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C'est autour de cette dimension vécue -et signifiante parce que vécue- que se pose selon moi une problématique phénoménologique du concept d'expérience. La signification des expériences corporelles se positionne en effet dans une interface entre une inscription culturelle et une dimension personnellement signifiante (à caractère phénoménologique). Pour moi la phénoménologie renvoie à une certaine introspection. Il me semble que Le Breton dans son travail d'anthropologue articule bien ces dimensions individuelle et collective de l'expérience corporelle. En effet j'admire la façon dont il parvient à analyser sous ces 2 aspects certaines pratiques contemporaines. Par exemple lorsqu'il cherche à comprendre les "pratiques à risques" il leur attribue une double légitimité ; ils prennent une double signification pour l'individu : à la fois la recherche d'un nouveau sens donné à son existence lors d'un jeu symbolique avec la mort (qui au final rend la vie plus pleine, un peu à l'image de ce que Canetti suggère lorsqu'il évoque la surpuissance du survivant) mais également une dimension culturelle car ces pratiques à risques ne sont pas isolées mais réellement diffusées dans une culture contemporaine en quête de sens.
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Mouais, pas très convaincant... Une fois nest pas coutume, je vais répondre (un peu tardivement, vacances obligent, mais si je devais le faire pour chacune des petites médiocrités des uns et des autres...). Il est nécessaire de rappeler les fondements de la philosophie phénoménologique pour montrer quil ne peut sagir, ni dune psychologie expérimentale, ni dune psychologie introspective.
Le vécu intentionnel est en effet le point de départ de la méthode phénoménologique. Lenjeu de la phénoménologie est déchapper aux pensées dualistes qui faisaient de lêtre humain un individu perpétuellement partagé sinon déchiré entre son intériorité et lextériorité, entre sa conscience et son corps. Ces théories furent incapables de reconnaître dans le sens interne ou intime la manière pour un sujet sans cesse en souci de lui-même, de ce quil fait et de ce qui lui arrive, de conquérir son identité et son intériorité (quil sagisse de la saisie des perceptions qui nous mettent en rapport avec lextériorité matérielle, ou de la réflexion sur nos propres idées et sur les signes qui les rendent perceptibles) dans un rapport à laltérité, à autre chose que soi (lensemble des liens qui constituent un monde externe dune part, une communauté humaine, dautre part), de sapproprier afin dassurer lunité, la continuité et lautonomie du soi, à partir du rapport immédiat aux objets dans laffectivité, cest-à-dire dans lépreuve corporelle du sentiment. Impossible en effet de poser lunité personnelle sans se référer à cette expérience intime du sentiment, qui se révèle irréductible à la représentation (ce bouleversement de la description traditionnelle de la relation du sujet et de lobjet est peut-être lacquis le plus décisif de la philosophie phénoménologique). La compréhension dun sentiment est une épreuve et cest à partir de limpossibilité où se trouve le sujet qui léprouve de se distinguer de son corps, lorsque celui-ci est affecté, que le processus de synthèse de lexpérience vécue est possible, et que par lui lidentité se forme.
