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Quels sont pour vous les trois livres de philo à lire pour un honnête homme ?


 
15.4 %
 273 votes
1.  "La république" de Platon
 
 
6.7 %
 119 votes
2.  "La métaphysique" d'Aristote
 
 
15.7 %
 279 votes
3.  "l'Ethique" de Spinoza
 
 
1.5 %
    27 votes
4.  "Essai de théodicée" de Leibniz
 
 
15.0 %
 266 votes
5.  "Critique de la raison pure" de Kant
 
 
17.8 %
 315 votes
6.  "Par delà le bien et le mal" de Nietzsche
 
 
5.9 %
 105 votes
7.  "L'évolution créatrice" de Bergson
 
 
6.4 %
 113 votes
8.  "Etre et temps" d'Heidegger
 
 
7.5 %
 133 votes
9.  "Qu'est-ce que la philosophie" de Gilles Deleuze
 
 
8.1 %
 144 votes
10.  "Moi, ma vie, mon oeuvre" de obiwan-kenobi
 

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Auteur Sujet :

Philo @ HFR

n°16741672
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 10:42:18  profilanswer
 

Reprise du message précédent :
Dans un cas, on dit que les choses existent avant qu'on en prenne conscience.
 
Dans l'autre (Sartre), on dit qu'elles existent avant qu'elles n'aient un sens.  
 
Je veux bien que dans les deux cas l'existence soit en avance, mais dans un cas, c'est sur la prise de conscience de ce qui est déjà, dans l'autre, c'est sur l'élaboration d'un sens.

Message cité 1 fois
Message édité par rahsaan le 16-11-2008 à 10:42:36

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Mon roman d'anticipation, L'I.A. qui m'aimait : https://tinyurl.com/mtz2p872 | Blog ciné/JV : http://cinecourt.over-blog.com
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Posté le 16-11-2008 à 10:42:18  profilanswer
 

n°16741691
Profil sup​primé
Posté le 16-11-2008 à 10:46:54  answer
 

rahsaan a écrit :


L'homme n'est que ce qu'il se fait,


 
je ne suis pas certain de partager les alternatives suivantes :
 
1) L'homme est la seul chose qui s'élabore.
 
2) L'homme se fait lui même. (Dans quel cas tu te contredit dans le même paragraphe.
 
 
Au choix, un alternative supplémentaire peut-être ?
 
Merci.

n°16741700
Profil sup​primé
Posté le 16-11-2008 à 10:48:14  answer
 

foutre de a écrit :

ben je trouve que du point de vue du retard de la conscience sur les évènements, DMNL a plutôt raison


Ce qui n'est le cas que de ceux qui subissent le monde.

Message cité 1 fois
Message édité par Profil supprimé le 16-11-2008 à 10:48:25
n°16741712
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 10:50:05  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Dans un cas, on dit que les choses existent avant qu'on en prenne conscience.
 
Dans l'autre (Sartre), on dit qu'elles existent avant qu'elles n'aient un sens.  
 
Je veux bien que dans les deux cas l'existence soit en avance, mais dans un cas, c'est sur la prise de conscience de ce qui est déjà, dans l'autre, c'est sur l'élaboration d'un sens.

mais la conscience est justement ce qui orchestre le sens en organisant l'ensemble des cogitata les uns par rapport aux autres, fût-ce en aboutissant à l'absurde comme coordonnée sémantique pour un donné.
entrer dans la conscience subjective, c'est s'articuler à une perspective déterminée, prendre place en tant qu'esquisse dans un mouvement de constitution...
non ?

Message cité 1 fois
Message édité par foutre de le 16-11-2008 à 10:50:50

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16741973
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 11:43:30  profilanswer
 

 

si tu as l'intention de m'adresser la parole, tu commences par reprendre la conversation où tu l'as laissée. Les mecs ultra grossiers qui picorent dans autrui quand ça les arrange pour ensuite les jeter quand ça les arrange plus, je ne suis pas intéressé. Tu en étais resté là :

 


Je ne sais pas où tu en es mais si tu n'as pas fait de sérieux progrès en politesse, ce n'est même pas la peine d'essayer d'apporter une seule correction à mes propos. Sois correct et précis, tu corrigeras et tu préciseras ensuite.
merci [:swedish chef]

Message cité 1 fois
Message édité par foutre de le 16-11-2008 à 11:58:30

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16742068
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 11:59:56  profilanswer
 


 
Oui, Les chemins de la pensée de Jacqueline Russ, c'est un très bon manuel. ;)


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Mon roman d'anticipation, L'I.A. qui m'aimait : https://tinyurl.com/mtz2p872 | Blog ciné/JV : http://cinecourt.over-blog.com
n°16742073
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 12:01:15  profilanswer
 


 
je t'invite à lire "l'invention de morel" d'adolfo bioy casarès ; les "Fictions" de Borgès ; "Les mains sales" et "les mouches" de sartre ; "Le rouge et le noir" de stendhal ; "l'étranger" de Camus.
 
Bon plaisir :hello:


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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16742084
Profil sup​primé
Posté le 16-11-2008 à 12:03:18  answer
 

foutre de a écrit :


...
 
...
Sois correct et précis, tu corrigeras et tu préciseras ensuite.
 
...
...


 
Phrase intéressante.
 
Par contre je ne comprend pas pourquoi tu ressorts ce sujet après six mois. A moins de t'avoir offensé.
Mais d'après ce que je lis dans ce message, se serais plutôt l'inverse.
 
(je corrigerais et préciserais par la suite si il y a lieu d'être, et si ça m'est donné)
 
 
Peut-être n'ai-je pas été suffisamment précis dans le message précédent ?


