Bonjour à tous !
Dans la catégorie essai de premier texte de premier roman d'un premier jet, voilà ma contribution. Je précise certaines choses :
1) Les noms choisis étaient parmis les plus courants à cet époque là
2) Le genre : tout au long de l'histoire, on va tendre vers le genre Steampunk ( plus d'info sur : http://fr.wikipedia.org/wiki/Steampunk ), en résumé: des technologies de nos jours ou futuristes transposées au XIXème siècle. Globalement, pour mon récit, l' Histoire est respectée jusqu'à la date du début du roman (Septembre 1899), puis c'est la divergence ( séparation avec l'Histoire réelle ).
C'était tout pour l'introduction, et maintenant, le texte :
1899, Septembre, au sud de Belfort à l‘approche du Jura. Un dirigeable volait droit vers la montagne. Dans la cabine : 2 passagers. Un vieil homme, tiré à épingles dans un costume gris pour cette journée particulière, regardait debout le paysage par le grand hublot en s‘appuyant sur sa canne, son profil droit restant caché à la vue du deuxième passager. À sa gauche, une femme en robe longue et noire était assise sur une banquette confortable, toute bleu nuit assortit de décorations fleuries et dorées. La jeune demoiselle semblait impatiente: « Puis-je enfin savoir précisément quelle sera ma mission au près de ces enfants? Demanda-t-elle
- Les rendre humains! Répondit le directeur.
- Pardon? S’étonna-t-elle.
- Ce ne sont pas des enfants…ordinaires. Nous avons la chances, et parfois la malchance, de regrouper les plus brillants enfants du pays. L’école des Monts rassemble l’élite intellectuelle de la jeunesse…
- Mais le problème est que…? Insista la jeune femme.
- À force de les garder entre l’élite, ils se déshumanisent, ils n’ont plus aucune relation sociale normale. Ils n’ont quasiment pas de sentiments vis-à-vis des personnes qui ne sont pas … de leur niveau. Par ailleurs certains deviennent complètement fou à lier et extrêmement dangereux. Il y a quelques mois, l’un de nos lauréats est partis en Allemagne, car l’armée allemande avait lancé un concours pour de nouvelles armes. Il est donc parti fabriquer des armes!
- Qu’est-il devenu? Interrogea la jeune femme.
- Pff… souffla-t-il désespéré. Je n‘ai reçu aucunes nouvelles. Mais les autres, en voyant que l’industrie des armes intéresse beaucoup de monde, ils ont tous décidé de fabriquer des machines toutes plus meurtrières les une que les autres. Depuis ce changement, je ne peux plus me permettre de former des génies totalement asociaux voulant détruire ceux qui ne font pas parti de leur élite. C’est pour ça que je vous ai engagé mademoiselle Durand. C’est d’ailleurs la première fois depuis la création de cette école qu’on engage quelqu’un pour surveiller et socialiser les enfants.
- Mais pourquoi ne faites-vous pas ça vous-même monsieur Muller? S’indigna Durand.
- Vous me donnez quel âge? »
Surpris, elle l’observa un bon moment, car il regardait toujours par le hublot, ne laissant que son profile gauche de visible: depuis le départ elle n’avait pas encore eu l’occasion d’être face à lui. Elle le regarda alors dans son ensemble: vieux, se reposant sur sa canne, des cheveux gris comme son costume et des mains squelettiques aux veines bleues saillantes. Puis, elle annonça: « Je dirais au moins 60 ans en toute honnêteté. » Il eut un petit rire amer: « Je n’ai que 26 ans et ça fait seulement 3 ans que je dirige cette école. En tant qu’ancien élève, j’ai repris la direction après la mort du directeur. Il y a 2 ans, j’ai essayé de faire votre boulot. J’ai donc été un sujet d’expérience pour l’un d’eux, Louis, un très bon biologiste et bon médecin en plus, mais qui a voulu jouer avec le feu. Il pensait avoir trouvé un élixir de jouvence, qu’il m’a fait boire… Et voilà donc le résultat avec seulement deux gouttes de son élixir: au lieu de rajeunir, j’ai vieilli. Il a quasiment triplé mon âge…Mais depuis il travaille jour et nuit pour trouvé un remède et me redonner ma jeunesse. En attendant, il m’a concocté une potion pour ralentir les effets du poison. Mais les effets persistent et je n’ai plus la force ni l’autorité nécessaire pour me faire obéir. Et vous pouvez me croire, j’ai suffisamment payé de ma personne… » Fini-t-il en s’asseyant sur la banquette en face de sa jeune employée, laissant enfin voir son profil droit: une plaque métallique couvrait un quart de son visage du front jusqu‘à la joue, un monocle doré faisant office d‘œil. La nouvelle gouvernante était stupéfaite, elle n’en croyait pas ses oreilles: « Vous plaisantez? Vous pensez que je vais croire une telle histoire? Et puis, ce ne sont que des enfants, à 12 ans créer un élixir de vieillesse et puis quoi encore? Et enfin, si vous êtes ici, qui surveille les enfants? Et comment … cela vous est arrivé? Demanda-t-elle surprise.
