Il est des lieux où l'on se demande à quoi l'on sert. C'est exactement ce que je me dis actuellement sur ma chaise, dans mon bureau, là où je passe 7h30 par jour à me demander ce que je pourrais bien trouver pour passer la journée tranquillement.
Au début j'analysais cela un peu comme une faute de ma part, et puis au cours de quelques réflexions un peu approfondies et de quelques conversations avec mes collègues (qui finalement, au fond, se posent presque tous aussi la même question), je me suis aperçu que le système voulait que je perçoive cela comme une faute de ma part et que tout était organisé, d'en haut, pour que ce malaise soit partie prenante dans la journée de tout à chacun.
Au début on culpabilise, puisqu'on se demande comment un système peut rémunérer grassement des gens sans qu'ils ne fassent rien de spécifique pour cela si ce n'est passer un concours et puis entrer dans un service quelque part dans la fonction publique? Et puis, voyant que l'on a même de la promotion, on se dit que là, pour le coup, ce n'est plus de la négligence, mais bel et bien un système organisé avec la complicité de tous les acteurs en présence.
Pourquoi la hiérarchie, si présente et pressante en façade, ne voit-elle rien (ou feint de ne rien voir)?
 
Tout d'abord, ce qu'il faut comprendre c'est que mon travail est estampillé «technique» et que ma hiérarchie est administrative. Cela sous-entend donc qu'elle ne comprend rien à ce que je fais. Elle saisit la finalité (encore heureux!) mais ne souhaite pas entrer dans le «comment ça marche». A partir de là, déjà, on peut dire que le système est mauvais. Mais s'il n'y avait que cela, ça serait vite réglé.
 
Pour mon cas personnel, voilà comment ça s'est passé : je suis arrivé au
début avec la volonté de bien faire, sortant de l'école, fier de mon savoir-faire. Je me suis perfectionné même, en demandant des formations, je me suis impliqué totalement et au bout de quelques temps, je me suis aperçu que mon travail n'était même pas regardé, ou à peine. Ce descriptif rapide est mon cas, mais c'est à peu près pareil pour une majorité, donc on se laisse aller, on se démotive, on ne propose plus rien, et on arrive même de temps en temps, à embobiner le chef sur des demandes un peu complexes auxquelles il ne va rien comprendre en arguant quelques problèmes techniques et très vite, avec un peu de discernement, on saisi que pour le hiérarchique, le seul et unique soucis ce n'est pas que vous fassiez du bon travail, mais c'est d'être bien vu, peu importe ce qui se passe autour !
Pour résumer, que l'on travaille consciencieusement ou pas, la destinée est
la même pour tous : prendre des échelons, tout en regardant passer les chefs carriéristes qui se succèdent et qui ne souhaitent pas de vague autour d'eux. En gros, ils n'ont que faire de votre boulot ou de votre «non-boulot», tant que la mer est calme et sans vague.
D'ailleurs il me vient une anecdote à ce sujet, un directeur général un jour lors d'une réunion de direction, nous a affirmé que de toute façon, il ne fallait jamais attendre de récompense. Que l'on devait faire son taf sans rien demander, et si par hasard nous étions récompensés alors c'était tout bénéf. Mais qu'en revanche, si rien ne se passait (comme dans 99% des cas) alors nous ne serions pas déçus ! Curieuse façon de voir les choses.
Si nous ne devions rien attendre, aucune récompense, aucune gratitude, aucun compliment, alors autant ne rien faire, ou le strict minimum, non?
 
