"On veut des motos !
- Ouais, et des boobs !
- Et des images étonnantes, c'est le titre du topic quand même !
- Ouaiiiis !
"
J'entends bien. Je vais donc utiliser mes grands pouvoirs d'homme de synthèse (
) parce si je commence à créer un topic dédié, vous pouvez être sûr que dans une semaine, je suis de retour en tant que lurker ici et que je ne m'occupe guère plus dudit topic. Bien, allons-y donc.
Hooo... mais qu'est-ce que c'est ?
"Ah, je ne sais pas mais moi je trouve ça drôlement étonnant !
- On veut une explication !
- Et des boobs !
- Ouaiiiis !
"
Bien, alors ceci est une moto. Ah, si, vous en avez demandée une, maintenant, vous l'avez. Je suis sûr que vous vous attendiez à de grosses Harley Davidson, mais on va reprendre du début. Pourquoi utiliser des deux roues en guerre ? Sachant qu'une jeep, c'est plus stable, tout terrain aussi, et que ça peut transporter plus de choses ? Retour en arrière.
Mais qu'est-ce que c'est que ce bordel ?
"C'est décidément super étonnant par ici.
- Ça manque juste de boobs !"
Patience. Et allons-y.
A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, on se demande bien que faire de cette belle invention qu'est le vélo. Et puis quelqu'un a une idée : et si ça remplaçait le cheval dans les unités montées (essayez d'imaginer la garde républicaine à vélo, ça a quand même un peu moins de panache
) ? Parce que les unités montées, c'est chouette, mais quand tout le monde descend de l'animal pour aller courir les bois le fusil à la main, il faut bien des gens pour garder les chevaux. Et bien ça fait autant de soldats en moins dans le régiment (on comptait environ 1 soldat pour garder 10 chevaux, donc 10% de puissance de feu en moins).
Alors que le vélo, c'est super : ça ne mange rien, ça ne pète pas devant le général ni ne laisse de vieux étrons derrière lui, et c'est beaucoup plus docile.
L'image étonnante ci-dessus, c'est donc l'une des premières idées de véhicule armé de l'histoire en 1888: deux vélos attachés ensemble et une mitrailleuse pour déplacer rapidement une grosse puissance de feu. Fallait juste penser à bien mettre les freins, quoi
. Autant dire que c'était moyennement pratique et que l'idée est retournée dans les cartons. Du moins, jusqu'à ce qu'on invente le vélo automoteur, plus connu sous le nom de motocyclette voire moto, qui pouvait aisément tracter une carriole avec mitrailleuse, ou plus simplement l'installer sur une side-car pour amener de la puissance de feu là où il y en avait besoin.
Par exemple, ici :
Idéal pour inciter les gens à ne pas vous doubler sur la route des vacances.
A l'époque, on roulait sans casque, mais avec une mitrailleuse : le concept de sécurité routière était encore un peu abscons.
Tout le monde était donc très excité à l'idée de faire la guerre avec des motos (et non, on ne tirait pas depuis le side-car en route, ou alors c'était qu'on avait pas envie de toucher quoi que ce soit) parce que ça avait l'air super
et puis là pas de bol, on invente la guerre de tranchées, et du coup, les motos ne sont plus très utiles, c'est donc dégueulasse d'ainsi pourrir le groove de moards innocents
pour combler leur amour de la belle mécanique, de l'action, et de la vitesse, on proposa à nombre de compagnies de devenir...
... équipages de tanks
Autant dire que le vent dans les cheveux à 4 kilomètres heures, c'était pas pareil. "Moards en colère", comme on dit. Mais bon.
Bon alors, du coup, pas de deux roues ? Mais si, mais si
Déjà, parce que vélos (si !) et motos pouvaient servir à évacuer les blessés dans des zones où les ambulances avaient un peu de mal à se rendre, à faire passer des ordres ou porter les messages, et d'ailleurs, Mesdames, sachez que l'on trouvait justement déjà des femmes chevauchant fièrement des motos pour porter les messages (désolé Meve, je n'ai pas trouvé "la grande histoire des cupcakes", vous serez déçue). Vélos et motos permettaient aussi d'amener un officier, un médecin ou même un peu de ravitaillement là où il y en avait besoin, vite et bien. Et surtout : il pouvait ravitailler en pigeons.
