Les partisans du oui au réferendum sur le projet de constitution européenne sont des êtres pour le moins curieux et paradoxaux. Dans un premier temps, ils nous annoncent que si le oui gagne, le chômage va disparaître, l’Europe ne connaîtra plus jamais la guerre, les délocalisations stopperont, les droits de l’Homme seront respectés… En vérité, à ce rythme là, dans quelques semaines, les sociaux-démocrates nous promettrons même que l’adoption de ce projet de constitution fera disparaître la faim dans le monde, le racisme, l’antisémitisme, la cellulite et les dépressions nerveuses ! Ensuite, ils insistent sur le fait que « ah mais attention ! on n’en prend pas ‘pour cinquante ans’ comme l’a malencontreusment dit VGE ! Cette constitution sera à tout moment modifiable ! ». Et bien, on est ravi de l’apprendre, mais puisque monts et merveilles nous sont promis en cas de victoire du oui, pourquoi diantre voudrait-on modifier la constitution après son adoption ?
J’ai relu Le rappel à l’ordre, Enquête sur les nouveaux réactionnaires, de Daniel Lindenberg. C’est effrayant de connerie. Certes, tout n’est pas faux : qu’Alain Soral, brejnevien machiste et homophobe, et Pierre-André Taguieff, fan d’Oriana Fallacci, soient deux crétins, personne n’en doute. Mais, ceci mis à part, Daniel Lindenberg sombre dans le délire paranoïaque le plus complet. Il ressort de son pamphlet qu’appartiennent à la catégorie des «nouveaux réactionnaires » : ceux qui utilisent trop souvent les mots « nation » ou « peuple », ceux qui critiquent les élites, ceux qui n’appartiennnent pas à ce qu’il appelle affectueusement et fallacieusement « la gauche égalitaire et la droite libérale », ceux qui ne sont pas « libéraux », ceux qui critiquent l’Islam, ceux qui se livrent à la « transgression systématique de tous les tabous », ceux qui lisent Marianne, ceux qui versent dans l’« antiaméricanisme », ceux, qui au contraire, versent dans le néoconservatisme, ceux qui lisent Michel Houellebecq, ceux qui s’inspirent de Guy Debord, ceux qui n’aiment pas Jacques Maillot, ceux qui ne se sont pas vautrés dans le « jeunisme », ceux qui détestant Jack Lang, ceux qui étaient contre les interventions occidentales dans les Balkans, ceux qui dénoncent l’instrumentalisation des droits de l’Homme à des fin de justification des politiques impérialistes, ceux qui détestent le filon libéral-libertaire des Libération et des Cohn-Bendit, ceux à qui le nihilisme qui caractérise l’Europe actuellement fait horreur, ceux qui dénoncent « l’horreur économique » du capitalisme, ceux qui sont attachés à la langue française, ceux qui déplorent la défaite de la culture, ceux qui pensent que la majorité n’a pas toujours raison, ceux qui estiment que la démocratie dans laquelle nous (sur)vivons n’est pas parfaite, ceux qui trouvent des choses à redire à la mondialisation/globalisation, ceux qui dénoncent le « mondialisme », ceux qui sont altermondialistes, ceux qui sont suspects de souverainisme, ceux qui s’inquiètent de la montée des communautarismes, ceux qui n’apprécient ni les Inrocks ni Technikart, ceux qui sont partisans du progrès, ceux qui fustigent le progressisme, ceux qui n’aiment pas les archéostaliniens, ceux qui abhorrent le mitterrandisme et « l’esprit Canal + », ceux qui rejettent la démocratie marchande et la société de consommation… En résumé : sont réactionnaires tous ceux qui refusent de céder au mensonge vertueux -à la mode du côté du PS- qui consiste à croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, que « c’est ainsi », qu’ « on ne peut rien y faire », etcetera. Depuis l’Intifada, nous sommes tous des Palestiniens, depuis le 11 septembre 2001, nous sommes tous des Américains, depuis Le rappel à l’ordre, nous sommes tous des « nouveaux réactionnaires » !
