Oulalalala ! Voici le premier chapitre, donc la suite du prélude, enfin !
Bonne lecture à tous
CHAPITRE 1
Le chien aboya. Un son court mais ô combien agréable. Anden sourit et, abaissant son arc, s'enfonça dans l'épaisse broussaille. L'appel venait de l'Est. Pendant plusieurs minutes il marcha, défiant les branches qui s'insinuaient devant lui, et il finit par débouché vers un endroit beaucoup moins encombré. Une odeur de sang assaillit aussitôt ses narines, et comme il venait de déjeuner, se passa la main gauche sur le visage.
Une carcasse de daim gisait sur l'herbe, une traînée rouge coulant le long de son cou ensanglanté. Anden contemplait toujours cette dépouille lorsque une langue vint lui lécher les mollets. Avec un sursaut incontrôlé il se laissa choir sur le sol et observa son chien. Grand, beau dans son pelage noir, sa langue remuait joyeusement pour atteindre le visage satisfait de son maître. Anden le caressa énergiquement un moment, signe de récompense, puis entendant les feuilles bruire prêt de lui, se releva vivement. Un autre homme, tout aussi souriant, plus grand et plus musclé s'approchait doucement de lui, tenant un dodu lapin dans sa main droite et un couteau dans l'autre.
« Jai entendu le cabot alors me suit hâter de vnir par là, déclara-t-il dune voix chaleureuse.
Tas bien fait, lui répondit Anden. Regarde ce que Tob a attrapé. »
Anden se tourna vers le gibier, hocha allègrement la tête et observa la réaction de son ami, flattant toujours son chien.
« Pas mal Rorkal, hein ?
Que oui ! Tas bien fait ton boulot mon ptit Tob. »
Et souriant de plus belle, Rorkal souleva Tob comme sil ne pesait pas plus quune plume et le choya un bon moment. Le toutou émit un petit aboiement enchanté, puis Rorkal le reposa sur lherbe et sapprocha du daim.
« Ha ! Il la bien eu ton chien Anden. Si y pouvait nous attraper ça tout les jours, ça srait pas mal ! »
Soudain un troisième homme émergea des bois. Des lapins pendaient à sa ceinture, reliques dune chasse plutôt bonne. Il était petit, maigre, mais son visage respirait la malice. Dun pas rapide il rejoignit les deux autres. Ses traits sagrandirent démesurément, découvrant une mâchoire abîmée, et il jaillit delle un rire gai.
« On va bien manger ! » sexclama-t-il.
Ses deux compagnons acquiescèrent promptement et Rorkal se baissa pour attraper leur dîner. Du sang coulait toujours, mais ne constituait pas plus quun infime filet. Il posa lanimal sur ses larges épaules, et lâcha un soupire de protestation.
« Cest qui pèse lourd en plus.
Tant mieux, cest quil est bien pansu. On aura encore plus à manger ! répliqua le frêle homme.
Ca svoit qucest pas toi qui lporte Gwaran. Tu frais moins lmalin sinon, riposta Rorkal en lui lançant un petit regard de défi.
Men chargerai aussi bien que toi, mais ce nest pas moi la grosse brute, déclara Gwaran en lui dédiant un sourire finaud.
Vous ne pouvez pas arrêter un peu ? intervint Anden en plaquant sur eux un regard désespéré.
Mais cest lui qui commence toujours à
Anden nécouta même pas la suite. Il leva les yeux au ciel, remerciant les Dieux de lui avoir offert pareils compagnons et sen alla vers Tob qui chassait un papillon. Au passage Anden lui déposa une petite caresse entre les oreilles, et immédiatement le chien délaissa linsecte volant et couru gaiement vers les arbres. Anden voulu se tourner, mais le flot de paroles qui coulait des bouches de ses amis len dissuada.
Le soleil commençait à disparaître derrière lhorizon, nimbant le ciel dune couleur enivrante, quand ils débouchèrent sur la grande route. Rorkal et Gwaran discutaillaient toujours quelques mètres derrière Anden, et Tob les attendait déjà au milieu du chemin de graviers. Il se grattait distraitement le flanc et lorsquil vit son maître surgir de la forêt se mit à aboyer sans raison apparente si ce nétait la joie de le revoir. Anden lui adressa un regard perplexe et mit un genou à terre devant lui.
