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Quels sont pour vous les trois livres de philo à lire pour un honnête homme ?


 
15.4 %
 273 votes
1.  "La république" de Platon
 
 
6.7 %
 119 votes
2.  "La métaphysique" d'Aristote
 
 
15.7 %
 279 votes
3.  "l'Ethique" de Spinoza
 
 
1.5 %
    27 votes
4.  "Essai de théodicée" de Leibniz
 
 
15.0 %
 266 votes
5.  "Critique de la raison pure" de Kant
 
 
17.8 %
 315 votes
6.  "Par delà le bien et le mal" de Nietzsche
 
 
5.9 %
 105 votes
7.  "L'évolution créatrice" de Bergson
 
 
6.4 %
 113 votes
8.  "Etre et temps" d'Heidegger
 
 
7.5 %
 133 votes
9.  "Qu'est-ce que la philosophie" de Gilles Deleuze
 
 
8.1 %
 144 votes
10.  "Moi, ma vie, mon oeuvre" de obiwan-kenobi
 

Total : 2656 votes (882 votes blancs)
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Auteur Sujet :

Philo @ HFR

n°6247125
Profil sup​primé
Posté le 04-08-2005 à 15:23:22  answer
 

Reprise du message précédent :
pour le moment je fais des fiches d'auteurs,
 
je pense qu'apres je vais essayer de travailler en Lv2 et lv1
 
beaucoup de lacune en ces deux matieres
 
:jap:

mood
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Posté le 04-08-2005 à 15:23:22  profilanswer
 

n°6273992
neojousous
Posté le 09-08-2005 à 13:48:05  profilanswer
 

Yop.
Je viens de recevoir Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes de Rousseau.
Sachant que j'ai aucune connaissance en philosophie politique, qu'est-ce que je dois savoir d'important avant de commencer à lire ce discours?
Et j'ai vu que précédait dans mon libre Discours sur les sciences et les arts . Vous me conseillez de lire aussi? Si oui avant ou après Discours sur l'inégalité ?
Je sais pas trop par où commencer... Pour l'instant je fais juste la différence entre le droit naturel et le droit positif.  
Merci


Message édité par neojousous le 09-08-2005 à 13:48:27
n°6279656
rahsaan
Posté le 10-08-2005 à 01:26:34  profilanswer
 

Ecoute, ne cherche pas à savoir ce qu'il faut en savoir. Commence par lire ces deux discours, dans l'ordre qu'il te plaira et tâche d'en comprendre l'argumentation. ;)

n°6281389
Bck
Posté le 10-08-2005 à 13:25:12  profilanswer
 

Très sympa le "La vie heureuse" de Sénèque qu'on nous fait lire pour les prépas 2005 :)
Le premier bouquin philosophique "plus qu'accessible" que je découvre :o
(A vrai dire j'ai pas essayé d'en lire des masses non plus :ange: )


Message édité par Bck le 10-08-2005 à 13:25:24
n°6289306
Mine anti-​personnel
Posté le 11-08-2005 à 15:35:20  profilanswer
 

Question à Rahsaan (et aux autres)
 
Que penses-tu de Bernard Stiegler, que j'ai découvert et lu récemment? Pour info, c'est le père de Barbara Stiegler; c'est le seul philosophe, à ma connaissance, dont la vocation philosophique est née en prison (parcours inverse de celui de Socrate). Il a écrit un petit livre là-dessus, ce qui peut faire le lien avec le topic "taulards, racontez vos expériences". En même temps, il s'intéresse énormément aux nouvelles technologies (directeur de l'Ina, maintenant de l'Ircam), donc il devrait intéresser les utilisateurs d'Internet.

n°6290930
rahsaan
Posté le 11-08-2005 à 19:00:39  profilanswer
 

Je connais un peu Barbare Stiegler, pour son excellent livre sur Nietzsche et la biologie.  
Je ne connais pas son père Bernard, mais il a l'air fort intéressant ! :D
Je vais me renseigner sur lui ! :)

n°6294145
Ache
immatriculé-conception
Posté le 12-08-2005 à 07:16:39  profilanswer
 

Mine anti-personnel a écrit :

Question à Rahsaan (et aux autres)
 
Que penses-tu de Bernard Stiegler, que j'ai découvert et lu récemment? Pour info, c'est le père de Barbara Stiegler; c'est le seul philosophe, à ma connaissance, dont la vocation philosophique est née en prison (parcours inverse de celui de Socrate). Il a écrit un petit livre là-dessus, ce qui peut faire le lien avec le topic "taulards, racontez vos expériences". En même temps, il s'intéresse énormément aux nouvelles technologies (directeur de l'Ina, maintenant de l'Ircam), donc il devrait intéresser les utilisateurs d'Internet.


 
Bonjour,
 
Si tu veux, il y a une interview intéressante de Bernard Stiegler sur http://www.automatesintelligents.c [...] egler.html.
J'ai eu l'occasion de parcourir certains de ses articles, et, comme tu le dis, sa "parenté" avec lesdits "nouveaux médias", rend son discours assez accessible (frais ?).

n°6294537
Mine anti-​personnel
Posté le 12-08-2005 à 10:18:21  profilanswer
 

Ache a écrit :

Bonjour,
 
Si tu veux, il y a une interview intéressante de Bernard Stiegler sur http://www.automatesintelligents.c [...] egler.html.
J'ai eu l'occasion de parcourir certains de ses articles, et, comme tu le dis, sa "parenté" avec lesdits "nouveaux médias", rend son discours assez accessible (frais ?).


 
Merci, j'avais déjà lu. Ses bouquins les plus importants sont les 3 de la série La technique et le temps (5 prévus), tout de même assez techniques. Malheureusement, il a tendance à stariser un peu récemment: livres d'entretien et confessions autobiographiques, à la Derrida, il publie trop. Malgré tout, il reste un penseur important à suivre.

n°6294821
rahsaan
Posté le 12-08-2005 à 10:58:49  profilanswer
 

Ache a écrit :

Oui, voilà, j'avais lu des extraits de cette série.
 
Ah ! la starification ! vaste question, celle-là... avec des arguments qui vont dans tous les sens...
On peut, à propos de "star", en dire autant de Deleuze ou Foucault, que de Sponville (je me retiens de citer d'autres "penseurs", mais vous voyez, n'est-ce pas ?)
 
Et à propos de "star pensante", je me renseigne aussi sur Peter Sloterdijk, assez en vogue dans certains milieux (Beaux-arts magazine est même allé jusqu'à tenter "le nouveau Nietzsche ?" ).


 
Tu as tort de confondre Deleuze et Foucault avec Sponville/BHL/Finkielkraut : les deux premiers n'ont jamais cherché à être des petites vedettes, des compilateurs des autres, des imitateurs.  
Mais je pense comme toi que Sloterdijk cherche un peu à faire sa vedette. Il intervient sur nombre de thèmes d'actualité : c'est bien son droit, mais ce goût de la présence mediatique me semble parfois trop fort chez lui. :o
Et Beaux-Arts a tort de dire que c'est un nouveau Nietzsche ; ce serait plutôt un Heideggerien de gauche inavoué. :o

n°6295037
rahsaan
Posté le 12-08-2005 à 11:28:41  profilanswer
 

>Ache : ok. :o
 
Effectivement, l'entretien avec Claire Parnet est un très bon document de philosophie. Emouvant certes, de par son intérêt historique, mais aussi vrai moment de pensée en acte. :)

mood
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Posté le 12-08-2005 à 11:28:41  profilanswer
 

n°6295103
tabernic
dura vitae sed vita
Posté le 12-08-2005 à 11:38:04  profilanswer
 

Spinoza encule Hegel, Jean-Bernard Pouy

n°6295110
neojousous
Posté le 12-08-2005 à 11:39:14  profilanswer
 

tabernic, il parle de quoi ce livre? Je suis tombé dessus en me demandant ce que ça pouvait être.

n°6295950
tabernic
dura vitae sed vita
Posté le 12-08-2005 à 13:09:27  profilanswer
 

C'est un peu un mad-max matiné de reflexions philo.

n°6345023
pascal75
Posté le 19-08-2005 à 12:00:38  profilanswer
 

C’est un polar, ca, non ?
En tous les cas, joli titre  :D

n°6345075
pascal75
Posté le 19-08-2005 à 12:05:56  profilanswer
 

En ce moment, j'essaye de lire Lao  
Tseu. Je relance pas la polemique pour savoir si c'est de la philosophie ou pas, mais ca se lit assez agreablement et, pour ce qu'on peut en comprendre, c'est profond. Evidemment les parties ou, en gros, Lao  
Tseu dit qu'il vaut mieux maintenir le peuple dans l'gnorance pour le gouverner, ne sont pas forcement les meilleures :o

n°6345522
Magicpanda
Pushing the envelope
Posté le 19-08-2005 à 13:00:45  profilanswer
 

En ce moment j'essaye de lire les investigations philosophiques de Wittgenstein :D

n°6346099
l'Antichri​st
Posté le 19-08-2005 à 14:00:55  profilanswer
 

Citation :

Pour le Tractatus de Wittgenstein, c'est logico-philisophicus et pas logici-philisophicus


 
Non, c'est le Tractatus Logico-philosophicus !!!


Message édité par l'Antichrist le 19-08-2005 à 14:01:55
n°6347449
neojousous
Posté le 19-08-2005 à 16:45:32  profilanswer
 

Quel est votre dialogue écrit par Platon préféré?
Pour l'instant j'ai lut (pas encore finit) le Banquet. Les autres dialogues sont dans le même "style"?

n°6347616
Mine anti-​personnel
Posté le 19-08-2005 à 17:09:39  profilanswer
 

neojousous a écrit :

Quel est votre dialogue écrit par Platon préféré?
Pour l'instant j'ai lut (pas encore finit) le Banquet. Les autres dialogues sont dans le même "style"?