« On les a récupérés, oui mais moi on m’aura pas, je tirerais le premier et j’viserai au bon endroit. » Monsieur Renaud Séchan, nous avons le regret de vous informer que vous êtes l’heureux signataire d’une pétition appelant à voter oui au réferendum sur le projet de constitution européenne…
Beaucoup aujourd’hui, surtout chez les « djeunes », ont une phobie de l’ « extrémisme ». Il faut donc être « modéré » pour passer inaperçu, pour se fondre dans la masse. Notons d’emblée que les termes « extrémistes » et « modérés » ont souvent, dans la bouche des élites occidentales, des acceptions très particulières : est « extrémiste » celui qui refuse de servir les intérêts de telle ou telle puissance impérialiste. A contrario, n’importe quel dictateur pourra être considéré comme « modéré » s’il s’en tient au rôle qui lui est attribué par ses maîtres. C’est ainsi que Hitler a longtemps été considéré comme un « modéré » par les officiels américains. Il n’est devenu un affreux « extrémiste » que très tardivement et, en tout cas, bien longtemps après avoir écrit Mein Kampf. Dans le même registre, au moment même ou des « extrémistes » islamistes essayaient de faire sauter le World Trade Center en 1993, les USA acheminaient des islamistes du Hezbollah ainsi que des terroristes wahhabites dans les Balkans : ces islamistes là étaient « modérés » puisqu’ils servaient les intérêts américains. Le vénézuélien Chavez a été élu de manière nettement plus démocratique que Bush en 2000, ce qui ne l’empêche pas d’être dans le camps des « extrémistes » et –pis encore ! - des « tyrans » car il n’est pas suffisamment servile à l’égard du Capital yankee. L’occidental « modéré », ce fléau, est facile à décrire : il n’aime pas les communistes, ni les fachos, il n’est ni trop à droite, ni trop à gauche, plutôt centriste en fait, « centre-droit » ou « centre-gauche » comme on dit, PS ou UDF. C’est certes un crétin, mais pas n’importe lequel : un crétin qui recherche le Consensus (ce qui n’arrange rien). Vous comprenez, il ne veut froisser personne, il ne se sent pas « réactionnaire » évidemment, même pas « islamophobe » (il déteste Michel Houellebecq, ce « facho ! »), c’est dire ! Il n’est pas révolutionnaire non plus : il n’a jamais entendu parler de Guy Debord et du situationnisme. Il se dit « démocrate » évidemment, et a horreur des dictatures et des tyrans, mais la démocratie des Conseils, il ne s’y est jamais intéressé. Il se sent « plutôt cultivé » parce qu’il a lu Alain Minc et achète Le Monde régulièrement, mais pas trop cultivé non plus car il lui est arrivé d’avoir à passer par la case « rattrapage » pour réussir ses examens. En vérité, il n’est pas si intelligent que ça : il n’a pas encore compris que « centrisme » n’était pas synonyme de « neutralité » et, sous couvert de fatalisme, de « progrès » et de morale, il se vautre gaiement dans le nihilisme : « cet homme des civilisations tardives et de la clarté déclinante sera en gros un individu plutôt débile ; son vœu le plus profond sera de mettre fin une bonne fois à la guerre qu’il est lui-même » (Nietzsche, Par delà bien et mal).
L’opinion s’est insidieusement répandue que c’est le schéma de l’unique alternative qui s’applique concernant le système économique : capitalisme, capitalisme et encore capitalisme ! On devrait donc voir, dans les prochaines années, la droite « classique » entamer son déclin. En effet, les électeurs ont un choix simplissime à effectuer : chez les démocrates-chrétiens, souverainistes et autre gaullistes, le capitalisme et les accusations d’accointances avec le fascisme ; chez les sociaux-démocrates et leurs alliés, un capitalisme en tous points semblable, mais avec la conscience tranquille et, en prime, l’ennivrante sensation d’être dans le camp du Bien !
« La révolution est le contraire de la violence(sic). Elle est un tendre(re-sic) engagement. », ces magnifiques phrases sont…d’Olivier Besancenot (Révolution ! 100 mots pour changer le monde !) . Les rapports de force nous sont extrêmement défavorables, et en plus notre « tendre engagement » nécessiterait que l’on renonce par avance à la violence ! Avec de telles inepties, on n’est pas sorti de l’auberge capitaliste…
Ca y est ! Khadafi est l’ami de la France ! Jusqu’en 1979, tel était déjà le cas, mais, on ne sait trop pourquoi, du jour au lendemain, il est devenu l’incarnation du Mal sur Terre, il a été « fascisé », « nazifié », « hitlérisé ». La dénonciation de la « bête immonde » Khadafi avait atteint un tel degré d’hystérie dans les années 80 que tous les malheurs du monde, à l’exception peut-être des catastrophes naturelles, lui étaient imputés… Et puis, au motif qu’il a renoncé à des armes de destruction massive qu’il ne possédait pas, il a à nouveau basculé dans le camp du Bien ! Donc, pour le récompenser d’avoir renoncé à des armes qu’il n’a jamais eues, c’est fort logiquement que la France a décidé de reprendre ses ventes d’armes à destination de Tripoli. Une leçon à retenir : si vous êtes mis à l’écart par la communauté internationale et que cette situation vous pèse, annoncez la destruction de stocks d’armes imaginaires et, non seulement on vous encensera, mais en plus on vous permettra d’acquérir ces armes que vous n’aviez pas ! En attendant, on pourra toujours méditer sur l’amnésie que semblent attribuer spontanément nos dirigeants à la population : croient-ils vraiment que, lorsqu’un chef d’Etat passe du jour au lendemain du statut de néo-Hitler à celui de respectable partenaire, tout le monde est dupe ? Une fois encore, on ne se privera pas d’appeler Orwell à la rescousse : « Au sixième jour de la Semaine de la Haine, […] alors que le grand orgasme palpitait vers son point culminant, que la haine générale contre l’Eurasia s’était échauffée et en était arrivée à un délire tel que si la foule avait pu mettre la main sur les deux criminels eurasiens qu’on devait pendre en public le dernier jour de la semaine, elle les aurait certainement mis en pièces, juste à ce moment, on annonça qu’après tout l’Océania n’était pas en guerre contre l’Eurasia. L’Océania était en guerre contre l’Estasia. L’Eurasia était un allié. […] [L’] orateur avait passé d’une ligne politique à une autre exactement au milieu d’une phrase, non seulement sans arrêter, mais sans même changer de syntaxe » (1984) .
