Y a pas mal de topics sur le football et aucun ne traite le problème du dopage. Dailleurs ce phénomène nest pas particulier à ce forum, tous les médias, en général, rechignent à parler de dopage dans le foot
contrairement au cyclisme, qui subi un véritable acharnement.
Avant den parler je vous propose quelques pistes de réflexions :
Tordons le cou à une idée reçue.
Quand on veut parler de dopage dans le football, souvent on se voit répondre « Ouais, mais le foot cest pas que du physique comme dans le vélo ou lhaltérophilie, donc y a aucun intérêt ».
Je lappelle largument « Tapie », en référence aux propos du fameux Bernard concernant des pratiques dopantes à lOM de la grande époque : « A part la cocaïne, il n'existe aucun produit capable de donner du dynamisme et en même temps de garder sa lucidité, de donner de la force et de garder l'adresse. Donc, on n'a pas vraiment dans le football de produits qui, comme dans d'autres sports, seraient utiles. »
Pour sen rendre compte, voici quelques classes de produits ou substances avec leurs effets recherchés et indésirables :
Les amphétamines : Psychostimulant, augmentation de la ventilation, perte de poids, lutte contre la fatigue musculaire et psychique.
Effets indésirables : Psychoses aiguës, accidents vasculaires cérébraux, infarctus du myocarde, troubles du rythme cardiaque, maladies pulmonaires sévères, toxicomanie, mort subite.
Hormone de croissance ou somatropine : Augmentation de la masse musculaire, potentialisation de l'effet des anabolisants.
Effets indésirables : Déformation des os, diabète, troubles thyroïdiens, gynécomastie, maladie de Creutzfeldt-Jakob.
Erythropoïétine ou EPO : Augmentation du transport d'oxygène due à une augmentation accrue de globules rouges, augmentation de la VO2 max.
Risques possibles à court terme :
Infarctus cérébraux, infarctus myocardiques, embolies pulmonaires, thrombose, mort subite./
Risques envisageables à long terme (à valider scientifiquement) :
Maladie auto-immune, hypertension artérielle, cancer de la moelle osseuse.
Nandrolone : La nandrolone est un dérivé de la testostérone à laquelle on a simplement supprimé un radical chimique (méthyl) de son 19e atome de carbone. Cette manipulation confère à la nandrolone des vertus fortement anabolisantes .
(NB : La créatine nest pas vraiment un dopant
mais est plutôt considéré comme un produit « masquant médiatique », je laisse donc de côté.)
Ca paraît clair, même si aucun produit ne permet de réussir des contrôles à la Zidane ou des drible à la Figo, il existe bel et bien toute une pharmacopée susceptible daméliorer considérablement les performances physiques dun footballeur engagé dans une saison de 70 matchs.
D'ailleurs on trouve des produits pour tous les types de sports...
Bref, largument « Tapie » ne tient donc pas la route, je vous remercie de pas lutiliser
Le scandale des veuves du Calcio :
L'affaire « des veuves du Calcio » commence avec le décès du footballeur Andrea Fortunato en 1997 d une leucémie, il a 24 ans. Peu après, l entraîneur tchèque de l AS Roma, Zdenek Zeman, fait une déclaration fracassante pour dénoncer le dopage dans le football italien « Il faut que le football sorte des pharmacies !» et émet de sérieux doutes sur létonnante musculature des cuisses de Del Piero et de Vialli, joueurs vedettes de la Juventus : « je pensais que certains résultats ne s'obtenaient qu'après des années de culturisme ».
Ces deux faits intriguent le procureur Guariniello (magistrat réputé pour être spécialiste des problèmes sanitaires, amiante ect
) qui ouvre une instruction judiciaire et lance une énorme enquête épidémiologique sur 24 000 footballeurs professionnels ayant évolués dans le Calcio entre 1960 et 1996 en serie A, B et C. L'enquête va durer 3 ans.
Entre temps, Gianluca Signori, ancien capitaine de la Sampdoria, est atteint d'une sclérose latérale amytrophique ou "SLA" (ou encore maladie de "Lou Gehrig" un joueur de baseball americain), maladie rare et incurable qui attaque le système nerveux et fait perdre l usage de tous ses membres. Signori fait un ultime adieu aux 30 000 supporters de la Samp en 2001 (il est alors complètement paralysé) et décède en novembre 2002.
Début 2003, lenquête épidémiologique arrive a son terme et elle est effrayante. Elle met en lumière que les taux de leucémies, de cancer du colon, du foie et du pancréas sont 2 fois plus élevés que la norme nationale et aussi que les cas de SLA s élèvent à 45 alors qu on en attendait qu un seul !