Message édité par Profil supprimé le 16-11-2008 à 12:04:17
n°16742119
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 12:08:07  profilanswer
 

foutre de a écrit :

mais la conscience est justement ce qui orchestre le sens en organisant l'ensemble des cogitata les uns par rapport aux autres, fût-ce en aboutissant à l'absurde comme coordonnée sémantique pour un donné.
entrer dans la conscience subjective, c'est s'articuler à une perspective déterminée, prendre place en tant qu'esquisse dans un mouvement de constitution...
non ?


 
Je dis juste qu'il y a deux questions différentes, sans rapport l'une avec l'autre : la saisie de nos perceptions inconscientes par la conscience (d'un côté) et (d'un autre côté), la conscience de l'absurdité de notre existence.  
Ça n'a tout simplement rien à voir. DMNL disait que la phrase citée par le prof de Aldebaran était peut-être la phrase de Sartre mais j'ai l'impression que ce n'est pas celle-là. Ce n'est pas le même problème.


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n°16742124
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 12:09:17  profilanswer
 

foutre de a écrit :


 
je t'invite à lire "l'invention de morel" d'adolfo bioy casarès ; les "Fictions" de Borgès ; "Les mains sales" et "les mouches" de sartre ; "Le rouge et le noir" de stendhal ; "l'étranger" de Camus.
 
Bon plaisir :hello:


 
Je crois qu'Aldebaran demandait des lectures en philosophie, non ?  :??:


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Posté le 16-11-2008 à 12:09:17  profilanswer
 

n°16742238
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 12:27:13  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

 

Je dis juste qu'il y a deux questions différentes, sans rapport l'une avec l'autre : la saisie de nos perceptions inconscientes par la conscience (d'un côté) et (d'un autre côté), la conscience de l'absurdité de notre existence.
Ça n'a tout simplement rien à voir. DMNL disait que la phrase citée par le prof de Aldebaran était peut-être la phrase de Sartre mais j'ai l'impression que ce n'est pas celle-là. Ce n'est pas le même problème.

 


je crois que tu distingues conscience et donation de sens. Or je crois que ce qui est conscient ne peut l'être que si un sens lui est attribué. tu parles de "perceptions inconscientes" : c'est impropre dans le sens où une perception est toujours le résultat d'une interprétation, l'interprétation d'une sensation. après tu sembles parler des seuils perceptifs : la définition d'une perception (le bruit de chaque goutte, de chaque molécule d'eau, jusqu'à quel détail puis-je espérer aller ? avec une prothèse technologique ?) et le problème de l'habituation (un stimulus d'intensité constante dans le temps finit par être négligé par le système d'excitation neuronale et quitter le champ du perçu) ; mais tout ce la me semble confus.

 

comment un phénomène conscient pourrait-il être tel sans avoir un sens, sans être constitué (extension, valeurs, relations...) dans l'ensemble du champ conscient ? as-tu un exemple ?

rahsaan a écrit :

 

Je crois qu'Aldebaran demandait des lectures en philosophie, non ?  :??:


vaste débat sur la forme que doit prendre le discours philosophique : le dialogue est-il du théâtre ? peut-on considérer un poème comme un texte philosophique ? les essais des moralistes sont-ils des écrits philosophiques ?
goethe et Einstein peuvent-ils accéder aux bibliographies philosophiques ? Qu'en est-il des prétendus "contes philosophiques" de Voltaire ?

 

je m'étonne que tu soulèves ce genre de questions... L'idée est-elle décidément irrecevable qu'un questionnement philosophique puisse être soulevé ailleurs que dans des traités ? Penses-tu vraiment que dans les oeuvres que j'ai citées Aldebaran ne puisse pas trouver la matière à initier et à nourrir un vrai questionnement ?

Message cité 1 fois
Message édité par foutre de le 16-11-2008 à 12:28:25

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16742333
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 12:41:53  profilanswer
 

foutre de a écrit :


vaste débat sur la forme que doit prendre le discours philosophique : le dialogue est-il du théâtre ? peut-on considérer un poème comme un texte philosophique ? les essais des moralistes sont-ils des écrits philosophiques ?
goethe et Einstein peuvent-ils accéder aux bibliographies philosophiques ? Qu'en est-il des prétendus "contes philosophiques" de Voltaire ?
 
je m'étonne que tu soulèves ce genre de questions... L'idée est-elle décidément irrecevable qu'un questionnement philosophique puisse être soulevé ailleurs que dans des traités ? Penses-tu vraiment que dans les oeuvres que j'ai citées Aldebaran ne puisse pas trouver la matière à initier et à nourrir un vrai questionnement ?


 
Ne le prends pas mal, mais je mettais ma MAIN A COUPER que tu allais me répondre comme ça ! :D
 
Je te réponds, avec Céline, que : "un livre, ça pose une question", en sorte que tout grand livre nous interroge, et que tout grand livre a une valeur philosophique. Mais tout grand livre n'est pas de la philosophie et il y a bien une différence entre philosophie et littérature, malgré des points de passage nombreux, que tu as mentionnés.  
Puisque personne ne prendrait Kant pour de la littérature, ni Maupassant pour de la philosophie.


Message édité par rahsaan le 16-11-2008 à 12:42:45

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n°16742394
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 12:51:21  profilanswer
 

non, en effet, maupassant y a pas de risque... Mais même en matière de littérature on est en droit de se poser pas mal de question à son sujet...

 

en revanche je crois que l'écriture de kant a soulevé récemment sur ce topic l'admiration littéraire (je ne te rappelles pas ce qu'on désigne classiquement pas "les Lettres" : Descartes fait partie de ce corpus)...

 

je m'étonnais justement parce que tu ne pouvais que mettre ta main à couper. je te répondrai donc que je ne me livre plus à aucun débat sur les genres, sauf avec les spécialistes d'Aristote. Si tu veux nous briffer sur cet auteur et son approche générique, tu es le bienvenu...