« Que ce passe-t-il ? »
Rien. Tob ne cessa pas démettre sa répétitive plainte, et même Rorkal et Gwaran interrompirent leur discussion. Ils se baissèrent devant le chien et le lorgnèrent dun il hésitant.
« Pourquoi quil aboie ton chien ? demanda Rorkal.
Comment veux-tu que je le sache, répliqua froidement Anden.
Il ne dit jamais rien dhabitude, murmura Gwaran.
Je le sais quil ne dit jamais rien ! lâcha abruptement son maître. Mais là il le dit ! »
Rorkal déposa le daim sur les cailloux, soulageant quelque temps ses épaules et posa sa main sur celles dAnden.
« Regarde là-bas, chuchota-t-il dune voix enrouée. »
Sans prendre la peine de se relever, Anden déposa son regard vers lOuest. Intrus dans le ciel orangé sélevaient de gros nuages poussiéreux. Dun noir plus gras que le poil de Tob, ils senvolaient lentement, quelques fois roussis par de gigantesques flammes.
« Mon Dieu, lâcha Anden. »
Un sifflement aigu accompagna ses propos. Tob avait cessé ses lamentations, et mordillait maintenant les jambes de son maître.
« Cest Vert-Bourg, siffla Gwaran. Ils doivent avoir un problème. Allons-y ! »
Ils sélançaient déjà quand Rorkal déclara dune voix puissante :
« Jen fais quoi du dîner ?
Laisse-le ! » sécria Anden, déconcerté par tant de bêtise.
Voilà bien la dernière des choses à penser en ce moment, songea-t-il amèrement.
Et le gros bonhomme fonça vers ses deux compagnons qui galopaient déjà loin devant, Tob affolé à leurs côtés. Au fur et à mesure quils se rapprochèrent du village la fumée se fit plus dense, plus abondante, et bientôt leurs yeux subirent ce pénible assaut. La désagréable odeur vint aussi tourmenter leurs narines dilatées, et ils ne purent sempêcher de ralentir le rythme pour reprendre leur souffle. Cest en trottinant quils continuèrent, une main plaqué sur leur bouche.
Vert-Bourg nétait pas particulièrement loin de leur village, Rivière-grise, mais aujourdhui, il semblait plus éloigné à chaque pas. Tout trois savaient quils atteindraient bientôt le village, mais la peur qui sempara de leur corps raidit leurs muscles et anima leur visage dune grimace anxieuse. Il y avait de la fumée, certes, peut-être tout les âtres flambaient dune vive flamme, mais la fumée était trop dense, trop mauvaise. Leurs yeux plissés, ils scrutèrent la route, sefforçant de distinguer la moindre forme, même celle dun animal, quimporte.
Soudain une maison devint visible, leur angoisse saccentuant, et cest dun pas presque inanimé quils pénétrèrent dans le village. Des gravats rougit sentassaient à lendroit où naguère avait siégé de belles maisons ; de la paille brûlait toujours un peu partout ; des filets dune fumée mortelle s'écoulaient de chaque brèche dans les bâtiments. Quelques corps, noircit par le feu gisaient entre les amas informes, leurs vêtements se consumants inlassablement. Une terrible odeur de mort escortait ce morbide spectacle et Rorkal ne put réprimer un haut-le-cur.
Ils contemplaient cet épouvantable spectacle, meurtrit et effarés par tant de barbarie, des larmes roulant sur leurs joues qui peu à peu prenait la teinte blafarde de la fumée, quand une voix les interpella :
« Ne restez pas là où ils vous prendront aussi. »
Sursautants, tremblants, pleurants ils se tournèrent vers la gauche, origine de la phrase. Ils ne discernèrent dabord rien, puis comme si les Dieux les écoutèrent, le vent changea de direction pour flâner vers le Nord. Alors un homme, vieil homme apparut face à eux. Des cheveux blancs courts garnissaient sa tête, une barbichette de neige pendouillait à son menton, et il se tenait recourbé vers lavant. Ses habits étaient de toutes parts déchirés, et il ressemblait à un ermite pareillement vêtu.
« Allez, venez, répéta-t-il. Sinon vous mourrez. »
Interpellés par les paroles du vieil homme, mais encore sonné par le village en ruine, ils ne bougèrent pas dun millimètre. Ce fut grâce à Tob que leurs jambes prirent la direction du Sud. Le vieil homme sourit et se replia derrière les fougère en les voyant arriver.
