Bon, j'ai bien regardé les sujets mais tout le monde semble décider à écrire uniquement de l'heroic fantasy et de la science fiction (moi y compris).
Sur les conseils d'une amie très proche, je me suis dit que j'allais essayer de pondre quelque chose de différent, qui parlerait d'amour, de relations, de cul, de désir, de désillusions, de recherches, de Meetic, bref de plein de trucs qui touchent les djeunz actuels.
Ca, normalement, je sais faire.
Alors oui, c'est pas de la grande littérature. Oui, c'est pas la suite des aventures de Rekk ou des Couleurs. Mais c'est de l'écriture, et au fur et à mesure ça me donne de plus en plus envie de prendre mon clavier.
Que pensez-vous de cette (courte) introduction ?
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Il paraît que cest toujours mieux lorsquon dit la vérité lors dune rupture. Que ça permet de comprendre ses défauts, de saméliorer, de progresser, de faire plus rapidement son deuil. Je ne sais pas quel sociologue sous acide a écrit ce tissu dâneries, mais jaimerais pouvoir lui insérer avec amour sa thèse de doctorat dans le rectum pour lui apprendre le véritable sens du mot douleur.
Non, soyons honnêtes. Les mensonges des filles sont quand même les bienvenus.
- Je suis désolée, je ne me sens pas prête à construire quelque chose de sérieux en ce moment
- Non, mais tu es vraiment quelquun de gentil, dadorable
je suis trop conne de partir
- Ca na rien à voir avec toi, cest moi, cest moi qui débloque
Cest reposant, ça. On sait tous que cest faux la preuve, on utilise les mêmes lorsque cest à notre tour de rompre. Mais ça nous met un peu de baume au cur, un peu de sourire sur les lèvres avant dabandonner celles quon embrassait. Qui veut de lhonnêteté, quand on peut avoir un peu de guimauve pour le même prix ?
Mais Véronique, cest différent. Véronique, elle na jamais aimé mentir. Et ses paroles résonnent encore à mes oreilles plusieurs heures après son départ et la porte claquée. Cest fou ce quune fille peut être cruelle quand elle est en colère. En plus, elles savent frapper où ça fait mal.
- Je suis désolée mais franchement, au lit, cest pas vraiment ça. A chaque fois, je memmerde et ça memmerde de memmerder. Alors il vaudrait peut-être mieux quon se sépare tout de suite plutôt que de continuer et de risquer de sattacher, tu ne crois pas ?
Je ne sais pas ce que je lui ai répondu. Probablement quelque chose comme « ben cest ça, fous le camp, connasse ! ». Ma répartie nest pas formidable lorsque je suis pris par surprise.
Six mois.
Putain, six mois !
Six putains de mois !
Je croyais que cette histoire allait durer, moi. Jétais bien parti pour me caser, ranger ma panoplie de célibataire, devenir un véritable petit couple avec machine à laver commune. Cest vrai, vous savez à quel point cest difficile de trouver une fille bien, de nos jours ? Quand on en trouve une belle, elle est lente. Quand elle est brillante, elle est chiante. Et quand elle est gentille, elle est déjà prise.
La vie, cest la jungle, et quelquun dautre va maintenant profiter du régime de banane que je métais trouvé.
Je me laissais tomber sur mon canapé-lit, les bras derrière la nuque. Je me sentais particulièrement déprimé, mais je navais pas envie de pleurer. Ma tristesse, je la gardais pour moi, même lorsque jétais seul.
Il y avait encore des emballages de préservatifs par terre, preuve que javais pourtant fait de mon mieux. Mais visiblement, rien à faire. Mauvais coup un jour, mauvais coup toujours. Au plafond, le poster dAkira me rendait mon regard, impassible. Peut-être que je devrais lenlever. Peut-être que cétait un tue-lamour, ce truc de manga glauque qui surplombait le lit. Je haussais les épaules. Tel que je me connaissais, ce ne serait pas demain quune fille viendrait dans le coin. Javais le temps de changer toute la décoration, si je le voulais.
Lorsque je me suis relevé, la nuit tombait. Je navais pourtant pas limpression dêtre resté allongé si longtemps. Jouvris la fenêtre et me penchai en avant pour profiter de lair plus frais de ce crépuscule. Au loin, le soleil se couchait sur les tours de la Défense. Paris prend un autre relief quand le ciel sembrase.
Je baissai lentement les yeux vers le pavé, trois étages plus bas. Les ombres jouaient sur mon visage. Pourquoi pas, après tout ? Qui me regretterait, si je faisais le grand plongeon ? Peu damis, peu de charme, peu dargent, peu de responsabilités. Je me penchai un peu pour évaluer la distance, puis me rejetai en arrière, le cur battant. Peu de courage aussi.
Non, il était hors de question de se suicider. Ce serait trop facile, et puis ça avait lair douloureux. Non merci, jétais douillet.
