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RUSSELL COUTTS EXPLIQUE SON DÉPART DE TEAM NEW ZEALAND
Le skipper d'Alinghi, Russell Coutts, ainsi que le tacticien Brad Butterworth, ont révélé aujourd'hui les circonstances de leur départ de Team New Zealand en mai 2000.
AUCKLAND - 31 janvier 2003 - Lorsqu'ils ont quitté Team New Zealand, Russell Coutts et Brad Butterworth ont fait la promesse, à la demande de Tom Schnackenberg et des nouveaux administrateurs de la société, de ne pas rendre publiques les problèmes qui ont précédé leur départ. Cette semaine, ils ont obtenu le feu vert de John Risely, l'un des administrateurs de Team New Zealand, pour s'exprimer librement.
"En déposant toutes les cartes sur la table, nous espérons pouvoir de nouveau concentrer l'attention du public sur le sport et l'action sur l'eau," a dit Russell Coutts.
"Je suis conscient de l'impact qu'a eu notre décision de partir sur la population néo-zélandaise. A l'époque, Brad et moi avions été impliqués depuis plus de deux ans dans des négociations ardues avec les responsables du conseil d'administration de Team New Zealand, et de l'organisation de la défense de la Coupe de l'America. Nous nous étions précédemment mis d'accord sur le fait que lorsque Peter Blake partirait de l'équipe, Tom Schnackenberg, Brad Butterworth et moi-même prendrions en charge la direction de l'équipe. Ce n'est qu'à une étape très avancée des négociations que nous sommes arrivés à la conclusion qu'il était fortement improbable qu'un tel accord - permettant le transfert des responsabilités - soit atteint.
"Selon nous, ceci est dû à l'attitude obstructive du président Richard Green et de l'un des gestionnaires du trust, John Lusk, et à l'hostilité dont ils ont fait preuve face à l'éventualité d'une prise en charge du pouvoir par nous-mêmes. Tous deux partenaires du cabinet d'avocat Russell McVeigh, Green et Lusk étaient les gestionnaires les plus influents du trust et ils contrôlaient Team New Zealand à l'époque.
"Nous voulions prendre en charge la gestion des sociétés impliquées dans la Coupe de l'America, mais les gestionnaires du trust de l'époque ont refusé de nous montrer des comptes détaillés ou des contrats existants. Nous avons eu le sentiment qu'ils ne voulaient pas véritablement traiter avec nous.
"Ainsi, après plus de deux ans de tractations, et quelques semaines après que nous ayons gagné la Coupe, les exigences suivantes nous ont été imposées:
-Accepter la responsabilité de dettes contractées par le trust, alors que les informations concernant l'envergure de ces dettes nous ont systématiquement été refusées.
-Accepter la responsabilité inhérente à l'imposition éventuelle du trust, sans que le trust ne nous informe de la somme que cette responsabilité éventuelle représenterait. A l'époque, les gestionnaires s'inquiétaient du fait que le statut de trust à caractère caritatif puisse être remis en cause, auquel cas nous serions responsables du paiement de la dette.
-Accepter des restrictions importantes sur les arrangements commerciaux à venir, notamment une restriction de notre capacité à signer des contrats avec des sponsors sur une période de 12 mois.
"A cette époque, Brad avait déjà été impliqué dans la marche de Team New Zealand depuis 1986. Quant à moi, j'étais membre de cette équipe depuis neuf ans. Nous avons pris la décision de partir car nous étions convaincus que sans un changement d'attitude radical de la part des gestionnaires du trust, la formidable organisation que nous avions mise en place au sein de Team New Zealand n'avait plus aucune chance de continuer à évoluer ou même de se maintenir. Nous pensons que nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir pour le bien de notre équipe, mais que nous n'avons pas été en mesure d'instiguer ce changement d'attitude de la part des membres du conseil d'administration.
D'un point de vue personnel, nous avons atteint un point où nous sentions que nous devions chercher une alternative.
Au moment de défendre la Coupe de l'America en 2000, explique Russell Coutts, ni lui ni Brad n'envisageaient de naviguer pour un autre syndicat.
