Simulacra NNID : Rez | ACNH : Chaton | zico17 a écrit :
Alors voici ma réponse pour toi, Simulacra. D'abord merci pour ton message long et argumenté, qui explique bien tout ce qu'on peut apprécier chez Rosa. Voici mes commentaires.
Tu parles longuement de Barks, qui a manifestement une place très importante dans l’œuvre de Rosa. Mais quand tu dis que pour apprécier La Jeunesse, il faut commencer par l'intégrale de Barks, aïe, ça fait beaucoup de lecture! C'est même carrément décourageant, puisque l’œuvre de Barks est j'imagine très riche! Du coup La Jeunesse ne se suffit pas à soi-même, et c'est dommage pour les lecteurs non assidus comme moi. Deuxio, et c'est un défaut qui revient de la part des détracteurs de La Jeunesse, Rosa ne s'est-il pas un peu enfermé en voulant respecter à la lettre les éléments donnés par Barks? Sincèrement je pense que personne ne lui en aurait voulu s'il avait pris quelques libertés. Et puis il aurait pu apporter son grain de sel: j'en reviens au personnage de Grégoire Trouvetou: pour moi il n'apporte rien, c'est le sosie physique et mental de son fils (ou petit-fils) Géo. Peut-être aurait-il pu s'approprier plus ce type de personnage, pour apporter son grain de sel, parce que là, ça fait un peu "perroquet". Quand je dis que je considère que la Jeunesse est une succession de scènes, juste pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïtés, je parle de chaque histoire et non de l'ensemble. Chaque histoire, à mes yeux, manque de consistance et au fond, ne consiste qu'en une succession de scènes. Ce sont des histoires qui manquent un peu d'histoire, en quelque sorte. J'ai du mal à exprimer cela mais en tout cas ça m'embête un peu.
Au sujet du réalisme, je suis à moitié d'accord avec toi: qu'on ait droit à des périodes spécifiques (la ruée vers l'or, etc.) c'est une bonne chose en effet, mais encore une fois, je ne suis pas trop fan des personnages réels (les Dalton, par exemple, qui font par exemple pâle figure à côté de ceux de Lucky Luke, bien sûr ce n'est pas le même type de BD mais c'est difficile de ne pas comparer les deux). Et toujours au sujet du réalisme, il y a quelque chose d'assez étrange dans son œuvre: un mélange de méticulosité extrême et de "grand n'importe quoi" (pas forcément dans le sens négatif) qui interpelle. Ex: dans son commentaire de l'histoire "La terreur du Transvaal", il dit: "quelqu'un souhaite-t-il me dire que l'on ne trouve pas de buffle d'eau en Afrique? D'accord mais d'après les recherches, on en a importé d'Asie dans les années 1880 pour travailler dans les mines du Transvaal". Donc il est capable de penser à la vraisemblance du moindre détail. Mais à côté de ça, dans la même histoire, on voit Picsou dompter tous les animaux de la jungle, dont un lion, en lui hurlant dessus. Quelqu'un ici trouve ça drôle mais pas moi, et, même si j'ai bien conscience que je n'ai pas entre les mains un roman de Balzac, et qu'il ne faut pas chercher du réalisme absolu, je ne suis pas très fan de ce type de facilité scénaristique, d'autant que, encore une fois, ça colle mal avec la méticulosité dont l'auteur peut faire preuve par ailleurs. Au sujet de l'humour, il ne me convainc pas chez Rosa. Chez les Italiens (du moins dans les histoires de Mickey Parade et Cie que j'ai pu lire), il s'agit en fait moins de gags que d'un état d'esprit général: une bonne humeur ambiante, un dynamisme, du fun. ça prête moins à rire que des gags proprement dits mais je m'y sens mieux, pour ma part.
