Citation :
Je me lance ) Bon sujet de culture G en tous cas
En tous cas par avance je regrette d'être expéditif mais j'ai vraiment la gueule DLC (et sans avoir picolé!) donc voilà. Et je donne pas les références jurisprudentielles des exemples à chaque fois mais si toutefois quelqu'un les veut je les donnerai.
"la lettre anonyme, c'est la dernière sauvergarde des libertés individuelles"
En fait l'anonymat permet d'agir sans qu'un nom ou une désignation puisse être rattaché à un acte positif.
Partant de là, ce n'est pas sorcier. A mon sens, il convient d'effectuer une distinction très dualiste et de dissocier la vie privée de la vie publique, et de distinguer les personnes physiques des personnes morales (les sociétés donc).
L'article 9 du Code Civil consacre le droit au respect de la vie privée. il s'agit naturellement d'un article très généraliste, mais sa portée a été largement complétée par une jurisprudence aussi abondante que pertinente, résumée dans la lumineuse formule de la première chambre civile de la Cour de Cassation en date de 06 mars 1996 : "est illicite toute immixion arbitraire dans la vie privée d'autrui".
Reste à définir la vie privée. Il s'agit de tout ce qui relève de la sphère intime, et ceci est entendu au sens très large. Et la loi est très tâtillonne, les tribunaux n'hésitent pas à condamner en cas d'atteinte à la vie privée qui elle même englobe différentes formes d'anonymat, en de variées circonstances.
Citons pêle même : l'adresse personnelle, qui ne saurait être diffusée sans le consentement de l'intressé, et ceci vaut également pour le domicile d'une personne morale, l'état de santé corroboré par le secret médical va de pair avec un traitement anonyme et personnalisé des données, le droit à l'image également, la pratique religieuse, les correspondances, la vie affective sont autant d'éléments
très protégés par la loi comme je viens de le dire, car rattachables à la vie privée et à la sphère intime, et pour lesquels on peut estimer que la protection de la vie privée implique le respect d'un certain anonymat.
Ainsi en matière de santé publique, le traitement anonyme et personnalisé des données est à l'origine de procédures variées et complexes (que je ne saurais décrire) mais qui visent à garantir la non-divulgation d'informations relevant de la sphère intime, ces dernières ne pouvant être exploitées que par le personnel soignant et ce dans le strict cadre du service. Car l'état de santé est quelquechose de on ne peut plus intime, qu'il existe en plus des maladies afflictives et infamantes (genre si on apprend que Baudis se traine une syphilis carabinée depuis qu'il est maire de toulouse, à mon humble avis ça va lui causer un tort colossal vu ce qui s'est passé précédemment) et que l'imputation de pathologies à une personne physique peut constituer des préjudices divers et variés que je vous laisse imaginer.
Pour les autres aspects de la vie privée (domicile, image, correspondance) ils sont rattachables soit à des principes constitutionnellement protégés (je pense au secret des correspondances : le contenu de votre courrier est anonyme dans la mesure où nul ne doit connaitre le contenu de vos missives) ou bien sont protégés car ils contribuent à identifier la personne, corroborant à ce moment là directement le droit à l'anonymat : image et domicile. En effet, vous êtes propriétaires de la représentation que vous voulez donnez de vous même, mais aussi de vouloir vous protéger d'être reconnus.
Cependant, ce que je viens d'énumérer n'est valable que dans le strict cadre des activités privées. En effet, l'anonymat est directement relié à la notion de vie privée (d'ailleurs, les textes de loi faisant référence à l'anonymat sont extrêmement rares et on trouve la majorité d'entre eux en matière de droit de la santé publique). Mais dès lors qu'une personne agit dans le cadre de la vie publique, il abandonne nécéssairement et par définition son droit à l'anonymat. Il est en effet inconcevable d'exercer une mission publique (j'entends par "mission publique une mission pas seulement au service de l'Etat mais qui peut être reliée par tout point que ce soit à la vie publique, ce qui inclue donc l'exercice de fonctions dans la vie civile) de façon anonyme, c'est un non-sens absolu. D'ailleurs, le "droit à l'information" brandi à tort et à travers par ces hordes de journalistes hargneux ne peut s'exercer que dans le cadre de la vie publique des personnes concernées.
Ainsi, le droit que chacun possède de contrôler la diffusion de son image cesse dès lors que le sujet de droit agit publiquement. Un homme politique en campagne ou dans le cadre de l'exercice de ses fonctions d'homme politique, un patron d'entreprise dans ses fonctions de patron, dans une conférence de presse, un représentant syndical par exemple filmé devant les grilles d'une entreprise au sein de laquelle se déroulait un mouvement de grève auquel participait le syndicat dudit représentant mais aussi un simple particulier se rendant dans une manifestations sont autant de situations qui par nature et puisqu'il s'agit de démonstrations publiques, impliquent de renoncer à son droit à l'image. Et donc à son anonymat. La seule limite résiderait dans la perception frauduleuse d'images, mais ce serait là un autre débat.
Il existe en outre d'autres situations, plus rares, où des atteintes à la vie privée sont permises, mais souvent au nom d'intérêts supérieurs : en matière de pruve judiciaire notamment (l'exemple type est le constat d'adultère : chacun est libre de faire ce qu'il veut dans son pieu ou ailleurs, mais le président du tribunal de grande instance est en droit d'autoriser un constat en vue de préconstituer la preuve de l'adultère d'un époux - civ. 1ere 06/02/1979).
Cette situation peut être illustrée par d'autres exemples comme un arrêt du tribunal de grande instance de Marseille du 23/03/1995 pour lequel la prise de photos et d'empreintes digitales dans le cadre d'une enquête préliminaire n'est pas constitutive d'une atteinte à la vie privée et par extention du droit à l'anonymat.
Pour conclure : l'anonymat est à mon sens une notion très floue et naturellement quasi impossible à respecter de manière absolue et en toutes circonstances. Prenez l'exemple d'un examen ou d'un concours administratif, anonyme jusqu'à la publication des résultats ou des admis, certains statuts d'entreprises imposent la publication d'un organigramme...
C'est pour ça qu'à mon sens, il est bien plus judicieux de parler de vie privée, notion aisément définissable, quitte à ensuite définir les rapports entre anonymat et vie privée, chose que j'ai quand même tenté de faire pour cadrer avec le sujet du jour
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