- Oh! Ne les sous-estimez pas ! Ce serait là une énorme erreur de ne les voir qu’en tant qu’enfants. Vous verrez que certains et certaines sont bien plus adulte que les adultes eux-mêmes. Et puis, le jeune Louis n’a que 11 ans et il est très susceptible. Pour ce qui est de la surveillance en mon absence, j’ai mes petits espions, dit-il en touchant son monocle et un sourire en coin, mais ils ne suffiront pas. Quant à ce qui est arrivé à mon oeil… Un conseil: faites toujours attention à ce qu’ils font et à ce qu’ils vous disent.
- Génial! Une bande de petits monstres à moi toute seule! Vous pourriez m’en dire un peu plus sur eux? Demanda Melle Durand.
- Le plus jeune a 10 ans et travaille à l’élaboration d’un gyrocoptère. Le plus vieux a 16 ans et travaille sur un pistolet à éclair. Au total, ils sont 12 à travailler dans des domaines très différents comme vous aurez l’occasion de la voir » déclara-t-il avec un grand sourire qui s’acheva sur une quinte de toux.
La nouvelle gouvernante s’approcha du hublot: en cette journée de septembre, les montagnes du Jura offrait sa roche grisâtre sous le soleil de ce début d‘après-midi. Les forêts de sapins s’étendaient sur des kilomètres à la ronde. Ici où là, quelques villages où seul le clocher d’une église dépassait les arbres. Le directeur alla vers l’avant de la cabine regarder à travers un autre hublot. « Voilà votre prochain lieu de résidence Melle Durand, s’exclama-t-il ». Elle s’approcha et vit une grande bâtisse accrocher à la montagne, mais avec le reflet du soleil, elle ne put voir que les contours de ce qu’il semblait être une ancienne forteresse.
Le dirigeable s’amarra au pylône dressé sur la tour Nord de la bâtisse. Les passagers descendirent de l’appareil, la jeune femme aidant M. Muller. En se retournant, elle vit que les élèves s’étaient rassemblés en rang dans un coin de la tour hexagonale. Ils s’étaient alignés du plus petit au plus grand. « On dirait qu’il en manque un » remarqua Melle Durand en désignant un trou dans le rang. « Ne vous inquiétez pas, il arrive » affirma-t-il en jetant un coup d’œil derrière lui. La gouvernante suivi le regard du directeur et vit stupéfaite un petit bonhomme en habit de pilote descendre prudemment du dirigeable. « J’arrive, j’arrive ! » cria-t-il et se précipita pour aller combler le trou dans le rang des élèves. Les 12 élèves étaient donc alignés, bien en rang, dans leurs plus beaux habits. Mais une chose marqua Marie : aucun ne souriait, on aurait dit des poupées de cire sans expressions. Le directeur s’avança : « Les enfants! Voici Mademoiselle Marie Durand, elle sera votre gouvernante, elle s’occupera donc de vous et vous aidera dans vos différents projets. Faites lui bon accueil car elle va être avec nous pour un bon moment! Et maintenant, conduisez la à sa chambre! » . Le rang se divisa en deux, et le premier garçon à la droite de Marie déclara sur un ton plus que formel, à la limite d’une caricature de major d’homme : « Si vous voulez bien me suivre mademoiselle Durand. Laissez donc vos valises ici, nous nous en occupons ». Et il descendit dans les escaliers juste derrière lui. Elle lui emboîta le pas dans le dédale de marches et de couloirs de cette immense demeure. Elle compris assez vite que ce qu’elle avait pris pour une forteresse, était en fait un gigantesque manoir. Des grandes fenêtres laissaient pénétrer une lumière brillante, éclairant de longs couloirs ocre orangés. La lumière devenait ainsi chaleureuse et les murs semblaient