 
Il faut tout lire. Une fois que tu auras tout lu, il faut tout relire, et là tu auras une idée de quoi il cause (ce conseil vaut pour tous les grands philosophes). Pour Platon, de préférence dans l'ordre chronologique (supposé) de leur écriture, c'est l'ordre des oeuvres complètes dans la Pléiade. La République et Les Lois sont les plus longs, mais pas les plus difficiles. Le plus difficile est le Parménide, à lire en dernier. Mon préféré est le Philèbe.

n°6374731
l'Antichri​st
Posté le 23-08-2005 à 10:53:12  profilanswer
 

Citation :

Je viens de recevoir Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes de Rousseau.  
Sachant que j'ai aucune connaissance en philosophie politique, qu'est-ce que je dois savoir d'important avant de commencer à lire ce discours ?


 
Si tu veux comprendre la pensée politique de Rousseau, il faut effectivement te familiariser avec sa vision du contrat social exposée dans la seconde partie du Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (ou Second Discours) à partir de sa méditation sur l’état de nature située dans la première partie. Il est alors intéressant de poser la question du lien existant entre ce contrat et celui du Contrat Social.
 
Tout d’abord, il faut bien voir qu’il y a en Rousseau deux hommes qui parlent tour à tour qu’on pourrait nommer, l’un le moraliste, l’autre le savant.
 
Le moraliste est au fond un homme de passion qui s’emporte et qui grince et ricane pour la bonne cause, qui s’indigne, qui fustige parce que le spectacle du vice et de la sottise le met hors de lui et qu’il ne voit pas d’autre raison au malheur ou au mal qu’une sorte d’acceptation, de consentement de la part de ses semblables. D’où ses emportements, ses diatribes, ses éclats de voix destinés à réveiller, à secouer, à faire réagir un interlocuteur qu’il pose comme responsable et cause de ses propres maux et faiblesses.
 
Le savant est un homme de raison qui, avec Spinoza, récuse "ceux qui préfèrent haïr ou railler les sentiments et les actions des hommes plutôt que de les comprendre" (cf. Ethique, III, préface). Le savant ne dénonce pas, ne blâme pas mais explique par les causes. Rousseau retrace alors un processus dont il ne dépend pas de l’homme qu’il le veuille ou qu’il ne le veuille pas et qu’il lui agrée ou non.
 
Rousseau tient au sujet de l’évolution humaine des propos positifs. Si la perfectibilité est une faculté naturelle et spécifique, c’est que Dieu a voulu que l’homme fût sociable et qu’il ne restât par conséquent pas dans l’état de pure nature. C’est donc que l’homme était appelé à devenir autre chose de plus élevé, de meilleur, de plus haut qu’un animal innocent et bête. La perfectibilité est justifiée au vu de choses comme la pensée et les lumières, comme les "deux sentiments connus des hommes, l’amour conjugal et l’amour paternel" (cf. Discours sur l'inégalité, II, 13), la plus douce des passions (cf. l’amour, II, 16), comme aussi la moralité qui donne lieu à un morceau enthousiaste dans le Contrat social (cf. I, 8).
 
Un tel passage contraste sans doute de la façon la plus criante avec la tonalité d’ensemble du Discours sur l'inégalité et peut sembler une sorte de revirement choquant. Mais c’est oublier la réserve (cf. "si les abus... dont il est sorti." ) et c’est oublier que le Discours sur l'inégalité est consacré tout entier  à la considération de cet abus, de cette dégradation qui a nom bestialité et non animalité : quand l’homme se dégrade il ne rétrograde pas à l’animal mais va en quelque sorte "en deçà" de lui. Que par ailleurs Rousseau ait lui-même évolué et ait été plus sensible à l’aspect négatif avant de l’être à l’aspect positif ou que le Discours sur l’inégalité coïncide avec une exaspération du malaise, est fort possible mais de toutes façons la perfectibilité apparaît finalement comme borne de son principe et dans ses effets spirituels, comme justifiée dans ce qu’elle peut permettre de plus haut.
 
Si la perfectibilité doit servir et ne peut pas ne pas entrer en action, si elle est faite pour cela, n’est-ce pas que l’homme est destiné à tout autre chose qu’au bonheur d’une Arcadie (comme le pensait déjà Kant), et même, au contraire de ce bonheur, à la peine, à toutes les peines liées à cet immense travail qu’est le développement de cette faculté ? Car c’est au risque de l’erreur, de la douleur, de l’extravagance, de la méchanceté que se confrontent nécessairement les facultés proprement humaines qui entendent s’élever au savoir et à la vérité, à la vertu et au droit : la vérité n’est atteinte que contre l’erreur, la vertu contre le vice, le droit contre la violence, le sens contre l’absurde, la positivité contre l’illusion, etc... et ce n’est que par le risque permanent de ceux-ci qu’on peut établir ceux-là. L’animal reste en deçà d’eux, son "innocence" n’étant que l’incapacité où il est de pouvoir s’élever à la plus légère idée de l’un et de l’autre (ce qui conduit Hegel à juger que même dans ses actes les plus déplorables, l’homme l’emporte encore sur la nature parce qu’il témoigne ainsi de l’esprit là où la nature en reste à l’aveugle détermination matérielle).
 
On peut donc dire que la cause des maux humains réside bien dans le don de la perfectibilité que la nature fît à l’homme. Dotation qui ne pouvait pas demeurer inerte et latente. Mais cette dotation voulue par Dieu est d’abord principe de perfectionnement et d’"ennoblissement", principe d’humanisation. Ce qui signifie que l’homme "perfectionné" ne peut plus s’abandonner à une spontanéité naturelle (qui s’est dérobée) et qu’il doit affronter des choix, des options, des oppositions, inconnus de l’homme naturel. Et c’est en cela qu’il est ou plutôt qu’il est devenu responsable de ses maux puisqu’aussi il lui est donné, de par son humanisation, de pouvoir choisir entre la voie des lumières et celle de l’erreur, la voie de la vertu et celle du vice, la voie du droit et celle de la force... L’homme est responsable de ses maux et non la nature en ce que la faculté que celle-ci lui donna peut le conduire au meilleur...au risque du pire sans doute mais tel est le prix à payer.
 
Ceci signifie aussi que rousseau ignore toute ruse de la raison (à la manière d’un Hegel), c’est-à-dire toute justification du mal par la nécessité immanente à un devenir orienté vers une fin qui légitime ses moyens et le négatif inhérent à ces moyens. A tout moment, un "halte-là" est possible par celui qui a l’esprit clair et c’est au fond par acquiescement à une force des choses qui en vérité désigne notre propre inclination que nous y cédons. A tout moment, la voix de la nature (ou d’une raison non pervertie ou dépravée) peut se faire entendre et il appartient à chacun de prendre ses responsabilités et de se détourner d’un mal qui n’est pas médiation nécessaire pour l’avènement du bien. D’où le ton ardent du moraliste, lequel suppose la liberté, le libre arbitre et la liberté qui en découle.
 
C’est donc à une prise de conscience de notre responsabilité dans l’existence du mal que rousseau nous convie de la sorte. Le mal ne peut venir que de nous et nous seul en avons la charge (et la décharge) possible. Reste qu’on sent Rousseau toujours partagé entre un projet d’assumer cette condition perfectionnée de l’homme, le présent et ce qui en lui peut permettre d’orienter mieux l’avenir d’une part et d’autre part cet invincible regret, cette insurmontable aspiration pour un état d’ "antan", pour un retour, l’heureuse unité ou solitude primitive.
 
Alors, salut politique ou salut moral chez Rousseau ? Il ne faut pas oublier la contemporanéité du Contrat social avec l’Emile : à savoir l’alternative (et la contradiction dont elle témoigne) qui s’offre à l’homme d’à présent et qui ne peut aboutir qu’à une demi-satisfaction, l’alternative entre le citoyen et la satisfaction civique et l’homme et la satisfaction intérieure. A lire et relire les textes, nous sommes loin de pouvoir trancher ! D'où l'étude qui va suivre (niveau bac...) consacrée à cette question.
 
La pensée de rousseau se déploie selon une logique de la rupture et de la discontinuité ; celle-ci anime un schéma trinitaire par quoi rousseau reconduit dans une philosophie laïque l’esprit religieux du christianisme et celle-ci fait du rousseauisme une philosophie de la chute et du salut, du mal et de la conversion. Cette logique implique une très forte opposition entre les différents moments de cet itinéraire humain et cela conduit Rousseau à établir un fossé entre état de nature et état civilisé, fossé dépouillant l’homme de toutes ses prérogatives les plus traditionnelles, le ramenant à une primitivité extrême contrairement à tout ce que ses prédécesseurs avaient admis (y compris Hobbes dont l’homme naturel parle et raisonne). C’est dans ce dépouillement extrême que Rousseau confère à l’homme une félicité et une innocence qui peuvent ériger cet état en valeur positive : indépendance, non-agressivité, répugnance à voir souffrir, simplicité constituent cette excellence originelle (qui n’implique cependant nulle cause, nul mérite).
 
Pourtant, Rousseau ne veut pas revenir à l’état de nature. En témoigne notamment, par exemple, la note "i" du Discours sur l’inégalité qui expose pourtant la misère de l’humanité civilisée et les raisons qu’elle peut avoir de regretter ses libres et heureuses origines.
 
Ce refus indigné de prendre à son compte une telle chimère repose non seulement sur l’idée déjà indiquée d’une impossibilité à régresser et d’un remède pire que le mal mais encore sur une autre idée selon laquelle l’état de nature "n’a peut-être point existé" selon le mot de la préface. Voilà pourquoi il faut écarter les faits et recourir à des "raisonnements hypothétiques et conditionnels plus propres à éclaircir la nature des choses qu’à en montrer la véritable origine" et semblables à ceux que font tous les jours nos physiciens sur la formation du monde (cf. Second Discours, Préface, 4). "Nature des choses" plus qu’"origine historique" : en somme essentiel plutôt que circonstanciel, rationnel plutôt qu’empirique. L’état de nature rousseauiste est présenté moins comme un fait constatable, situé dans le temps que comme une hypothèse nécessaire à quoi la pensée doit recourir pour comprendre le fonctionnement des choses à la façon dont Descartes ("nos physiciens " ) parlait de fiction du monde pour exposer les principes mécanistes de la nature.
 