"En 1997, Peter Blake nous a annoncé qu'il quitterait Team New Zealand après la Coupe de l'America 2000 afin de travailler pour la " Cousteau Society ". Il a rendu cette information publique dans le courant de cette même année. Le départ de Peter signifiait que nous devions planifier la succession de la gestion de Team New Zealand. Les équipes de navigation, de design et de construction des bateaux souhaitaient que Tom Schnackenberg, Brad et moi-même prenions la relève. Fin 1999, nous avons obtenu une garantie personnelle de la part de Richard Green et des PDG du 'club des cinq', les cinq sponsors de Team New Zealand, que " si nous gagnions la Coupe de l'America et que nous la gagnions bien ", ils assureraient à une transition en douceur de la structure de direction en notre faveur."
"En novembre 1997, et à la suite de difficultés initiales relatives à l'établissement de cet accord de transfert des responsabilités, nous avons engagé le juriste Jim Farmer QC. Ce dernier a travaillé avec nous pendant plus de deux ans afin de tenter de finaliser un accord avec les gestionnaires du trust en place, pendant que nous nous concentrions sur la défense de la Coupe. Dans un premier temps, Richard Green et John Lusk, les gestionnaires avec qui Jim Farmer traitait, se sont montrés coopératifs. Farmer n'est pourtant pas parvenu à faire aboutir les discussions, et ceci malgré une bonne entente avec les deux administrateurs. Jim nous a confié que Green et Lusk refusaient tout accord impliquant le remplacement des gestionnaires en place par de nouveaux gestionnaires dans la structure de trust existante. Par ailleurs, la nouvelle structure de trust allait hériter de conditions difficiles : les valeurs actives devraient être vendues, et plusieurs millions de dollars de dette discrétionnaire devraient être payés aux sponsors existants. Jim nous a en outre informés du fait que ses nombreuses demandes écrites sont restées sans réponses. Il nous a dit ne pas comprendre pourquoi un accord, qui nous aurait donné des assurances sur notre futur, ne pouvait pas être atteint à ce moment-là."
"Team New Zealand a gagné la coupe le 2 mars 2000. Le 30 mars, les contrats de tous les membres de l'équipe sont arrivés à expiration. Passé cette date, nous n'avions plus d'accord avec les gestionnaires du trust. Ils n'étaient pas parvenus à garantir un avenir à l'équipe, telle qu'elle existait à l'époque, et à assurer sa continuité."
"En conséquence, les marins et les autres membres de l'équipe, qui avaient des obligations financières et des familles à soutenir, se sont trouvés confrontés à un avenir incertain. Aucun engagement ferme ne leur avait été donné quand au renouvellement de leurs contrats. A ce stade, plusieurs d'entre eux ont accepté des offres avec d'autres syndicats. L'équipe aurait dû réunir des fonds et engager son futur personnel. Nous n'avons eu de cesse de demander des réunions avec les gestionnaires du trust pour finaliser un accord de gestion comme promis. Ils n'étaient pas prêts, nous ont-ils dit, et ont repoussé la date de la réunion. Pour nous, leur attitude signifiait qu'ils étaient réticents à nous laisser jouer un rôle de direction, et qu'ils voulaient freiner le processus de transition malgré l'urgence évidente."
"Evènement symbolique de l'attitude qui prévalait à l'époque : les serrures de la base de Team New Zealand ont été changées du jour au lendemain, infligeant à des marins qui avaient contribué au succès de Team New Zealand depuis plus de dix ans, parmi lesquels Brad Butterworth, l'humiliation de se trouver enfermés à l'extérieur de la base.
"Quand nous avons finalement réussi à organiser une réunion avec les gestionnaires du trust, ils nous ont proposé des conditions inacceptables.
Nous pensons qu'ils nous cachaient des informations d'une importance vitale. Ils avaient de nouvelles exigences financières considérables et surprenantes. Ils ne semblaient pas comprendre la nécessité urgente de résoudre la situation pour que l'équipe reste ensemble.