flamboyés d’une vie intérieure. Quelques minutes plus tard: « Voilà votre chambre » déclara le jeune garçon sur un ton totalement neutre en ouvrant la porte. Elle entra et découvrit sa chambre: tout de suite à sa gauche un petit bureau de secrétaire, contre le mur de gauche une grande armoire de chêne massif et joliment ouvragée donnait l’impression d’être à l’étroit, à gauche de celle-ci côté couloir, un grand tableau représentant un directeur dans son bureau en train d‘écrire. Face à elle, une fenêtre donnait sur l’une des cours intérieures et sur les autres parties du Manoir. À côté de la fenêtre, contre le mur de droite, un lit d’une place avec des grosses couvertures. Juste devant le lit une autre porte donnait sur une petite salle de bain: une grande baignoire, un lavabo et des toilettes. « Vous avez l’eau courante? S’étonna-t-elle.
- Oui, et on a même l’eau chaude directement au robinet, répondit l’élève.
- C’est génial!
- Oui mademoiselle, comme tout ce que vous verrez ici, dit-il.»
En sortant de la salle de bain, elle fut surprise en voyant que ses valises étaient rangées en-dessous du tableau, car elle n’avait rien entendu. Elle ouvrit sa première grosse valise: vide. Elle ouvrit ses autres valises: toutes vides. Elle se tourna vers l’élève: « Dis moi, petit bonhomme, où sont mes affaires? ». Il s’approcha d’elle, et comme il lui arrivé à peine au-dessus du nombril, il leva bien haut la tête pour la regarder dans les yeux: « Primo, le petit bonhomme s’appelle Jean. Secundo, vos affaires sont bien ici. » Répondit-il, sarcastique. La gouvernante réfléchit un instant puis ouvrit l’une des portes de l’armoire: toutes ses affaires y étaient déjà rangées. « Excuses moi Jean, je ne voulais pas… »En se retournant, elle ne vit personne. Une feuille était posée sur le bureau. En s’approchant, elle vit qu’il y avait un petit mot et une carte du manoir. Le mot disait: « Le directeur vous attend dans le Petit Salon ». Elle étudia la carte un moment puis s’en alla en refermant la porte. En se dirigeant vers le Petit Salon, elle remarqua que des ombres bougeaient derrière les autres fenêtres. Elle s’arrêta pour regarder plus attentivement: les petites silhouettes disparurent rapidement. Les élèves l’observaient, sans doute pour voir si elle se perdrait dans les couloirs, pensa-t-elle. Elle arriva enfin devant une double porte, un petit écriteau indiquait « Petit Salon ». Elle entra refermant la porte derrière elle. En se tournant, elle vit le directeur assis dans un fauteuil, il tendait le bras droit sur l‘accoudoir : une grosse araignée monta sur le bras et se dirigea vers le visage de M. Muller. Elle s’arrêta sur l’œil de verre et ses huit pattes s’enfoncèrent autour du monocle. Le vieil homme eut un sursaut et grimaça de douleur. Puis, en voyant que Marie était là, il dit: « je suis en train de voir mes deux jours d’absence ». Il grimaça à nouveau: « voilà le deuxième jour ». Marie s’était rapprochée, inquiète, elle le regardait se tordre de douleur sur sa chaise. Elle avait déjà vu des personne avec ce type d’œil mécanique qui remplaçait celui perdu lors d’un accident ou à a guerre, mais jamais elle n‘aurait pensé qu‘une araignée visiblement artificielle puisse transmettre des informations via l‘œil de verre. « Les salles mômes, ils vous ont préparé des tas de farces pour que vous partiez… Mais ne vous inquiétez pas, je vais vous dire ce que vous devez évitez de faire et….oh! De manger aussi » dit-il cette fois-ci avec une grimace de dégoût.