Ces remarques de Rousseau méritent examen, d’abord parce que le statut de l’état de nature chez lui mais aussi chez d’autres fait question et ensuite et surtout peut-être parce qu’il faut s’interroger sur ce concept même d’état de nature. Car, qu’il désigne une réalité ou une conjecture, c’est un fait qu’il est omniprésent dans la réflexion politique, juridique et sociale de l’époque (en fait depuis Hobbes) et qu’il convient de s’interroger sur ses raisons d’être, ses justifications, son rôle dans ladite réflexion (et ceci est renforcé par cette constatation qu’il disparaît dans la philosophie du siècle suivant : non seulement comme fait il est récusé mais comme hypothèse il paraît cesser d’être indispensable).
 
Le concept d’état de nature est une des marques majeures de la philosophie politique moderne des XVIIe et XVIIIe siècles, l’autre étant celui de pacte social qui lui est connexe. Cette philosophie affirme que les sociétés politiques organisées sont toujours fondées sur des conventions qui leur donnent naissance : à l’origine et au principe de toute société organisées, il y a un engagement qui lie et unit les contractants et qui décide – c’est capital – des modalités de l’autorité qui régira ladite société (c’est-à-dire du type de relation qu’entretiendront gouvernants et gouvernés).
 
La convention qui inaugure la société politisée met évidemment fin à un état antérieur et c’est lui qu’on nomme "état de nature". Le concept d’état de nature n’a de sens qu’à l’intérieur d’une conception contractualiste, conventionnaliste du social et du politique puisqu’avant l’état de bien institué par un art (juridique), il y a "fait" (factum), c’est-à-dire un état naturel, spontané, immédiat. Mais attention ! Nature, naturel ne veulent nullement dire asocial et c’est pourquoi on a dit que le pacte et la convention établissaient des sociétés "organisées" (et politiques). Le pacte ne signifie nullement "formation d’une société à partir d’individus a-sociaux ou insociables" mais seulement formation d’un corps social, d’une société civile, c’est-à-dire instituée selon des règles (contractées) et régie par des lois issuent d’une autorité établie selon ces règles contractées. En fait, le pacte social n’est pas tant la société comme telle que l’organisation politique de la société, c’est-à-dire tout simplement l’existence d’un pouvoir politique. De sorte que l’état de nature définit toujours un état dépourvu de pouvoir politique.
 
Les philosophies politiques qui usent des concepts d’"état de nature" et de "pacte social" (philosophies juridiques : Grotius, Pufendorf, Burlamaqui, Barbeyrac ; philosophies politiques : Hobbes, Spinoza, Locke, Rousseau) sont avant tout des philosophies de l’origine et du fondement du pouvoir politique, de l’autorité publique. C’est comme telles qu’elles se sont imposées au long du XVIIe siècle, pour triompher au XVIIIe siècle, et ceci contre d’autres philosophies également relatives au même système (cf. Robert Derathé Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps). Et il convient de souligner que le succès de cette philosophie conventionnaliste du pouvoir politique est d’abord venu de ce qu’elles assuraient aux monarques et à l’absolutisme des justifications qui leur parurent meilleures que toute autre (en particulier parce qu’elles évacuaient toute interférence religieuse).
 
Or si l’établissement du pouvoir politique dépend d’une convention, on peut supposer que ses modalités d’exercice, sa nature, sa portée et ses limites etc... relèvent de ce qui est alors conclu. Et en effet, le pacte social est bien l’acte définitoire, fondateur et légitimateur de l’autorité publique. Mais d’autre part, cet acte, qui met fin à la vie non politique (mais pas nécessairement non-sociale redisons-le) de l’état de nature, ne le fait vraisemblablement qu’en fonction de ce qui se passe dans cet état. C’est par rapport à la situation qui est celle des hommes dans l’état anté-politique qu’a sens l’acte qui vient clore cet état et pour les modalités du régime politique. Et l’on peut alors en conclure que la façon dont on conçoit que doivent être les modalités de l’organisation politique est fonction de la façon dont les choses se passaient dans l’état dénué d’organisation politique et l’on peut alors juger du caractère, si l’on peut dire, hautement stratégique de ce concept d’état de nature : en schématisant, on peut dire : tel est l’état de nature, tel sera le pacte social et de là l’Etat.
 
On voit aussitôt l’enjeu formidable dissimulé derrière le concept d’état de nature : car il commande les justifications, les raisons données à tel modèle politique plutôt qu’à tel autre. Ou, pour inverser le schéma indiqué précédemment, on peut dire : tel on veut l’Etat (et par conséquent le pacte social avec ses principes), tel on fera l’état de nature.
 
Il est alors aisé de comprendre la diversité des façons dont fut conçu le fameux état de nature et plus particulièrement l’étonnante opposition qui surgit entre philosophes à son sujet puisque pour les uns, l’état de nature est un état de socialité et même de sociabilité spontanée, tandis que pour les autres il est un état d’insociabilité et de conflit permanent : chacune de ces deux conceptions commande, en vertu de sa teneur particulière, une certaine idée du pacte social et donc de l’état de ses prérogatives, de son fonctionnement, etc... (conforme aux yeux du philosophe).
 
C’est ce que rousseau a très bien compris, ce qui revient à dire que Rousseau a saisi et dénoncé ce qu’avant la lettre on peut appeler l’idéologie ou le caractère idéologique des conceptions de l’état de nature faite par ses devanciers. Soulignant dans le Discours sur l'inégalité (préface, 6) le désaccord surprenant et scandaleux qui règne sur cette importante question, il distribue régulièrement l’épithète de "sophiste" à tel ou tel pour signifier qu’il y a raisonnement captieux destiné à justifier sous une apparence de raison un résultat en droit inacceptable mais tout à fait désirable pour l’intéressé. Parlant des façons argumentatives de Grotius (cf. Du contrat social, I, 2) il dit qu’on "pourrait employer une méthode plus conséquente [plus cohérente] mais non plus favorable aux tyrans". Grotius est un "sophiste payé" : un penseur à gages !
 
De là le projet rousseauiste de rétablir la vérité (scientifique) contre l’erreur (nullement involontaire) de manipulateurs intéressés, alors que les théoriciens précédents ont fabriqué leur état de nature "sur mesure" en partant, non de l’homme originel, mais de l’homme civil et d’un homme civil tel qu’ils voulaient le voir (c’est-à-dire lui-même fait sur mesure, en fonction du type d’institutions politiques et sociales qu’ils souhaitaient justifiés). Rousseau se flatte de restituer la vraie figure primitive de l’homme tel qu’il sortit des mains de son Créateur (c’est-à-dire tel que le voulait Dieu et par conséquent tel que l’homme doit le respecter s’il veut respecter – et il le doit – la volonté de son Créateur).
 
On peut se demander ce que vaut en vérité ce projet d’atteindre le seul véritable état de nature (non trafiqué, non manipulé). Peut-on dire que rousseau fait oeuvre "scientifique" là où ses prédécesseurs firent oeuvre "idéologique" ? On a déjà le double visage de l’anthropologie rousseauiste et cet entrelacement entre le scientifique et le moraliste, l’objectif et le projectif, le factitif et le normatif, le gnoséologique et l’axiologique apparaît bien en cette matière de l’état de nature. Il est certain en effet que la reconstitution par Rousseau d’un état de nature qui ne soit pas une grossière transposition aux premiers âges d’une situation enfantine très actuelle et à quoi on a seulement ôté l’élément institutionnel, peut être créditée d’une valeur heuristique réelle. Et peu importe ici que le détail de la description rousseauiste soit périmée, c’est le principe "génétique" et "évolutionniste" qui importe et qui est positif. On peut d’ailleurs s’étonner de la sûreté d’une reconstitution que confirment tel ou tel état de la recherche ethnologique ou préhistorienne. Avoir bien vu, par exemple, que contrairement aux visions style guerre du feu ou même style Protagoras (mythe de Prométhée / Epiméthée), l’homme naturel (l’australopithèque ? L’homo habilis ? L’homo erectus, bref l’homme d’avant le feu par exemple 500, 600, 700 000 ans avant Jésus-Christ) n’était pas du tout un malheureux démuni affrontant l’épouvante d’une nature hostile et ténébreuse, mais un être parfaitement accordé à son milieu ; avoir si remarquablement ressaisi l’essence de ce qu’on appelle à présent la révolution néolithique méritent admiration. Rousseau a vraiment introduit la vertigineuse distance des millénaires et parvient à juste titre à se gausser de ses prédécesseurs, lui qui n’était "point obligé de faire de l’homme un philosophe avant que d’en faire un homme" (cf. Discours sur l'inégalité, préface, 10) et qui pouvait uniquement souligner que toutes les définitions données par ces "savants hommes..."(cf. Discours sur l'inégalité, préface, 6).
 
Cela étant, il faut reconnaître que son état de nature joue le même rôle que chez tous ses prédécesseurs, et que la détermination de sa teneur est affecté d’un coefficient fortement axiologisé aux fins de justifier des conclusions normatives au sujet de l’état souhaité (et corrélativement de l’Etat refusé), pour mieux légitimer ce qui doit (et ne doit pas être). En somme l’état de nature joue chez rousseau, comme chez tous les autres, un rôle de "canon", de règle (positive le plus souvent, ou négative chez Hobbes), afin de juger du présent et de disposer d’une norme, d’une règle, pour apprécier ce qui est en regard de ce qui (ne) doit (pas) être et pour exiger ce qui doit être. L’état de nature fournit la norme de l’exigible, il n’est pas un concept descriptif mais normatif. Il ne décrit pas une réalité mais un idéal (ou un contre-idéal). Il n’est pas réaliste mais "idéaliste", pas historique mais moral. Ce que Rousseau avoue en disant que même si l’état de nature n’a jamais existé : "il est pourtant nécessaire d’[en] avoir des notions justes pour bien juger de notre état présent" (cf. Discours sur l'inégalité, préface 4), déclaration à quoi pourraient souscrire tous ses prédécesseurs.
 
Et que pour lui l’état de nature soit affecté d’une valeur référentielle qui l’élève au rang de canon, est assez attesté par les références à son statut divin. L’état de nature est par essence la perfection ou même l’idéal dont on ne s’écarte que par malheur et qui doit guider tous nos efforts pour vivre ou revivre mieux. A cet égard (et mutatis mutandis) l’état de nature rousseauiste ne se différencie guère de l’état de nature lockien, par exemple, où l’on voit les hommes vivre directement sous la houlette de la loi naturelle, conçue par dieu. L’homme naturel rousseauiste n’est pas sociable, il n’a pas de raison développé, il vit instinctivement mais Rousseau fait bien "du concours et de la combinaison" (préface 9) des deux principes instinctifs et primitifs donc bons qui sont dans l’âme humaine, la racine des règles du droit naturel. Ils sont donc l’équivalent en termes sensibles de la loi naturelle des juristes et des philosophes antérieurs.
 