 

lire un livre de philosophe n'a pas forcément grand chose à voir comme activité avec la philosophie. Je conseille donc de quoi commencer à cultiver un art de l'interrogation, pour commencer "tout doux", mais commencer vraiment...

Message cité 1 fois
Message édité par foutre de le 16-11-2008 à 12:55:14

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16742478
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 13:07:10  profilanswer
 


 
La réponse vient de Descartes lui-même...  :o  
 
Raah  :fou: , je n'arrive pas à remettre la main sur ce texte, où il explique comment lire ses Méditations : en gros, il faut le lire 3 ou 4 fois.  
Help quelqu'un !  :cry: En plus, ce texte a déjà été posté.

Message cité 2 fois
Message édité par rahsaan le 16-11-2008 à 13:16:33

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n°16742524
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 13:14:06  profilanswer
 

foutre de a écrit :

non, en effet, maupassant y a pas de risque... Mais même en matière de littérature on est en droit de se poser pas mal de question à son sujet...


 
 :lol: J'avais oublié que tu ne l'aimes pas. :D
 

foutre de a écrit :

en revanche je crois que l'écriture de kant a soulevé récemment sur ce topic l'admiration littéraire (je ne te rappelles pas ce qu'on désigne classiquement pas "les Lettres" : Descartes fait partie de ce corpus)...


 
Oui, j'avais pensé mettre une réponse au forumeur qui disait cela, mais j'ai oublié.  
C'est vrai qu'il y a de belles pages chez Kant mais ce n'est justement pas du Descartes ou du Pascal. D'ailleurs, il dit dans la Critique de la raison pure qu'il reste des obscurités dans son texte, et qu'il laisse à d'autres, amis de la philosophie, le soin de corriger et réécrire ce qui semblera imparfait.  
 
On imagine quand même mal Stendhal nous dire que la scène de rencontre entre Julien et Mme de Rénal est pas mal mais qu'il laisse à d'autres le soin de la refaire s'ils sont de vrais amis de la littérature.  
 

foutre de a écrit :

lire un livre de philosophe n'a pas forcément grand chose à voir comme activité avec la philosophie. Je conseille donc de quoi commencer à cultiver un art de l'interrogation, pour commencer "tout doux", mais commencer vraiment...


 
Oui les livres que tu conseilles sont bien sûr à conseiller, mais n'est-ce pas admettre que la littérature, c'est de la philosophie en plus facile ?
"Vous voulez commencer la philo en douceur ? Lisez donc un grand roman."
 
Je ne le crois pas. Est-ce que la littérature, ce n'est pas plus difficile, ou du moins pas plus facile, que la philosophie ?
 
Pour commencer en philosophie, lire quelques pages d'un grand auteur est bien.

Message cité 1 fois
Message édité par rahsaan le 16-11-2008 à 13:19:06

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n°16742572
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 13:24:28  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

 

On imagine quand même mal Stendhal nous dire que la scène de rencontre entre Julien et Mme de Rénal est plutôt réussie mais qu'il laisse à d'autres le soin de la refaire s'ils sont de vrais amis de la littérature.

 



Stendhal peut-être pas (égotisme oblige), mais les classiques reprenant des mythes le font constamment "allez-donc reprendre médée derrière nous", clament Sénèque et Racine... Peut-être Kant est-il plus proche des classiques que des romantiques dans cette attitude, voilà tout

rahsaan a écrit :

 

..., mais n'est-ce pas admettre que la littérature, c'est de la philosophie en plus facile ?
"Vous voulez commencer la philo en douceur ? Lisez donc un grand roman."

 

Pour commencer en philosophie, lire quelques pages d'un grand auteur est bien.


C'est cela, il faut apprendre à lire. Pour commencer, quelques pages du dictionnaire sont bien. Ou alors tu vas apprendre à lire avec des gros dessins au-dessus : les illustrés, c'est de la littérature en plus facile ? La littérature ce serait de la philosophie illustrée ? Vilaines images qui retardent l'accès aux classiques à la lettre...
on peut même s'entrainer à courir le marathon en ne courant que l'arrivée...


Message édité par foutre de le 16-11-2008 à 13:38:11

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16742733
alcyon36
Posté le 16-11-2008 à 13:48:12  profilanswer
 

Mine anti-personnel a écrit :


Sauf que "avec accompagnement d'autres moyens" est du charabia que jamais un écrivain français n'écrirait spontanément. C'est un défaut typique de traducteur qui croit bien faire en collant au plus près du texte, avec l'excuse bien connue qu'on doit choisir entre une traduction belle mais infidèle ou fidèle mais donc non-littéraire. C'est au nom de ce principe qu'on a des traductions de Heidegger imbuvables.
.


oui, sans doute...encore que Heidegger, de part le geste même de sa philosophie impose de renouveller le problème de la traduction...traduire Heidegger c'est necessairement traduire sa propre langue dans ses mots les plus propres, c'est à dire nous rendre étranger à ce qui faisait la familiarité de notre langue propre. Et là pour le coup, ca devient beaucoup plus balèze de faire le travail de traduction;)
 

Citation :


Mon Wahrig (équivaut au Robert 1 chez nous)


En l'espece, je ne sais pas quelle est la bonne traduction, je suis germaniste mais je n'ai pas le niveau. En revanche, même si c'est très pratique d'utiliser le Wahrig que tu as sous la main, gardons nous, comme dirait l'autre, d'utiliser un dictionnaire allemand du 20eme pour traduire un texte du 19ème...je dis ca, moi j'en sais rien, mais visiblement Didier Franck a l'air d'y tenir...donc je répète, ca peut servir. :lol:  
 
Le Clausewits de Deleuze
 
Le rapport de Deleuze avec Clausewitz est complexe. En fait, la difficulté première que l'on rencontre est due au geste philosophique propre de Deleuze, que l'on pourrait appeler le constructivisme conceptuel. Un tel geste se veut contraignant, et impose au commentateur de rester vigilant à la stratégie argumentative de Deleuze. Cette dernière repose (entre autre) sur une sélection des savoirs et de leurs traits distinctifs, infligeant necessaairement des deplacements et torsions à ces doctrines. Il s'agit d'utiliser les traits positifs d'un savoir constitué (ethnologie, linguistique...), de s'appuyer sur eux comme points critiques  permettant la position d'un nouveau problème. Ainsi, ces appropriations, ces usages, déplacements, torsions...de certains savoirs sont autant de signes, d'indices guidant le lecteur à travers le processus de problématisation. Aussi,  la question qu'il nous faut poser, si tout au moins nous voulons comprendre le geste conceptuel deleuzien, est: comment Deleuze instrumentalise-t-il les orientations de Clausewitz pour les intégrer, les faire fonctionner, dans l'epistemologie des agencements?  
 
