Le spam, plus qu'une marque de jambonneau
L'expression «spammers» pour qualifier les personnes qui exercent le spamming a certes une
connotation péjorative et peu d'annonceurs apprécient d'être qualifié de la sorte. Bien que
le spamming soit considéré comme un comportement abusif à plusieurs égards, les spammers ne
sont pas tous des expéditeurs impulsifs de courriers électroniques.L'objectif évident du
spammer ordinaire est plutôt de promouvoir un quelconque produit ou service. Ceci dit, cet
objectif n'enlève pas le caractère répréhensible de ce comportement. Le spam est donc plus
qu'une marque de jambonneau, c'est un moyen de promotion (1) que la communauté cybernétique
juge abusif (2).
1. Un moyen de promotion
Les spammers cherchent généralement à nous faire connaître quelque choase : des sites web,
des produits, des services et même certains évènements qu'ils croient susceptibles
d'intéresser. À ce titre, ils n'ont pas toujours conscience qu'ils «spamment» la communauté
cybernétique. Toutefois, on peut difficilement se convaincre qu'il s'agit de la majorité
d'entre eux. Les personnes qui exercent le multi-postage abusif (EMP) ou l'envoi massif de
courriers électroniques non sollicités (junk mail) savent bien la nature de ce qu'ils font.
Les tenants du marketing direct justifient le spamming par son caractère économique et
commercial. En effet, le spamming permettrait au petites entreprises de faire de la
publicité de masse à un prix minime de façon à ce qu'elles aient la capacité de rejoindre
un maximum de clients et soient alors concurrentes aux entreprises internationales. À leur
avis, le spamming n'est guère un moyen promotionnel différent des bandes annonces et de la
publicité grandissante sur le World Wide Web et, en ce sens, il constitue une nouvelle
façon de faire du commerce . Au surplus, le spamming permettrait également aux
consommateurs de faire de meilleurs choix entre les produits et services qu'ils leur sont
offerts et favoriserait, par le jeu du marché, la publicité de qualité.
Sous un autre angle, les spammers mettent en évidence la facilité de suppression du
courrier électronique et la capacité d'ignorer les messages Usenet inintéressant. Le
spamming serait par ailleurs un moyen écologique de faire de la publicité.
Toutefois, certains spammers ne s'exécutent pas seulement dans un objectif de promotion
mais également pour défendre la cause du spamming et même, obtenir une certaine notoriété.
À cet égard, plusieurs spammers font l'objet de légendes. On raconte notamment que les
premiers spammers furent les avocats Laurence Canter et Martha Siegel. Le message qu'ils
expédiaient à une multitude de groupes de discussion consistait à offrir des services
juridiques pour obtenir la carte verte américaine. Le flambeau du spamming a par la suite
été transmis à la compagnie Cyberpromotion. D'abord connue sous le nom de Promo Enterprises
lorsqu'elle expédiait des publicités par télécopieur, Cyberpromotion est maintenant
considérée comme le plus important abuseur du réseau Internet. Débranchée à plusieurs
reprises par ses fournisseurs d'accès Internet suite aux plaintes d'usagers, Cyberpromotion
a créé son propre fournisseur du nom d'ISpam pour lequel la companie Hormel la poursuit.
Enfin, Cyberpromotion est membre du conglomérat des spammers, l'InternetE-Mail Marketing
Council qui favorise des pratiques responsables de la promotion par courrier électronique.
Si la publicité est généralement acceptée dans nos sociétés, la forme qu'elle prend sur
Internet est cependant susceptible d'être considérée abusive.
2 Un moyen abusif
Le spamming a été qualifié d'abus du réseau et non d'abus sur le réseau. En effet, on
perçoit généralement le spamming comme un comportement nuisible au bon fonctionnement
d'Internet. Cependant, nous constaterons que le spamming est également accompagé de
méthodes sournoises et que le contenu des messages expédiés est souvent douteux. À ce
titre, le spamming constitue également des abus sur le réseau.