La question, classique, sur l’existence historique ou non de l’état de nature perd ainsi beaucoup de sa portée. Le fait que l’état de nature vaille avant tout comme canon et règle pour juger de ce qui convient aux hommes en matière d’institutions peut s’accommoder d’une forme d’existence non empiriquement, non historiquement attestée. On mesure cependant bien le caractère équivoque de cette notion à la fois raison justificatrice et principe régulateur pour un certain choix institutionnel quand on voit que cet état naturel a été tantôt admis comme un fait, tantôt posé comme une simple possibilité.
 
Il semble que dans l’ensemble des tenants de l’école dite du droit naturel un philosophe comme Locke ait considéré que l’état de nature a bien existé à l’origine et qu’il fut une sorte d’âge d’or. En revanche, Hobbes envisage sans difficulté le caractère purement hypothétique d’une telle existence historique car la force de sa position tient en ceci que l’état de nature (tel qu’il le dépeint) n’a nullement besoin d’être situé en un lointain passé (disparu depuis si longtemps qu’il est facile d’en contester l’existence) puisqu’il existe dès que deux hommes sont ensemble. L’état de nature n’est pas derrière nous mais "sous" nous en ce sens que le plus léger fléchissement des contraintes sociales suffit à ramener au jour une agressivité, une compétition violente, des débordements conflictuels, que rien ne peut supprimer. Sous la mince pellicule de l’homme policé, des habitus sociaux modérés, gronde toujours l’orage des passions et des désirs. Le char de l’Etat est le couvercle d’un volcan que le moindre incident fait sauter ; le vernis de la civilisation masque à grand frais la sauvagerie de la brute. A tous ceux qui lui reprochaient l’affreux tableau qu’il faisait de l’état de nature, Hobbes demandait sarcastiquement ce qu’ils faisaient la nuit, durant leurs voyages, etc... sinon se barricader, s’armer, se méfier, se garantir... de leurs semblables si sociables et si bienveillants ! Sans compter que c’est l’état de nature qui règne entre ces super-individus que sont les Etats.
 
L’existence de l’état de nature est donc moins historique que "trans-historique". Elle est latente, immanente aux conduites humaines. L’état de nature est un fait que chacun peut constater (pourvu qu’il ne se raconte pas d’histoires) car il resurgit perpétuellement puisque ses causes (le désir, la crainte, la gloire) sont indéracinables. Comment du reste expliquer que, dans l’hypothèse des théoriciens du droit naturel qui prétendent que l’état de nature fait un état de sociabilité et de bienveillance, les hommes aient renoncé à cet état ? S’ils ont été conduits à contracter afin d’établir une autorité et des lois contraignantes, c’est forcément parce que la sociabilité naturelle n’allait pas sans accrocs. Toute la force de la position hobbesienne est là, et comme le note Derathé, on finissait toujours bon gré mal gré par devoir passer sous les fourches caudines du terrible anglais, dès lors qu’on évoquait le pacte social et la fin de l’état de nature.
 
L’aporie majeure des penseurs classiques du droit naturel est là : dépeignant un état de nature globalement très positif, comment expliquer la nécessité où les hommes furent d’en sortir ? La conception hobbesienne de la nature n’a évidemment pas cette redoutable difficulté et force est d’admettre qu’à cet égard elle paraît beaucoup plus solide en son réalisme impitoyable que celle des Pufendorf et des Locke. Le caractère "idéologique" de ce dernier semble difficilement niable au regard de la lucidité de son illustre compatriote. Locke dépeint en effet l’état de nature comme un état de sociabilité tranquille dans lequel, sous l’égide de la loi naturelle, les hommes exercent paisiblement des droits naturels (inaliénables) dont Dieu les a pourvus, et en particulier le droit de propriété. C’est la positivité de cet état qui fait règle pour l’établissement d’une autorité que Locke veut tempérée, respectueuse des droits naturels absolument imprescriptibles et destinée exclusivement à empêcher toute action susceptible d’attenter à ces droits : c’est le futur "Etat-gendarme" du libéralisme qui protège et favorise la "société civile" et perd toute légitimité dès lors qu’il accroît son caractère autoritaire. Locke est le théoricien de la "glorieuse révolution" de 1688 qui chassa les Stuart et en laquelle s’origine la monarchie parlementaire à l’anglaise qu’admirent tant Montesquieu et Voltaire. Mais Locke n’insiste guère sur les raisons de passer de l’état de nature à l’état civil, il souligne constamment la continuité entre les deux états et la nécessité pour l’état civil de demeurer au plus près de l’état de nature ("Laissez faire, laissez passer " ).
 
Or, cette difficulté d’expliquer pourquoi les hommes, qui vivent si bien à l’état de nature, éprouvent le besoin d’introduire l’art politique (fut ce de manière modeste), difficulté inexistante chez Hobbes, se retrouve dans le rousseauisme quoique d’une autre façon ; et cette difficulté interfère précisément avec la question de la réalité ou de l’hypothéticité de l’état de nature dans cette conception.
 
Il ne faut pas oublier en effet que l’état de nature se divise en deux et recouvre deux situations à ne surtout pas confondre. Il y a en effet à l’origine vraiment première ou supposé l’état de pure nature. Exposé dans la première partie du Discours sur l’inégalité, il concerne l’animal humain solitaire et réduit à des fonctions purement animales. Ensuite il y a l’état de "sauvagerie" qui est déjà un état de société (naturelle) et dans lequel les hommes ne sont plus seulement des bipèdes mais des êtres parlant, pensant, fabricant, désirant... Or, cet état de nature second est parfaitement attesté et Rousseau ne se fait pas faute de renvoyer dans ses notes aux récits de voyageurs qui ont découvert depuis deux siècles ces êtres exotiques. Or, il ressort des propos de Rousseau que ce second état de nature est supérieur au premier. Il convient en effet de ne pas perdre de vue que l’état de pure nature concerne un être qui n’a d’humain que les apparences physiques et qui pour le reste n’est qu’un animal stupide et borné tout libre (indépendant) et heureux (satisfait) qu’il soit. Rien de réel ne différencie alors l’homme de la bête brute et l’on peut tout de même hésiter à considérer un tel état comme l’idéal supérieur, le paradis de perfection dont pour notre malheur nous sommes déchus.
 
Mais justement, il faut penser l’articulation entre ces deux états de nature : le second étant réel sans conteste, qu’en est-il du premier ? S’il fut également réel, pourquoi l’homme est-il passé de l’un à l’autre ? S’il n’est qu’une hypothèse, quel statut faut-il alors donner à cette antériorité sans réalité historique ?
 
On sait que le tableau dressé par Rousseau de cet état primitif aboutit à l’idée d’une harmonie "symbiotique" entre une nature fertile et prodigue et un homme parfaitement adapté à son milieu. Cette "idylle" n’a rien de niais car elle repose sur la disparition rapide des inaptes et sur cette idée que la nature est d’autant plus prodigue que ce qu’on lui demande est modeste. Or les besoins de l’animal humain sont très simples et aisés à satisfaire. Sur ce point Rousseau dénonce l’illusion qui repose sur la peur que nous avons de nous retrouver seuls et nus devant la nature ; car c’est une illusion de civilisé devenu incapable de vivre sans un attirail compliqué de protection variées (vêtements, outils, maisons), incapable de se passer d’une foule de choses apparemment superflues (le raffinement des mets par exemple). Il ne faut pas penser le pur sauvage sur le modèle du civilisé et les premiers se trouvent parfaitement à leur aise là où les seconds seraient dans le plus grand embarras. Raisonnement parfaitement remarquable et entièrement confirmé par l’ethnologie et la préhistoire, dans lequel Rousseau prend le contrepied de la vieille image de l’homme démuni et voué à sa perte dans une nature hostile et marâtre (mythe de Protagoras). En outre, étant solitaire et disposé en d’immenses territoires, la catastrophe hobbesienne de la guerre est nécessairement inconnue et derechef le thème sophistique de la nécessité de l’art cesse d’être pertinent. Prométhée n’a nulle raison d’être.
 
Comment dans ces conditions a-t-il pu se faire que l’homme devienne prométhéen ? Telle est la difficulté et Hobbes en somme revient à la charge : il faut bien que quelque part l’homme ait été menacé pour qu’il ait cru bon de codifier sa condition naturelle. A cela Rousseau répond dans le Discours sur l'inégalité (II, 3) qu’en effet "il se présentera bientôt des difficultés...". Des aléas climatiques voire des révolutions exigèrent de la part des hommes une initiative qui les força à la coopération et progressivement les mit sur le chemin de la société, du langage, de la pensée, des sentiments et des besoins plus complexes.
 
Mais comment penser ce "bientôt" ? Il semble que Rousseau veuille dire que la nature a été d’abord tranquille et maternelle, uniforme et régulière et qu’à un moment donné, des troubles sont survenus qui détruisent une harmonie génératrice d’inertie et d’indéfinie poursuite d’une même vie. Idée que Rousseau paraît confirmer quand dans son Discours sur l’origine des langues il écrit que "Celui qui voulut que l’homme fut sociable toucha du doigt l’axe du globe et l’inclina sur l’axe de l’univers". Cette idée d’un accident (au sens littéral, quelque chose survient) pourrait être - chose remarquable – confirmée par nos connaissances actuelles sur les modifications climatiques et écologiques qui affectèrent il y a quelques millions d’années l’est africain (passage de la forêt à la savane) et eurent des répercussions décisives sur le comportement de populations d’êtres hybrides, ni singes anthropoïdes, ni homo, qu’on appelle "australopithèque" (archanthropes, Lucy).
 