Je pense qu'on ne peut rien comprendre à cette question, si l'on ne prend pas garde, aux traits distinctifs, qui interessent Deleuze chez Clausewitz, et en l'espece la distinction clausewitzienne entre le concept pur de la guerre absolue et les guerres réelles (actuelles au sens de Deleuze):

Citation :


L’Etat n’a pas par lui-même de machine de guerre ; il se l’appropriera seulement sous forme d’institution militaire, et celle-ci ne cessera pas de luiposer de problèmes. D’où la méfiance des Etats vis-à-vis de leur institution militaire, en tant qu’elle hérite d’une machine de guerre extrinsèque. Clausewitz a le pressentiment de cette situation générale, lorsqu’il traite le flux de guerre absolue comme une Idée, que les Etats s’approprient partiellement suivant les besoins de leur politique, et par rapport à laquelle ils sont plus ou moins bons « conducteurs » (MP, 438-439).


Cette distinction de Clausewitz est posée dès les premières pages du texte (De la guerre, tr. fr. L. Murawiek, Paris, Perrin, 1999. p.31-49).

Citation :

Si les guerres entre nations civilisées sont bien moins cruelles et
destructives que les guerres entre nations incultes, cela tient à l’état de la société à l’intérieur et dans ses relationsextérieures. C’est cet état qui engendre, conditionne, circonscrit et tempère la guerre : mais tous ces aspects restent étrangers à l’essence de la guerre, et n’en sont que des variables extrinsèques(p.32)

et plus loin:

Citation :

Demandons-nous d’abord ce qu’est le but vers lequel doit tendre la guerre afin d’être le moyen approprié à la fin politique ; nous voyons que ce but est tout aussi variable que la fin politique et que les circonstances qui sont propres à la guerre. Revenons alors au pur concept de guerre, d’où il ressort que la fin politique de la guerre est extérieure à son domaine ; car si la guerre est un acte de violence destiné à plier l’adversaire à notre volonté, il faudrait toujours et uniquement que la guerre aboutisse à l’effondrement de l’adversaire, c’est-à-dire à lui ôter toute capacité de résister.(p.49)


C'est particulièrement le livre VIII qui semble interesser D et G. Dans ce dernier, Clausewitz s'interroge sur le statut ambigu de la guerre absolue, qui bien qqu'elle continue à s'inscrire dans les affaires d'Etats, qu'elle reste déterminée par la politque, semble en même temps indiquer la guerre comme un concept exterieur aux Etats,  que ces derniers effectuent plus ou moins; les Etats comme conducteurs. Dans ces pages, Clausewitz dévelope le problème des facteurs qui facilitent ou contrarient (le plus souvent), temperent, limiitent l'effectuation concrete (politique, historique...) du concept:

Citation :

Des facteurs inhérents à la machine de la guerre elle-même peuvent suspendre et atténuer le principe d’hostilité tel qu’il s’incarne dans son vecteur humain et dans tout ce qui compose la guerre […]. Mais quel est donc cet écran non conducteur qui empêche une décharge intégrale ? Pourquoi le concept le concept philosophique n’est-il pas en phase avec la réalité pratique ? L’écran, c’est la myriade de choses, de forces, de facteurs de la vie de la nation affectés par la guerre. Nulle causalité logique ne peut se mouvoir au travers de leurs multiples méandres comme si elle n’était que la conclusion simple de deux prémisses. La causalité se perd dans ces méandres… » ( p. 295).


Mais, Deleuze reste clair, il ne peut s'agir chez Clausewitz que d'un pressentiment. Cette détermination de la guerre comme Idée, concept pur, absolu est ne cessairement laissée implicite par Clausewitz, ce dernier cherchant à rendre compte de la guerre, comme d'un moyen d'action politique. Ainsi, quand Claussewitz affirme que la guerre n'est "jamais une réalité indépendante mais dans tous les cas envisageables comme un instrument politique, une continuation des rapports politiques, la réalisation des rapports politiques par d'autres moyens"(p.46-47), il parle bien uniquement des guerres réelles. En fait, la thèse de Claussewitz pressupose et recouvre, dissimule l'exteriorité de la machine de guerre par rapport à l'Eat. Car, si la guerre consitue des moyens autres pour accomplissement des fins politiques, il nous faut bien nous demander, par rapport à quoi ces moyens sont ils "autres"? Ces moyens sont autres par rapport aux moyens "proprement" politiques...ce qui suppose donc bien une certaine exteriorité de droit de la machine de guerre par raport à l'Etat. Mais, dans le même temps cette proposition de Clausewitz recouvre, dissimule cette position d'exteriorité, en imposant au concept de guerre les fers du syllogisme politique (moyen-fin); "l’intention politique est la fin recherchée, la guerre en est le moyen, et le moyen ne peut être conçu sans la fin »(p. 46).
Deleuze récapitule ainsi ce développement:

Citation :