« Allons, dépêchez, ils sont tout prêt. »
Retrouvant un semblant de réflexion ils se couvrirent derrière les branches lorsquil furent tout prêt du vieux. Il puait la fumée, et il avait du assister à ce carnage depuis son commencement. Les trois compagnons sallongèrent gauchement sur lherbe une fois à labri et laissèrent couler leurs larmes. La peine les quittant à chaque pleur.
Le village où ils avaient passé la moitié de leur enfance, le village où ils sétaient connus, le village où ils avaient décidé dêtre amis jusquà la mort sévaporait maintenant, torréfiant à jamais lendroit de toutes leurs joies, de tout leurs chagrins ; Vert-Bourg. Toutes les personnes quils avaient adorées, même aimées se trouvaient dans ce brasier, probablement mortes, ou brûlées sur tout le corps. La mère Gaut qui leur préparait toujours des bons plats quand leurs estomacs criaient famines, Torn, le forgeron qui leur avait offert des armes ajustées à leur profil, Tom qui leur avait apprit la chasse, et tant dautres
« Ne pleurez pas les enfants, dit le vieil homme en se rapprochant deux. Tant que vous penserez à eux ils seront prêt de vous. »
Et sur ces paroles ils séchèrent peu à peu leurs larmes. Tob aussi semblait abattu, couché par terre, la tête bien basse. Mais le vieux les releva empressement. Les tenant par les épaules il leur intima de se remettre vite en marche sils voulaient trouver leur village avant la destruction.
« Car ils vont aussi détruire notre village ? senquit Anden dune voix encore secouée par les sanglots.
Probablement. Maintenant quils sont là, ils ne vont pas renoncer à dautres endroits où ils pourront semer la mort.
Mais qui sont-ils ? sécria Rorkal maintenant prêt à se battre, sa hache en main. Où sont-ils ? Je ne les ai pas encore vu !
Du calme où ils pourraient bien nous tomber dessus avant que nous les voyons. »
Et ils se mirent en marche, menés par le vieil homme. Pendant un moment ils déambulèrent en silence dans la nuit naissante, puis le vieil homme prit la parole :
« Je les ai vu, moi. Ce sont des hommes, comme vous, comme moi. Des guerriers plutôt, car leurs armures et leurs épées brillaient de mille feux sous le soleil. Ils étaient très beaux. Jai pu les admirer pendant un très court instant, car la seconde daprès, ils avaient disparu, pouf. » Il fit un geste avec ses mains. « Jai cru dabords à un rêve, mais le reflet qui captiva mes yeux me prouva le contraire. Jai crié tout ce que jai pu dans le village, hurler, mais les autres nont voulu mécouter. » Il baissa la tête, navrée. « Je me suis donc mit à labri, et les soldats ont déferlés comme la plus puissante des vagues sur notre village. Quelques minutes plus tard, tout brûlait. La vie se consumait.
Mais comment est-ce possible ? demanda Gwaran.
Sûrement de la magie, lança le petit vieux. En tout cas je ne vois que ça.
Mais personne na jamais eu de magie par ici. Cest bien le cadet de nos soucis !
Ici peut-être, mais eux la possédait en tout cas. Et puis ils nétaient pas dici
eux.
Et où sont-ils à présent ? intervint Anden.
Comment le savoir ? Je vous le dirai si seulement je le savais. Ils peuvent être partout ! »
Triste évidence. Anden hocha la tête et soudain, sous limpulsion du vieil homme, ils pressèrent le pas. Ils ne le connaissaient pas depuis longtemps, mais déjà à en juger par la vitesse à laquelle le vieux se fondait dans la nature, il affichait une rigueur presque irréelle. Même les trois amis qui se débrouillaient assez bien en course eurent du mal à le suivre au bout de quelques minutes de cavalcade. Il fallut que le rythme baisse pour quil puisse de nouveau recoller et recouvrer leur souffle.
« Au fait, comment vous appelez-vous ? demanda Gwaran, aspirant une grande goulée dair.
Mon véritable nom et Corgoth, mais daucuns me nomment Corg. Faites comme il vous plaira.
Ainsi dit, Corg accéléra le pas et disant :
Vite ! Je sens quils arrivent prêt de chez vous ! »
Malgré cette avertissement et le fait que des centaines de vies dépendaient sûrement de la rapidité de leur course, ils ne parvinrent pas à augmenter dintensité. Mais ils résistèrent de longues minutes à une vitesse très soutenue. Seuls Corg et Tob semblaient parfaitement à laise à ce train.
