Salon des inventions :
Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar.
Aujourd'hui : La doudoune anti-mouches.

Revoilà les beaux jours et leurs escouades de mouches. Ces sales bêtes reviennent pour orbiter en nombre autour de vos appétissantes tartines de confiture et vous dégouter d’avaler vos succulents bols de lait de chèvre. Sans parler du pourrissement de vos safaris avec guides et porteurs. Dans nos appartement modernes, à cause des mouches importunes, il n’est pas toujours facile pour un père de famille de cohabiter avec son bétail et ses adolescents. Hélas, chacun sait qu’il est très difficile d’éloigner des boissons gazeuses ces insectes volants, diptères du sous-ordre des brachycères et de l'infra-ordre des muscomorphes (ou de l'ancienne dénomination des cyclorrhaphes). Ces maudits intectes sont partout et vont partout, protégés par l’incroyable impunité que leur offre la vitesse de leur unique paire d’ailes. Du coup, c’est à vous d’écraser lorsqu’elles arrivent pour vous sucer, puisque les ordures n‘attirent pas que les rats. Face à cet état de choses, vous baissiez les bras, plein de rage. Non pas pour les écrabouiller, mais parce que vous manquiez de bons moyens, malgré votre courage et votre tenacité. Désormais, grâce à cette formidable doudoune anti-mouches, ces saletés vont maintenant voir ce qu’elles vont voir !
Face aux mouches, il est nécessaire de garder son enthousiasme et son envie de se battre, sinon vous êtes perdus. Celui qui frappe vite ira plus loin, un point c’est tout. Notre uniforme spécialisé va vous offrir enfin un service très apprécié qui fera de vous un tueur de mouches prestigieux. Soyons clairs, vous débarraser des mouches et leur imposer le silence de la tombe, n’est-ce pas le rêve de toute votre vie ? Une fois enfilée cette merveilleuse doudoune, vous vous mettrez littéralement dans leur peau, ce qui prouvera votre ruse et votre intelligence, pour mieux mener la saine guérilla que facilitera cet équipement complet, par imitation. Vouloir mettre les mouches en cage ne sert à rien, non, pas de sentimentalisme vis à vis de ces monstres volants, il faut les tuer ! A la fois tendance et confortable, auquel se rajoute un incontestable effet Revival 80's, la doudoune anti-mouches est un véritable vêtement de mode qui permet à 100%100 d’atteindre ce but. Cette tenue de combat transforme votre silhouette en un corps cylindrique en boule, identique à celui de l‘ennemi, et la capuche recouvre intégralement votre tête, tout en lui proposant une grande liberté de mouvement, avec de gros yeux globuleux, comme une vraie tronche de mouche. Pour parfaire l’illusion, le tissu irisé dans lequel est taillé la doudoune matelassée imite à la perfection la couleur particulière du thorax de la Calliphoridae, pour laquelle vous ne serez rien d’autre qu’un nouvel ami. De plus, le vêtement est imprégné d’une solution chimique phéromonale pour tromper la mouche, laquelle vous prendra sans faute pour un partenaire sexuel potentiel. Le temps qu’elle se rende compte de sa méprise, vous l’explosez littéralement, d’une seule frappe ajustée de la solide tapette en plastique souple complétant votre uniforme. Un simple passage de balayette terminera l’opération. Dans votre dos, le battement continu des deux ailes en nylon mues par quatre piles R6, non seulement trompera habilement les insectes sur votre identité véritable, mais permettra en plus une heureuse auto-ventilation de l’équipement, puisque les mouches attaquent l’été, lors des grosses chaleurs, ce qui rend cette doudoune anti-mouches extrêmement confortable. Un kazoo optionnel permettra d’imiter à la perfection, avec la bouche, le vrombissement incessant de ces petites saloperies.