1) Il y a un pur concept de la guerre comme guerre absolue, inconditionnée, Idée non donnée dans
l’expérience (abattre ou « renverser » l’ennemi, supposé n’avoir aucune autre détermination, sans
considération politique, économique ou sociale)2) Ce qui est donné, ce sont les guerres réelles en tant
que soumises à des buts d’Etats, lesquels sont plus ou moins bons « conducteurs » par rapport à la
guerre absolue, et de toute façon en conditionnent la réalisation dans l’expérience3) les guerres réelles
oscillent entre deux pôles, tous deux soumis à la politique d’Etat : guerre d’anéantissement qui peut
aller jusqu’à la guerre totale (d’après les objectifs sur lesquels l’anéantissement porte) et tend à se
rapprocher du concept inconditionné par ascension aux extrêmes ; guerre limitée, qui n’est pas moins
« guerre », mais qui opère une descente plus proche des conditions limitatives, et peut aller jusqu’à une
simple « observation armée » (MP, 523)


 
Une fois cela posé, il nous faut insister sur le déplacement que Deleuze fait subir à la problemaatique de Clausewitz. Ce dernier définissait le concept pur de guerre par la determination du but intrinsèque de la guerre, à savoir "la destruction de l'ennemi". Nous voyons bien qu'une telle détermination de l'idée pure de guerre, même si elle dépasse les fins particulières de tel ou tel Etat, n'en constitue toujours pas moin une subordination de la machine de guerre au syllogisme moyen-but propre à la détermination politique. Une grande partie du Traité de nomadologie de Deleuze consiste justement à dégager, à partir des données ethnographiques, historriques, mythologiques...sur le nomadisme, l'objet de la machine de guerre, son Idée pure, non plus par la guerre, "mais par une certaine manière d'occuper, de remplir l'espace-temps, ou d'inventer de nouveaux espaces-temps" (Pp, 233).
 
 
Si ca vous innteresse, j'essaierai bientôt d'ecrire la suite, comprendre 1) le problème de l'appropriation de la machine de guerre par l'Etat, 2) le problème de la consitution d'une machine de guerre globale lorsque les Etats, sous la domnation du capitalisme, ne sont plus que des modeles de realisation de l'axiomatique capitaliste. Cette nouvelle machine de guerre n'aura justement plus pour objet la guerre, mais ce que D et G appellent "la paix de la Terreur ou de la Survie". Nous verrons que justement, le problème de la machine de guerre au sein de l'axiomatique capitaliste revient à opérer une inversion de la proposition de Clausewitz: la politique comme continuation de la guerre par d'autres moyens.

Message cité 1 fois
Message édité par alcyon36 le 16-11-2008 à 14:46:13

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"la pensée de l'être est le souci porté à l'usage de la langue" Heidegger
n°16742781
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 13:55:52  profilanswer
 

alcyon36 a écrit :


oui, sans doute...encore que Heidegger, de part le geste même de sa philosophie impose de renouveller le problème de la traduction...traduire Heidegger c'est necessairement traduire sa propre langue dans ses mots les plus propres, c'est à dire nous rendre étranger à ce qui faisait la familiarité de notre langue propre. Et là pour le coup, ca devient beaucoup plus balèze de faire le travail de traduction;)


bah, le meilleur traducteur de Heidegger, c'est Derrida dans toute son oeuvre : il la mouline bien la familiarité avec le français


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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16742898
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 14:16:04  profilanswer
 

Merci pour ces explications. ;)
 
Tiens, Alcyon36, si tu es dans les machines de guerre, est-ce que tu peux me dire si Deleuze et Guattari parlent bien des écrivains (ou de la littérature) comme de machines de guerre ?  
Machine de guerre Artaud, Beckett etc.  
 
Je soutenais à Pascal que c'était le cas, mais il ne s'en souvenait pas.


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Mon roman d'anticipation, L'I.A. qui m'aimait : https://tinyurl.com/mtz2p872 | Blog ciné/JV : http://cinecourt.over-blog.com
n°16742905
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 14:17:41  profilanswer
 


 
 
Oui mais je ne voulais pas me contenter de te dire ça.  
 
En gros, de mémoire, Descartes dit qu'il faut lire une première fois pour déblayer le terrain, comme pour le plaisir, sans s'arrêter sur les difficultés.  
Lors de la seconde lecture, aborder les difficultés de front.  
Puis une troisième fois pour finir de dissiper les malentendus des autres fois.


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Mon roman d'anticipation, L'I.A. qui m'aimait : https://tinyurl.com/mtz2p872 | Blog ciné/JV : http://cinecourt.over-blog.com
n°16742975
alcyon36
Posté le 16-11-2008 à 14:27:16  profilanswer
 

rahsaan a écrit :


 
La réponse vient de Descartes lui-même...  :o  
 
Raah  :fou: , je n'arrive pas à remettre la main sur ce texte, où il explique comment lire ses Méditations : en gros, il faut le lire 3 ou 4 fois.  
Help quelqu'un !  :cry: En plus, ce texte a déjà été posté.


"J’'aurais aussi ajouté un mot d’'avis touchant la façon de lire ce livre, qui est que je voudrais qu'’on le parcourût d'’abord tout entier ainsi qu’'un roman, sans forcer beaucoup son attention ni s’'arrêter aux difficultés qu'’on y peut rencontrer, afin seulement de savoir en gros quelles sont les matières dont j’'ai traité ; et qu’'après cela, si on trouve qu’'elles méritent d’'être examinées et qu'’on ait la curiosité d’'en connaître les causes, on le peut lire une seconde fois pour remarquer la suite de mes raisons ; mais qu’'il ne se faut pas derechef rebuter si on ne la peut assez connaître partout, ou qu'’on ne les entende pas toutes ; il faut seulement marquer d'’un trait de plume les lieux où l’'on trouvera de la difficulté et continuer de lire sans interruption jusqu’à la fin ; puis, si on reprend le livre pour la troisième fois, j'’ose croire qu'’on y trouvera la solution de la plupart des difficultés qu'’on aura marquées auparavant, et que s’'il en reste encore quelques-unes, on en trouvera enfin la solution en relisant."  
Lettre-préface aux Principes de la philosophie  


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"la pensée de l'être est le souci porté à l'usage de la langue" Heidegger
n°16742979
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 14:28:01  profilanswer
 

Haaa, n'est-il pas formidable ce Alcyon36 ! :D


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n°16743012
alcyon36
Posté le 16-11-2008 à 14:34:55  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Merci pour ces explications. ;)
 
Tiens, Alcyon36, si tu es dans les machines de guerre, est-ce que tu peux me dire si Deleuze et Guattari parlent bien des écrivains (ou de la littérature) comme de machines de guerre ?  
Machine de guerre Artaud, Beckett etc.  
 
