand Palais. "A travers nous, un rêve est en passe de se réaliser, celui d'un projet collectif de développement économique, de paix, de droit et de solidarité: l'Union pour la Méditerranée."
Nicolas Sarkozy s'est quant à lui montré ravi de voir des ennemis réunis pour la première fois autour de la même table.
"Ça ne veut pas dire que tous les problèmes sont résolus, mais ça veut dire que la Méditerranée appartient à tous", a-t-il déclaré en recevant ses homologues palestinien et israélien.
Le président syrien Bachar al Assad, qui siégeait pour la première fois aux côtés d'un Premier ministre israélien, a accepté samedi de normaliser ses relations avec Beyrouth lors d'une rencontre avec le président libanais Michel Souleïmane.
"Nous pouvons dire que le Liban, qui était une zone de turbulence, de guerre, est devenu une zone pacifiée où les Libanais, et seulement les Libanais, ont le droit de déterminer leur propre avenir", a expliqué Bachar al Assad, qui a longtemps été accusé par la France de vouloir déstabiliser le Liban.
ACCORD PROCHE, DIT OLMERT
Pour Kouchner, l'ouverture d'un dialogue indirect entre la Syrie et Israël sous l'égide de la Turquie et les perspectives de paix entre Palestiniens et Israéliens ouvertes par la conférence d'Annapolis sont autant de signes positifs.
Le président palestinien Mahmoud Abbas et le Premier ministre israélien Ehud Olmert ont fait assaut d'optimisme à l'issue d'une réunion dimanche avec le président français.
Selon lui, "nous n'avons jamais été aussi proches de la possibilité d'arriver à un accord comme nous le sommes aujourd'hui", a dit le Premier ministre israélien.
"Nous sommes tout à fait sérieux, nous sommes sérieux pour parvenir à cette paix", a ajouté Mahmoud Abbas.
Quarante-quatre pays sont représentés -les Vingt-Sept de l'Union européenne, les 13 membres du processus de Barcelone lancé en 1995 pour rassembler les deux rives de la Méditerranée ainsi que la Bosnie, la Croatie, Monaco et le Monténégro.
Même le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, qui se méfie d'une initiative proposée par un pays qui ne veut pas de la Turquie dans l'Union européenne, a fait le voyage de Paris.
Il a d'ailleurs obtenu l'engagement de Nicolas Sarkozy que la présidence française de l'Union européenne se comporterait de manière "loyale" et ouvrirait les chapitres de la négociation qui sont techniquement prêts, sans faire d'obstruction.
Le seul véritable absent sera le chef d'Etat libyen, Mouammar Kadhafi, violemment opposé au projet, qui s'est fait représenter par son ministre des Affaires étrangères, tandis que le roi Mohammed VI du Maroc est remplacé par son frère.
Le sommet de Paris devait lancer quelques grands projets, comme la dépollution de la Méditerranée, les "autoroutes de la mer", la coopération en matière de protection civile pour la lutte contre les catastrophes naturelles, le développement de l'énergie solaire, l'éducation et l'aide aux PME.
PARTENARIAT NORD-SUD
Même si ces projets étaient pour beaucoup déjà prévus, tout comme l'objectif d'une zone de libre-échange pour 2010, la nouveauté viendrait des sources de financement diversifiées, et notamment de l'implication du secteur privé, ainsi que des coopérations au cas par cas pour éviter trop de bureaucratie.
La principale innovation est d'ordre institutionnel pour que le Nord ne donne pas l'impression de dicter sa volonté au Sud, mais qu'il s'agit d'un véritable processus géré en commun.
Ainsi, l'UPM sera pilotée par deux co-présidents, un du Sud et un du Nord: le président égyptien Hosni Moubarak a déjà course gagnée pour la coprésidence réservée au Sud et, au moins dans un premier temps, Sarkozy sera le premier président pour le Nord parce qu'il assume pour l'instant celle de l'UE.
La localisation du secrétariat qui sera chargé de piloter l'UPM ne devrait pas faire l'objet d'un accord à Paris - la France pense à Tunis mais Malte et le Maroc sont également candidats - et un "comité de direction" composé de représentants du Sud et du Nord basé à Bruxelles lui sera adjoint.
Les problèmes qui ont constamment empêché le processus de Barcelone ne disparaîtront toutefois pas par enchantement et le succès de l'UPM dépendra lourdement des progrès qui pourront être faits dans le processus de paix au Proche-Orient.
Le projet de déclaration du sommet le démontre clairement.
Toutes les références à "la fin de l'occupation" des territoires par Israël, la création d'une région "libre d'armes de destruction massive", notamment nucléaires, au respect des engagements pris selon les conventions internationales de protection des droits de l'homme sont entre crochets et devraient disparaître dans la version finale.
L'appellation - "Processus de Barcelone: Union pour la Méditerranée" - qui a été retenue démontre son ambigüité.
La France qui voulait initialement limiter le périmètre de l'UPM aux seuls 22 pays strictement riverains de la Méditerranée, plus le Portugal, la Jordanie et la Mauritanie, a dû se soumettre aux exigences de l'Allemagne, principal investisseur de l'UE dans le Sud de la Méditerranée.
Les Vingt-Sept seront désormais impliqués.
|