Mais on peut tout aussi bien penser que cette distinction entre une nature uniforme et une nature agitée ne relève pas de la succession chronologique mais d’une dissociation méthodologique. La description que Rousseau fait de la nature dans la première partie du Discours sur l'inégalité a pour but d’exposer le rapport homme / nature non pas réel mais principiel. Il s’agit d’exposer le rapport minimal des deux en ôtant tout ce qui est susceptible d’entrer de jeu de faire évoluer ce rapport, et afin de restituer une sorte de point de départ absolu indépendamment de toute évolution si minime soit elle (une sorte d’arrêt sur image, d’instantané d’une origine qui en fait n’a jamais eu lieu empiriquement, concrètement, car tout est toujours en mouvement) mais qui n’en est pas moins sous-jacent. L’analyse de la première partie du Discours est le produit d’une abstraction méthodologique, d’une chimère dissociatrice destiné à créer (intellectuellement, conceptuellement) le corps chimiquement pur (mais inexistant comme tel dans la nature) de l'état de nature c’est-à-dire de l'homme à l’état brut dans un milieu instantané (abstraitement, fictivement étiré à l’envi d’où le caractère étrange, mythique, immémorial du récit rousseauiste qui rappelle ce temps d’avant le temps, ce temps du "à l’origine il y avait" des récits mythiques).
 
Mais en fait ce corps pur n’ayant jamais existé comme tel, la nature n’a jamais été arrêtée et fixée et l’homme n’a jamais été cette pure animalité immuable et Dieu n’a pas d’abord créé un monde tranquille puis, pris de la volonté de rendre les hommes sociables, il n’a pas brusquement décidé de modifier l’axe du monde pour y faire surgir ces révolutions et ces accidents, ces bouleversements dont le Discours sur l’origine des langues fait état beaucoup plus nettement que le Second discours. Et c’est en ce sens qu’on pourrait comprendre que l’état de nature n’a peut-être point existé : il n’a jamais existé à l’état pur ; mais emporté par le flux du devenir auquel la nature est d’emblée soumise, il a d’emblée été affecté par divers caractères issus de ce mouvement des éléments. L’état de nature est une sorte de point zéro, donc est l’instant qui précède le départ ; c’est le monde sortant des mains de Dieu, en sa perfection, et juste avant que son cours ne l’emporte. C’est comme tel qu’il est la perfection, le bien (et cette norme référentielle d’origine qu’il faut restituer et remémorer si l’on veut pouvoir redonner à la vie une étoile polaire) juste avant que le mal ne vienne le contaminer. Pourrait-on revenir à une telle origine absolue, d’avant le temps ?
 
Mais quel est donc ce mal et pourquoi le mal qui vient (soit au bout d’un certain temps, soit d’emblée) altérer cette perfection ? Quelle en est la cause, la source, l’auteur ? L’homme aurait-il pu ne pas choir dans le mal ? Tout est bien sortant des mains du créateur et tout périclite dans celles de l’homme. Peut-on admettre cette "répartition des tâches" et nous couvrir la tête de cendres ? Les choses sont en vérité beaucoup plus complexes et la pensée de Rousseau suscite embarras et perplexité.
 
Analysons le moment du mal. Avant de répondre à cette question, il convient d’abord de revenir sur l’exacte nature et l’exacte source du mal. Le mal vient-il de la sortie de l’état de nature c’est-à-dire de l’état de solitude et consiste-t-il dans la société ; ou bien vient-il d’autre chose qu’on a appelé civilisation ? En un mot, la pensée définitive de Rousseau est-ce : la société voilà le mal ?
 
Sur ce point comme sur bien d’autres, les formules tranchées de Rousseau peuvent égarer ou rendre perplexe et l’image, certes caricaturale, d’un Rousseau vitupérant toute société et thuriféraire d’une absolue sauvagerie n’est pas totalement dénuée d’arguments. Maints propos donnent à penser que pour lui l’homme en sortant de son isolement naturel a perdu sa condition la plus douce et la plus propice au bonheur.
 
Cependant, une telle façon de voir les choses présente un inconvénient car l’éloge de l’état de nature comme bien humain, comme éden humain, est l’éloge d’un état dans lequel il n’y a d’homme que le nom ou plutôt les apparences. Qu’est-ce que l’homme naturel sinon, de l’aveu même de Rousseau, un animal ? Physiquement cet animal a nos traits mais quant au reste il est borné à l’exercice des facultés qui sont celles des autres bêtes (instincts, sensations...). Si l’état de nature est un paradis perdu, ce paradis ne nous concerne pas, il concerne un autre être qui a disparu. Pouvons-nous vraiment regretter et invoquer comme norme un état qui nous est à ce point étranger ? L’homme naturel de Rousseau n’est ni Adam ni l’homme naturel des jurisconsultes comme Locke.
 
En fait, les choses sont plus complexes. Le mal humain présent ne peut être dit tel que par rapport à un bien qui soit également humain et ce bien humain ne saurait être pleinement naturel puisqu’alors il n’y aurait qu’asocialité (ou alors faut-il dire que nous ayons la nostalgie de l’animalité ? Mais c’est alors avoir la nostalgie de quelque chose d’ancestral que nous fumes mais que nous ne pouvons absolument plus redevenir et retrouver, quelque chose à quoi nous sommes devenus irréductiblement étrangers). Or ce bien "humain" que nous avons perdu pour connaître le mal, c’est en réalité la "sauvagerie" que les hommes ont perdue pour la "civilisation" et c’est pourquoi le véritable tournant, gros de conséquences accablantes, ne se situe pas véritablement entre la première et la seconde partie du Second discours mais dans le cours de la seconde partie, à un moment que Rousseau qualifie de "grande révolution" qui a "perdu le genre humain". De quoi s’agit-il donc ?
 
Que la description de la première partie désigne une période originelle antérieure, ce degré zéro, cet instantané abstrait aussitôt emporté dans un cours agité, il reste que la destinée actuelle de notre espèce n’est telle que parce que divers événements affectèrent l’état naturel et formèrent autant de "circonstances" propres à solliciter rudement les êtres naturels et parmi eux, l’espèce humaine.
 
Or cette espèce est dotée d’une faculté singulière décrite par Rousseau à l’alinéa 17 de la première partie et qu’il nomme "faculté de se perfectionner" ou "perfectibilité" et cette faculté "à l’aide des circonstances développe successivement toutes les autres". C’est donc cette faculté spécifique qui, sollicitée par les difficultés ("mais il se présenta bientôt des difficultés", Discours sur l'inégalité, II, 3) issues "du concours fortuit de plusieurs causes étrangères" (Ibidem, I, 50), développe progressivement la pensée, le langage, les savoir-faire, les passions, évolution retracée parfois minutieusement par l’auteur au début de la seconde partie du Discours. Pour plus de commodités, les hommes s’assemblent alors en petites sociétés et aboutissent à ce que Rousseau appelle la "société commencée" (cf. Ibidem, II, 19) c’est-à-dire la "sauvagerie". Dans la terminologie de l’auteur, le terme de sauvagerie correspond à ce qui sera appelé ultérieurement "sociétés primitives", à ce que nous nommons (d’un terme que nous voulons moins péjorativement connoté) "sociétés archaïques" c’est-à-dire à ces petits ensembles humains de quelques dizaines, quelques centaines au plus d’individus, pratiquant une économie collective de déprédation légère (chasse, pêche, cueillette) à peine perfectionnée de quelque petit jardinage ou élevage domestique. Les récits des voyageurs faisaient alors état de ces sociétés avec d’autant plus de curiosité qu’elles étaient "exotiques", éloignées non seulement par la distance et les moeurs mais encore par l’absence, l’inexistence chez elles de tout ce que les grandes sociétés européennes jugeaient naturel et indispensable : agriculture, commerce, Etat, administration, instruments et commodités.
 
Or, Rousseau signale (cf. Ibidem, II, 19) cet état comme le paradis perdu. Car l’homme y est vraiment un homme pleinement tel mais cet homme conserve les privilèges de l’état de nature à savoir liberté et bonheur. Sans doute n’a-t-il plus l’indépendance absolu du solitaire mais son nécessaire commerce avec ses semblables, outre tous les avantages intellectuelles et affectifs qu’il comporte, ne l’empêche pas de demeurer "indépendant" (cf. Ibidem, II, 20) puisqu’il demeure capable de s’appliquer seul à tel ouvrage qu’il désire. En somme, tout individu demeure foncièrement capable d’autarcie et nulle action ne l’expose à tomber sous la coupe d’un autre, à devoir sa subsistance à un autre (la chose est certes collective mais outre qu’elle peut toujours être à la rigueur un acte individuel, elle est le fait d’égaux interdépendants et non d’une relation unilatéral).
 
Le mal humain n’est donc pas la socialisation, qui fait de nous des hommes et n’altère pas la liberté ni le bonheur, mais ce qui met fin à cette société commencée, dont Rousseau pressent qu’elle a duré fort longtemps car : "Plus on y réfléchit... ne jamais arriver" (II, 19). Et le texte qui confirme cette affirmation se trouve dans le chapitre 8 du Contrat social, I. Rousseau ne pouvait donner démenti plus net à tous ceux qui se figure encore et toujours qu’il veut nous faire redevenir des bêtes. Il est vrai que cette apologie de la sortie de l’état de nature comporte une réserve "si les choses de cette nouvelle condition... dont il est sorti ". Mais le terme même d’"abus" est éclairant : ce n’est pas cette nouvelle condition, son usage proprement humain, qui est proprement détestable, au contraire, mais ce sont ces abus. Qu’est-ce à dire ?
 
Laissons de côté le funeste hasard dont fait état la réflexion sur la pérennité potentielle de la sauvagerie et ne considérons que ceci : "Dès l’instant... moissons". Dans ce passage, justement célèbre pour la force des antithèses, l’ample mouvement et le rythme de la période, Rousseau affirme que la "jeunesse du monde" a pris fin, que les hommes découvrirent la propriété, l’appropriation individuelle des choses. Bref le mal c’est la propriété car d’elle s’ensuit l’inégalité et toutes ses turpitudes. Nous voici à l’instant de la chute, cet instant symboliquement évoqué par Rousseau au début de la seconde partie du Discours par cet homme plantant des pieux, creusant un fossé autour de son bien, introduisant entre lui et les autres une frontière, une cassure irrémédiable, hissant l’unité sociale et la "convention" (stricto sensu) du tous pour un, un pour tous.
 