Je soutenais à Pascal que c'était le cas, mais il ne s'en souvenait pas.


oui, oui, tu as raison. Enfin, je ne crois pas qu'ils parlent de machine de guerre Artaud ou Beckett, mais l'art, la science, la philosophie ^sont des machines de guerre.
"les mouvements revolutionnaires, mais aussi les mouvements d'art sont de telles machines de guerre.(Pp p. 233)

Message cité 1 fois
Message édité par alcyon36 le 16-11-2008 à 14:35:35

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"la pensée de l'être est le souci porté à l'usage de la langue" Heidegger
n°16743019
alcyon36
Posté le 16-11-2008 à 14:36:07  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Haaa, n'est-il pas formidable ce Alcyon36 ! :D


sisi, il l'est... :D


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"la pensée de l'être est le souci porté à l'usage de la langue" Heidegger
n°16743035
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 14:39:47  profilanswer
 

alcyon36 a écrit :


oui, oui, tu as raison. Enfin, je ne crois pas qu'ils parlent de machine de guerre Artaud ou Beckett, mais l'art, la science, la philosophie ^sont des machines de guerre.
"les mouvements revolutionnaires, mais aussi les mouvements d'art sont de telles machines de guerre.(Pp p. 233)


 
Voilà, c'est ça.  :)


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n°16745202
le vicaire
Posté le 16-11-2008 à 19:57:40  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

Aujourd'hui, les Américains ont l'idée d'une guerre sans mort (dans leur camp) : une guerre menée complètement à distance, pilotée par ordinateur, sans soldats sur le terrain. Ce serait la guerre virtuelle pour eux et pour le camp d'en face, une mort programmée, venue de nulle part (tombée du ciel, sous forme de missile intercontinentale ou de bombe capable de détruire les équipements électroniques etc.).


 
Voilà c'est ça le problème que je me pose... La guerre c'est une pure fiction sauf pour ceux qui sont dans la tranchée. De belles théories qui se font et se défont contrairement à l'expérience qui modifie le jugement sur la guerre et qui elle ne peut pas se défaire aussi facilement. La guerre avec 0 mort, "propre", comme une pub pour Coca... C'est pourquoi je parlais d'Alain qui juge Mars pour l'avoir rencontré. A partir de là peut-on rendre audible un discours sur la guerre autre que celui de la politique entendue comme intérêt d'une nation contre une autre, défense de la Raison d'Etat (position de machiavel qui ne me satisfait guère) ? J'ai l'impression que tout ces discours essaient de justifier la violence d'Etat au nom d'une violence ancestrale (celle de l'Iliade, Des Dieux contre les Titans ?), quasi divine. Mais bon, l'établissement de la philia, de la concorde d'Aristote, la paix intérieure des épicuriens ou des stoïciens sont peut être les premières réponses "pacifistes" largement amplifiées par les chrétiens (je rangerais Socrate parmi les "néo-cons"  :lol: )...


Message édité par le vicaire le 16-11-2008 à 19:59:17
n°16746517
rahsaan
Posté le 16-11-2008 à 22:06:36  profilanswer
 

Je lis que selon Oswald Ducrot, le langage n'a pas essentiellement pour fonction de faire référence au monde mais d'argumenter et ce à partir des structures même du langage.  
En sorte que les références au monde ne sont pas premières mais, si je comprends bien, s'incluent dans un échange argumentatif, précisément pour servir d'arguments ("mais si, dans la vie, c'est comme ça... D'ailleurs, hier encore, j'ai vu que..." ). Ce qui est dit dépend en fait d'un dire plus fondamental, qui est argumentatif.  
 
On ne discute pas pour faire référence au monde, mais pour argumenter, pour discuter.  
 
Aussitôt, ça m'a éclairé sur toute discussion, y compris sur les forums et sur ce topic.


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n°16747649
foutre de
Posté le 16-11-2008 à 23:15:57  profilanswer
 

rahsaan a écrit :


On ne discute pas pour faire référence au monde, mais [...] pour discuter.

 

explique-t-il quelles sont les visées de cette activité argumentaire intersubjective ? parce que là ça resssemble à l'art pour l'art...


Message édité par foutre de le 16-11-2008 à 23:18:52

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16749286
rahsaan
Posté le 17-11-2008 à 09:14:59  profilanswer
 

J'imagine que c'est pour faire gagner notre point de vue.  
 
Je recopie ce que dit Zizek dans un de ses livres (Fragile absolu, p201-202) : "Oswald Ducrot a développé la thèse selon laquelle, dans notre langage, tous les prédicats ne sont que des procédures argumentatives réifiées, et en dernière instance nous ne faisons pas usage du langage pour désigner la réalité, ou un contenu de pensée, mais pour duper l'autre, pour remporter une discussion, pour séduire ou menacer, pour dissimuler nos vrais désirs..."