Pour éviter les bêtises des enfants, le directeur Muller préféra présenter lui-même le manoir à sa nouvelle gouvernante. Ainsi, elle découvrit les différentes salles du manoir : une cuisine avec un équipement étrange selon Marie, une salle à manger spacieuse, une salle de classe, un petit gymnase, un grand laboratoire de chimie, puis un immense atelier où elle fut impressionnée les inventions des petits génies. A l’extérieur, elle put admirer l’architecture du manoir en pierre grise du Jura ainsi que les immenses fenêtres laissant apparaître quelques élèves qui les épiés. Ils allèrent ensuite aux écuries : « Voici votre cheval » annonça le directeur en désignant une belle jument à la robe brune. « Elle s’appelle Brunie et elle est très obéissante », Marie s’était approchée pour caresser le canasson. Brunie tourna la tête et donna un petit coup de museau contre sa nouvelle propriétaire, celle-ci pris une poigné d’avoine et en donna à Brunie qui apprécia le geste: « ça commence bien » se réjouis Marie. « Ah! Si seulement les enfants pouvaient obéir aussi facilement » s’exclama le directeur en s’appuyant contre la rambarde, fatigué de cette longue promenade. Il sortit un flacon de sa poche et bu une gorgé. Puis, ils firent le tour de la propriété par un petit chemin qui passait à travers le bois. Quelque panneaux indiquaient des villages, M. Muller conseilla Marie : « Là-bas, il faudra acheter le lait… Ici achetez la viande… ». Enfin, ils rentrèrent au manoir, mais juste devant la porte d’entrée il lui dit: « Une dernière chose: n’emmenez jamais les élèves dans l’un de ces villages, jamais. Ils n’aiment pas trop nos enfants. » et ils entrèrent.
Le dîner fut préparer par le plus vieux des élèves, David qui se révéla être un très bon cuisinier. Tous apprécièrent sa cuisine, ou du moins en eu l’air: tout le monde mangeait en silence, on entendait à peine le bruit des couverts dans les assiettes. Marie osa briser le silence en félicitant David qui hocha la tête comme si c’était une évidence. Elle fut gênée car le silence retomba immédiatement. Même le directeur restait silencieux, sans doute une habitude d‘ancien élève. En détournant le regard, elle vit un tableau au fond de la salle à manger représentant une coupe de fruits débordante. Maintenant qu’elle y repensait, dans chaque pièce qu’elle avait visité il n’y avait qu’un seul tableau positionné assez bas. Elle verra ça plus tard, se dit-elle. Soudain une lumière jaunâtre illumina le ciel, tout le monde se précipita à la fenêtre pour voir ce qui se passait. La lumière persista un moment, on entendit enfin un bruit de tonnerre ou un son assez proche. Marie regarda les enfants: ils étaient tous calmes et impassibles, mais en se tournant vers le directeur elle remarqua qu’il était très inquiet, sa main tremblait en s’appuyant sur sa canne. « Allez dans vos chambres les enfants » dit-il, à peine eut-il fini sa phrase qu’un deuxième éclaire jaunâtre zébra le ciel, suivit une minute plus tard par un bruit de tonnerre. « Tout de suite! » s’emporta M. Muller. Une fois les enfants partis, il emmena Marie dans le petit salon. « Ça fait un mois maintenant: tous les samedi à 23h50, il y a cette…lumière. Je ne sais pas ce que c’est et ça m’inquiète. J’ai d’abord cru que c’était un feu d’artifice ou même l‘orage, mais le bruit ne correspond pas du tout.
- C’était la première fois que les enfants voyaient cette lumière?
