La photo est-elle un ART? Ouiiii!
Question qui démange photographes et spectateurs, hésitants à octroyer ce label à l'activité d'"appuyer le bouton".
Ca paraît si simple! ...
Trop simple pour un si grand honneur pense le plus grand nombre.
D'autre part, il y a des photographies d'une si grande beauté ou tellement pleines de signification, véhiculant un message criant si fort dans le silence quiet de la photo unique...
Il en est de clichés qui secouent la planète tout entière ou qui restent à toujours inscrit dans la mémoire collective.
Il y en a qui durent un temps d'autres qui semblent éternels, ceux qui paraissent faciles: "j'aurais pu le faire moi-même..." d'autres qui laissent pantois d'admiration devant l'imagination du photographe qui réussit un tel cadrage, tel équilibre de masses, une force de couleurs, pureté, légèreté, des vrais miracles du jamais vu, de l'éphémère...
Une chose est certaine: l’œuvre d'art nécessite deux êtres, le créateur et celui qui la contemple.
N'importe le laborieux, le difficile ou le jamais vu.
N'importe la virtuosité de la technique ni le coût des matériaux employés.
Juste la réaction de celui qui, surpris devant l'objet d'art, se voit soudain grandir de son intérieur vers un sentiment, une expérience qui peut aller de la joie, l'admiration, l'explosion de bonté intérieure jusqu'à l'élévation mystique qui nous coupe de la gravité planétaire, qui nous fait oublier le moi, le hic, le nunc du quotidien.
Certes qu'un tel résultat peut ne pas être universel, à la portée de tout passant, qui s'adresse à l'autre possédant certaines clés, certaines connaissances préalables, partageant des valeurs, de désirs obscurs ou inexprimés.
L'art n'est pas exclusivement le beau ou exclusivement le message ou encore l'originalité: c'est une communication intense, forte pouvant aller à la violence même...
Qu'importe la quantité du travail artisanal, pénible ou expert requis ou les méthodes et moyens utilisés, le temps passé à fabrication de l'objet ou le prestige du créateur.
Puis tout ceci n'est pas binaire, tout ou rien, oui-non; cela peut être plus ou moins artistique, plus ou moins réussi, plus ou moins partagé par grand nombre de critiques.
Plus, il en est des objets d'art qui disent tout autre chose que l'auteur ne voulut faire passer!
N'est-il alors pas le spectateur l'artiste en dernier ressort?
Les temps, les mœurs, les environnements historiques du fait de création changent et avec eux s'en va une bonne partie de la valeur originelle de la chose d'art.
Nous croyons notre jugement toujours être le dernier mot sur l'intérêt artistique, mais d'autres contextes viendront ressusciter des oeuvres qui attendaient de la compréhension. Le créateur était en avance mental sur son temps ou décalé de ses contemporains tout simplement.
Il me vient à l'esprit ce cliché de l'auberge espagnole: on y trouve que ce qu'on y apporte.
On peut alors se demander avec le philosophe: "Ame d'où te viennent ces émotions que tu ignorais en toi?
Plus près de terre, je sens que le recadrage, la retouche, et tous ajouts ultérieurs à la photographie initiale n’enlèvent en rien de ses droits à l’appellation « œuvre d’art », ne sue autant le peintre devant sa toile ? ne la recompose-t-il pas, effaçant par ci rajoutant par là ?
La cuisine sous-jacente ne regarde point la relation entre l’objet et celui qui la contemple, s’en extasie et lui donne son interprétation.
Qui le saura?
Toujours est-il que cela n’en devienne raison de rejet final, par cause « d’ artifice », de manipulation, de fabrication en série, de consommation à bas prix, de réduction à objet naturel, produit de machines ou du hasard de la nature, avec absence de communication noble d’un Autre, qui nous confie un secret, secret qui en suggère d’autres, à jamais inaccessibles.