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n°16751588
neojousous
Posté le 17-11-2008 à 14:23:40  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

>Néojousous : je prépare un texte sur le progrès en philosophie. Je voudrais m'appuyer sur la philo analytique.  
Aurais-tu un exemple de questionnement où cette philo prétend avoir progressé ? Sur quels objets sa connaissance a-t-elle progressé par exemple ?


 
Le meilleur exemple que j'ai en tête, c'est la découverte des vérités nécessaires a posteriori. Tu peux regarder La logique des noms propres de Kripke. Pour une explication, Référence et modalité de Filipe Drapeau Contim et Pascal Ludwig.
Les continentaux ont tendance à croire que a priori et nécessaire sont synonymes, de même qu'a posteriori et contingent. Or Kant n'identifie pas sémantiquement ces deux concepts. Il les pose d'abord, avec leur sens propre. Puis il propose une thèse forte, qui connecte le nécessaire et l'a priori. Le couple a priori/a posteriori est généralement appréhendé comme un concept épistémique : il est relatif à la manière dont nous connaissons la vérité d'un énoncé. Le couple contingent/nécessaire est généralement appréhendé comme un concept métaphysique : il est relatif à la vérité elle-même. La modalité désigne la manière d'être vrai d'un énoncé, pas la façon dont nous connaissons cet énoncé.
Kripke a défendu l'existence de vérités a priori contingente, et de vérités a posteriori nécessaires (VAN). L'orthodoxie actuelle refuse les premières, mais accepte les VAN.  
Un exemple de vérité qui semble à la fois justifié de manière a priori, et vraie de façon contingente, est un énoncé s'appuyant sur des indexicaux :
"Je suis ici maintenant". Cet énoncé est justifié a priori : je n'ai pas besoin de regarder l'état du monde pour affirmer qu'il est vrai (dimension épistémique). Cet énoncé est contingent. Il aurait pu être le cas que je ne sois pas ici maintenant, et que je sois en train de faire tout autre chose, le monde aurait pu être autrement (dimension métaphysique).  
J'ai pas creusé la chose, je ne sais pas encore comment les philosophes contre-argumentent sur les énoncés indexicaux.
Exemple moins discutable (mais discuté quand même bien sûr) d'énoncé nécessaire a posteriori : L'eau n'est rien d'autre que du H2O. Cet énoncé est nécessaire, il n'aurait pas pu être le cas que l'eau soit du XYZ par exemple (dimension métaphysique). Mais il est a posteriori, car il nécessite des méthodes de vérification empirique pour être justifié (dimension épistémique).
 
Le progrès en philosophie analytique ne se fait pas par des découvertes radicales, similaires aux découvertes empiriques en sciences. Il faut plutôt comparer le progrès philosophique à l'abandon des épicycles. Les analytiques examinent des problèmes précis de façon minutieuse et rigoureuse. Etant admis qu'en philosophie on peut défendre à peu près n'importe quoi (suffit de regarder les postmodernes chez les continentaux, ou David Lewis chez les analytiques, ou encore la thèse que le changement n'existe pas chez  Parménide en histoire de la philosophie pour s'en convaincre) les arguments peuvent toujours être parés, contre-attaqués, contre-attaques qui vont elle-mêmes être dépassés.  Cette progression au sein de l'espace polémique a pour corollaire une complexification croissante des théories en présence. Il arrive un moment où l'une des théorie devient tellement complexe (en plus d'être invraisemblable), qu'elle en devient trop invraisemblable et s'écroule, telle la théorie des épicycles en astronomie. Il y a eu progression, car la théorie qui reste debout s'est consolidée, son niveau de subtilité est extrême.
Ce qui fait croire qu'il n'y a pas de progrès en philosophie, c'est qu'il est toujours possible de s'opposer à la théorie dominante. Mais c'est confondre la philosophie avec la science. Si la science s'intéresse à la vérité d'une théorie, la philosophie s'intéresse plutôt à la plausibilité d'une théorie philosophique. Le progrès a lieu dans la précision, et l'examen des conséquences propre à une théorie philosophique.
 
La philo analytique est beaucoup plus dans la continuité de l'histoire de la philo, que la philo continentale. La philo analytique s'inspire plutôt du style de la philo scholastique et médiévale, et considère que les débats métaphysique qui ont lieu dans l'Antiquité ou à toute autre époque peuvent être transférés dans l'espace polémique contemporain (ce que Richard Rorty appelle "reconstruction rationnelle", 1987).  La continuité est telle qu'un contemporain n'hésitera pas à dialoguer et critiquer un philosophe antique. Les continentaux au contraire défendent à tout bout de champ l'idée de rupture, et n'apprécieront pas d'adopter une perspective contemporaine sur les auteurs passés (oui bien sûr, on peut penser au Spinoza de Deleuze ou au Marx de Michel Henry, mais il ne s'agit pas pas d'un dialogue entre Spinoza et Deleuze visant la découverte de la vérité, la découverte de ce qui est le plus plausible). Ils s'efforceront d'exposer les conditions historiques ayant menées à la formulation de telles thèses par les anciens. Si la philo analytique conserve son objectif de découverte de la vérité, la philo continentale l'a souvent abandonné (par exemple les postmodernes). Et le progrès en philo continentale est précisément là, dans sa façon de s'appréhender elle-même. De plus tout grand philosophe continental se doit d'être en rupture avec le passé, soit en annonçant la fin de la philosophie, ou en affirmant par exemple que toute l'histoire de la philo est celle de l'oubli de la question du sens de l'être (Heidegger). Je crois que l'idée de progrès en philo est difficile à appréhender d'un point de vue continentale, mais beaucoup moins d'un point de vue analytique.
Pour le dire en une phrase, forcément caricaturale, le progrès me semble être en philo analytique dans l'amélioration et la clarification des arguments (l'objectif de vérité restant stable), et me semble être en philo continentale dans la clarification de son histoire et dans la compréhension de ce qu'elle est elle-même (mais je surestime  peut-être l'héritage lourd de Hegel sur la philo continentale).
 