"Les conditions de leur proposition étaient notamment les suivantes :
-La restitution d'une dette de plus de 5 millions de dollars néo-zélandais aux sponsors existants.
-L'acceptation de toute responsabilité inhérente à l'imposition éventuelle du trust, sans que le trust ne nous informe de l'envergure de cette responsabilité éventuelle. Comme dit plus haut, les gestionnaires s'inquiétaient du fait que le statut de trust à but non lucratif soit remis en cause, et si une telle remise en cause avait lieu, nous serions donc responsables de la dette.
-Le paiement d'une somme de 2 millions de dollars néo-zélandais pour fournir des fonds au trust à caractère caritatif de Team New Zealand, afin de lui permettre de faire des dons à des oeuvres de charité et ainsi justifier son statut.
-La garantie que nous ne chercherions pas de sponsors pendant 12 mois.
-La garantie que nous ne négocierions qu'avec le 'club des cinq', le groupe des cinq sponsors, selon les conditions qui existaient déjà.
"La confiance que nous avions accordée aux gestionnaires du trust s'est effritée lorsque le 4 mars 2000, 2 jours après avoir défendu victorieusement la Coupe de l'America, Richard Green et la direction de Team New Zealand, ont convenu d'une conférence de presse sans nous en informer, pour annoncer le Protocole pour la Coupe de l'America 2003. Nous nous attendions à être informés de l'annonce publique d'un document d'une telle importance. Lors de cette conférence, Richard Green a clairement laissé entendre qu'il ne souhaitait pas confirmer de futurs arrangements de gestion.
"Peu de temps après, nous avons appris que l'engagement qu'ils avaient pris de ne vendre aucun actif en cours de négociation avait été violé puisqu'ils avaient vendu le voilier NZL 38 et le travel lift utilisé pour la mise à l'eau des bateaux.
"A la mi-avril nous avons fait le bilan de notre situation. Nous n'avions pas de contrats. L'équipe de gestion n'avait engagé aucun membre clé du personnel. Certains marins et designers s'étaient déjà engagés auprès d'autres syndicats. Ayant gagné la coupe, nous étions extrêmement déçus par cette situation. Quelques jours plus tard, nous avons commencé à sérieusement envisager de quitter Team New Zealand. Nous en avons immédiatement informé Tom Schnackenberg et John Risely. Le 4 mai, John Risely, Brad et moi-même nous sommes réunis à New York avec Ernesto Bertarelli et Michel Bonnefous. Après cette réunion, Brad et moi avons décidé d'annoncer officiellement notre départ de Team New Zealand. Nous avons immédiatement informé Tom Schnackenberg, John Risely, Peter Menzies et Ralph Norris de cette décision.
Informations sur la structure de Team New Zealand - mars 2000
1.1 Team New Zealand Trust (un trust à but non lucratif) contrôlait toutes les entités de Team New Zealand. Ses gestionnaires étaient Tom Clarke, Roger France, Richard Green, Jim Hoare et John Lusk.
1.2 Le Trust était à la tête de Team New Zealand Trustee Limited. Ses directeurs étaient Clarke, France, Green, Hoare et Lusk.
1.3 La société de trust était à la tête de Team New Zealand Limited, la société chargée et nommée par le RNZYS pour défendre la Coupe de l'America et dont les directeurs étaient Clarke, France, Green, Hoare et Lusk.
1.4 Team New Zealand Limited était à la tête de AC2000 Limited, la société chargée de l'organisation du Match de la Coupe de l'America et dont les directeurs étaient Clarke, France, Green, Hoare et Lusk,
1.5 Russell Coutts, Brad Butterworth et Tom Schnackenberg ont réuni un nouveau groupe de gestionnaires éventuels du trust pour la Coupe 2003, comprenant Ralph Norris, Peter Menzies et John Risely.
Suite au départ de Russell Coutts et de Brad Butterworth, Ralph Norris et Peter Menzies ont donné aux anciens gestionnaires du trust un ultimatum de deux heures pour accepter leurs conditions. Les anciens gestionnaires ont accepté cet ultimatum.
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