«Une nouvelle histoire de la Bolivie commence» : les larmes aux yeux, de son fief de Cochabamba, dans le centre du pays, Evo Morales, le leader indien de la gauche bolivienne, s'est proclamé vainqueur, dimanche dans la soirée, de l'élection présidentielle, sur la foi de sondages de sortie des urnes mais sans attendre la proclamation de résultats officiels par la Cour nationale électorale (CNE). Au même moment, plusieurs milliers de personnes défilaient dans les rues de la ville : «Evo président, le pays répond présent !»
Coca. Dix ans après qu'il a fondé le MAS (Mouvement vers le socialisme), vingt ans après son entrée dans le syndicalisme paysan auprès des petits cultivateurs de feuilles de coca boliviens, Evo Morales, 46 ans, qui se réclame à la fois du Cubain Fidel Castro et du Vénézuélien Hugo Chavez, a balayé les partis traditionnels qui se partageaient le pouvoir depuis la fin de la dictature, en 1982.
La CNE a promis, hier, de proclamer les résultats définitifs aujourd'hui, mais tous les instituts de sondage semblaient indiquer que la présidence ne pouvait lui échapper, même dans l'éventualité d'un second tour (s'il n'atteint pas 50 % des suffrages). Selon la Constitution bolivienne, ce deuxième tour se tiendrait alors devant le Congrès, soit les 157 députés et sénateurs réunis.
Ses principaux adversaires ont implicitement reconnu la victoire d'Evo Morales. «Je félicite les candidats du MAS, ils ont fait une bonne campagne», a ainsi déclaré le candidat de la droite libérale, Jorge Quiroga, donné deuxième avec 30 % des voix environ.
Evo Morales est né sur l'Altiplano, ces hauts plateaux semi-désertiques plantés à 4 000 mètres d'altitude à l'ouest de la Bolivie, où se concentre l'essentiel des populations indiennes andines. Il milite au sein de la COB, la Centrale ouvrière bolivienne, puis dirige le syndicat des planteurs de coca du Chaparé, dans la région de Cochabamba. La coca est considérée comme une culture traditionnelle par les Indiens et Evo Morales s'affrontera dès lors à Washington, qui finance en Bolivie une politique d'éradication de cette plante pour lutter contre le trafic de cocaïne. Derrière la Colombie et le Pérou, la Bolivie est le troisième plus grand producteur de cocaïne de la région.
Par son parcours, Evo Morales est donc au carrefour des principales revendications qui ont marqué la Bolivie depuis une quinzaine d'années. Syndicales et politiques d'abord, contre la libéralisation des années 90 privatisations tous azimuts, y compris celle du système des retraites. Et celles d'une sorte de «nationalisme indien» qui, bien au-delà des revendications culturelles, accuse la «colonisation» l'arrivée, au XVIe siècle, des Espagnols de tous les retards économiques et sociaux. «Durant plus de cinq cents ans, on a sorti de notre Terre Mère la Pachamama de l'or, de l'argent, de l'étain... Mais tout a été emporté à l'extérieur», dénonce ainsi Evo Morales, qui proclamait, dimanche soir : «Pour la première fois, nous sommes présidents ; Aymaras, Quechuas, Chiquitanos, Guaranis... nous avons enfin gagné.»
Depuis dix ans, le MAS s'est donc fait le porte-parole d'intenses mouvements sociaux, qui luttent notamment pour la renationalisation de services publics tels que la distribution d'eau ou des immenses réserves de gaz naturel, exploitées par des multinationales (dont Total et l'espagnole Repsol mais aussi la brésilienne Petrobras). Et qui paralysent régulièrement le pays. En octobre 2003, la répression violente d'une manifestation dans la banlieue de La Paz fait entre 60 et 80 morts, et oblige le président Gonzalo Sanchez de Losada (droite libérale) à s'enfuir aux Etats-Unis. Son successeur, Carlos Mesa, un indépendant, jette l'éponge un an et demi plus tard, estimant que le pays est devenu «ingouvernable». C'est cette dernière démission qui avait conduit à l'élection de dimanche. Et c'est désormais à Evo Morales de prouver que le pays est gouvernable.
Que pensez-vous de cet homme ?
Pour ma part, c'est un homme comme lui qu'il faut en Afrique du Nord (Moi même Algérien)
Et je le soutiens à fond !!