Au sujet du manque d'énigme et de mystère, je ne vois pas en quoi Rosa n'aurait pas pu en insérer dans la Jeunesse? En tout cas ça m'a manqué. En tout cas, tu as bien raison de dire que le Picsou de Rosa (et de Barks) n'est pas le mien, le mien étant celui des histoires "lambda". Le mien est pingre, grincheux, basique (tout en ayant une forme d'humanité), c'est un anti-héros par excellence et c'est comme ça que je l'aime. Je vois les histoires de Picsou comme des purs divertissements, de la distraction, et quand on me parle de psychologie et de profondeur, je trouve que ce sont des notions plus proches de l’œuvre de Dostoïevski que de l'univers de Donaldville. Ce qui ne m'a cependant pas empêché de lire et apprécier des histoires non écrites par Rosa mais qui proposaient une certaine réflexion, comme celle où il est question de télé-réalité avant l'heure ("Donald ton univers est pitoyable" sortie dans un Mickey Parade des années 80). Bref, comme m'a dit justeleblanc (qui apprécie La Jeunesse): "tout ce qui fait que tu n'apprécies pas trop, c'est exactement ces points qui font je suis fan et relis avec grand plaisir !": en conclusion, tout dépend de ce qu'on attend d'une histoire de Picsou! Après comme le dit ezeckiel, peut-être que je me plairai mieux dans des histoires de Rosa qui n'appartiendraient pas à la Jeunesse. J'ai d'ailleurs eu entre les mains une histoire de trésor hollandais, qui m'avait plus plu que celles de la Jeunesse.
Bon ma réponse est légèrement déstructurée mais j'avais envie de dire ce qui fait que je n'ai pas apprécié plus que ça La Jeunesse. Merci d'avoir eu le courage de me lire
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Continuons cette passionnante conversation Bon, je ne te dis pas de te taper l'intégrale de Barks pour aimer Rosa hein (ça serait plutôt long !), j'explique juste que connaitre le Picsou de Barks aide vraiment à apprécier celui de Rosa. Après, on peut apprécier (ou non) Life and Times (le nom anglais de la jeunesse c'est plus rapide à dire que "la jeunesse de picsou" ) pour un simple divertissement, mais on y perd fatalement des tonnes de choses. Don s'est enfermé dans l'univers de Barks, et sans doute personne ne lui aurait reproché de s'éloigner de l'univers Barksien comme ont su le faire d'autres auteurs jusqu'à s'approprier le personnage et le développer de leur côté (ce qu'à fait Scarpa en créant Brigitte et d'autres personnages, et en développant Flairsou plus que Barks ne l'a jamais fait (Flairsou a été créé pour une seule histoire et n'est jamais revenu chez Barks), mais dans ce cas là, cela n'aurait pas été Life and Times. Cela aurait été une histoire sans doute vite oubliée, alors qu'aujourd'hui, elle trône dans le cœur des fans de Barks comme un petit bijoux, un hommage, une révélation même (éclaircissant toutes les zones d'ombres sur le passé du personnage) Don Rosa lui même est le premier et plus grand fan de Carl Barks, et la fidélité à l'univers Barksien est la base de ses BD, et pas seulement pour Life and Times... toutes ses histoires font partie du même univers et sont connectées les unes aux autres et à l'univers de Barks. La BD avec le trésor du Hollandais est complétement liée au passé de Picsou, et à l'épisode avec les daltons, justement. C'est cette cohérence d'ensemble, ce respect de l’œuvre originale, ce soucis du détail, cet amour de Picsou qui rend l'oeuvre de Don Rosa complètement à part et qui font qu'il ait autant de fans. C'est le seul auteur à avoir vraiment poursuivi l’œuvre de Barks, et il l'a complété, il est allé encore plus loin, sans jamais trahir ni dénaturer l’œuvre de base. Alors certes, s'il l'avait fait, on ne lui en aurait pas forcément voulu, mais qu'il ne l'ait pas fait, c'est ce qui rend ses histoires aussi passionnantes pour ses principaux fans. En plus de son humour, où visiblement, on n'est pas du tout d'accord. Moi, je trouve cela hilarant comment il fait peur au lion Bon, encore une fois, cela respecte complétement le Picsou Barksien, qui n'est pas le pingre anti-héros que tu aimes tant (enfin, il l'est dans les premières histoires, au moment de sa création, jusqu'au moment ou Barks a réalisé toute la popularité naissance du personnage et qu'il a décidé d'en faire le héros, lui créant un passé, une personnalité et une psychologie). Je reviens à la BD que je te conseillais "juste un pauvre vieil homme pauvre", c'est vraiment un tournant, et si on peut dire, la deuxième naissance du personnage après l'histoire du Mont Ours. Plusieurs vignettes parlent de son passé, et Picsou est décrit à ce moment là comme le canard courageux, inconscient et indomptable qu'il était jeune. Pour moi, donc, c'est plutôt quand je