Mais parfois dans cet océan de paix, vient se déchainer une soudaine tempête. La tempête des grandes-bouches. J'entends par là, ceux qui osent parler de ce «petit» malaise ouvertement, voire même à la hiérarchie.
Diantre! Quelle ânerie ne font-ils pas là ! La personne naïve ne connaissant pas ce système pourrait croire qu'on contraire, alerter sa hiérarchie sur cet état de fait serait un acte salvateur pour tout le monde. Que nenni.
Si jamais on apprend que dans tel ou tel service il y a des gens inoccupés ou mal employés, alors que va-t-on penser de leurs managers?? Des bons à rien, incapables de motiver les troupes, de donner des objectifs motivants, de gonfler l'enthousiasme de chacun. Alors très vite, avant même que le bruit ne circule, il faudra déboulonner, dégrader, placardiser, discréditer, bref, mettre hors d'état de nuire celui qui a la langue bien trop pendue. Cela arrive fréquemment avec des éléments venus de l'extérieur ne prenant pas assez de temps pour observer le fonctionnement d'une telle structure. Et dans un cas pareil, vous pouvez être sûr que tous les niveaux de chefs N, N+1, N+2, N+3, etc., feront front commun pour mettre à mort le pauvre malheureux avant qu'il n'ait le temps de dire ouf. Cela peut se comprendre. Si un manager n'a pas bien su manager, alors son supérieur direct qui n'a rien vu ou rien dit ne vaut pas mieux et ainsi de suite, et c'est toute la chaine qui déraille.
Donc mieux vaut un petit dommage collatéral avec un simple salarié qui sera très vite en dépression, plutôt que d'avoir une once de courage et de voir sa carrière brisée en pleine élan.
 
Certains ont même des emplois fictifs, et ce, sans même passer par tout ce système qui vous digère avec ces concours, échelons, indice brut et majoré,
etc., etc...Non, là, il s'agit de personnes éminemment importantes, et qui pour la plupart du temps sont parachutées par des élus (souvent de la famille à placer ou des gens ayant leur carte du parti). Alors ceux-là,
même en pleine conscience de la coquille vide que représente leur mission, pourront déployer une telle énergie à faire croire que la création de leur poste était indispensable que l'on en croirait qu'ils sont débordés. Se sont souvent ceux qui passent dans les couloirs a vive allure avec des tas de dossiers sous le bras. J'ai l'impression que c'est très simple de créer des postes bidons avec des missions tout aussi vides de sens. Du coup les administrations regorgent de conseillers CNIL ou TIC, de chefs de projets Agenda 21 ou autres missions spécifiques en communication sur tel ou tel projet émanant d'un autre groupe de travail bidon.
En gros, je dirais qu'en dehors des emplois d'exécutions où les tâches sont bien définies (maintenance, secrétariat, courrier, ...) et des Ressources Humaines où l'on doit gérer tous ces emplois creux, ils n'y a pas beaucoup de monde ayant un travail qui nécessite 7h30 de présence !
Alors pourquoi installer des pointeuses et obliger les gens à rester 7h30 sur place, tout en sachant qu'ils passeront le plus clair de leur temps soit à la machine à café, soit sur facebook ou à papoter de ci de là?
Là je n'ai pas de réponse, mais je ne m'avoue pas vaincu pour autant, il doit bien y avoir une raison que je trouverai, ça m'occupera.
Ainsi le système est si bien foutu que j'emploie du monde à la maison pour garder mes enfants ou pour faire mon ménage pendant que moi je vais surfer sur internet. Vive la modernité !

Certains ont même des emplois fictifs, et ce, sans même passer par tout ce système qui vous digère avec ces concours, échelons, indice brut et majoré,
etc., etc...Non, là, il s'agit de personnes éminemment importantes, et qui pour la plupart du temps sont parachutées par des élus (souvent de la famille à placer ou des gens ayant leur carte du parti). Alors ceux-là,
même en pleine conscience de la coquille vide que représente leur mission, pourront déployer une telle énergie à faire croire que la création de leur poste était indispensable que l'on en croirait qu'ils sont débordés. Se sont souvent ceux qui passent dans les couloirs a vive allure avec des tas de dossiers sous le bras. J'ai l'impression que c'est très simple de créer des postes bidons avec des missions tout aussi vides de sens. Du coup les administrations regorgent de conseillers CNIL ou TIC, de chefs de projets Agenda 21 ou autres missions spécifiques en communication sur tel ou tel projet émanant d'un autre groupe de travail bidon.