De ce point de vue, je suis assez daccord sur lintérêt des analyses de Le Breton : je pense aussi que toute enquête qui se veut réelle sur le vécu doit commencer par la position du corps, qui nest pas un simple "objet" mais nous-même. Le corps possède sa forme propre dintelligence irréductible à la matérialité, il est un centre daction, source de sens et de norme, le lieu où senracine et se déploie dans lexistence lordre de lhumain. Je suis mon corps, et si celui-ci se signale dabord par sa résistance, jai aussi la possibilité dagir sur lui, de le "faire" à mes pratiques, mieux de prendre possession de moi en prenant possession de lui. Dans la volonté dagir, dans lexercice de mes organes sensoriels de réception, de filtrage et de protection, dans toutes les activités où un effort sur le corps est nécessaire, cest la possibilité daccéder, bien au-delà de la pure et simple sensation, à lidentité propre de mon être, dapercevoir mon existence continuée, qui est assurée. Lexpérience de lacte volontaire est la condition de laperception et de la conscience et cela rend nécessaire, comme Freud déjà le signalait, une confrontation avec le réel dans la perception-conscience, cest-à-dire lexpérience du risque contre la tyrannie du moi inhibiteur. Dans le risque, la mise en oeuvre du corps, de ses muscles, de sa sensibilité saccomplit comme réflexion, non au sens dun mouvement second, dun retour de la visée sur elle-même, mais au sens de laperception, dune appréhension de soi dans lexpérience de lacte volontaire. Dans les pratiques à risques, "la vie redevient intéressante, retrouve tout son contenu" (Freud). Elles sont le moyen de prendre véritablement conscience de notre mort. Elles révèlent le fond mortifère de notre existence : nous savons habituellement que nous allons mourir, mais y croit-on véritablement ? Dans les pratiques à risques, je fais lexpérience intime que je suis promis à la mort. Cette expérience intime est angoissante : je ressens dans ma chair lhorreur de la fin de ma vie, la prise de conscience de ce que je réprime habituellement : lidée de ma propre mort. Ces pratiques apparaissent comme un moment métaphysique dans une existence humaine : langoisse soudaine que je vais mourir. Non pas que je peux mourir de façon lointaine mais que je vais mourir dans limmédiateté dun instant où ma propre vie intime va disparaître. A partir de là, je vis une vie particulière : une vie sous le surplomb de ma propre mort. Cette expérience est vécue : je la ressens dans ma chair. Il ne sagit pas de penser à ma mort comme dans lexpression "jy pense comme à la mort" (cest-à-dire sans y penser, en dilettante, sans y croire vraiment) mais il sagit de ressentir en soi le spectre de sa propre mort. Je suis un vivant en sursis parce que je porte en moi ma propre mort. Les pratiques à risques me permettent de penser ma propre mort mais de la penser vraiment, cest-à-dire dans langoisse, dans linquiétude. Par le désir et linquiétude qui lanime, la pensée est liée à laffectivité, au sentiment qui est bien plus quune affection ou quune sensation : un "je peux" originaire, auto-détermination qui rend possible le mouvement. Dans les pratiques à risques, je vis ma vie sans y réprimer le fond mortifère latent, jaccède enfin au réel ou plutôt celui-ci se signale à moi. Je vis lexpérience qui mapprend douloureusement et en un éclair que je suis mortel et que ma mort est inéluctable. Au fond, il s'agit de supporter la vie telle quelle est et non telle que nous la fantasmons. Le fantasme consiste à croire en une vie pure détachée de la puissance du négatif. Or, les pratiques à risques permettent de connaître le danger cest-à-dire le risque de la vie. Elles apparaissent comme le lieu négatif duquel peut sortir la valeur de la vie : cest parce que la vie est baignée par la mort que nous pouvons comprendre le précieux de la vie. Dans le rsique, la place se fait pour penser le précieux de la vie mais de la vie telle quelle est. Que signifie "la vie telle quelle est" ? Cela signifie que la vie est jalonnée de destructions, de négatifs, de morts. Le risque révèle la vie humaine. Lhomme y risque consciemment sa vie. Il sent alors que sa vie na de sens que parce quelle est précieuse, et cet aspect précieux lui est donné dans le risque de la perdre. Le risque est prié de mettre à lépreuve ma vie, de la mettre en péril. Cela ne peut se faire que si je sens que je porte ma mort en moi. Cest parce que je sens ma mort que je peux véritablement vivre.