"Quand nous avions commencé, nous pensions qu'il s'agissait de quelques cas isolés. Avec la SLA, nous nous attendions à trouver au maximum un cas. Sur un échantillon de 24 000 personnes, le taux devrait être de 0.61. Or nous avons découvert que huit joueurs sont décédés de cette maladie sur cette période, et cinq autres entre 1996 et 2002. Du point de vue statistiques épidémiologiques, c'est absolument exceptionnel !" déclare Guariniello à Libération en janvier 2003.
Les médecins ne savent pas encore quel est le lien entre la SLA et la pratique du foot à haut niveau, bien sur y a de graves soupçons sur l utilisation de produits dopants... mais ce qui est étonnant, c est que la SLA semble être une maladie spécifique à ce sport.
En effet le juge a fait réaliser une enquête sanitaire sur la SLA auprès de 6000 cyclistes italiens, et le taux est tout à fait normal.
On semble donc en présence d une "maladie professionnelle du footballeur"... et ce qui est terrible, c est que les cas de SLA ou de leucémies se déclarent vers 35/ 45 ans environ, on est peut-être devant une bombe à retardement.
Parallèlement, le juge commence à sintéresser de plus en plus à la prestigieuse Juventus de Turin.
Après une perquisition en règle dans les locaux de la vieille dame, les enquêteurs découvrent dans la pharmacie tous les produits possibles et imaginables, en tout, près de 281 produits différents et le plus souvent interdits, en quantité digne dun petit hôpital !
Antonio Giraudo, administrateur du club et Riccardo Agricola, médecin, se voient accusés de «fraude sportive» et d'«administration de produits dangereux pour la santé» entre 1994 et 1998.
Il faut noter que sur la période qui est l objet d une enquête pénale, de 1994 à 1998, la Juve a remporté 3 titres de champions d Italie en 4 ans (1995, 1997, 1998), une coupe d Italie (1995) et a disputé 3 finales de league des champions (1996, 1997, 1998) dont une remportée en 1996
Cest dans le cadre de cette enquête que les Zidane, Del Piero, Ronaldo, Deschamps et consorts ont été appelés à témoigner, le procès est actuellement en cours, voici les évolutions de la dernière audience pour ceux que ça intéressent.
http://www.liberation.com/page.php?Article=219401
La prochaine audience aura lieu le 15 juillet, la fin du procès est prévu pour Octobre.
Des déclarations et des faits en vrac :
Déclarations (jen rajouterais quand jaurais récupéré toutes mes sources
)
«Je fais des perfusions d'un produit dont je ne connais pas le nom ; je crois qu'il s'agit de vitamines et de sucres. Je ne sais pas si le produit s'appelle Neoton ou Esafosfina». «Les perfusions sont utiles. Sinon comment pourrais-je jouer 70 matchs par an ?» Interrogé sur le recours au Samyr (un antidépresseur) : «J'en prends par intraveineuse. Cela me sert pour éliminer la fatigue ». «J'ai des carences en fer importantes. Il m'arrivait d'en prendre quatre ou cinq fois par an». Zinedine Zidane, entendu dans le cadre du procès de la Juve.
« Après étude des dossiers médicaux des joueurs, il est inévitable de penser à une stimulation pharmacologique de la moelle osseuse et à la nécessité conséquente de préparation à base de fer aux fins de synthèse de l hémoglobine des globules rouges excédentaires. Parmi ces stimulants nous pouvons citer comme piste : les anabolisants, l hormone de croissance et l EPO ». Déclaration des experts italiens en hématologie durant le procès de la Juve.
"A la coupe du monde 1986 l'assistance médicale de l'équipe d'Allemagne etait impressionnante ainsi que la quantité de pilules en tout genre. Mais outre les médicaments, nous étions assaillis de piqûres, le professeur Liesen en injecta près de 3000 !" Harald Schumacher, gardien de léquipe nationale dAllemagne.
"Automne 1984 à Cologne, une fois de plus les dirigeants nous parle d'un match décisif. Une fois de plus, la survie du club semblait en jeu. Plusieurs joueurs tâtèrent de différents stimulants. N'importe comment. Sans aucun discernement. Ils avalèrent un sirop contenant une forte dose d'éphédrine. Gonflés à bloc, ils arpentèrent le terrain comme des lapins possédés par le démon. Nous avons gagnés, mais dans quel état !" toujours Harald Schumacher.
« Jai déjà pris des produits, mais jamais avant les grands évènements.» Dominique Rocheteau.