Soudain ils passèrent devant leur daim. Il trônait toujours dans les fourrées, intact. Rorkal eut envie de le ramasser, toujours un repas de gagner, mais Anden lui fit signe de ne pas y penser. La vie de centaines de villageois dépendait deux. Ils étaient à peu prêt à mi-chemin de leur village quand Corgoth disparut, loin devant. Ils eurent beau crier pour que celui-ci lattende, mais comme il ne revenait pas, ils continuèrent leur course folle.
Une chose laissait tout de même présager que les soldats navaient pas encore sonnés la charge : la fumée ne montait pas. Ils eurent beau se dire que lespoir persistait toujours, leur visage nesquissa quun maigre sourire. Enfin, de très longues minutes plus tard, exténués, assoiffés, essoufflés, ils virent apparaître la première maison de Rivière-Grise. Un bel édifice de pierre, de bois et de foin, toujours impeccablement planté dans le sol.
Alors, ils stoppèrent totalement leurs efforts et se laissèrent tomber à genoux, cherchant lair qui leur manquait. Des gouttes de sueur roulaient partout sur le visage rubicond, et leurs jambes tremblaient, meurtries par ce violent effort. Une ombre passa soudain derrière eux. Alertés, ils se retournèrent et dévisagèrent Corgoth, accompagné de Tob. Ils paraissait lui aussi soulagé, mais son visage nen restait pas moins fermé.
« Ils ne sont pas encore arrivé, une chance, murmura-t-il.
Que devons-nous faire ? le coupa Anden, limplorant du regard.
Si vous avertissez les villageois quune menace imminente risque de les frapper, croirez-vous quils vous croirons ? »
Les trois baissèrent la tête, savant déjà quelle était la réponse. Leurs yeux semplirent de larmes, et ils neurent pas même le temps desquisser un geste que déjà des villageois hurlaient, couraient, pleuraient. Se dressant dun bond, ils dégainèrent chacun leur arme, prêts à se battre farouchement, mais le désespoir les terrassa lorsquils ne virent rien dautre que des flammes se nourrir du foin, des hommes tomber par terre sans quaucun autre nait fait de mouvement. Les attaquants étaient bien invisibles.
« Trop tard
murmura Corg, le regard captivé par lattaque. »
Gwaran décocha une flèche, visant le vide, espérant atteindre un des soldats invisibles, mais le bois effleura lair et ricocha sur la terre.
« Tu ne pourras pas les atteindre petit, rien ne peut les arrêter
Tu en es bien sûr ? »
Cétait Rorkal. Avec la vitesse dun félin, il tira une dague ensanglantée de sa poche et avec une puissance surhumaine lenvoya dans les ombres du village. Lair siffla à ses côtés, mais rien dautre ne se passa. Elle se planta lamentablement dans la terre, nourrissant un petit nuage de poussière. Rorkal lâcha alors le plus assourdissant des cris quil put, et avec la rage dun barbare se jeta sur la place du village où les gens commençaient à mourir, où les maisons commençaient à brûler. Dégainant sa grosse hache, il esquissa dimmense geste, au hasard sur son chemin, blessant lair, coupant le vent. Il recommença tant quil pu, aveuglé par une frénésie incontrôlable, ne sentant jamais un corps sinterposer devant sa lame. Et pourtant il se mit à courir, le visage convulsé par la colère, fauchant le ciel, broyant léther, inlassablement.
Anden, Gwaran et Corgoth regardèrent ce triste spectacle pendant toute sa durée et, les larmes roulants sur leurs joues, se détournèrent en voyant une femme broyée, hachée par une lame invisible. Déjà la fumée senvolait emportant lâme des défunts avec elle, et déjà des dizaines et des dizaines de personnes sétalaient sur le sol, rouge et défigurées. Tob se mit à aboyer soudainement. Anden et Gwaran se tournèrent vers le village, les yeux embués, mais ce quils virent leur redonna une lueur despoir. Des hommes et des femmes escaladaient la petite pente pour les rejoindre, le visage noirci, du sang les maculant un peu partout. Ils fuyaient.