«On veut toucher le ciel étoilé sans baisser l' pantalon» affirme le « rappeur » Passi. Comme s’il n’avait pas eu besoin de le baisser, son foutu pantalon, pour en remplir les poches ! Car c’est pourtant ce qu’il a fait ce pitoyable rappeur, ce pantin, cet histrion, cette marionnette, ce clown, ce guignol, cet analphabète, cet apologiste du Capital ! Ca me fait penser à ces histoires de diplodocus qui avaient un cerveau tellement petit et un corps tellement imposant que plusieurs minutes étaient nécessaires pour que la sensation d’un coup violent porté à la queue parvienne jusqu’au cerveau. Passi est assez semblable à ces dinosaures, quoiqu’à un stade encore plus primitif de développement : il se fait enculer depuis des années mais n’a pas encore pris conscience qu’il a baissé le pantalon !
Le système spectaculaire marchand a ceci de génial qu’il arrive à faire passer ses meilleurs chiens de garde pour ses pires ennemis . Le stalinien , le cégétiste, le fasciste, le skinhead néonazi, la racaille sont autant de défenseurs du Système mais le Spectacle parvient efficacement à les faire passer pour des adversaires farouches de l’ordre établi. On a pu voir récemment que le Système avait atteint un degré de perfection quasi-parfait dans la mise en place de ses défenses : désormais , il n’a plus besoin de CRS pour tabasser les lycéens lors des manifs, les racailles s’en chargent ! Du point de vue de la bourgeoisie, cela est très positif , rendez vous compte : les racailles jouent le rôle des flics, à la différence près qu’ils n’ont même pas besoin de recevoir d’ordres et que personne n’ira leur reprocher d’agir pour le compte de l’Etat ou du Pouvoir !
Dans un récent discours, l’Empereur George W.Bush expliquait que c’était un devoir moral de détruire ce qu’il reste de protection sociale aux USA … Non seulement Dieu n’existe pas , mais en plus il lit Milton Friedman !
20h 29, un triste jour de février 2005, on eut le droit à un reportage de cinq minutes sur les godemichés au journal télévisé de France 2 . J’étais pourtant persuadé que France 2 était une chaîne publique . J’ai du me tromper . Une demi-heure plus tard , c’est l’heure de Di Fool sur Skyrock - la-radio-jeune-qui-est-super-trop-rebelle –… et même sujet de conversation que France 2 . Parler sodomie et godemiché en permanence , ce doit être une manière de faire comprendre aux prolétaires que , d’une manière ou d’une autre , ils sont là pour se faire enculer.
J’ai lu quelque part , dans le magazine Cancer peut être , que le patron d’un bar rennais connu pour sa « coolitude antiraciste » avait sabré le champagne avec quelques gauchistes lorsqu’il a appris que les tours jumelles de NY étaient en flammes , frappées par deux avions de ligne détournés . C’est l’antiracisme sélectif . Ca fonctionne souvent comme suit : faute de grives , on mange des merles , faute de Révolution prolétarienne , on soutient la Djihad , faute de prolétaires conscients de leur appartenance de classe , on soutient les terroristes wahhabites. Je me fais la réflexion que ce patron doit être complexé par son statut… de patron justement . Dans sa jeunesse , il a probablement été communiste. Maintenant , qu’il est passé de l’autre côté de la barricade et qu’il s’en fout plein les poches , il a honte , il culpabilise , alors l’antiaméricanisme est son ballon d’oxygène : ça lui permet de se donner bonne conscience à peu de frais . A peu de frais… pour l’instant du moins, car la caque sent toujours le hareng et un patron restera toujours un patron , c’est-à-dire un exploiteur , son antiaméricanisme benladenophile n’arrangeant pas les choses. On savait que l’antisémitisme était le socialisme des imbéciles , on n’ignore plus désormais que l’antiaméricanisme est le communisme des patrons.