« Entre la durée des voyages et les entraînements, aucun joueur ne peut répéter tous ces efforts tous les trois jours. Il y a cinquante ans, on marchait, puis on s'est mis à courir. Aujourd'hui, ça vole ! La différence se fera désormais pendant les préparations. La médecine prend une part de plus en plus importante." Emmanuel Petit.
« Au sujet de lUEFA, je suis effondré vous limaginez bien. Dans mon livre, jexplique précisément comment la FIFA a littéralement fait semblant de traquer lEPO lors du Mondial 2002, en déclarant avoir fait 512 tests sanguins et urinaires là où ils nont fait que 256 tests sanguins... soit aucune recherche directe des traces dEPO exogènes chez les footballeurs présents en Corée.... Quajouter ? » Réponse dEric Maitrot sur labsence de contrôle positif lors de leuro 2004
« A ce jour, je n'ai aucune idée de ce que c'était, le médecin du club me disait seulement que cela me donnerait une décharge d'adrénaline et je ne me suis jamais senti en état de réclamer du repos. Quel que fût le produit, mes performances se sont améliorées. Je me raccroche à l'espoir que c'était légal, même si en réalité je suis sûr à 99% que ça ne l'était pas. » Tony Cascarino, joueur de lOM de 1994 et 1996.
"Le médecin du club disait que les injections nous aideraient pour récupérer après les matches mais après deux d'entre elles, je ne voyais pas la différence. Alors j'ai laissé tomber." Chris Waddle, joueur de lOM.
« Depuis vingt-huit ans que je suis dans le football, je n'ai jamais vu un footballeur mourir sur un terrain" Sepp Blatter.
« Le salon du Dotore ne désemplit pas de sportifs en tout genre. La première fois que les ai vus, sagement assis, avec leur mine de vierge à sa première visité chez le gynéco, jai failli exploser de rire. Cétait donc là que le gratin du sport de haut niveau venait se ressourcer. Quelle magnifique photo de famille ! Dormez tranquilles, fans de buts surnaturels et amateurs de records pulvérisés. Si un paparazzo réussissait un pareil cliché, aucun magazine naurait le mauvais goût de le publier. Pourquoi briser les rêves de millions de spectateurs à travers le monde, surtout quand ils génèrent autant dargent ? En son temps, Giovanni Agnelli lavait bien compris. La Juventus nétait pas un investissement de mécène. Le lundi matin, lorsque « leur » équipe avait gagné la veille, les ouvriers de chez Fiat retournaient à lusine de bon cur. Du pain et des jeux. Cétait la Rome antique, mais rien na vraiment changé depuis. » Erwann Menthéour.
Des faits :
- Pour la coupe du monde 1998 en France, les sélections italienne, belge, espagnole, hollandaise et autrichienne font une sacré bourde : elles déclarent à lAgence du Médicament une demande dimportation pour des produits interdits dont la nandrolone
- Ils ont été contrôlé positifs à la nandrolone : David Garçion (Lille), Cyrille Pouget (Le Havre), Vincent Guerin (PSG), Dominique Arribagé (Toulouse), Antoine Sibierski (Auxerre), Christophe Dugarry (Marseille), Franck de Boer (Barcelone), Edgar Davids (Juventus Turin).
- Le jeudi 16 octobre 2003, la police suédoise a saisi des seringues usagées lors d'une perquisition à Malmoe dans l'hôtel où séjournait la délégation du Sporting Portugal, avant le match de Coupe de l'UEFA qui opposait le club portugais au Malmoe FF. Les policiers suédois ont agi sur commission rogatoire après que des employés de l'hôtel eurent signalé la présence de "seringues ensanglantées" dans la chambre du Brésilien Correa Anderson Polga et du Portugais Roberto Seveno, selon le quotidien Aftonbladet. Des seringues ont également été saisies dans les chambres d'autres joueurs, affirme Expressen. Le médecin, José Pereira, et l'infirmier de l'équipe portugaise ont assuré qu'il s'agissait de "multivitamine".
- L'attaquant croate Ivica Olic a subi un contrôle antidopage positif (méthylprednisolone)
après le match contre la France à l'Euro-2004 (gr. B) mais n'a pas été sanctionné par l'Union européenne de football (UEFA).
- Pour Eugenio Mueller, ce recours au Neoton et à l'Esofosfina aurait eu pour objet de stimuler le «métabolisme énergetico-musculaire» des footballeurs. Ces deux médicaments auraient été injectés par intraveineuse avant et après les matchs à plusieurs joueurs dont Conte, Del Piero, Ferrara, Lombardo, Ravanelli, Baggio et Vialli. (Procès de la Juve).