2.1 Des abus du réseau
Le caractère abusif du spamming à l'égard du bon fonctionnement d'Internet se justifie par
la nature volumineuse des messages expédiés. L'espace considérable que prennent les spams
sur le réseau emporte des effets évidents sur l'efficacité d'Internet et sur les coûts
associés à son fonctionnement.
Bien que le terme spamming définit également le courrier électronique non sollicité et
d'autres abus d'Internet, il concerne d'abord l'Excessive Multi-Posting qui constitue
l'abus le plus répréhensible sur la ressource télématique Usenet. Seul le critère du volume
permet d'identifier un spam d'un message ordinaire. À cet effet, l'EMP doit être distingué
de l'Excessive Cross-Posting (ECP). Cette dernière méthode, également appelée Velveeta,
fait référence à l'envoi d'un seul message à plusieurs groupes de discussion par l'emploi
de la fonction copie conforme (cc) ou de la fonction copie conforme invisible (bcc) d'un
logiciel de courrier électronique.Un spam effectué de cette manière est donc moins
volumineux qu'un message expédié pour chaque groupe de discussion visé (EMP).
Puisque l'élément-clef de la détermination d'un spam sur les groupes de discussion n'est
pas la pertinence du message, on peut objectivement apprécier si un message constitue un
spam en dénombrant les fois qu'il apparaît. Cependant, il peut être difficile de mesurer ce
nombre lorsque le message en question est expédié à plusieurs autres groupes de discussion.
À cette fin, le moteur de recherche Deja News permet de connaître le nombre de fois qu'un
message identique a été envoyé.De façon générale, on considère un message comme un spam
lorsqu'il a été expédié plus de 20 fois.
Qu'il s'agisse de spamming par courrier électronique ou sur les groupes de discussion, il
n'en demeure pas moins que le spamming affecte le bon fonctionnement du réseau Internet et
ses coûts d'opération.
2.1.2 Les effets du spamming
L'argument couramment invoqué par les anti-spammers est l'espace que dévore le spamming sur
le réseau Internet. La quantité de spams expédiés rend les transmissions Internet moins
rapides et contribue de beaucoup au trafic sur le réseau. L'exemple le plus probant est
celui des spams qu'ont expédiés les sympatisants de l'église de Scientologie sur le groupe
de discussion alt.religion.scientology. On raconte qu'ils y ont envoyé 1200 spams en 15
jours, ce qui équivalait à 50 mégaoctets. De son côté, le fournisseur d'accès Internet AOL
affirme recevoir 1.8 million de spams de Cyberpromotion par jour.
Autre exemple est celui de mon compte de courrier. Je reçoit en moyenne entre 8 et 15
messages de spam par jour ce qui représente:
250 kB / jour soit...
1750 kB (1,75 Mo) / Semaine soit...
638750 Kb (639 Mo) / Année.
Si je prends une moyenne de 1100 comptes de courrier sur le serveur du Cybernaute, cela
donne:
702 625 Mo ou 703 Go / Année... Juste en spam !!!
En plus de diminuer la vitesse de transmission des communications Internet, le spamming
pervertit la possibilité aux administrateurs de bien gérer leurs systèmes et dérobe aux
utilisateurs l'utilité des groupes de discussion en les submergeant de barrages
publicitaires. Le spamming exercé sur des listes de distribution modérées rend également la
tâche plus difficile pour les administrateurs qui assurent leur gestion.
Les coûts associés aux effets du spamming sur le fonctionnement du réseau sont tout aussi
révélateurs du caractère abusif du spamming. Voici un résumé des coûts du spamming pour les
fournisseurs d'accès Internet (FAI) et leurs utilisateurs :
Pour les FAI :
coûts additionnels pour l'augmentation de la largeur de bande afin de contrer
l'augmentation du trafic sur Internet;
coûts additionnels pour l'achat et la gestion d'ordinateurs supplémentaires afin d'assurer
la sécurité et l'intégrité des FAI souvent menacés par les spammers;
coûts additionnels pour l'achat de mémoire supplémentaire afin d'entreposer les messages
additionnels que constituent les spams;
personnel additionnel pour gérer les problèmes techniques liés au spamming et répondre aux
plaintes des victimes du spamming.