J'en profite pour conseiller un livre, en particulier aux étudiants qui débarquent en fac de philo, mais pas seulement :
Philosophie contemporaine, PUF Licence, de Roger Pouivet. Il décrit la philo continentale, la philo analytique, la situation contemporaine, et donne des outils à l'étudiant un peu pommé au milieu de profs en désaccords entre eux, des outils pour se repérer dans la jungle de sa propre fac, et au sein de la situation philosophique mondiale.


Message édité par neojousous le 29-11-2008 à 17:35:40
n°16753014
foutre de
Posté le 17-11-2008 à 17:09:26  profilanswer
 

très intéressant. J'aime beaucoup cette description des épicycles. Il n'y a plus qu'à connecter ça aux mouvements des civilisations, et je crois qu'on percevra les mouvements de l'histoire de la philo continentale à la lettre, dont les ruptures sont induites par son implication dans le champ politique et idéologique (copernic, la révolution française, la révolution industrielle...)

 

D'ailleurs, sais-tu si on peut dégager une position d'ensemble de la philosophie analytique par rapport au cartésianisme et au tournant moderne de la philosophie européenne ?

Message cité 1 fois
Message édité par foutre de le 17-11-2008 à 18:57:37

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16753126
foutre de
Posté le 17-11-2008 à 17:20:05  profilanswer
 

rahsaan a écrit :

J'imagine que c'est pour faire gagner notre point de vue.  
 
Je recopie ce que dit Zizek dans un de ses livres (Fragile absolu, p201-202) : "Oswald Ducrot a développé la thèse selon laquelle, dans notre langage, tous les prédicats ne sont que des procédures argumentatives réifiées, et en dernière instance nous ne faisons pas usage du langage pour désigner la réalité, ou un contenu de pensée, mais pour duper l'autre, pour remporter une discussion, pour séduire ou menacer, pour dissimuler nos vrais désirs..."


ça fait vraiment paranoïaque comme description. Ca ne soulève même pas les motifs d'échanges verbaux de la mère à l'enfant. Je crois que cette thèse implique une sorte d'intégrisme : intégrité totale de la parole descriptive dont on attendrait qu'elle soit neutre et alibidinale absolument ; intégrité de la malice pure qui verrait dans toute motion désirante un rapport de force agonistique, une relation de pouvoir, le mensonge préféré à la vérité au nom d'intérêts, évidemment dissimulés.
Je pensais que tu lisais oswald ducrot directement alors je ne tirerai pas de conclusion avec ces propos rapportés, mais le résultat sent bon l'absence de rapport ludique, gratuit, dansant au langage, et plus grave encore, plus terrible, l'absence de considération pour les usages solitaires du langage où l'autre n'est pas "enjeu".
ça ressemble à l'antagonisme dressé rigide contre une théorie aussi réifiée que son répondant adverse. C'est assez triste. On pense à ces thèse du "tout politique" d'il y a quarante ans


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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16753553
rahsaan
Posté le 17-11-2008 à 18:03:28  profilanswer
 

>Neojousous : merci pour tes explications, c'est très intéressant. ;)
 

foutre de a écrit :


ça fait vraiment paranoïaque comme description. Ca ne soulève même pas les motifs d'échanges verbaux de la mère à l'enfant. Je crois que cette thèse implique une sorte d'intégrisme : intégrité totale de la parole descriptive dont on attendrait qu'elle soit neutre et alibidinale absolument ; intégrité de la malice pure qui verrait dans toute motion désirante un rapport de force agonistique, une relation de pouvoir, le mensonge préféré à la vérité au nom d'intérêts, évidemment dissimulés.


 
Je ne peux pas vraiment te répondre ; au premier abord, oui, cette théorie de Ducrot semble très "pessimiste" quant à notre usage du langage.
Voici ce qui en est dit sur Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Oswald_Ducrot
 
"Ducrot a élaboré, avec Anscombre, une théorie de l'argumentation dans la langue qui consiste à saisir le déploiement de l'argumentation non pas uniquement dans le discours, la prise en pratique des potentialités linguistiques, mais au niveau de la langue elle-même. L'idée maîtresse est que la langue n'a pas comme but principal la représentation du monde, mais l'argumentation. En d'autres termes, le langage naturel n'entretient pas uniquement (parfois il semble dire pas du tout) un lien de référence au monde, mais constitue le lieu d'échange d'arguments, dont la structure est logée à même le langage."


Message édité par rahsaan le 17-11-2008 à 18:03:43

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n°16753594
foutre de
Posté le 17-11-2008 à 18:07:45  profilanswer
 

ce qui me chagrine le plus avec cette histoire, c'est que ça n'aille pas jusqu'à évoquer la constitution de la psyché, comme si notre usage de la langue n'y était pas pris, mais un simple outil autonome dont des intentions s'emparent. Ca ne respire pas le partage tout ça

 

à lire l'article wiki, il annonce quelques autres pistes et semble un peu plus nuancé que je ce que je comprenais en lisant Zizek


Message édité par foutre de le 17-11-2008 à 18:15:41

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« Une force presque nulle est une force presque infinie dès lors qu'elle est rigoureusement étrangère au système qu'elle met en mouvement »
n°16754424
le vicaire
Posté le 17-11-2008 à 19:36:51  profilanswer
 

C'est à peine croyable mais Claude Lévi-Strauss aura 100 ans dans quelques jours. Une  
soirée spéciale lui est consacrée sur France 5. [:kimouss]

n°16754751
rahsaan
Posté le 17-11-2008 à 20:10:01  profilanswer
 

Hé oui.  
 
Mais moi, celui que je regrette, c'est Pierre Clastres, mort si jeune, ou encore François Zourabichvili.


Message édité par rahsaan le 17-11-2008 à 20:10:35

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