Bon, un proche a trouvé très malin de m’offrir le cadeau suivant pour Noël :
Il s’agit donc de la seconde édition du manuel de référence de notre ami Bob (le bracelet Bobien est issu d’un Noël précédent), la première étant apparemment devenu au choix introuvable ou hors de prix (spéculer sur le lore Bobesque, je n’étais pas prêt).
Mais figurez-vous qu’au delà de la simple blague, ce cadeau idiot signe très probablement une avancée majeure dans le domaine de la psychanalyse Bobienne.
Car en parcourant les pages de cet ouvrage d’un autre temps, nous comprenons mieux la manière dont notre héros interprète la lecture d’articles techniques : comme nous savons maintenant ce qui rentre très exactement dans son crâne avant d’en sortir par l’orifice buccal sous forme de bouillie infâme, nous pouvons reconstruire le processus de pensée et d’assimilation du savoir de notre spécimen.
Pour mieux le cerner, il faut donc commencer par étudier l’ouvrage dont il est question.
La forme :
Comme vous pouvez le voir sur la couverture, le manuel se veut entièrement en couleur et surtout, facile à lire : « moins de lecture, plus de résultat ». Et effectivement, les chapitres de cet ouvrage ne contiennent majoritairement que des photos et images d’illustration : il n’y a au final que peu de texte.
Tout est fléché, numéroté, copieusement illustré et accompagné de dessins plus au moins humoristiques. Les textes sont courts, la police d’écriture assez grande, le tout étant systématiquement entouré de grands cadres colorés : c’est bien simple, si l’on m’avait demandé d’écrire un manuel de hardware à destination du bel âge, je ne m’y serais pas pris autrement.
Le fond :
Le manuel se veut très complet et aborder un peu tout, parfois en vrac, avec la simplicité dans la forme que nous venons de voir : ce qu’il en résulte est un ensemble de guides extrêmement généralistes et superficiels, qui ne rentrent que très (très) rarement dans les détails et se contentent donc d’asséner des généralités (souvent hors d'âge). C’est particulièrement visible sur la partie software où seuls de grands concepts et de vagues présentations de types de programmes trouvables sur un ordinateur personnel sont abordés. Exemple : vous ne saurez pas comment installer Windows, mais vous saurez que le CD est livré avec votre machine et qu’un système d’exploitation est vital pour s'en servir. On vous apprendra qu’il faut acheter une carte d’acquisition pour pouvoir y brancher votre caméscope, vous y découvrirez la forme d’un port USB et d’un port Firewire, mais le tutoriel n’ira guère plus loin.
Certains matériels essentiels sont en revanche parfois assez bien présentés, comme le disque dur, où l’on retrouvera une illustration plutôt correcte du mécanisme et des notions de cylindres, secteurs et têtes.
Assez étonnamment, dès le début on nous présentera le concept de sauvegardes incrémentielles perdu au milieu du tutoriel bombe à air.
Comme vous allez le voir, la liste des sujets est assez vaste et il n’est du coup pas étonnant que l’ouvrage reste très vague dans la quasi totalité de ces derniers puisque ces auteurs ont visiblement décidé de traiter presque tous les domaines ayant trait à l’informatique personnelle en à peine plus de 200 pages, à grand renfort d’illustrations.
Les sujets :
Forcément, je ne vous en ferais pas une liste exhaustive mais dans les grandes lignes, sachez que la première partie est consacrée aux notions essentielles de réparation et on invitera donc à constituer une trousse à outils, vous sensibiliser à l’électricité statique (deux pages de dessins qui font peur), à vous inscrire dans le club d’informatique local de votre bourgade et repérer les adresses des bonnes boutiques de quartier au cas où vous seriez un peu dans la merde (et oui, ça sent bon la fin des années 90). Grosso merdo, j’ai vraiment l’impression que les auteurs traitent l’ordinateur personnel comme un bagnole
Ensuite, le bouquin rentre dans le vif du sujet: repérer et assembler les composants fondamentaux d’un ordinosaure (sans déconner, y’a des photos de Willamette en intro mais tout le reste se passe sur socket 7 et slot 1) : les grands concepts et termes sont balancés en vrac sans détails, vous saurez que la SDRAM et désormais plus répandue et rapide que l’EDO, mais strictement aucun mot sur leurs caractéristiques techniques respectives (fréquences, timings, tensions etc.). Mis à part peut-être pour notre bon vieux disque dur mécanique et la carte mère avec ses vingt milles jumpers, à peu près tout le matos de la section est traité de cette façon.
Le troisième chapitre présente les périphériques de la même manière… En pire.
