pour les courageux, lisez cet article (source infOGM):
Lintroduction des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) dans lagriculture et lalimentation pose, entre autres, la question de leur innocuité dun point de vue sanitaire. Cette question recoupe plusieurs aspects : la toxicité des aliments, la résistance des bactéries aux antibiotiques, et celle que nous traitons plus particulièrement dans ce dossier, la relation entre OGM et allergie.
Le mot "allergie" (du grec allos - autre - et ergos - action) définit une réaction immunitaire excessive dirigée contre une substance étrangère (antigène) considérée par lorganisme, souvent à tort, comme ennemie, et appelée dans ce cas allergène. Celui-ci entre en contact avec le système immunitaire de lappareil digestif1. A lheure actuelle, les études réalisées ne permettent pas de conclure si les aliments issus dOGM sont plus ou moins allergisants que les aliments traditionnels correspondants.
Allergies alimentaires en augmentation
On constate que le nombre dallergies est en augmentation depuis un siècle, avec une forte accentuation ces dernières années. Daprès Jean-Michel Wal (INRA), "les urgences allergiques ont été multipliées par cinq en quinze ans". Les causes semblent être liées au phénomène de lindustrialisation de notre société et surtout, de notre alimentation : les allergies alimentaires sont fréquentes dans tous les pays développés, avec une moyenne générale de 3% à 4% et de 8% en population pédiatrique. La fragilisation des individus dans nos sociétés modernes "sur-protégées", due aux modifications rapides de notre environnement (pollution atmosphérique, stress, surmédication...), explique aussi cette augmentation des allergies. La grande majorité des allergies identifiées sont provoquées par des aliments appartenant à 8 groupes : cacahuète, soja, fruits à coques, lait, ufs, poisson, crustacés et blé2. Leur étude montre que lallergénicité (ou potentiel allergique) dun aliment est pratiquement toujours dû à un grand nombre de protéines (généralement des glycoprotéines). De plus, une protéine allergénique présente généralement plusieurs sites capables de déclencher des allergies. La liste des allergènes est donc quasiment infinie. Cependant, les cas dallergies les plus courants sont connus et répertoriés. Or lindustrie agroalimentaire a non seulement mélangé abondamment des substances dorigines diverses (par exemple, on trouve du kiwi dans des petits pots pour bébés) sansétiquetage systématique, mais elle a aussi créé de nouvelles substances de synthèse, sans que des contrôles poussés précèdent leur mise sur le marché. Les OGM sinscrivent dans ce processus dindustrialisation croissante de lalimentation. Les produits qui contiennent des OGM sont généralement hautement manufacturés. Il est donc difficile de déterminer quel élément précis dun produit déclenche la réaction allergique. Sachant que les premiers OGM sont apparus sur le marché en 1996, le recul est aujourdhui insuffisant. LAssociation Médicale Britannique3, dans un rapport publié en mai 1999, préconisait linstitution dun moratoire sur les OGM en attendant que de nouvelles recherches permettent, entre autres, de déterminer le véritable pouvoir allergène des OGM. De même, dans son annexe au rapport de la Commission du Génie Biomoléculaire de 1999, Gilles Eric Séralini notait le manque danalyses toxicologiques sérieuses faites lors de linstruction des demandes de mise sur le marché des OGM.