Parce qu'à une époque où la radio portative, c'était pas vraiment ça, pour communiquer, on utilisait encore le pigeon (encore durant la seconde guerre). Sauf que le pigeon ne faisant pas d'aller/retour (il se contente de rentrer chez lui même si vous lui expliquez deux heures durant comment aller au bureau tabac vous chercher des clopes) à chaque fois que vous en lâchez un, il faut vous en ramener un autre ! Il n'était donc pas rare de voir des vélos ou motos aller ravitailler des chars en pleine avance.
Bon, après, le pigeon, c'est quand même un peu pourri.
"Kiki ! Kiki on se fait arroser sévère, tu DOIS prévenir le général que l'ennemi a plus d'artillerie que prévu !
- Rourou
- Tu as compris Kiki ? On a besoin d'un tir de soutien maintenant où on est tous fichus. On compte sur toi Kik, va vole !
.
- Rouuu
"
Sauf qu'il était assez commun de retrouver Kiki en train de picorer du pain auprès d'une petite vieille sans avoir délivré son message, voire avoir carrément déféqué sur la casquette du général avant de repartir faire des trucs de pigeon, comme faire des bruits bizarres à 5h du matin, harceler les enfants avec des gauffres, ou regarder Cyril Hanouna.
Du coup, le vélo étant aussi un outil militaire, c'était un bon argument de vente pour faire sérieux.
"C'est pas assez étonnant !"
Ah, vous êtes difficiles. Tenez, une photo d'un régiment cycliste exhibant fièrement son matériel au Chemin des Dames. Et en couleur, ce qui est étonnant.
"La photo est floue, remboursez !"
Okay, j'en mets une plus jolie.
Il est pas beau ce poilu qui prend son déjeuner place royale à Reims en 1917 ? Hein ? Ho que si ma bonne dame.
"J'attends toujours mes grosses motos et mes boobs, M. Potter. Ai-je une tête de cycliste ?
"
C'est donc l'heure de la pause NSFW. On y trouvera des boobs dans la thématique.
Revenons à nos affaires. Le début du XXe siècle est aussi l'occasion de se motoriser pour les bandits comme pour la maréchaussée : vous connaissez les brigades du Tigre, maintenant, sachez que les motos ont aussi fait partie de l'aventure, puisque pratiques pour les poursuites.
Ici par exemple, vous aviez un joli bouclier fixé à l'avant de la moto, et un étui pour la mitraillette Thompson. Et avec ça, roulez jeunesse ! Bon, tirer en route, c'était toujours un coup à avoir des balles perdues dans tout le quartier, mais en même temps, c'était tellement classe alors écoutez Madame, arrêtez de gueuler, et puis bon, vous vous en serviez vraiment de ce bébé ?
Du coup, au début de la seconde guerre, les moards sont contents : c'est une guerre de mouvement !
alors là les copains, on va bien rigoler ! Et en effet : les motos servent d'éclaireurs, même si les jeeps leur font de la concurrence. Mais elles font plein d'autres choses ! A commencer par chiens de berger pour convois : contrairement aux voitures, elles peuvent circuler sur le bord de la route sans problème, et transmettre les ordres, vérifier que tout se passe bien (c'est pour ça que l'on voit souvent des policiers militaires à moto), organiser... et donc faire des allers et retours tout le long d'une colonne en marche. La plupart des groupes ont donc un camion surnommé "le garage" chargé de ravitailler les motos, de leur fournir des pièces de rechange, bref, de s'assurer que les petits gars du bord de route puissent continuer à aller voir ce qu'il se passe devant le convoi, dans le convoi, et derrière.
Les messages étaient d'ailleurs parfois écrits sur papier de soie : le motard les transportait dans sa bouche et pouvait ainsi les avaler tranquillement en cas de risque de capture, et ce sans avoir mal au bidou, voire mieux encore, en ayant plein de bonnes fibres pour faire de beaux cacas
C'est ce qu'on appelle être organisé. Les moards se paumaient parfois la nuit puisqu'ils ne devaient pas non plus transporter de cartes trop précises, et se retrouvaient régulièrement derrière les lignes ennemies par accident. Et quand on voit le bruit que fait une Harley, mieux valait se dépêcher parce que ça ne se confondait pas vraiment avec une moto allemande
et à l'inverse, il ne fallait pas se faire tirer dessus en rentrant à la maison. D'ailleurs, il semblerait que ce soit en prévision d'un conflit que les véhicules français aient, un peu avant la guerre, eu l'obligation de s'équiper en phares jaunes : comme ça, la nuit, on savait sur qui tirer ou non.