Il sagit donc de dépasser la dichotomie du sujet et de lobjet, de lintériorité et de lextériorité. Dans lensemble de la culture scientifique ou philosophique (à quelques exceptions près, je pense spécialement à Maine de Biran, ce précurseur qui voyait la réflexion comme un "je peux" à la manière précisément de la phénoménologie), létude des expériences humaines repose sur le présupposé dun sujet qui se met en rapport avec un objet, cest-à-dire sur une attitude fondamentale et naturelle nenvisageant la réalité que sur le mode spatial et matériel afin den rendre compte selon un schéma causaliste. Ainsi, le psychologisme naturaliste explique les faits psychiques (y compris les idéalités comme les essences mathématiques...) à partir dun modèle physique : les prémisses produisent leurs conclusions comme leau est produite par lunion de lhydrogène et de loxygène. Le moi vivant (union inaliénable du corps et de lesprit), luni-dualité du sujet et ses expériences subjectives, tout ce qui en lui échappe aux catégories et aux modes dexistence des réalités naturelles, ne peut avoir dobjectivité, à moins dêtre réduit à un contenu psychologique. Pendant des siècles, lobservateur des expériences humaines et des facultés actives est resté un spectateur focalisé sur la visibilité de la pensée : il fallait rendre lesprit manifeste, le saisir sur le mode de lextériorité. Cest encore aujourdhui lespoir (insensé...) des neuro-sciences : lier les opérations de lesprit à des processus organiques déterminés et à des comportements observables. Mais dans les passions correspondant au jeu de nos organes sensibles, nous ne pouvons lire que des effets, relevant dune réceptivité passive. Une telle voie nous condamne au désespoir en nous interdisant tout accès direct aux phénomènes, en rendant impensable la possibilité dune manifestation immédiate, lintuition dune constitution antérieure au constitué. C'est pourquoi, à linspectio mentis doit être substitué une vision directe, une "pensée de contact" qui sinstalle au coeur même de lexpérience, du vécu (au lieu de le décomposer, comme le fait le psychologisme, en ses éléments ultimes au point de perdre le noyau significatif), là où sentrecroisent les rapports du sujet et du monde, de la corporéité et du psychique.
La méthode phénoménologique consiste à convertir notre regard sur le monde et les choses en une prise de conscience philosophique des actes de la conscience par lesquels nous visons les choses du monde. La conscience est une expérience intégrante tout à la fois de soi et du monde, de soi par le monde et du monde via soi-même. Le monde et le moi ne subsistent pas par eux-mêmes indépendamment de la relation qui les constituent lun par lautre : la relation est première. Le monde nest tel que dans la manière quil a dapparaître à un sujet et le sujet nest plus le reflet passif du monde mais lacte de le constituer en ensemble de significations. Le monde nest plus un monde de choses "irréelles", mais un monde "dobjets intentionnels", cest-à-dire de significations visées par la conscience et immanentes à cet acte de visée tandis que la conscience nest plus le réceptacle dimages du monde, une "boite à représentations" construites à partir des impressions sensibles, mais apposition active dun sens. Dans ma perception d'une voiture qui passe, par exemple, se trouve en effet des sons, des impressions, des mouvements, tout un ensemble de stimuli auditifs, visuels, olfactifs, accessibles à la psychologie expérimentale et indissociables de ma perception, puisque si je les supprime je ne perçois plus rien. Pourtant, ce ne sont pas ces stimuli que je perçois mais un objet intentionnel qui n'est pas une somme d'impressions. Ma conscience vise d'emblée la signification "voiture qui passe". Ainsi, le monde na pas dautre sens dêtre que dêtre pour une conscience, il ny a rien dautre en lui que ce qui est visé en lui : il est phénomène. Toute la réalité du monde sépuise dans le fait de se présenter à la conscience. Le monde nexiste pas dabord pour lui-même pour se présenter "après-coup" à la conscience : il nest lui-même que dans la mesure où il apparaît à la conscience. Mais si le monde renvoie par essence à une conscience, lêtre de la conscience à son tour cest de se rapporter au monde : cest lintentionnalité. Il ny a pas une conscience qui, par ailleurs, prendrait conscience du monde, mais une conscience qui nest elle-même quen sortant delle-même vers le monde, quen "séclatant" dans le monde (pour reprendre lexpression de Sartre). Le monde ne se soutient que dêtre pour une conscience qui ne se soutient elle-même que de se rapporter à lui.