Les deux compagnons se jetèrent vers eux, oubliant leur fatigue et entamèrent une vive descente. A peine arrivaient-ils à leur hauteur que les derniers de la file tombaient, les jambes ou le ventre fauché par une arme incroyablement puissante. Cétait comme des arbres que lon abattaient, tous tombaient, entraînant lautre dans sa chute vers la mort. Mais Anden et Gwaran se refusèrent dadmettre aussi tôt la défaite. Avec un cri de guerre que jamais ils ne crurent possible démettre, ils dégainèrent leurs épées luisantes et sinterposèrent entre lennemi et les réfugiés.
« Courrez dans la forêt ! » beugla Anden avant dasséner un coup dune redoutable férocité dans les airs.
Pendant un long moment, à limage de Rorkal ils tentèrent, essayèrent de toucher ce qui ne pouvait lêtre. Comme possédés, ils réitérèrent toujours leurs attaques, la conviction quun intrus tombera. Les premiers villageois se perdaient déjà entre les arbres, lorsque Gwaran et Anden sentirent comme une ombre obscurcirent le paysage. Comme si lastre de la nuit sétait furtivement enfuit, comme si des nuages colériques samoncelait au dessus deux. Mais il nen était rien. Le ciel était dun bleu sombre royal, les étoiles éclatantes, la Lune plus belle que jamais dans sa robe étincelante.
Puis, plus horrifiant encore, ils sentirent comme un être transpercer leur corps, le fouiller de part en part, les ronger de lintérieur, les ruiner. Leurs entrailles se gelèrent à ce contact mort, leurs yeux se convulsèrent ; ils nétaient plus maître de leur corps, quelque chose dautre puisait leur force vitale. Anden et Gwaran gisaient sur lherbe, pliés en deux, les mains sur la tête, les genoux devant le ventre, les yeux fermés, criant leur douleur, implorant le ciel, et cest un sifflement qui mit fin à leur tourmente. Aussi rapide que leur mal était apparu, il se volatilisa, et leur douleur sestompa ; ils ne ressentaient plus rien.
« Ca va ? » sécria Corgoth en se jetant à leurs pieds, posant une main froide et osseuse sur leur front.
Aucun son ne vint le rassurer, juste des mouvements. Des mouvements fatigués, presque invisibles. Pourtant, la vie les habitait toujours, et après un moment de récupération, ils se retrouvèrent debout, appuyés contre un arbre, haletant mais sans blessure, sans souffrance.
« Où sont les villageois ? articula faiblement Anden.
Dans la forêt
ceux qui ont pu leur échapper.
Et
Rorkal ?
Je suis là » répondit le colosse en remontant la pente, sa hache en main.
Un sourire vint effleurer le visage du jeune homme. Au moins son ami était toujours là, en pleine forme.
« Y sont vraiment invisibles ces soldats bon dieu ! Jai rien touché et pourtant jai frappé !
Je tavais prévenu, soupira Corgoth, on ne peut rien y faire. Ils sont invincibles. Il faudrait maîtriser la magie
Mais qui pourrait le faire ici ! tempêta Anden en sapprochant du vieux bonhomme. Personne ne connaît de magicien ! Il nen vient jamais par chez nous.
Et puis qui aurait envie de pratiquer cette force occulte, ajouta Gwaran. Pas moi en tout cas. Cest beaucoup trop aléatoire.
Et si je te disais le contraire, déclara calmement Corgoth.
Eh bien je ne te croirais pas, tout simplement.
Cest justement là que tu as peut-être tort
Que veux-tu dire par là Corg ? questionna doucement Anden.
Ho, rien de bien important, rien de bien important. Ny pensez plus, cétait juste un délire du vieux Corg, conclut-il en riant faiblement.
Anden jeta un regard perplexe à ses deux amis, et ceux-ci le lui rendirent. Ils haussèrent les épaules, le visage troublé, puis se rapprochèrent du vieil homme.
« Et quallons nous faire maintenant que tout est ruiné, que nous navons plus de maison où habiter, plus de personne à qui parler ? demanda Rorkal dune voix forte mais pleine de douleur.
Votre vie nest plus la question maintenant, répondit Corgoth. Il faut prévenir le Roi du plus proche Empire, celui de lEst. Lui seul pourra trouver une solution. Il faut lui apprendre ces sombres nouvelles avant que les troupes ne frappent sa citadelle. Il faut trouver des magiciens.
Et les villageois qui sont encore en vie ? Nous nallons pas les aider ?
Pas le temps, ils trouveront bien comme nous quelque chose à faire pour sauver leur peau. Maintenant il faut agir et vite ! »
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