Pour la petite histoire, en 2002, la flotte américaine répète ses exercices pour l'invasion à venir de l'Irak. Et pour ce faire, c'est un général de Marines retraité, Paul Van Riper, qui a le rôle du chef des armées irakiennes, soit presque rien. Sauf que Riper est de la vieille école et sait combien les motos sont précieuses : il n'utilise donc pas son matériel de communication moderne qu'il sait écouté, et envoie ses ordres à moto à ses unités avancées. Résultat ? La flotte américaine perd un porte-avions et deux portes-hélicoptères d'entrée de jeu, des milliers de soldats et dans la confusion, la plupart de ses autres navires se font aussi couler. Ordre est donc donné de recommencer l'exercice, mais en oubliant les motos et obligeant Riper à utiliser ses radios et autres communications. Riper parvenant encore à contourner les règles, les arbitres de l'exercice finissent par carrément donner eux-même les ordres, et Riper se retire de la manoeuvre, un peu dégoûté, mais pas mécontent de son boulot pour autant
Vous avez tout suivi ? Alors revenons à l'image étonnante du début de ce bien long post.
Repooooost !
La moto, c'est drôlement pratique, mais ça se largue moyennement par parachute. Or, pour équiper paras, commandos et résistants français, il a bien fallu improviser ! La moto que vous voyez là se nomme la "Welbike", vous pouvez d'ailleurs en trouver un exemplaire au musée de l'armée de Paris. Le principe est simple : c'est petit, ça se démonte et se plie facilement pour rentrer dans un container largable. Le bidule avait une autonomie de 145 kilomètres, pouvait rouler à 50 kilomètres heures et avait un réservoir d'un peu moins de 4 litres. Avec ça, vous n'aviez pas la grande classe du motard, mais vous pouviez faire le zazou dans le maquis
"On peut ravoir des boobs ?"
Non.
Je vais juste terminer en ajoutant que ce concept fonctionnait aussi pour les vélos pliants, qui n'ont pas été inventés par nos amis jeunes fougueux des réseaux sociaux, qui, à les croire, auraient d'ailleurs tous été résistants. Alors que bon, hein, si les Allemands reviennent, ça va être vite plié (hohoho).
"Dites-nous où fous cachez la famille Tauffenberg !
- Jamais ! Vous pouvez brûler mon chèche et tirer sur mes poils de barbe, ou même me proposer tout l'or du monde, je ne parlerai pas !
- Et si che fou propose un succès Steam exclusif ?
- Un succ- non... non, je ne peux pas, je ne dois pas accepter !
- Ch'achoute 10 followers sur Twittère.
- Je... d'accord, d'accord ! Ils sont dans la cave de mon voisin, j'ai caché la clé sous mes CDs de Lana Del Rey ! Choppez les vite !"
Bref. Le vélo pliant était donc largable, mais surtout, facilement transportable par la troupe, même dans un espace restreint (comme une barge de débarquement ou un avion).
Parachutisme et cyclisme : tant de sports extrêmes d'un coup.
Dans la résistance, tout devait de toute manière être facilement dissimulable et transportable. Que ce soit une moto pour aller faire de la reconnaissance, ou un vélo qui permettait en sus de cacher aisément un message dedans (il suffisait de les glisser dans les tubes du cadre) sans compter que même des enfants et ados pouvaient circuler sur un vélo sans paraître suspects, et donc faire passer des messages. Juste pour la petite histoire, même les pistolets étaient tout petits :
Petit mais peu puissant et sans mécanisme de rechargement, c'était pratique principalement pour récupérer une "vraie" arme. Et on vous expliquait comment la recharger à l'aide d'un guide digne d'Ikea.
"Ho, c'est étonnant ! "
Et je vous passe les manuels pour apprendre à faire des bombes déguisés en livret des meilleurs discours d'Adolf Hitler pour passer pour un bon citoyen
Une dernière image pour la route pour clore le sujet :
Et avec ça, raconter vos vacances avait tellement plus de panache.
Voilà, j'ai essayé de satisfaire tout le monde : vélos, motos, boobs et images étonnantes (enfin je crois)