- Oui, et je me demande ce que je vais bien pouvoir leur dire, dit-il en s’écroulant dans son fauteuil.
- Vous n’avez pas la moindre idée de ce que ça peut être? »
Il regarda par la fenêtre où une nouvelle lumière éclaira le ciel un très court instant. Puis il prit un cadre photo qui datait d’il y a 3 ans quand il avait repris le rôle de directeur. Il n’avait pas encore la plaque métallique qui lui couvrait un quart du visage ni cet oeil de verre, ni toutes ces rides affreuses. Il se tenait au côté des 13 élèves tous sans sourire ni aucune autre expression sur leur visage. Son regard s‘arrêta sur un élève. « Si, j’ai bien une idée, mais elle m’effraie: Joseph, celui qui est parti fabriquer des armes en Allemagne. » le bruit étouffé caractéristique de cette lumière acheva sa phrase.
Les jours suivant, Marie endossa le rôle de gouvernante comme prévu. Elle se rendait tôt aux villages avec son cheval et en profitait également pour visiter la région. Les villageois étaient contents de voir une nouvelle tête, surtout les hommes, charmés par un si joli minois. Au manoir, Marie découvrit quelques inventions des petits génies qui lui simplifièrent énormes les taches ménagères. Ainsi, elle pouvait acheter la nourriture pour la semaine grâce à la froidière : une imposante machine à froid permettait de refroidir une petite pièce placé sous la cuisine jusqu’à une température de -5°. Pour le ménage, ils avaient inventé une sorte de balai à succion mécanique qui aspirait efficacement la poussière, toutefois l’utilisateur devait avoir de bons bras car il fallait tourner très vite une manivelle tout en poussant la petite machine. Mais pour lui donner plus de travail, les enfants n’hésitaient pas à laisser tomber des déchets qui ne pouvaient être aspiré. Par ailleurs, Marie fut soulagée de voir que la corvée de linge ne se faisait pas au lavoir du village le plus proche, mais dans plusieurs machines à laver le linge : il y avait deux machines pour laver les habits, une autre plus grande pour le linge de maison. Elles étaient alimentées en électricité et eau par un moulin à eau situé en amont du manoir, sur le colline: un ruisseau en sortait sous pression, passait dans le moulin en produisant de l’énergie, puis l’eau était purifiée et stockée dans un réservoir sur le toit du manoir. Évidemment, les sales mômes n’hésitaient pas à bloquer la roue du moulin ou même à couper l’arrivée d’eau du réservoir. Quand Marie étendait le linge pour le faire sécher, les marmots préparait un feu dont la fumée dégager une odeur à réveiller un cimetière. Grâce à un ventilateur géant, ils dirigeaient la fumée vers le linge qui s’imprégnait de cette odeur. Marie devait alors tout recommencer. Elle trouva la parade en ne lavant que ses habits et ceux de M. Muller. Les enfants se retrouvèrent vite sans vêtements propres et quand ils tentèrent de faire leur propre lessive, Marie avait elle-même saboté les machines, si bien qu’ils ne trouvèrent jamais comment elle avait fait. Quand à la cuisine, elle ne cuisinait plus que pour elle et le directeur tout en cachant la nourriture. Ils les regardaient manger d‘un air suppliant, les assiettes étant désespérément vide. « Elle est censée vous faciliter les choses, déclara le directeur devant le regard envieux des enfants, et vous avez décidez de lui nuire. À vous d’en assumer les conséquences. » Ils se retirèrent dans le Grand Salon pour discuter. Ils s’assirent dans trois canapés placés autour d’une table basse en verre, une cheminée aussi grande qu‘un homme complété le quatrième côté. « On devrait peut être arrêter? Commença David le plus vieux des élèves.
- Complètement ? Demanda Sébastien, 13 ans.
- NON! Répondirent-ils tous en chœur.