Le potentiel allergène des OGM
La première source dallergie possible par les OGM est liée à linsertion dun gène qui synthétiserait une protéine allergène.Autrement dit, lOGM recevant un gène extérieur peut devenir allergène. Dans le cas des OGM, le caractère "caché", car directement inséré dans le génome dune plante, est plus pernicieux. Ainsi, une personne allergique à un produit donné X, risque de déclencher une réaction allergique en consommant un quelconque produit Y dans lequel le gène allergisant de X a été inséré. Ce cas nest pas un simple cas décole. En effet, en 1996, lentreprise Pioneer Hi-Bred a transplanté un gène de la noix du Brésil dans le génome dun soja destiné au fourrage4. Le but était de donner à ce soja une meilleure composition protéique (augmentation de la teneur en méthionine). Or, des recherches ont révélé que le gène inséré codait pour la production de la protéine responsable de lallergie à la noix du Brésil chez lhomme. Dans ce cas précis, où une étude poussée démontrant le risque allergénique a eu lieu, le danger a pu être écarté : Pioneer a décidé de ne pas commercialiser cette variété de soja. Cependant, pour un OGM détecté comme produisant un allergène connu, combien ne le sont pas lors des procédures dautorisations ? En effet, ces dernières nimposent pas de tests toxicologiques chroniques et, aux Etats-Unis comme au Canada le principe de l"équivalence substantielle" domine en matière dautorisation. Ce principe, défini par lOCDE en 1993, se fonde sur idée que les produits alimentaires qui ont fait la preuve de leur innocuité peuvent servir de référence. La comparaison entre cette référence et un aliment transgénique permet de déterminer sil y a ou non équivalence en substance. Ce principe permet donc de classer au même rang un aliment issu dOGM et un aliment conventionnel, si les taux de nutriments du produit transgénique équivalent à ceux du produit conventionnel. Ce concept est régulièrement critiqué par des scientifiques, par exemple par une équipe gouvernementale hollandaise qui estime que lanalyse de la composition chimique dun aliment ne suffit pas à prouver lintroduction de nouveaux risques génétiques, biochimiques, immunologiques" qui pourraient lui être inhérents. De plus, la noix du Brésil, connue pour son caractère allergène, a permis damener à la réalisation de tests in vivo. Mais quen est-il pour des gènes issus dorganismes étrangers à lalimentation traditionnelle de lhomme ? Prédire avec certitude le caractère allergène dun nouveau produit est aujourdhui impossible. Les travaux de Marion Nestle montrent que le caractère allergène dune nouvelle protéine est "incertain, imprévisible et intestable"5. En effet, pour déterminer lallergénicité dune protéine, il faut effectuer un certain nombre de tests concernant les caractéristiques physiques, chimiques, la résistance à la chaleur et à lacidité, la vitesse de dégradation enzymatique, le taux de corrélation des séquences peptidiques avec des protéines allergéniques connues. Mais, même sils en donnent une idée, ces tests ne permettent pas de prédire avec certitude le caractère allergène dune protéine. En effet, dune part les structures tridimensionnelles des protéines ne sont pas étudiées et, dautre part, le nombre de séquences peptidiques allergènes répertoriéees dans les banques de données est encore réduit. De plus, des mutations, même ponctuelles, de la séquence en acides aminés ou des modifications posttraductionnelles peuvent avoir une incidence importante sur lallergénicité. Ainsi, Denise-Anne Moneret Vautrin explique qu "on ne sait actuellement pas ce qui pourrait prédire quune protéine est allergène6.
La transgénèse responsable ?
La transgénèse nest pas une technique complètement maîtrisée.Ainsi, lors de la création dun OGM, les scientifiques ne savent pas si le transgène a intégré ou non le génome-hôte. On ne sait pas non plus avec précision et a priori la position du gène étranger dans le génome, ni son expression, ni linfluence possible sur dautres gènes. La dernière incertitude concerne lévolution des gènes dans le temps. La stabilité à moyen terme reste à ce jour inconnue. Anne Briand Bouthiaux explique que : "la cause principale de linstabilité des lignées transgéniques est sans doute le caractère hasardeux de linsertion du transgène, générateur deffets génétiques secondaires inattendus"7. Ces caractéristiques de la transgénèse soulèvent quelques questions. En effet, comme on ne connaît que peu lensemble des interactions géniques, on ne peut déterminer avec précision ce qui résultera dune modification génétique. Ainsi, un gène, placé à deux endroits, produira soit deux protéines différentes, soit la même en quantité différente. Dans les deux cas, des allergènes peuvent apparaître sans avoir été voulus, ni prévus. En effet, la variation en quantité de protéines peut ou non déclencher une réaction allergique. On peut également, lors de linsertion dun gène, voir apparaître lexpression dun gène inactif dans lorganisme naturel qui peut, à terme, apporter un caractère allergène nouveau.