vois Picsou courir se cacher dans les arbres que j'ai envie de crier au n'importe quoi ! Ce n'est pas Picsou, non de dieu ! Picsou, c'est le genre de type à faire des descentes sur des glaciers, a arrêter 8 rapetous à lui seul, à attaquer l'armée des états-unis avec un morceau de bois et à faire peur aux lions quand il n'est pas content ! C'est le personnage qui veut ça ! Et voir Don Rosa en jouer à la perfection, c'est simplement drôle ! Après, pour ce qui est du réalisme... en quoi est-ce moins réaliste d'avoir un canard qui fait peur à un lion que d'avoir le canard le plus riche du monde ? On peut aussi, pour expliquer le côté "fort" du jeune Picsou, resituer un peu le contexte "américain". Aux USA, les "comics" mettent la majorité du temps en vedette des super héros. Don Rosa, enfant, détestai tous ces supers héros aux pouvoirs ridicules et préférait les aventures de Picsou de Carl Barks, pas forcément plus réaliste, mais à ses yeux plus entrainantes (Picsou gagne parce qu'il est plus malin que les petits malins, plus dur que les gros durs, et surtout, il a sut réussir en restant honnête et carré !) (bon, le jeu de mot marche mieux en anglais ). Du coup, c'est assez normal à ses yeux de montrer que le jeune Picsou était un héros sans super pouvoir, mais un héros quand même, allant jusqu'à grossir un peu le trait. Mais il sait aussi s'en amuser, avec la scène ou Picsou détruit le bateau de Soappy, où juste après, notre canard préféré explique qu'on en a beaucoup rajouté sur cette histoire... mais que c'est quand même vrai
L'humour de Don Rosa est vraiment très textuel, avec des remarques, des jeux de mots, des réflexions... c'est dommage que tu n'adhères pas à ce style d'humour, mais quand on est dans le trip... c'est un vrai plaisir ! Essaie de lire certaines de ses bédés humoristiques (je ne saurais que te conseiller "Poubelle et Trésor" qui reste une de mes préférés dans le domaine Don au sommet de son art... (juste avant sa retraite, malheureusement :-( )
Pour la psychologie... c'est compliqué, je comprends tout à fait qu'on puisse préférer le Picsou anti-héros sans prise de tête... bien plus fidèle, au final, à l'univers Disney en général. Mais ce n'est pas le Picsou créé par Carl Barks. Peut-être parce que Carl Barks s'est lui-même détaché de cet univers disney "classique" qui s'adressait à des enfants pour développer la psychologie, le passé et les liens de ses personnages. Mais voilà, on ne peut pas reprocher à Don Rosa d'être fidèle au personnage créé par Carl Barks, même s'il trahit de cette manière la mentalité Disney (d'ailleurs, il ne s'en cache pas, ses relations avec Disney ont toujours été un peu particulières et il a toujours expliqué qu'il ne reprenait pas le donald de Disney mais bien l'univers de Carl dans ses BD, et la nuance est très importante). Le dessin, très osé, posté au dessus illustrant la "mort" de Picsou est sans doute un de ses plus gros doigts d'honneur aux ayant-droit de l'oncle Walt Maintenant, si on sort un peu de la BD Disney, tout se côté psychologique met l'oeuvre de Don complètement à part... mais en même temps, c'est de la BD, de la vraie BD. Quand je lis "une lettre de la maison", je ne lis pas une histoire Picsou pour gosse dessinée à l'arrache pour un magazine, je lis de la BD, de la vrai, au sens noble et "artistique" du terme. Ce n'est pas qu'un divertissement pour gosse, c'est aussi, avec les personnages qui ont bercé notre enfance, de la BD pour adulte. Et réussir à faire les deux en même temps, c'est peut-être là le plus grand coup de génie de Don Rosa, et la raison pour laquelle on sort ses intégrales dans tant de pays et pourquoi, finalement, on lui rend cet hommage, non pas en tant que "dessinateur anonyme de bédé disney", mais en tant qu'artiste. Don est le seul a avoir eu le courage et le talent pour traiter des sujets aussi complexe que la famille, la sexualité (si monsieur, les deux coeurs du Yukon, D 95044... ) le regret et la mort dans des BD de canard. Tu me diras "ouais, mais c'est pas la place", et tu auras sans doute raison, c'est ce que de nombreuses personnes (principalement dans l'univers Disney) ont pensé et doivent toujours penser. Mais Don Rosa a montré qu'une autre vision, plus proche et fidèle, mais en même temps poussée, de celle de Barks était possible, et qu'elle pouvait plaire, autant aux enfants qu'aux adultes. Alors certes, c'est pas la bonne ambiance générale qu'on a chez les Italiens Mais si tu cherchais à savoir pourquoi on est si nombreux à aimer Rosa là où pour oi, ça reste assez opaque... voilà des éléments de réponse !
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Plop
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