Restait la seconde option : trouver des amis compatissants et me bourrer la gueule en leur compagnie. Cest sympa, des amis. Dans des moments comme ça, ils ne jugent pas, ne critiquent pas, et se contentent de secouer la tête en crachant sur les filles en général et sur la persécutrice du soir en particulier. Je me sentais une envie irrépressible dune soirée misogyne.
- Ce soir
. Murmurai-je.
Je fouillai le répertoire de mon portable, mon enthousiasme retrouvé. Puis je le refermai avec un claquement sec. Nous étions mercredi. En pleine semaine, qui allait vouloir se déplacer pour boire avec moi ? Un verre, peut-être, mais vraiment jusquà loubli ? Personne ! Ils tenaient tous à leur travail, et je les comprenais tout à fait. Salauds dégoïstes.
Je regardai machinalement les noms qui défilaient sur lécran. Pas beaucoup de filles, évidemment. Plutôt des collègues de travail, des gens de ma famille, des relations denfance. Et puis
et puis Bernard.
Je restai un instant immobile, le doigt sur son numéro. En temps normal, cétait quelquun dépuisant. Il était toujours de bonne humeur, toujours actif, toujours énergique. Il coupait la parole à tout le monde, parlait fort, riait beaucoup. Les gens le regardaient avec un mélange damusement et dexaspération ; moi aussi. Exactement ce dont javais besoin ce soir. Tout, sauf ce silence désagréable qui me vrillait les oreilles. Et puis lui ne rechignait jamais devant lalcool, même au milieu de la semaine.
Je composai son numéro dun index décidé. Tonalité, sonnerie, puis une voix joyeuse dans mes oreilles.
- Salut Fred ! Ben alors, ça va pauvre loque depuis le temps ? Tes pas en train de troncher ta Véro ?
Cest le souci de la présentation de numéro, on sait qui cest donc on répond tout de suite, sans avoir eu le temps de jauger de lhumeur de la personne qui appelle. Il faudrait que je pense à donner mon opinion aux sociétés de téléphonie mobile. Je suis sûr que ça les aiderait dans leurs plans marketings.
- Salut, grommelai-je
- Oh, ça na pas lair daller, mon gars. Cest encore Véronique là-dessous ? Tu as loosé et tu las mise enceinte ? Ou elle ta refilé une merde quelconque ? Si cest le cas, je préfère pas savoir
Bernard était gentil, mais il ne faisait jamais dans la dentelle. Cest pour ça que je lavais appelé. Pas le genre de gars à se lamenter avec moi et à trouver plein dexcuses pour expliquer ce quil sétait passé. Il irait droit au but
- Non, non. En fait
Jhésitais.
- Crache le morceau, gars, je suis sur le périph et je nai pas de kit mains libres. Un flic et je me prends lamende.
Comment résister à des arguments aussi convaincants ?
- Elle ma plaqué. Véronique ma plaqué
Silence au bout du fil. Il lui faut le temps dassimiler la nouvelle, probablement. Sous ses dehors bourrus, cest quand même un chic type. Puis jentends sa voix grésiller de nouveau.
- Désolé pour le délai, une bagnole avec un gyrophare, mais cétait juste un truc de dépannage. Jai flippé pour le téléphone. Ouais, tu disais ?
Au temps pour la compassion.
- Véronique ma plaqué
- Oh.
- Eh.
De nouveau un silence, mais cette fois-ci il réfléchit. Ca lui arrive, parfois.
- Bah, je ne lavais jamais aimée de toute façon. Un peu trop prétentieuse, et puis pas si belle que ça, quand on y pense. Bon. Jai quelques bouteilles dans le coffre, jallais à une soirée mais je peux annuler. Je suis chez toi dans vingt minutes.
- Attends, je ne veux pas que tu foires ta soirée pour
.
- Se bourrer la gueule, jappelle pas ça foirer une soirée. Jarrive, je te dis. Il y a jamais de place dans ton quartier pourri mais je vais faire de mon mieux.
Il raccrocha.
Le silence a une certaine qualité, après le débit haché de Bernard. Ce mec est un enfoiré de première dans de nombreux domaines, mais il laisse rarement tomber ses amis. Cest déjà beaucoup.
Je me laissai retomber sur mon canapé, la tête dans les mains. Ce soir, jallais tout oublier à la vodka et au mauvais whisky.
Mais demain ? Et les autres jours ? Pour la première fois, labsence de Véronique se fit réellement sentir. Javais comme une boule dans la gorge, et mes mâchoires se contractaient étrangement. Je me rappelais la chanson de The Cure, et je grimaçais étrangement. Boys dont cry, les garçons ne pleurent pas.
Les garçons, non, mais les hommes ?
Quelque chose coulait sur ma joue. Je le récupérai de la langue. Cétait salé.
Message édité par Grenouille Bleue le 07-09-2006 à 15:22:13
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