Ainsi, si lobjet "réel" (real) est transcendant à ma conscience, puisque son mode dapparaître en fait une chose du monde jamais intégralement accessible en une fois à ma conscience, jamais intuitionné, jamais évident, le vécu peut être dit immanent à la conscience précisément parce quil est tout entier présent à ma conscience, parce quil se donne totalement et absolument dans une intuition noético-noématique ("lobjet intentionnel" est dit "noème" par Husserl, tandis que lacte qui le vise sappelle "noèse" ), elle-même prise dans le flux général de la conscience qui lui donne un "horizon" ou, comme dit Husserl, une "unité de motivation" : la conscience, en visant son objet vise toujours plus que cet objet, et ce "plus" appartient à titre de corrélat à la visée elle-même. Par exemple, si je regarde une maison, ma perception de la maison enveloppe non seulement la visée intuitive de sa façade qui est véritablement perçue, mais également celle des côtés qui ne le sont pas encore et qui le deviendront si je change la direction de mon regard, si je me déplace autour de la maison, etc... Ainsi, tout vécu de conscience est un vécu intentionnel qui possède un horizon, cest-à-dire la visée dun fond ou dun "halo" relativement indéterminé auquel renvoie lobjet lui-même mais dont la visée intuitive demeure vide. Dans la perception et, plus généralement, dans la saisie d'un objet quelconque, la conscience dépasse cet objet selon les multiples horizons qui le constituent. Mais il faut préciser que ces horizons sont en même temps des horizons temporels. En effet, chaque perception externe opère un renvoi des côtés véritablement perçus de l'objet de la perception aux côtés qui sont visés corrélativement sans être encore perçus. Or, ces derniers sont seulement anticipés sur le mode de l'attente en tant qu'ils sont alors à venir du point de vue de la perception. Il s'agit là d'une protention qui revêt un sens nouveau avec chaque phase nouvelle de la perception. L'intentionnalité est inséparable du mouvement par lequel la conscience se temporalise et se rapporte au monde lui-même. Nous entrevoyons du même coup que l'intentionnalité de la conscience n'est autre que la transcendance d'un être qui existe et dont l'être-au-monde constitue la structure fondamentale de son existence.
Mais peut-on se contenter de décrire des intentionnalités qui se juxtaposent ou se succèdent ? En fait, la diversité des intentionnalités suppose un "ego" qui en est comme le foyer : ainsi, lorsque je me représente un événement du passé comme ayant été vécu par moi, c'est que la différence entre ce passé et ce présent s'accompagne de l'unité d'un même sujet conscient ; le flux temporel des intentionnalités ne serait qu'éparpillement de représentations sans aucune coordination s'il n'était animé par un même sujet qui ne peut se dire qu'en première personne ("je" ). De ce point de vue, la philosophie phénoménologique est un idéalisme transcendantal parce que tout le réel est constitué par un ego transcendantal dont l'activité n'est ni réfléchie ni volontaire. Cet ego transcendantal n'est pas le moi empirique que je peux saisir dans le mouvement introspectif de ma conscience ou en me posant comme un objet du monde traitable par des expériences de psychologie.
Que se passe-t-il si l'on va jusqu'au bout du mouvement de retour de la conscience sur elle-même, nécessaire à l'analyse des intentionnalités, c'est-à-dire à la connaissance des phénomènes, si l'on ne se contente pas de discerner tel ou tel état passager, mais si l'on tente d'aller jusqu'à la racine de cette diversité d'opérations et d'actes de la conscience ? Selon cette orientation et cette exigence, le moi qui médite se retrouve en fait lui-même en tant que subjectivité, et le mot doit être pris ici dans sa littéralité : la subjectivité est un mode d'être qui consiste à se trouver "sous" et donc à donner une assise commune aux multiples visées de la conscience. Or, si la subjectivité est bien cela, elle ne saurait être limitée au moi méditant : celui-ci la découvre, mais il ne la produit pas. Elle est aussi bien à l'oeuvre dans le moi expérimentant, c'est-à-dire le moi en tant qu'il fait l'expérience naturelle, réelle et possible du monde : cette expérience est dite "naturelle" au sens où elle précède justement le retour sur soi par la méditation, et consiste notamment dans la perception commune du monde, qu'elle soit déjà acquise ou à venir. Cette subjectivité est à l'oeuvre encore dans le moi agissant, le moi en tant qu'il est engagé dans des activités, y compris les activités liées à la connaissance scientifique (observation, expérimentation, calcul). Cette même subjectivité préexiste donc aussi et déjà à toute connaissance naturelle de soi. Une connaissance naturelle de soi n'est nullement une absence de réflexion : elle est aussi bien la clairvoyance dont tout un chacun peut faire preuve que, de façon différente, un travail qui pourra prendre forme en des disciplines telles que la psychologie ou en des recherches mobilisant plusieurs disciplines (psychologie, biologie, neurologie...). Mais, quelles que soient les différences considérables entre ces attitudes et ces pratiques, elles ont toujours le même objet : la connaissance naturelle de soi, c'est la connaissance empirique du sujet psychophysique. A ce sujet, dont il ne s'agit pas de nier la réalité, préexiste une subjectivité qui serait donc encore plus fondamentale. Pourquoi ? Précisément parce que tout ce qui forme l'individu psychophysique - données anatomiques, fonctionnements physiologiques, processus psychiques inconscients et conscients - n'est accessible qu'à cette conscience intentionnelle que la méditation découvre en mettant en suspens la croyance à l'existence du monde et les intérêts qui y sont liés, cette conscience intentionnelle qui trouve elle-même son unité dans un ego transcendantal qui ne saurait donc être confondu avec le sujet psychophysique.