Un vol de mouche vient de s’abattre dans la cuisine. Vous enfilez et zippez prestement votre combinaison, puis vous réalisez en toute quiétude votre approche. Alors que les sales bestioles se livrent sur la table à leur orgie sacrilège, vous brandissez avec sérénité votre tapette. Les mouches se retournent, bien sûr, mais elles vous prennent pour une copine, sans se douter de rien, puis elles replongent tranquillement dans leur festin répugnant. C’est le moment opportun pour brandir votre arme, fermement tenue par le manche. Bien sûr, effrayée peut-être au dernier moment par le déplacement de l’air, votre proie déboussolée par le leurre essaie de filer, maudissant les faux-amis, mais il ne faudra pas deux secondes pour lui faire payer cette habitude confortable. Trop tard pour elle, c’est gagné ! Ainsi de suite, vous éliminez avec une extrème facilité la tribu toute entière. Equipé de votre doudoune anti-mouches, c’est l’heure d’une saine gymnastique, sans tension nerveuse ni musculaire, sans jamais connaitre le stress d’un échec. Voilà pour vous de vrais vacances sportives, au cours desquelles vous organiserez de riantes compétitions familiales, bien à l‘abri dans vos utiles camouflages.
NB : cette doudoune ne convient pas pour chasser les moustiques et les cafards, mais une combinaison à leur ressemblance est également disponible.
Revue de presse
Aujourd'hui : Une gabegie financière.

Salon des inventions :
Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar.
Aujourd'hui : Le tourniquet bronzant.

C’est en observant un poulet sur sa broche que le pro-fesseur Talbazar a eu l’idée de ce fantastique tourniquet bronzant, lequel permet un splendide bronzage uniforme de tout le corps. Comme ce poulet, l’estivant présente au premier jour de ses congés une blancheur hideuse, mais comme lui, après avoir tournoyé toute la journée sous les rayons du soleil, un hâle magnifique recouvrira sa peau qu‘il viendra sublimer, après seulement quelques heures de sieste passées sur le tambour rotatif. Alors, comme une vague recouvrant toute la plage, inévitablement, montera le crépitement des applaudissements. Voilà enfin un engin qui certifie à tous de sortir du lot des ploucs et des parisiens à la pâleur de lait. Symbole lointain des terres riches en céréales où le soleil cognait sur les serfs affairés, le bronzage est désormais l’apanage des glandeurs de l’été, sans lequel il est extrêmement difficile de niquer. Tenez vous-le pour dit ! C’est une bonne raison qui poussera à l’achat d’un tourniquet bronzant, mais attention, comme dit le proverbe : si le soleil n’a pas lui à midi, tout le jour sera pluie. Alors qu’hirondelle volant haut, le temps sera beau. De toute façon, c’est perdre son temps que de se plaindre du temps. Notre appareil sera donc indispensable pendant les vacances, afin de mieux vous fondre au milieu des marins, des paysans, des bédouins et des montagnards que vous rencontrerez. Un incognito louable pour croiser ces indigènes qui en ont trop souvent ras le bonbon des touristes, même s‘ils ont choisi d‘en faire l‘élevage saisonnier. Quoiqu’il en soit, même soigneusement bronzé, gardez-vous toujours d’interpréter hâtivement un regard bienveillant. Attendez toujours quelque temps avant de parler mariage avec les chevriers, au risque de paraître insensible.
D’un poids utile de 500 kg, la forme circulaire du tourniquet vous permet de le faire très facilement rouler sur sa tranche et de trouver votre place idéale sur les plages. Sans plus penser à cette querelle idiote avec votre conjoint pour une sombre question d’aisselles à laver, vous prenez place de tout votre long sur le confortable tambour du tourniquet. Une simple pression sur l’interrupteur, et vous voilà entrainé à trois tours/minute sous le soleil ardent, dont les rayons complaisants et gratuits vont uniformément vous griller l’épiderme, pour un hâle zéro défaut. Ainsi perché à cinquante centimètre du sable, vous êtes en plus protégés des mégots, des papiers gras, des tampons hygiéniques, des bouteilles cassées et autres immondices abandonnés par les bronzeurs normaux. La réussite de cet équipement est telle que notre invention équipe déjà 642 stations balnéaires et 45 centres de médecine ayurvédique, qui la proposent en location, à la journée ou pour quelques heures. Le tout pour une somme ridicule, voir une poignée d’oursins dans quelques pays émergents. Insuffisant pour faire cuire un steak sur sa selle, le tourniquet bronzant est cependant étudié pour donner satisfaction à la cougar la plus exigeante. Au rythme lent de sa rotation, le résultat obtenu dépassera n’importe laquelle des séances d’UV, et pour beaucoup moins cher, c‘en est même la conclusion sympathique. Il est certain que vous en deviendrez un adepte enthousiaste. La lenteur du déplacement rotatif permet à tous de devenir peu à peu rose, puis orange, mais lorsque la chair se décortiquera, il sera forcément temps de prévenir les parents. Surtout il faut prendre garde à vérifier les heures de marée, sous peine de se retrouver flottant au large des côtes océaniques, sur un tourniquet transformé en radeau. En montagne, on prendra garde aux avalanches et à ne pas dévaler les pentes en s’accrochant à un tourniquet mal calé. Une chaise longue, une serviette, ne tiennent aucun compte de la course quotidienne de l’astre solaire, c’est pour s’éviter le fatigue inutile des sempiternels déplacements qu’existe cette extraordinaire invention.