Mais d’où surgit la fatale, la funeste propriété ?
 
1) De la spécialisation (division du travail) et de la forme nouvelle de coopération qu’elle entraîne (dépendance du non spécialiste vis-à-vis du spécialiste).
 
2) du travail, entendons d’une action destinée à produire au delà de la consommation immédiate un surplus dont on pourra user comme d’un moyen de pression sur d’autres. A une économie fondée sur la non spécialisation et une production (une déprédation) au jour le jour, économie où tous sont unis dans l’interchangeabilité et l’égalité, se substitue une économie fondée sur l’échange de services spécialisés (le paysan, le berger, le métallurgiste...) et la production d’un surproduit susceptible de spéculation ; économie où tous deviennent dépendant mutuellement les uns des autres, mais dans une spécialisation et une appropriation qui supprime l’équivalence et l’égalité : la différenciation laborieuse engendre la distinction économique et sociale, chacun se sentant différents des autres par ses talents veut accroître et consolider cette différence par le moyen de la possession qu’il assure grâce à ce talent propre.
 
A l’économie de déprédation légère, toute proche encore de l’animalité, succède une économie d’exploitation et d’accumulation qui s’empare de la nature et bouleverse son visage. L’agriculture, c’est la mainmise sur la nature jusqu’alors effleurée par l’acteur des hommes, vivants parmi d’autres vivants, simple espèce parmi d’autres espèces. Agriculture qui elle-même requiert la métallurgie apte à forger des outils indispensables à une telle maîtrise de la terre. Et c’est pourquoi : "La métallurgie... le genre humain" (II, 21).
 
C’est alors que se met en place l’ordre des choses qui nous est familier. Il vaut la peine de souligner que par la seule force d’une reconstitution largement raisonnée, Rousseau ait identifié comme responsable de la société inégalitaire, qu’on appellera un jour "société de classe", ce qu’on nomme aujourd’hui la "révolution néolithique", ce processus d’où l’histoire sort de la préhistoire et les sociétés "chaudes" des sociétés "froides", processus au cours duquel l’homme se sédentarisa, créa l’irrigation, construisit les premiers villages puis les premières cités, de vastes sociétés auxquelles il fallut l’organisation étatique et l’administration, l’écriture, bref ce qu’on nomme en effet aujourd’hui les civilisations. Et comme Rousseau l’ajoute (II, 28), les choses étant parvenues à ce point, il est facile d’imaginer le reste, ce reste qui consiste en la période qui va de l’Egypte antique à l’Europe du XVIIIe siècle et où, derrière des visages superficiels, un même principe social s’est perpétué : l’inégalité et la coupure entre ceux qui regorgent de richesses, donnent et gouvernent et la multitude affamée qui manque du nécessaire.
 
L’opposition paraît se situer moins entre nature (+) et société (-) qu’entre société (+) et société (-). Il est vrai que la société sauvage peut être dite naturelle en quelque façon puisque, à la façon de la société naturelle des jurisconsultes ou de Locke, elle ne repose pas sur un pacte et des institutions convenues. En sorte qu’il y a lieu de distinguer chez Rousseau un état qu’on peut qualifier de pure nature qui ignore toute société et un état de nature devenue qui développe la socialité. Ce qui différencie ce premier état social encore "naturel" (non pas qu’il soit spontané et originel mais parce qu’il est sans conventions) de l’état social "artificiel", c’est non pas tant l’existence d’un pacte que celle d’une appropriation (II, 2), le pacte n’étant lui-même qu’une conséquence de la propriété, la propriété rendant indispensable la conclusion du pacte.
 
Ces différences entre Rousseau et ses prédécesseurs renvoient toutes à la différence fondamentale qui en est la clé : pour ceux-ci le passage de la nature (non social ou sociale peu importe) à la société civile est toujours positif, soit absolument chez Hobbes (puisqu’on y passe du pire au meilleur) soit relativement chez les autres (puisque la société civile a pur but de conforter le bien naturel). Le devenir historique civil est dans le principe une bonne chose (c’est surtout de façon accidentelle et extérieure que le mal peut advenir, quand la société politique s’écarte trop de la nature – de la loi naturelle). C’est le contraire pour Rousseau : les institutions civiles étant issues de la propriété c’est-à-dire de l’inégalité c’est-à-dire de la destruction de l’heureuse indépendance naturelle, sont forcément mauvaises. Le devenir historique civile, loin de remédier à la nature (Hobbes) ou de conforter la nature (Pufendorf, Locke) détruit la nature. L’art est ici directement fatal à la nature et Rousseau est l’exacte antithèse de Hobbes sur ce point.
 
Quoi qu’il en soit, c’est dans le pacte social que l’homme non seulement retrouve les avantages perdus de l’origine mais encore les étend (comme l’homme chrétien sera dans sa salvation et son élection finales bien au-dessus d’Adam avant sa faute). Rousseau va même jusqu'à souligner les limites de la félicité et de l’excellence originelles par rapport à la supériorité de son état final heureux et moral. Il semble donc que l’accession de l’homme à sa plus grande supériorité ait pour condition le contrat social. Mais c’est ici que surgit la difficulté. La moralité a pour condition la socialité, la sortie de la solitude animale primitive, certes mais quelle socialité ? Il apparaît clairement que ce "changement très remarquable" dépend d’un état civil établi d’après ce qui est exposé dans le chapitre 8 du Contrat Social que Rousseau appelle de ses voeux.
 
Et justement ce contrat social est présenté comme ce qui doit être institué si l’on veut que des hommes échappent à la violence, l’oppression, l’injustice etc... Ce qui signifie que tel n’étant présentement pas le cas, les hommes vivent aujourd’hui dans l’immoralité et la méchanceté. Et en effet Rousseau décrit la civilisation comme état d’immoralité puisqu’il repose sur l’inégalité et l’oppression du faible et du pauvre par le riche et le fort. D’où l’existence dans le texte de Rousseau de deux contrats, celui du Discours sur l’inégalité qui est fallacieux, intervenant à un moment où la corruption de l’ordre de chose initial est fort avancé déjà et celui du Contrat social authentique qui en est le rétablissement sur des bases saines et à des conditions non truquées, authentiques.
 
Il en résulte comme conséquence que la morale acceptable doit attendre pour exister qu’intervienne ce contrat social authentique et qu’elle est inconnue tant que règne le contrat social faussé décrit dans la seconde partie du Discours sur l’inégalité. Illustration de la formule fameuse des Confessions qui dit que Rousseau découvrit que tout naît de la politique. Mais c’est alors que la difficulté se précise, une difficulté qui a double visage. Primo, celui d’un manque de cohérence dans les propos de Rousseau. Secundo, celui d’une contradiction peut-être inéluctable dont Rousseau est la cause, qu’il ne résout pas et dont la résolution est problématique.
 
Difficulté 1 : Si la moralité véritable dépend du "bon" contrat social, elle est en réalité future (et  problématique). Or Rousseau la présente dans le Contrat social comme un fait et cela parce qu’il présente le contrat social comme un fait ! Il s’exprime à l’indicatif de la description : "Ce passage de l’état de nature à l’état civil produit..." c’est-à-dire qu’il parle du "bon" contrat social non plus comme un programme pour l’avenir mais comme d’un fait passé.
 
Et en outre ce contrat social authentique produit une condition nouvelle susceptible d’abus tels qu’ils dégradent souvent l’homme au-dessous de son ancienne condition (naturelle) ! C’est-à-dire que le contrat social dont parle le Contrat social est à la fois le contrat social idéal, le seul valide (celui qui ne dévaste pas) et celui qui a eu lieu (mais s’est dégradé). Que devient dans ces conditions la distinction entre le contrat du Discours sur l’inégalité et celui du Contrat social ?
 
Le Discours sur l'inégalité obéit nettement au schéma ternaire : nature (+) qui ignore le droit civilisateur (-) qui adultère et fausse le droit, enfin l’art perfectionné (+ +) qui rétablit le droit selon la nature qui l’ignorait (cette troisième partie étant bien entendu en filigrane programmatique). Le Contrat social trouble ce schéma en faisant du (bon) contrat un idéal et un réel. Mais du coup si le bon contrat social n’est pas totalement irréel et programmatique, mais déjà réel, la moralité qu’il induit n’est pas elle-même totalement irréelle et programmatique, et elle a déjà une existence historique. Et dans ces conditions, l’état présent n’est pas totalement mauvais, qui connaît déjà la moralité et s’est déjà élevé à son idée. De même que l’état de nature, quoique bon, manque cependant de quelque chose d’essentiel, de même, mais inversement, l’état civil, quoique mauvais, possède quelque chose d’essentiel du point de vue excellence.
 
Ainsi, on ne voit pas très nettement si pour Rousseau la morale suppose seulement l’état social ou seulement l’état social correct, ses propos pouvant autoriser l’une et l’autre dans ces interprétations. Pourtant, il paraît difficile d’après des propos de Rousseau de nier que la morale n’existe pas encore et de prétendre que son instauration doive attendre la conclusion du bon contrat. Non seulement parce que l’exemple des cités antiques atteste d’une vertu que rousseau n’a jamais marchandée mais encore parce que le christianisme atteste de l’existence d’une autre moralité bien différente de celle qu’on vient d’examiner et qui est intimement liée au politique (avec la difficulté qu’on vient de rappeler). Et ceci nous conduit à la seconde difficulté.
 
Difficulté 2 : Car non seulement l’état corrompu qui succède à l’état bon des origines, n’ignore pas, semble-t-il, la haute valeur de la moralité (qui fut la vraie défunte et la vraie valeur de l’homme) mais en outre il connaît une moralité qui est distincte non seulement du politique corrompu d’ici présent mais distincte de toute politique c’est-à-dire forcément du politique lors même qu’il sera (si c’est possible) rétabli sur les bases saines que Rousseau expose dans son Contrat social. Bref une moralité bien différente de la "vertu" et des moeurs caractéristiques du citoyen.
 