Pour les utilisateurs:
coûts additionnels pour le temps de chargement;
coûts additionnels pour les usagers qui utilisent une communication interurbaine;
baisse de productivité liée au temps passé à filtrer les spams, à se plaindre et à se
désabonner à des listes de distribution commerciales.
Évidemment, tous les coûts supplémentaires des FAI seront finalement supportés par les
utilisateurs qui verront augmenter leurs tarifs d'abonnement. C'est dire que les
utilisateurs déboursent pour recevoir de la pubicité, que ce soit sur Usenet ou par
courrier électronique, qu'ils considèrent pourtant indésirable et qu'ils n'ont d'ailleurs
pas sollicitée.
2.2 Des abus sur le réseau
On peut définir les abus sur le réseau Internet comme des actes susceptibles d'être
considérés illégaux s'ils étaient accomplis dans un environnement autre qu'Internet. Ceci
dit, il ne faut pas comprendre de cette dernière affirmation qu'Internet est une terre sans
loi mais plutôt que la qualification juridique des communications Internet, par leur
caractère transnational et leur complexité, est souvent plus difficile. Toutefois, nous
pouvons certainement apprécier le caractère abusif du contenu des spams et des méthodes
employées par les spammers pour obtenir les coordonnées de leurs destinataires.
2.2.1. Des messages indésirables
Les spams sont généralement des publicités commerciales aux produits ambigüs et aux
services à la limite de la légalité. Par exemples, les spams sont souvent des publicités
proposant des cures miracles ou des solutions pour devenir riche rapidement (make money
fast). Il arrive également que les spams soient des lettres à la chaîne ou des ventes
pyramidales. À ce titre, ces messages constituent des actes illégaux que nous pouvons
reporter aux services policiers tant au Canada qu'aux États-Unis.
Les spams ne sont pas toujours des publicités frauduleuses ou illégales bien qu'on plaide
sans ambage qu'ils sont rarement plus que des publicités médiocres, décevantes et sans
intérêt. Cependant, comme nous l'avons déjà remarqué, les spammers n'ont pas tous de
mauvaises intentions. Il serait trop opportun de qualifier un message un tantinet
commercial de contenu abusif. Le débat doit plutôt porter sur le caractère économique du
spamming et également sur les méthodes employées par les spammers pour obtenir les adresses
électroniques de leurs destinataires.
2.2.2. Des méthodes sournoises
S'il est facile d'obtenir la liste des groupes de discussion Usenet, la recherche
d'adresses électroniques s'avère moins évidente. Par ailleurs, les méthodes employées par
les spammers à cette fin débouchent sur un réel marché d'adresses de courriers
électroniques. Par exemple, 2 millions d'adresses électroniques peuvent se vendre à 99
dollards américains et 100 milles adresses d'abonnés d'AOL, à 100 dollards américains. Les
spammers doivent cependant user de multiples procédés pour obtenir l'eau de leur moulin.
La méthode courante consiste à collecter automatiquement les adresses électroniques
laissées par les utilisateurs sur les groupes de discussion et leurs pages Web. À cette
fin, il existe plusieurs logiciels
Les autres méthodes ont un caractère beaucoup plus abusif et se révèlent souvent
frauduleuses. Par exemple, certains spammers élaborent des pages webs sur lesquelles ils
proposent aux visiteurs de participer à un concours par courrier électronique. Le concours
se révèle évidemment faux et les spammers disparaissent avec les coordonnées des
participants. D'autres vont même jusqu'à se faire passer pour des chômeurs en quête de
travail sur des sites consacrés à la recherche d'emploi. Lorsqu'ils reçoivent une offre de
travail par courrier électronique, ils notent les adresses des autres candidats inscrits
dans l'en-tête du message et leur expédient des publicités. Cette technique leur permet
même de cibler leurs destinataires en fonction du spam qu'ils désirent envoyer.