Bien entendu, la vitesse de rotation est parfaitement réglable. Des capteurs solaires installés sur le pourtour, et astucieusement disposés dans les éléments de la décoration, permettent à la batterie de faire fonctionner le moteur électrique, pas de branchements problématiques, pas de câbles aussi dangereux pour les autres qu’inesthétiques. Installé peinard dans sa véranda sans chemise et sans pantalon, on laisse entrer le soleil pour qu’il vous dévore de la tête au pieds au gré des orbites voluptueuses offertes par le tourniquet bronzant, même avec une peau épaisse et coriace. C’est l’occasion de réfléchir ou prier, puisqu’il est rare de faire en même temps les deux. Elle est pas belle, la vie ? Je vous laisse vous installer pour tourner en rond et méditer là-dessus.
NB : Pour tout achat d’un tourniquet bronzant au format familial, sera offert en cadeau un spray auto-bronzant indice 7 et une lance à incendie 15 bars.
Bonnes vacances ensoleillées !
Salon littéraire
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar.
Aujourd'hui : Marlou les doigts d'or - extrait numéro 44.

L’ex-princesse Ewij Nikasek du Gurukislapet pleurait la mort de son daron, tout en graissant méticuleusement à l’huile de coude son colt démonté sur ses genoux. Alphonse-Jean-Justin de Saint Exupéry respecta son deuil, préoccupé plutôt quand à lui par la blessure de son épaule qui commençait à puer. Le Brésil était loin et ce périple minant commençait sérieusement à le déprimer. Il avait perdu le précieux soutient de la Hyène et se retrouvait maintenant entre ville et campagne, incapable de poursuivre correctement son rêve de domination mondiale et la mainmise de son organisation sur les commandes publiques. Il avait quand même fait du chemin depuis son enfance, à partir de sa naissance au fin fond d’un jardin ouvrier, puis son premier vol de mobylette à huit ans suivi de celui d‘un tracteur quelques heures plus tard. Les champs environnants s’éclairaient de teintes pastels, mais pas le fascinant portrait de femme que présentait son jeune otage. La détermination meurtrière d’Ewij commençait à lui foutre la trouille, car elle butait les mecs avec un geste d’une sidérante sûreté, ce qui pouvait peut-être représenter dans leur cavale un motif d‘inquiétude. Il jeta brièvement un regard aux pulsations lumineuses de ses prunelles résolues, alors qu‘elle terminait de nettoyer son arme. Ayant remonté son pétard, elle se leva pour abattre un lapin dont la tête alla valser cent mètres plus loin sur un talus, car elle avait très faim. Ils se querellèrent un instant sur le danger de faire un feu qui pouvait révéler leur présence, puis ils se décidèrent pour manger cru. Après ce repas rapidement avalé, quelques pulsions probablement incestueuses vinrent travailler la jeune princesse, aussi jolie qu’ingénue, qui mourrait peut-être debout, mais qui ne détestait visiblement pas vivre couchée. Alors qu’elle cherchait à le réchauffer du moelleux de ses petits seins protégés par de charmants bonnets roses, les cris d’Alphonse la dissuadèrent d’aller plus loin dans son projet amoureux et chassèrent ses pensées coupables. La blessure commandait des soins d’urgence et Ewij ne tenait pas à enterrer son guru trop vite, car elle était faite pour la vie à deux. Elle monta en puissance le son de son baladeur pour ne plus l’entendre gueuler, mais elle hésita à déchirer sa propre chemise pour lui bander le torse et s‘en servir de pansement absorbant sur la zone à risque, la priorité étant d’extraire la balle fichée dans l’omoplate. Sans traitement, il serait mort dans quelques heures.
