Sujet 6- Starket
De lourds nuages errent sans but dans le ciel gris. Une pluie fine,glacée,tombe à flots rythmiques et abondants.Mes vitres tremblent sous le vent qui en cet étrange matin ,semble d'une puissance infinie.
Dehors, tout fuie, tout plie. Les gens courent se cacher, arc-boutés sous leurs parapluies. Les chiens des rues, térrorisés, n'ont plus la force d'aboyer. Mais debout devant mes fenêtres, je regarde sereinement le déchainement des éléments. Je regarde sans voir, trop occupée par des pensées qui pour l'instant s'ordonnent difficilement.
Mon cerveau est un noir et vaste labyrinthe, je m'y perd souvent!
Ca y est, je me souviens peu à peu. Le souvenir renaît dans ma tête et doucement prend forme.
C'était hier. Bien tard dans la nuit,alors que je m'endormais,il vînt,soûl et fou. Ses yeux rouges et exorbités semblaient me lançer des éclairs.S'affalant sur le fauteuil, il se mit d'une voix rauque et puissante a chanter réligieusement:" on ira tous au paradis.....".Légerement inquiète, je feignis le sommeil.Ces temps ci, il était souvent soûl et qui sait,peut-etre commençait-il a perdre la raison.Régulièrement, il s'imaginait mille complots et mille trahisons. Cela devenait invivable. Malgré mes vagues peurs, je sentit le sommeil m'enlacer voluptueusement.Volupté de courte durée:
En effet, il s'approcha soudainement de moi et me glissa doucement à l'oreille:
-Je sais tout chérie.
Rassemblant le peu de force intellectuelle que le sommeil m'avait laissé, je tentai de comprendre le message sybillin.Que savait il? Ou plutôt, que croyait-il savoir? Mon regard rencontra le sien.Dieu! Quelle terreur!Ses yeux déments me fixaient avec rage.Puis, avant même que je n'ouvre la bouche, ses deux mains se refermerent sur mon cou comme d'implacables tenailles.Je me suis battue. J'ai lutté, de toutes mes forces, avec mes poings, avec mes pieds, avec mes dents, avec mes tripes. Je lui ai fait mal;
La pluie tombe toujours sur mes vitres et je me suis encore perdue. Un trou dans mon cerveau, une brèche dans le souvenir.Que s'est-il passé ensuite? Cette fois,le trou est un gouffre.J'ai beau chercher, beau creuser, je ne me souviens plus.Renonçant a chercher plus longtemps, je me mets a regarder les reflets qui vont et viennent sur la vitre. Alors,un doute affreux m'envahit. Serait-ce possible? Non,tout de même pas! Je me précipite vers la salle de bain, un grand miroir y est posé.
Cet un bel objet,limpide comme le plus pur cristal.Je me place en face de lui remplie d'une folle crainte. Et je contemple, incrédule. Les murs autour de moi, derriere moi, les divers objets de la salle se reflètent brillamment sur le miroir, mais de moi, aucune image, aucune!
Et dans ma tête, se met alors a résonner un air aux paroles curieuses:
" On ira tous au paradis...".

Sujet 6 - kalygraphe
La dernière danse.
 
Elle est assise. Immobile, figée devant ses reflets, vestiges d'une vie consacré au mouvement.
Ses longs cheveux roux autrefois flamboyants, ne peuvent plus cacher les ravages du temps.
Ses yeux, son visage, avant si expressifs ne sont maintenant plus qu'une Mer de la Sérénité.
Sa grâce est glacé, froide et statique. Les forces intérieures, jadis tourbillon de feux dévastateur
se sont tues. De Soleil, elle est devenu Lune.  
 
La lumière baisse, sa vue se trouble et son image s'anime, virevolte. Le miroir brille  
subitement de milles éclats. La musique s'engouffre dans ses oreilles et fait à nouveau vibrer sa peau.  
Elle a 20 ans.  
Prodigieux miroir, fais lui revivre encore une fois l'ivresse et l'extase!
Tout n'est plus que déchaînement, passion et harmonie. La douce valse se transforme peu à peu en un flamenco endiablé.
Son corps oscille, tournoie toujours plus vite, caressé et violenté par la musique. Happé par le son,
il n'existe plus, il est mouvement pur, déchaînement animal, geste primordial.  
Le crescendo est envoûtant, un Boléro sans fin, un avant goût d'infini.  
 
Ses paupières sont désormais closes. Un léger sourire imprègne son vieux et doux visage  
pendant que la musique sans cesse plus enivrante emporte toujours plus haut et pour l'éternité sa dernière danse.

Sujet n°6: Tigerlily
 
Elle a demandé à être seule. C’est un grand moment, après tout. Son moment. Quelque chose qu’elle attend depuis toujours.  
 
Elle s’est assise sur le tabouret devant le miroir. Du bout des doigts, elle effleure sa surface dure et froide et son cadre ajouré. Des gravures en spirales, fines et régulières.
 
Elle le voit sans le voir. Par ce que jusqu’à cet instant, ses mains ont été ses yeux.
 
Trente années dans le noir. Le noir, vraiment ? On lui a souvent demandé ce qu’elle voyait, ce qu’elle ressentait, au delà de ses yeux aveugles. Le néant ? Du noir ? Elle n’en sait rien. Elle ne sait pas ce que signifie l’adjectif noir, pas plus que rouge, foncé, doré ou bleu. Elle ne peut que se l’imaginer. En tout cas, jusqu’à maintenant.
 
Ses doigts tremblent lorsqu’elle détache le dernier pansement, celui qui maintient une épaisse ouate sur le haut de son visage. Une dernière respiration, trois battements de cœur, et elle l’abaisse.
 
Tout d’abord, une atroce sensation de brûlure. La lumière, sans doute, répète-t-elle avec force pour se rassurer. Elle garde encore les paupières fermées, le temps que cesse la douleur. Et elle finit par s’estomper, en même temps que revient son calme.
 
La panique la reprend un court instant lorsqu’elle lève les paupières. Tout est flou, indistinct. Mais, écoutant mieux ses sensations, elle se rend compte qu’elle bat follement des cils. Une dose de calme, encore, lui permet de fixer son regard. Droit devant elle. Vers ce miroir qui ne lui a jamais rien livré auparavant.
 
Et enfin, comme sur la surface d’un lac limpide après un courant de brise, son image apparaît.
On lui a dit que ses cheveux étaient blonds, que sa peau était claire et que ses yeux étaient bleus. C’est donc sur ses premiers mots qu’elle peut mettre une image. Mais toutefois, elle ne peut en être sure. Ses iris ont-ils été modifiés par l’opération ? Le chirurgien a peut-être omis de le lui dire.
 
Par réflexe, elle lève une main et la promène sur son visage. Elle s’amuse à comparer les creux et les pleins qu’elle a toujours ressenti avec ceux qu’elle voit, ourlés de couleurs ou d’ombres.
Un court rire étranglé s’échappe de sa gorge, qui se noue. Deux larmes s’échappent des coins de ses yeux, petites merveilles d’eau cristalline. Elle ne les cueille pas du doigt. Les voir progresser le long de ses joues est bien trop magnifique.
 
Elle se demande si elle est belle. On lui a dit que oui, mais comment peut-elle le savoir ? Elle n’a aucune référence.  
Son sourire revient. Elle s’en moque. Elle sait que jusqu’à sa mort, chaque chose qu’elle verra sera plus belle que la précédente.
 
Dans un éclat de rire, elle se lève. Elle a encore des milliers de couleurs à découvrir.