Il y a des jeux d’une exceptionnelle intelligence sur TF1 . On peut appeler , de temps à autre, pour gagner des gadgets. Deux millions de Français composent un numéro à 35 centimes d’euros la minute , un a la chance de gagner un album de Jennifer . Et il peut s’estimer heureux si TF1 ne lui demande pas le remboursement des frais de port .
Le mot « putasserie » a disparu de certains dictionnaires récents . Il y était encore il y a quelques années , mais la destruction de la langue « progresse » rapidement . L’argument de ceux qui se félicitent de cette destruction est simple, d’aucuns diraient simpliste : certains à l’extrême droite défendent la langue française , donc tous ceux qui la défendent sont des fachos . Mais voilà , tout n’est pas simple : des irréductibles gaulois résistent encore au langage haissehaimehaisse , au verlan et autre parler djeune …
Parmis les chansons qui passent en boucle à la radio, il y en a une dans laquelle une jeune fille chante que « la cité tue les rêves » . Malheureusement , la cité en laisse un intact , et ce n’est pas le moins nocif : celui de l’existence d’un Dieu. Les subventions versées par le PS aux associations « caritatives » islamistes n’y sont peut être pas pour rien…
France Inter n’hésite pas à consacrer dix minutes de son journal de 13 heures au mariage d’un prince et on a également pu y entendre récemment une émouvante apologie de la fraude lors des élections en Irak signée Bernard Guetta. Ce à quoi il faut ajouter des heures de propagande grossière au moment de la mascarade « démocratique » ukrainienne . Je croyais que France Inter était un service public . J’ai du me tromper.
J’ai lu quelque part que Skyrock était plus dangereux que Radio Courtoisie . Je suis d’accord, mieux même , j’étend volontiers le raisonnement : le PS est plus dangereux que le FN et Libération est plus dangereux que Minute . Libération devrait se rebaptiser Aliénation , pour avoir un nom plus en accord avec son contenu . Durant l’année 1984 (1984 , quelle coïncidence !) , Libération , qui s’était autoproclamé « journal de gÔche », a titré « vive la crise ! » . On pouvait également lire, dans ce torchon et à la même époque , les comptes-rendus des exploits héroïques des « combattants de la liberté » en Afghanistan . On a pu admirer depuis , dans les transports en commun madrilènes par exemple , à quel point ces « combattants de la liberté » étaient des hommes forts respectables … Aujourd’hui , Libération appartient à Rothschild , la boucle est bouclée . Il y a l’(in)Humanité aussi comme torchon , c’est un journal stalinien appartenant à TF1 et Lagardère, je crois . Debord qualifiait l’(in)Humanité de « dégoûtant journal tout aussi chargé de sang et de mensonges que les comptes du Docteur Garetta » . Ce n’est pas allé en s’améliorant.
Chevènement dit que le débat sur la Constitution européenne est biaisé, que seuls les partisans du « oui » peuvent s’exprimer .Je suis d’accord avec lui , pour une fois . Du temps où la France était encore un peu démocratique , trotskistes , staliniens , souverainistes et autres fascistes auraient eut accès aux médias pour défendre le « non » . A propos de démocratie , on nous parle un peu de l’Irak : c’est une démocratie maintenant . Il y a eu des élections sans campagne électorale , les gens ont voté pour des candidats anonymes , les résultats sont ignorés de tous , à Bassorah , des barbus défilent avec des portraits de l’ayatollah Khomeini , bref , une démocratie quoi .
J’ai vu trois jeunes prolétaires occupés à coller des affiches nationalistes bretonnes. Résumée sommairement , leur philosophie est : « les Français dehors ! les Arabes aussi ! » . Spectacle affligeant que ces jeunes qui ont renié leur appartenance à la classe prolétarienne et qui s’inventent une persécution imaginaire (« les Français» sont dans l’imaginaire des nationalistes bretons ce que « les Américains» sont dans celui des staliniens d’antan). Comme pour confirmer ce total reniement , ils se dirigent vers un panneau d’affichage libre et arrachent les affiches annonçant un meeting de Lutte Ouvrière . Des lâches, en plus : incapables d’assumer leurs opinions racistes , ils « oeuvrent » la nuit, si possible une nuit de brouillard épais avec un temps à ne pas mettre un chien dehors .
Message édité par Noam Chomsky le 28-03-2005 à 17:08:04
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