- Le joueur russe Yegor Titov a été contrôlé positif au bromantan (un agent masquant) le 15 novembre à Moscou au terme du match aller de barrage Russie-pays de Galles (0-0). Le pays de Galles sest incliné à Cardiff (0-1) au match retour.
Sur les dix dernières années,: ils sont morts en plein match (liste non exhaustive
).
1995 - Augusto Candido (BRE - 23 ans)
1995 - Albino Ribeiro "Bareta" (POR - 31 ans)
1995 - Amir Angwe, (NIG - 29 ans)
1996 - Josif Gjergi (ALB - 30 ans)
1997 - Emmanuel Awanegbo (NIG)
1997 - Hedi Berrakhissa (TUN - 24 ans)
1999 - Stefan Vrabioru (ROU - 24 ans)
2000 - John Ikoroma (NIG - 17 ans)
2001 - Lakdar Boukria (FRA - 26 ans)
2001 - Youssef Benkhouja (Mar - 26 ans)
2002 - Marcio Dos Santos (BRE - 28 ans)
2002 - Michael Michael (CHY - 32 ans)
2002 - Stefan Toleskin (MKD - 23 ans)
2003 - Gelu Dascalu (ROU - 20 ans)
2003 - Maximiliano Patrick Ferreira (BRE - 20 ans)
2003 - Marc-Vivien Foé (CAM - 28 ans)
2004, Miklos Feher (Hongrie 24 ans).
Le dopage du futur :
La thérapie cellulaire :
Pour linstant, le détournement des techniques de thérapie cellulaire et dingénierie tissulaire au profit de la performance sportive relève de limagination. Du moins en partie.
Mais ce champ nécessite dors et déjà une sérieuse réflexion éthique et réglementaire
Voici, sans présager de leur application réelle, quelques perspectives.
Au lieu de substances interdites, certains sportifs recevront peut-être des greffes de cellules souches transgéniques qui fabriqueront directement les produits dopant dans leur organisme. Fiction ? Voire, car cette technique a déjà été réalisé dès la fin des années 90 sur des babouins. Après avoir introduit le gène codant pour lérythropoïétine dans les cellules souches, des chercheurs américains les ont implantés dans les primates. Dès le 4eme jour, leur taux moyen dEPO a été multiplié par 10. Et que dire des ces souris à qui on a injecté le gène de lIGF-1 et qui ont vu leur musculature et leur force augmenter de 15 % ?
En outre, laccroissement des connaissances sur le génome permettra peut-être de produire des substances chimiques personnalisées, adaptées au profil et aux besoins de chaque sportif
Sans parler de manipulations plus simples, comme dobtenir des plus grands basketteurs. Charles Cantor, directeur du centre de biotechnologies avancées de Boston déclare : « Je pourrais manipuler un embryon pour faire naître quelquun plus grand. Il suffirait de greffer quelques gènes commandant la synthèse de lhormone de croissance. Mais on peut imaginer quà lavenir, on tente des modifications plus ambitieuses. »
On pourrait aussi envisager lutilisation de certaines molécules qui modifieraient les récepteurs hormonaux de façon à augmenter leur activité. Certains facteurs pourraient être utilisés pour récupérer plus vite après une blessure, accroître la vitesse de conduction nerveuse et donc diminuer les temps de réaction, développer la vision nocturne ou accélérer la capacité de poursuite visuelle dun objet (comme une balle)
Certains chercheurs incorporeront peut-être des xénobiotiques, comme la résiline, cette protéine dont se servent les puces pour sauter 300 fois leur taille en hauteur, et dont limplantation risquera de poser des problèmes aux futurs compétiteurs de saut en salle. Toujours de la fiction ?
Le jour où les progrès biotechnologiques réalisés dans le traitement des myopathies seront détournés au profit des membres inférieurs des sportifs, ceux-ci acquerront une telle détente que tous les records de saut seront instantanément pulvérisés.
Sources :
« Les scandales du sport contaminé » Eric Maitrot. (Flammarion)
« Les alchimistes de la performance : histoire du dopage et des conduites dopantes » Patrick Laure. (Vuibert).
« Secret défonce » Erwann Menthéour, (Jai lu).
http://www.dopage.com/
http://www.cahiersdufootball.net
http://www.lequipe.fr
Vala, vala, y a pas que le cyclisme dans le dopage Des réactions ?
Message édité par Loopkin le 09-07-2004 à 17:53:46
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Vous êtes marié comme moi, vous savez que la monstruosité peut prendre des formes très diverses.