Risque allergène et traçabilité des OGM
La récente affaire du maïs Starlink8 peut donner une idée des problèmes liés à la contamination dun OGM potentiellement allergène dans lalimentation. En septembre 2000, le Groupe Genetically Engineered Food Alert découvre dans différents produits destinés à la consommation humaine du maïs Starlink. Ce maïs, créé par Aventis CropScience, produit la protéine Cry9C, donnant au maïs un caractère insecticide (contre la Pyrale). La FDA (Food and Drug Administration aux Etats-Unis) lautorise pour lalimentation animale mais, en raison de risques dallergies, linterdit à lalimentation humaine. En effet, la protéine Cry9C nest pas dégradée par la chaleur ni par les enzymes digestives : elle est donc un candidat idéal à la création dallergies. Cette contamination entraîne un nombre record de "rappels" : au moins 300 types de produits ont dû être retirés du marché.Vu la rapidité de la dissémination des OGM (pollinisation ou manque de ségrégation des filières), lallergène peut se propager facilement et de façon incontrôlée. A ce jour, 44 plaintes ont été déposées contre le maïs Starlink après des manifestations allergiques. Les différentes études menées ont abouti à des résultats totalement opposés quant au caractère allergène du Starlink. Selon lEPA (Agence de protection de lenvironnement aux Etats-Unis), la protéine Cry9C possède un potentiel allergique "modéré". Le centre américain de contrôle des maladies (CDC) a conclu quaucune donnée ne permet de prouver quil existe un lien entre la protéine Cry9C et les allergies mais quil nest pas impossible que des personnes aient eu des réactions allergiques au Starlink. Enfin, M Kawata de luniversité de Nagoya, au Japon, dénonce le protocole utilisé pour les analyses de la protéine Cry9C (notamment par rapport aux échantillons témoins) et affirme que les tests de non allergénicité ne sont pas valides9. Suite à ces querelles dexperts, la FDA a conclu en juillet 2001 à labsence de données suffisantes pour démontrer linnocuité du Starlink, et a donc reconduit linterdiction de ce maïs pour lalimentation humaine. Contrairement aux allergies dues aux acariens ou au pollen, aucune méthode de désensibilisation nexiste pour les allergies alimentaires. Des tests sériques pourraient être effectués, mais vu le coût de ce genre danalyses ils restent difficilement envisageables dans un contexte de compression des dépenses de santé. La seule méthode fiable pour prévenir les réactions reste déviter laliment en cause. Pour cela, il serait nécessaire de mettre en place une traçabilité et un étiquetage précis des OGM afin de permettre aux personnes allergiques déviter autant que possible les aliments incriminés. Mais létiquetage doit non seulement indiquer la présence dOGM mais surtout quel OGM, avec quelle modification génétique, produisant quelle protéine... Seul un tel étiquetage permettrait également aux médecins-allergologues un meilleur suivi des substances à risques. Les promoteurs des OGM argumentent que lintroduction daliments exotiques non OGM (comme le kiwi) nont pas non plus fait lobjet détudes allergéniques. La grande différence est quil est totalement impossible déviter ces produits allergènes sils sont dissimulés dans une construction génétique. Comme nous venons de le voir un OGM, de par sa construction, introduit une source supplémentaire de risque en matière dallergie : qui décidera sil vaut réellement la peine dêtre couru ? Et comment sera-t-il évalué ? Qui sera responsable au final en cas de problème allergique majeur ?
Message édité par fran0001 le 17-12-2005 à 11:29:26