C’est qu’en effet, cette moralité que le contrat social produit en l’homme (comme en fait état le chapitre 8 du Contrat social) est toujours et nécessairement une moralité civile ou civique, bref une moralité particulière, propre à une collectivité, collectivité nationale qui est vis à vis des autres dans l’état de nature (sur ce point Rousseau retrouve tout à fait Hobbes). Et à cette moralité nationale, civile s’oppose une moralité universelle, celle que l’Evangile a répandue et dont les commandements s’adressent à tous les hommes.
 
Et nous revoici par conséquent confrontés à cette "dualité d’idéal", l’homme et le citoyen, évoquée au début. Face à l’universalisme et au cosmopolitisme trop facilement optimiste de l’époque, Rousseau montre que la volonté générale est nécessairement particulière par rapport à d’autres corps politiques et c’est pourquoi l’individu est partagé entre son statut de citoyen et sa condition d’homme : le mouvement de civilisation qui élève et ennoblit l’homme (cf. Contrat social, I, 8) s’arrête aux frontières de la communauté civile car au-delà, le citoyen devient soldat en guerre contre son semblable qui est l’ennemi, raison pour laquelle Rousseau est très critique vis à vis du Projet de paix perpétuelle de l’abbé de saint pierre qu’il avait entrepris de commenter.
 
Cependant, c’est ce mot de civilisation qui éduque l’homme et pas seulement le citoyen, la perfectibilité recèle et l’un et l’autre et cependant tous deux sont en conflit puisque la morale de l’homme exige ou interdit ce que la morale du citoyen interdit et exige (et vice versa). Il apparaît alors que Rousseau est dans un grand embarras à ce sujet et paraît adopter tantôt un parti tantôt l’autre.
 
L’admirateur des cités antiques et le réformateur radical des sociétés modernes ne veut évidemment pas mettre la morale au-dessus de la loi et faire de la loi morale quelque chose de plus impérieux et de plus vénérable que la loi politique. C’est pourquoi, dans le manuscrit de Genève, il écrit que "Nous ne commençons proprement à devenir hommes qu’après avoir été citoyens". Par où l’on voit ce qu’il faut penser de ces prétendues cosmopolites. Le ton est fort critique et paraît tenir la moralité universaliste pour quelque chose de plus irréel (factice, apparent) que la Sittlichkeit lié à l’universel concret de la cité.
 
Dans le Contrat social, la moralité consécutive à la socialisation sera reprise en main par le législateur qui a pour tâche d’instituer un peuple et nullement le genre humain. D’où le rôle de la religion civile qui prend le relais de la religion nationale des cités d’antan.
 
On peut même voir la pensée de Rousseau se renforcer sur ce point à partir du Contrat Social. Les conceptions que cet ouvrage expose de l’Etat le considèrent toujours comme une réalité en soi. Rousseau étudie l’Etat "en vase clos" c’est-à-dire abstraction faite de l’existence concurrente des autres Etats. Or cette existence a nécessairement des conséquences importantes sur le fonctionnement interne de l’Etat (ce que Rousseau appelle la police en ce sens notamment que les nécessités de la sûreté extérieure fait que la vie politique interne ne saurait être pleinement démocratique).
 
On peut alors comprendre que Rousseau ait pu s’exclamer plusieurs années après avoir écrit le Contrat social qu'il est "un livre à refaire". Or les Considérations sur le gouvernement de Pologne contemporaines de ce jugement et où les références au Contrat social sont manifestes, a ceci d’intéressant qu’il traite d’un Etat forcé par sa situation "géopolitique" de subordonner sa "police" à sa "sûreté". Et dans une telle situation il n’y a pas 36 solutions ; un humanisme moral universaliste est tout à fait déplacé. Tout rêve d’une "Société des Nations" comme dit Kant reposant sur un développement de la conscience morale collective comme moteur est écarté au profit d’une réponse entièrement contraire à l’idéalisme kantien, puisque Rousseau préconise pour les Polonais une "éducation nationale" c’est-à-dire stricto sensu une inculcation des vertus patriotiques de l’amour exclusif de la patrie contre toute bienveillance cosmopolitique trop propre à accepter la loi de l’adversaire.
 
Mais d’un autre côté, le Rousseau "chrétien" ou en tous cas adepte d’une religion naturelle, comme celle du Vicaire savoyard est contraint de tenir un tout autre discours. Dans le Discours sur l’inégalité, il parle avec faveur des grandes âmes cosmopolites qui


Message édité par l'Antichrist le 24-08-2005 à 09:27:04
n°6374905
l'Antichri​st
Posté le 23-08-2005 à 11:14:38  profilanswer
 

Citation :

Quel est votre dialogue écrit par Platon préféré?  
Pour l'instant j'ai lut (pas encore finit) le Banquet. Les autres dialogues sont dans le même "style"?


 

Citation :

Il faut tout lire. Une fois que tu auras tout lu, il faut tout relire, et là tu auras une idée de quoi il cause (ce conseil vaut pour tous les grands philosophes). Pour Platon, de préférence dans l'ordre chronologique (supposé) de leur écriture, c'est l'ordre des oeuvres complètes dans la Pléiade. La République et Les Lois sont les plus longs, mais pas les plus difficiles. Le plus difficile est le Parménide, à lire en dernier. Mon préféré est le Philèbe.


 
Intéressant ! Je pourrais peut-être vous proposer une "petite" étude "unifiant" le Phédon, le Banquet, La République et surtout le Parménide sur la fameuse question de la théorie des Formes !
 

n°6375830
neojousous
Posté le 23-08-2005 à 12:59:06  profilanswer
 

Merci Antichrist pour cette étude, j'ai lu la moitié, et c'est très intéressent, ça clarifie ce que j'avais saisi.
 
Je vais donc commencer Alcibiade lorsque j'aurai finit le Banquet... Mais bon devoir lire dans l'ordre chronologique m'embête un peu, j'avais repéré Charmide, Phédon et Timée qui se semblait très intéressant.

n°6376221
l'Antichri​st
Posté le 23-08-2005 à 13:42:53  profilanswer
 

Citation :

Je vais donc commencer Alcibiade lorsque j'aurai finit le Banquet... Mais bon devoir lire dans l'ordre chronologique m'embête un peu, j'avais repéré Charmide, Phédon et Timée qui se semblait très intéressant.


 
Non, il ne faut pas "tout lire" dans l'ordre chronologique et "littéraire" des oeuvres mais plutôt suivre la "logique" philosophique des questions qui traversent ces oeuvres. Je te conseille donc de lire dans l'ordre (qui est ausi, d'une certaine façon, celui de la difficulté) : le Gorgias, le Ménon, le Banquet, le Phédon, la République pour finir avec le Parménide dont le projet est de dépasser le dualisme dans la théorie des Formes ou des Idées !

n°6376526
neojousous
Posté le 23-08-2005 à 14:12:25  profilanswer
 

Donc l'oeuvre de Platon est une oeuvre globale et organique?
On ne peut pas lire le Banquet comme réflexion sur l'amour ou le phédon comme réflexion sur la mort?

n°6376605
l'Antichri​st
Posté le 23-08-2005 à 14:21:19  profilanswer
 

Oui, bien sûr qu'on le peut, mais je voulais t'indiquer un ordre de lecture qui permet de progresser dans la compréhension et la problématisation du dualisme platonicien dont le coeur est la théorie des Idées.

n°6376622
neojousous
Posté le 23-08-2005 à 14:23:50  profilanswer
 

Ok je vais m'essayer au Gorgias alors (qui traite du sophisme et de la persuasion c'est ça?).

n°6377044
l'Antichri​st
Posté le 23-08-2005 à 15:23:32  profilanswer
 

Le Gorgias interroge la conception sophistique de la rhétorique, en effet, mais la question, qui reste en suspens dans ce dialogue de jeunesse, tout entier consacré à purifier l'esprit de ses erreurs, est de savoir qu'elle est positivement l'essence de cette vertu qu'est l'art de parler ? Ainsi, en 497-508/509e, Socrate différencie l'agréable, qui "se produit", du bon, qui par sa "présence" fait que nous sommes bons, de même que le mal est ce par la "présence" (parousia) de quoi nous sommes mauvais. Or, cette "présence" du bon en nous a lieu quand une "vertu" "est venue se produire" dans le sujet. Ainsi, le bien et le mal sont des réalités absolues, tandis que vertu et plaisir, ayant un commencement et une fin, sont dans le devenir. Mais comment une "vertu" se produit-elle ? Lorsque l'ordre cosmique est respecté, ce qui, en ce qui concerne l'âme, est réalisée lorsque celle-ci est tempérante et sage, c'est-à-dire lorsqu'elle agit de la façon qui convient à son arrangement propre. Ainsi, il existe pour Platon, entre le ciel et la terre, entre les dieux et les hommes, une communauté réglée et ordonnée : "l'égalité géométrique", c'est-à-dire de proportion, "a un grand pouvoir dans les choses divines comme dans les choses humaines" (506c-508a). L’égalité géométrique est puissante chez Dieu et chez les hommes. C'est pourquoi, Socrate critique Calliclès et dit qu’un homme qui se réglerait sur sa doctrine impérialiste ne saurait devenir l’ami ni d’un Dieu ni d’un homme : car le ciel et la terre sont contenus par une amitié, par un ordre. Il y a un passage de l’amitié-vertu au cosmos : vertu politique, puis physique, et enfin mathématique. Platon (comme Aristote d'ailleurs) distingue égalité arithmétique et égalité géométrique (Cf. République, VIII ; Lois, VI, 457a-b). Égalité arithmétique : on attribue des choses égales à des choses inégales. Ainsi, on donne les mêmes honneurs à des citoyens inégaux, et de même pour les lois. Comme il y a plus de citoyens que de charges à remplir, on arrive dans la Constitution, par exemple, à une répartition égale par tirage au sort. Égalité géométrique : il s’agit de donner à chacun en proportion de sa nature. Mais si une Cité est réglée seulement selon le principe géométrique, elle court le risque de séditions ; il faut donc y introduire l’égalité ignorante, qui distribue les charges de façon égale par tirage au sort. Mais le hasard est divin car la raison ne peut l’analyser jusqu’au bout. On peut faire un rapprochement avec le Timée. L’égalité géométrique traduit la causalité formelle dans la Cité ; l’égalité arithmétique, qui est la part faite à la matière sociale, répond à la causalité matérielle. De même que, dans le Timée, la raison persuade la nécessité, de même la législation persuade les citoyens d’accepter l’égalité géométrique, en leur accordant sur d’autres points l’égalité arithmétique ; il y a là une entorse faite à l’idéal, une concession faite à la matière. Autrement dit, Platon fait nettement la distinction entre le Devenir, divers et contingent, et l'être, unique et nécessaire. Mais il dit aussi que le Devenir peut réaliser une imitation plus ou moins réussie de l'être, qu'il tend vers celui-ci et trouve en lui sa fin. C'est sous la forme d'une proportion mathématique que se détermine cette tendance, quand elle va vers son bien. Tout cela annonce les dialogues futurs, du Ménon au Parménide !