Les méthodes de collection d'adresses ne figurent pas seules au nombre des techniques
abusives des spammers. Certains d'entre eux, dans un objectif purement nuisible, utilisent
les noms de domaine d'autres fournisseurs d'accès Internet pour expédier leur spams ou de
fausses adresses de retour. À ce titre, il faut constater que la plupart des causes
pendantes ou des décisions relatives au spamming portent sur des questions de crimes
informatiques et de contrefaçon. Enfin, quelques entreprises participent aux méfaits des
spammers en leur offrant des logiciels de spamming contenant une liste de noms faussement
prétendue comme des gens désireux d'obtenir de la publicité par courrier électronique.
Le spamming n'est donc pas seulement un envoi volumineux de courriers électroniques
nuisible au fonctionnement d'Internet, mais également un phénomène susceptible d'atteindre
le droit à la vie privée et de violer les domaines informatiques des entreprises opérant
sur Internet. Pour ces raisons, il y a lieu de jeter un regard sur les efforts de contrôle
apportés pas la communauté cybernétique et les approches législatives envisagées pour
réglementer la publicité de masse sur Internet.
Les efforts de contrôle du spamming
Outre mesure, nous avons remarqué que le spamming était l'objet de plusieurs contestations
de la communauté cybernétique. Nous abordons maintenant les efforts de contrôle dont elle
est l'initiatrice (1). Celle-ci tend à proposer différentes solutions techniques et réagit
vigoureusement à ce phénomène qui, avec l'augmentation des activités commerciales sur
Internet, a pris une certaine ampleur. En effet, le débat est tel que plusieurs croient que
le problème du spamming requiert une réglementation (2).
1. Au plan interne du réseau
On peut séparer les efforts de contrôle du spamming de la communauté cybernétique selon
deux tendances. Soit elle élabore des solutions techniques pour contrer les messages
expédiés par les spammers, soit elle s'organise en mouvement pour informer les cybernautes
des effets du spamming et les exorte à dénoncer les spammers aux différents acteurs du
réseau.
1.1. Les solutions techniques
Le courrier électronique non sollicité
Puisque l'envoi de spams dépend de la connaissance du spammer de l'adresse électronique de
ses destinataires, il est possible de prendre des mesures techniques préventives contre le
spamming. On recommande aux utilisateurs d'ajouter l'annotation no-spam à leurs adresses
électroniques lorsqu'ils les inscrivent sur leurs pages web personnelles ou quand ils
envoient un message sur un groupe de discussion. Certains recommandent même de créer une
erreur dans le nom de domaine en prenant soin d'indiquer la bonne adresse dans le corps du
message. L'outils de recherche de courrier électronique du spammer ne décèlera pas les
erreurs et ses spams lui seront donc retournés.
Par l'emploi de logiciels de filtrage, les utilisateurs peuvent également se protéger
lorsque leurs adresses de courrier électronique sont connues des spammers. La plupart de
ces logiciels filtrent les messages reçus et expédient les spams dans le répertoire
poubelle du logiciel de courrier électronique.
L'utilisation de tels logiciels peut cependant se révéler plus encombrante que les spams
eux-mêmes. Des messages attendus par l'utilisateur peuvent se retrouver dans le répertoire
poubelle, ce qui implique qu'il doit vérifier régulièrement les messages contenus dans ce
répertoire. Au surplus, ces logiciels ne diminuent aucunement le temps de connection passé
à télécharger les spams.
Les solutions techniques actuelles contre le spam n'apparaissent donc pas très
convaincantes. Bien qu'il soit possible de prévenir les spams, il demeure difficile de s'en
débarasser une fois que l'adresse électronique est connue des spammers.
Nous allons maintenant voir une méthode simple et rapide pour nous permettre d'éliminer les
messages de spam automatiquement.