raouf a écrit :
Superbe film, du très grand Clint à son plus haut niveau.
Grande complexité et profondeur dans le propos tenu. Ce film est une espèce de synthèse, qui peut être vu par tout le monde, mais est encore plus intéressant pour ceux qui connaissent bien l'oeuvre de Clint.
On peut voir dans ce film le thème de la fin de l'Amérique blanche, de la montée en puissance des minorités, et comment les américains blancs traditionnels vivent cette mutation majeure.
Le personnage est le même que celui de l'inspecteur Harry, mais vielli. Comme toujours chez Clint : un personnage des classes populaires.
Ce héros incarné par Clint est porteur des valeurs éternelles de l'Amérique, dans leur grandeur et dans leur ambiguité.
Ces valeurs, l'Amérique blanche ne les incarne plus, elle est en déclin : déclin symbolisé par la chute de l'industrie automobile (les enfants ont une Toyota -japonaise- et non une Ford). Ses enfants lui sont devenus étrangers. Qui va prendre le flambeau de la continuité de ces valeurs ? Ces enfants en sont incapables. Clint montre que ce sont les nouveaux immigrants qui sont eux seuls capables de prendre le flambeau, comme cela a toujours été le cas en Amérique. Ce sont eux qui apportent la force vitale qui manque aux américains installés.
On notera un coup de pate aux idées progressistes molles : le jeune garçon qui n'assume pas ses valeurs et essaye de faire copain copain avec ses agresseurs est traité avec le plus grand mépris.
Voir dans ce film un simple plaidoyer antiraciste est à mon avis réducteur, comme toujours chez Clint, on a un mélange d'idées "progressistes" et "réactionnaires", le tout formant une vision très forte et passionnante.
Ce n'est pas un reniement du personnage de Dirty Harry : un affinement certes (la violence n'est plus le seul recours), mais il y a une véritable continuité entre le Clint du début et celui de la fin du film : à la fin il ne se rapproche pas des asiatiques parce qu'il a renoncé à ses valeurs, mais au contraire parce qu'il pense que c'est en eux qu'elles vont s'incarner et survivre. D'où la passation de pouvoir symbolisée par la transmission de la Grand Torino.
Un film tout à fait en phase avec l'élection d'Obama en somme.
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