- Nous allons arrêter pendant un moment pour regagner leur confiance, continua David, et après, on pourrait recommencer mais avec des petites bêtises. Et puis, personnellement, ne plus avoir à faire de corvées ça me donne plus de temps pour m’occuper de mes recherches. » Des hochements de têtes signifiant leur accord termina la conversation. « Je vais enlever le seau de vipères de son armoire avant d’avoir d’autres problèmes… » se rappela Jean. « Attendez! Intervint Annabelle, 14 ans. Lorsque nous avons rangé ses affaires lors de son arrivée, j’ai eu sa boîte à maquillage entre mes mains.
- Et alors? Demanda David.
- Alors, trouves-tu normales, qu’une boîte à maquillage pèse environ 10kg ? » et un silence d’incompréhension se répandis sur le visage des enfants. « Effectivement, c’est étrange: soit elle est vraiment moche et elle a besoins d’une grosse quantité de maquillage pour cacher la misère, soit elle nous cache quelque chose de plus lourd, si j’ose dire… » David plongea alors dans ses pensées. « Jouons les enfants modèles et tachons de gagner sa confiance, nous pourrions peut-être en apprendre d’avantage, déclara David, nous verrons le moment venu ce qu’elle nous cache. »
Tous revinrent dans la salle à manger où Marie et M. Muller venaient d’entamer le dessert. Ils s’alignèrent et David joua le porte-parole: « Après mûre réflexion, nous tenons à présenter nos plus plates excuses à mademoiselle Durand. Nous nous sommes fait prendre à notre propre jeu, et à vrai dire, nous n’en sommes pas fière. Et je crois parler au nom de tous en vous demandant ceci: est-ce qu’on pourrait avoir un morceau de votre merveilleux rôti de vœu s’il vous plaît? ». Marie les jaugea, elle les regarda tous un par un les yeux dans les yeux de la manière la plus dure qu’elle put. Après quoi, elle sourit et dit sur un ton rassurant : « Mettez vous à table, je vais faire réchauffer le repas ». Un soupir de soulagement parcoura le rang, et ils s’installèrent à table. Le directeur se leva : « Attendez, je vais vous aider ». Dans la cuisine, Marie rallumait le feu sous la casserole. « Je trouve qu’ils ont abandonné bien vite, ça ne me dit rien de bon. En plus, il manquait Jean: c’est un spécialiste des poisons et tout ce qui s’y rattache. Il élève des serpents dans ses vivariums et d’autres bêtes de ce genre. Fouillez bien votre chambre, il serait capable de vous mettre l’une de ces bestioles pour vous faire peur. »
Au beau milieu de la nuit, une faible lueur filtrait à travers les volets de la chambre de la gouvernante. À l’intérieur, une petite bougie diffusé une lumière vacillante mais suffisante pour éclairer le bureau. « Premier rapport: malgré une tentative des enfants pour me renvoyer, ils ont fini par m’accepter. Mais j’ai encore des doutes sur leur sincérité: ce sont de véritables génies et apparemment de bons acteurs selon le directeur M. Cédric Muller. Les enfants me gardent à l’écart de leur atelier et je n’ai pas pu voir en détail leurs inventions, toutefois, maintenant qu’ils ont changé d’attitude envers moi, je pense que je pourrais y parvenir. Le soir même de mon arrivée, j’ai pu apercevoir les éclairs jaunâtres que nous avaient rapportés nos informateurs. D’après le directeur, il s’agirait d’un des enfants surdoués, Joseph Laiglon, qui a quitté l’école il y a 5 mois pour se rendre en Allemagne, où l’armée avait organisé un concours. Il semblerait qu’il ait remporté le premier prix. Il faudrait envoyé quelqu’un pour confirmer. D'autant plus que la frontière n'est pas très loin, et que s'il s'agit d'essai d'armes, il est urgent d'aller voir ce qu'il se trame.
« Je ferai mon prochain rapport le mois prochain à la même heure. Fin de transmission ». Elle rangea le microphone dans la boîte qui cachait une radio. Elle mit une plaque en bois pour cacher la radio dans le double fond, puis remis en place son nécessaire à maquillage par-dessus et referma la boîte en bois vernis. Elle alla se coucher en emportant la bougie qu’elle déposa sur sa table de chevet. Elle éteignit la flamme et l’obscurité envahie la chambre.