Le projet phénoménologique, en tant qu'élucidation de toutes sortes d'intentionnalités à la source des connaissances humaines, vise à mettre au jour le sol sur lequel toute science s'édifie, donc à élaborer peu à peu la science des sciences, la science la plus universelle, ou plutôt la seule science universelle. Mais à cela il ne faut pas moins que l'adoption de "l'attitude phénoménologique transcendantale". "L'attitude" : il s'agit d'une position, obtenue par modification à partir de l'attitude qui nous est la plus naturelle, celle qui consiste à admettre spontanément le monde, les choses, nous-mêmes en tant qu'individus dans le monde. "L'attitude phénoménologique" : il ne s'agit pas de nier ni de mettre en question l'existence du monde, des choses..., il s'agit d'en manifester et d'en expliciter les manières d'apparaître, donc d'en chercher les rapports essentiels avec la conscience qui les intuitionne. "L'attitude phénoménologique transcendantale" enfin : cette conscience qui, d'un point de vue descriptif, n'est qu'un flux d'intentionnalités, a son unité dans un "ego" ; mais cet "ego" n'est pas la personne psychophysique, autrement dit l'individu dans le monde, puisque celui-ci fait justement partie des phénomènes qui se donnent à la conscience intentionnelle (comme lorsqu'il nous arrive de nous voir situé en un lieu, ou de nous entendre en train de parler...). C'est donc un "ego" qu'il faut qualifier de "transcendantal", par différence avec "psychologique" ou même "psychophysique", puisqu'il est ce par quoi un monde, des choses, ainsi que lui-même et ses semblables comme êtres du monde, apparaissent, et apparaissent comme des réalités transcendantes, c'est-à-dire extérieures à cet "ego empirique" qui en quelque sorte s'épuise à les viser.
Cette distinction entre l'ego empirique et l'ego transcendantal continue à faire problème, après les analyses de Sartre, Merleau-Ponty...
Faut-il retrouver, en deçà des opérations perceptives immédiates et spontanées par lesquelles l'homme adhère au monde, la subjectivité fondatrice absolue, qui ne soit ni psychologique, ni historique, ni mondaine, mais transcendantale et universelle ? Pour Merleau-Ponty, l'erreur de Husserl fut justement de croire en l'existence dun sujet plus fondamental que le sujet psychophysique, le "Je pense" qui, de l'expérience pré-réflexive à l'activité réfléchissante et au travail conceptuel, en conditionnerait l'appréhension. La conscience est-elle constamment sous-jacente aux connaissances comme à toute autre activité de l'homme dans le monde ? Au contraire, tout en admettant que le cogito (husserlien ou cartésien) ne saurait se réduire à une diversité détats et dévénements psychologiques, Merleau-Ponty critique l'idée d'une pure activité spirituelle soustraite à toute limite de fait et à toute condition temporelle. Le "Je pense" ne peut être un absolu dissocié de toute inhérence au monde et de toute expérience dautrui. Le cogito ne peut être caractérisé par la référence à un sujet pensant ontologiquement distinct du monde sensible et de linsertion dans un milieu intersubjectif.
Mais ceci est une autre histoire...
Message édité par l'Antichrist le 31-10-2005 à 07:20:41