Message édité par l'Antichrist le 24-08-2005 à 09:05:11
n°6377189
neojousous
Posté le 23-08-2005 à 15:47:19  profilanswer
 

Je viens de finir Le Banquet.
 
Je vais attendre une semaine pour commencer Gorgias (pour profiter de la biblio universitaire, acheter les livres, ça commence à revenir cher :D).
Je vais donc lire un peu de science fiction (je suis à la moitié de 1984 d'Orwell, et à la seconde partie d'Hypérion).
Qu'est-ce que vous pensez de la science-fiction par rapport à la philosophie?
Personnellement c'est une source d'inspiration et de réfléxion énorme, qui me font réfléchir sur des sujet de philo, en m'immergeant dans des univers passionants. Je crois que c'est la science-fiction qui m'a apporté à la fois le goût pour les sciences et pour la philo.
 
Ah sinon une question sur Le Banquet. A l'époque de Platon, la vision de l'amour c'était quoi? Le discours de Socrate est "révolutionnaire" ? Parceque ça tranche beaucoup avec les histoires contées par les autres convives. (celui d'aristophane selon lequel chaque homme recherche sa moitié, car il est incomplet?).

n°6377625
l'Antichri​st
Posté le 23-08-2005 à 16:44:04  profilanswer
 

Ah, la science fiction, une grande passion de jeunesse ! Mes souvenirs vont vers Robert Heinlein (En Terre étrangère, Une porte sur l'été, je dois avoir quelque part l'ensemble de son oeuvre...), A.E. Van Vogt (Le monde des A, Les armureries D'Isher, A la poursuite des Slans, La faune de l'espace, etc...), Theodore Sturgeon (Cristal qui songe, etc...), Arthur C. Clarke (Les enfants d'Icare, Terre, Planète impériale, etc...), Robert Silverberg (L'homme dans le labyrinthe, L'oreille interne, Les chants de l'été, etc...), Philippe Curval (L'homme à rebours, Cette chère humanité, etc...), Issac Asimov (Le cycle des Robots, etc...), Clifford D. Simak (Demain les chiens, Dans le torrent des siècles, etc...), Erle Cox (la sphère d'or I et II), etc... je dois posséder 200 ou 250 volumes toutes collections confondues et sans doute bien plus encore, je ne sais pas en fait, je vis et je travaille dans un océan de livres... La science fiction fut surtout pour moi une source inépuisable d'évasion et de divertissement (elle a aussi sans doute stimulé mon imagination et développé mon sens créatif) mais je reconnais volontiers qu'elle fonctionne comme une vision métaphorique de l'univers : à travers elle, nos contemporains expriment leurs craintes, leurs délires, leurs espoirs. Sur le Banquet, je vous réponds dès que possible...


Message édité par l'Antichrist le 23-08-2005 à 16:47:15
n°6379057
Mine anti-​personnel
Posté le 23-08-2005 à 20:23:25  profilanswer
 

neojousous a écrit :


Ah sinon une question sur Le Banquet. A l'époque de Platon, la vision de l'amour c'était quoi? Le discours de Socrate est "révolutionnaire" ? Parceque ça tranche beaucoup avec les histoires contées par les autres convives. (celui d'aristophane selon lequel chaque homme recherche sa moitié, car il est incomplet?).


En fait le vrai sujet du Banquet n'est pas l'amour, mais la philosophie. On peut le lire comme un texte littéraire sur l'amour; mais tout ce discours sur l'amour est en fait, comme souvent chez Platon, une allégorie (métaphore continuée). Donc à chaque fois que Platon parle d'amour (philia), il faut comprendre en fait philosophie (philosophia). C'est là où il veut en venir.

n°6380728
rahsaan
Posté le 23-08-2005 à 22:47:47  profilanswer
 

Salut à tous ! Je vois que ce topic continue d'être bien vivant ! :)
 
Cette année, à l'agreg de philo, nous avons un beau programme.  
L'Antichrist, as-tu dans ta hotte magique quelques aides sur le premier Heidegger (Etre et Temps, Pb fondamentaux de la phéno...) et sur Montaigne ?  :D

n°6386165
le penseur​ fou
Posté le 24-08-2005 à 15:44:55  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Salut à tous ! Je vois que ce topic continue d'être bien vivant ! :)
 
Cette année, à l'agreg de philo, nous avons un beau programme.  
L'Antichrist, as-tu dans ta hotte magique quelques aides sur le premier Heidegger (Etre et Temps, Pb fondamentaux de la phéno...) et sur Montaigne ?  :D


 
Tiens , c'est curieux ça . Ils placent au meme niveau de difficulté Montaigne et Heidegger a l'agreg ?
 
Sinon j'ai une nympho qui pourrait interesser les gens de ce topic:
Tous les soirs entre 19h et 20h sur France Culture, il y a Michel Onfray qui donne des cours de philo . Depuis un moment le thème en est : "les libertins baroques" .
Ce soir il va essayer de démontrer que Spinoza est un Epicurien  :p

n°6386271
rahsaan
Posté le 24-08-2005 à 16:02:14  profilanswer
 

le penseur fou a écrit :


Ce soir il va essayer de démontrer que Spinoza est un Epicurien  :p


 
Il peut le démontrer, ce n'est pas non plus un défi grandiose.  :heink: Et quand bien même il y arrive, je ne sais pas bien si on sera tellement avancé sur Spinoza. Franchement, Michel Onfray aime enfoncer souvent des portes ouvertes, au nom d'une lutte contre l'idéalisme religieux et le nihilisme chrétien -un peu comme si nous vivions encore au 19e siècle, en somme.  :sarcastic:


Message édité par rahsaan le 24-08-2005 à 16:02:32
n°6386347
le penseur​ fou
Posté le 24-08-2005 à 16:11:27  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Il peut le démontrer, ce n'est pas non plus un défi grandiose.  :heink: Et quand bien même il y arrive, je ne sais pas bien si on sera tellement avancé sur Spinoza. Franchement, Michel Onfray aime enfoncer souvent des portes ouvertes, au nom d'une lutte contre l'idéalisme religieux et le nihilisme chrétien -un peu comme si nous vivions encore au 19e siècle, en somme.  :sarcastic:


Je suis pas un fan absolu non plus mais ça reste interessant .
C'est vrai qu'il semble avoir la haine du religieux .
Enfin hier il a surtout parlé de la vie de Spinoza et peu de sa philosophie , c'était "vivant" toutefois .
 
Sinon Spinoza épicurien , c'est assez nouveau pour moi , le Baruch etait si frugale !
(et je ne confond pourtant pas l'epicurisme avec l'hedonisme)

n°6386534
neojousous
Posté le 24-08-2005 à 16:33:08  profilanswer
 

C'est abordable pour les novices Michel Onfey? Il a une position philosophique ou politique particulière?

n°6387489
rahsaan
Posté le 24-08-2005 à 18:40:43  profilanswer
 

neojousous a écrit :

C'est abordable pour les novices Michel Onfey? Il a une position philosophique ou politique particulière?


 
Oui, c'est abordable, et il a bien une position philosophico-politique particulière : de son propre aveu, il est nietzschéen de gauche, hédoniste, anarchiste, libertaire et tout le tsouin-tsouin !  [:maestro]  

n°6387669
Magicpanda
Pushing the envelope
Posté le 24-08-2005 à 19:20:40  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Il peut le démontrer, ce n'est pas non plus un défi grandiose.  :heink: Et quand bien même il y arrive, je ne sais pas bien si on sera tellement avancé sur Spinoza. Franchement, Michel Onfray aime enfoncer souvent des portes ouvertes, au nom d'une lutte contre l'idéalisme religieux et le nihilisme chrétien -un peu comme si nous vivions encore au 19e siècle, en somme.  :sarcastic:


 
 
Il faut lire "critique de la raison scolastique" de Bourdieu , pour avoir envie de rire en écoutant Onfray :D  
 
Il faut que je lise le dernier texte de l'Antichrist aussi :jap:


---------------
" Quel est le but du capital ? Le but du capital c'est produire pour le capital. L'objectif, lui, est illimité. L'objectif du capital c'est produire pour produire." - Deleuze || André Gorz - Vers la société libérée
n°6387832
rahsaan
Posté le 24-08-2005 à 20:00:15  profilanswer
 

Magicpanda a écrit :

Il faut lire "critique de la raison scolastique" de Bourdieu , pour avoir envie de rire en écoutant Onfray :D


 
Que veux-tu dire par là ?  

n°6388091
le penseur​ fou
Posté le 24-08-2005 à 20:51:46  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Que veux-tu dire par là ?


Toi tu as ecouté France culture!
 
Dernier post 20h00 avant dernier post 18h40 .
élémentaire cher Watson  :sol:  

n°6389860
rahsaan
Posté le 25-08-2005 à 00:01:05  profilanswer
 

le penseur fou a écrit :

Toi tu as ecouté France culture!
 
Dernier post 20h00 avant dernier post 18h40 .
élémentaire cher Watson  :sol:


 
Dans l'absolu, cher Lockholmes, ta déduction ne serait pas fausse, mais non, je n'ai pas écouté l'émission.  :D

n°6391077
Magicpanda
Pushing the envelope
Posté le 25-08-2005 à 07:47:13  profilanswer
 

il y avait eu également cet été une émission du meme style sur Derrida et la déconstruction


---------------
" Quel est le but du capital ? Le but du capital c'est produire pour le capital. L'objectif, lui, est illimité. L'objectif du capital c'est produire pour produire." - Deleuze || André Gorz - Vers la société libérée
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