article dans libé ce matin, pour ceux sui soutiennent mordicus que tout va bien, les déficits, c'est pas grave
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Quelle entreprise peut obtenir de son banquier une autorisation de découvert de 33 milliards d'euros ? Réponse : la Sécurité sociale. En attendant la réforme, dont les principes doivent être arrêtés «avant l'été 2004» pour être mis en oeuvre en 2005, le gouvernement n'a rien trouvé de mieux pour financer la protection sociale que de remonter le «plafond de découvert» consenti aux organismes de Sécurité sociale. D'abord de 12 à 15 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année, puis de 15 à 33 milliards d'euros fin 2004.
Ce genre d'expédient ne pouvait qu'agacer Bruxelles. D'autant que les Allemands, capables de prendre à l'occasion des libertés avec les règles communes, ont décidé de mesures drastiques pour contenir la dérive de leur système d'assurance maladie : création d'un forfait hospitalier, d'un ticket modérateur de 10 euros par trimestre, et exclusion des prothèses dentaires du régime général de base. La réforme allemande est «totalement inenvisageable en France», estimait lundi Jean-François Mattei, lors d'une réunion des ministres de la Santé de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques).
Attentisme. «Notre pays se paye sa santé à crédit», admettait pourtant la semaine dernière Jean-Pierre Raffarin, qui ne comptait «pas moins de 16 plans de sauvetage» de la Sécurité sociale depuis 1977. Ce qui ne l'a pas empêché de s'accorder une année de délai supplémentaire, le temps pour le nouveau Haut Conseil de l'assurance maladie de faire des propositions. Le temps, surtout, de laisser passer les échéances électorales des régionales et des européennes avant d'annoncer des décisions forcément douloureuses.
Scénario. En 2004, malgré 3,5 milliards d'euros d'économies annoncées, le trou de la Sécu (dont l'assurance maladie est presque intégralement responsable) devrait se creuser encore de 11 milliards d'euros (en plus des 8,9 milliards de 2003). Car le scénario est écrit : les dépenses de santé progressent beaucoup plus vite que la croissance. Ce rythme, qui va en s'accélérant, s'élève à 5,7 % par an en moyenne depuis 2001. De septembre 2002 à septembre 2003, il est de 6,4 % en rythme annuel, selon la Caisse nationale d'assurance maladie. Et, à la fin de l'année, il devrait atteindre 7,2 %. «Aucune recette ne peut suivre un tel train», rappelait il y a peu la Cour des comptes. Surtout quand la croissance du PIB stagne entre 0,1 % et 0,3 % comme ce devrait être le cas en 2003.
Dans plusieurs domaines essentiels, notamment les prescriptions de médicaments et les indemnités journalières, le dérapage est encore plus impressionnant. Mais comme il est induit par le comportement des prescripteurs et des patients, la mise en place d'un mécanisme régulateur est une gageure. La solution qui semble de plus en plus inévitable serait de ne plus mettre toutes les dépenses de santé à la charge de l'assurance maladie, sans toutefois prononcer le mot de déremboursement. C'est en tout cas la solution que Bruxelles attend.
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