– Faut qu’on trouve rapidement un médecin, mon amour.
– J’entend une ville bourdonner, faut qu’on s’y rende intra-muros si on veut dénicher un toubib. Sa voix n’était ni douce, ni sucrée.
– Y’a une route pas loin, probablement propice au passage des mécaniques à pétrole…
Aussitôt dit aussitôt fait, elle se planta au milieu de la chaussée, où une voiture ne tarda pas à se montrer. Elle agrafa son soutien-gorge qu’elle venait d’enlever et tira dans la tête du chauffeur avant de prendre le volant. Alphonse se garda d’une objection rédhibitoire, car il avait trop mal et perdait beaucoup de sang. Ils s’aventurèrent jusqu’au centre de la cité, bercés par le bruits des sabots de chevaux heurtant le pavé, si typiques des villes moyennes du Gurukislpatet. Rageuse, Ewij fit vrombir le moteur, créant de l’espace devant elle, à l’affût d’une plaque signalant un cabinet médical. Elle dépassa quelques centres d’initiation éco-conduite et des garderies d’enfants, alertée par le visage blême d’Alphonse qui venait de tomber dans les pommes. Elle se mordit les lèvres en l’accusant d’être aussi encombrant qu’égoïste, mais ce n’était qu’un ralliement à son propre désespoir. Elle avait beaucoup de mal à garder bonne figure, en se disant que ce n‘était pas demain la veille qu‘ils frétilleraient ensemble dans la mer Méditerranée. La géométrie des poumons d’Aphonse dispersait sur les sièges de nombreuses cellules mortes, au milieu d’un épanchement de liquide séro-sanglant.
– Merde Alphonse, lâche pas la rampe !
Elle pila enfin devant le cabinet d’un médecin. Sur le coup, Alphonse se réveilla et aussi con qu’un anti-héros, il cria comme une bête. Tout à l’objet de sa passion, elle lui fit un clin d’œil triomphant, puis elle le traina en ahanant jusqu’aux pieds d’un médecin, tout en plantant devant le nez de celui-ci le canon de son gun rutilant. Elle avait par précaution buté sa secrétaire.
– Y’a urgence, docteur. De mon côté, je prendrais quelques mesures de vigilance, et fais pas ton con, si toi et ta femme caressez toujours le bonheur de donner la vie. Sois gai, actif et surtout performant !
En l’obligeant à réorganiser son agenda, l’incidence du discours de la jeune fille fut manifeste sur le médecin qui s’attela à extraire la balle du corps d’Alphonse, assouplissant quelque peu quelques règles d‘hygiène. Ewij le bassinait en riant sur les risques de grossesses multiples, tout en consultant un magazine trouvé sur la table basse de la salle d‘attente. L’annonce du futur mariage de la nouvelle Présidente à vie du Gurukislapet avec Ban Leden tenait la couverture.
– Je m’en branle, je suis pas pédiatre. Il fit choir la balle dans le gobelet de café qu‘il venait d‘avaler, puis il ferma le passage aux virus et aux bactéries en recousant soigneusement la plaie. Alphonse ne risquait plus rien. Cette conclusion chassa chez Ewij la sensation qu’elle ressentait d’un danger imminent. Elle demanda conseil à l’homéopathe sur son propre problème de surmenage.
– Merci docteur.
– Oui, ben on s’affole pas, je préfère nettement vacciner les populations. Je vais encore lui coller des somnifères pour l’empêcher de rêver. Ensuite, on ajoutera des compléments alimentaires, mais ça me fait braire d’assurer les soins post-opératoires, je vous le dit comme je le pense.
Le téléphone d’Alphonse se mit à sonner, c’était sa filiale Brésilienne qui s’inquiétait du retard prolongé de son patron.

Message édité par talbazar le 01-06-2014 à 18:31:01