Vous saurez que le papier peu bourrer l’imprimante et qu’il faut la démonter quand ça arrive, en revanche, aucun détails sur son installation ou même utilisation sur le Windows du moment. Encore un fois, à peu près tous les périphériques possibles sont rapidement passés en revue et si parfois les rédacteurs s’attardent sur des futilités (présentation d’une imprimante matricielle ou de la forme du tournevis à utiliser pour dévisser un cache), le contenue est vraiment très, très généraliste.
Le quatrième passe encore plus rapidement en revue les périphériques d’accès à Internet d’époque : attendez-vous surtout à des images de poteaux téléphoniques, des illustrations de satellite et à la représentation d’électrons qui circulent plus ou moins vite dans un câble en fonction de la vitesse de synchronisation du modem (si si). Là pour le coup, on est pas loin du niveau habituel du maître : on sait aussi qu’il y a des pilotes et des disquettes de diagnostic. Surpuissant.
Le chapitre suivant est l’un de ceux qui a pris le plus gros coup de vieux et qui se trouve être dorénavant obsolète dans sa quasi totalité : le stockage.
Et c’est fort dommage, puisqu’il s’agit du plus détaillé. Les lecteurs Zip, les disques EIDE et le chaînage des lecteurs disquettes n’auront plus aucun secret pour vous. Cela dit, pour la énième fois, les auteurs mettent encore très fortement l’accent sur le nettoyage (aussi bien au sens physique que logique) des périphériques : c’est une véritable lubie.
Le suivant traite du paramétrage de la machine ainsi que des mises à jours logicielles : c’est là que l’on se rend vraiment compte des limites de la forme du manuel.
Donc nous savons que nous pouvons mettre à jour des pilotes, des systèmes d’exploitation, des logiciels, des BIOS (avec un bel encart réservé au CMOS/CMAÛSSE). Enfin, nous apprenons qu’en appuyant sur SUPPR (grosse image pour illustrer la manip’), nous pouvons rentrer dans le BIOS pour paramétrer des trucs mais que de toute façon depuis le Plug’n’Play, on s’en tape.
Le septième n’a strictement aucun intérêt, c’est un gloubi boulga des précédents sur comment réparer/nettoyer tout ce merdier, sujet qui a déjà été abordé dans la plupart des chapitres.
En revanche, le huitième risque de bien vous faire rigoler : acheter un nouvel ordinateur.
Déjà, le PC, c’est IBM, Dell et Compaq : de gros fabricants qui ont de beaux immeubles tout en verre et qui fabriquent des ordinateurs depuis longtemps. Si vous achetez autre chose, c’est à vos risques et périls : les « clones » sont fatalement moins fiables (pas entièrement faux si l’on considère que les auteurs ont sûrement été traumatisés par la glorieuse époque des boutiques de quartiers remplies de mobales PC-CHIPS).
Nous aurons aussi droit à quelques configs, mais la plupart des conseils d’achat consistent à choisir… La grande surface dans laquelle acquérir la nouvelle machine ! SAV, vendeurs, techniciens sur site et soldes des grands étaliers, on vous dit tout (ou pas, en fait).
Au final, seulement trois configs types vous sont proposées en fonction de votre utilisation : élémentaire, professionnelle et familiale. Le jeu disparaît des radars, il y a de l’Intel partout et mis à part la quantité de mémoire vive, la taille de l’écran, la vitesse du modem et la gestion de la table d’onde par la carte son, on ne vous aidera pas des masses.
Le dernier clôture le bouquin sur la mise en service d’un réseau domestique : quelques termes comme masque de sous réseau ou adresse IP sont lâchés en vrac au milieu de dessin de ports ethernet et de plateau de monopoly censé représenter une LAN.
Pour tester le fonctionnement de votre installation, pas de prise de tête à paramétrer votre carte/modem sous Windows 98, il y a le testeur de câble et l’analyseur de réseaux. Woot.
Pour conclure, je dirais que ce qui est finalement le plus obsolète dans ce manuel, c’est la manière dont il aborde ses sujets...
L’interprétation Bobienne :
Déjà, il est facile de comprendre pourquoi Bob affectionne ce livre : il est gavé à ras bord d’images, ne comporte que peu de texte facile à lire et tout semble extrêmement simple puisqu’il ne rentre que rarement dans les détails.
Ce que l’on constate dès les premières pages, c’est que justement, notre ami semble ne s’être particulièrement intéressé qu’à celles-ci : pour faire simple, sa capacité de concentration lui permet de lire une dizaine de pages avant de décrocher et survoler le reste de l’œuvre. Malgré les grosses images et le traitement ultra superficiel de la plupart des sujets, il n’a pas été capable d’aller réellement plus loin que le tout premier chapitre, celui où l’on achète des trucs pour se préparer à réparer un ordinosaure comme si l’on était un vrai professionnel.
Ce sont donc ces pages qui traitent de l’électricité statiques, du nettoyage au pinceau, au nettoyant pour contacts et à la bombe à air et l’on y retrouve une bonne partie de l’attirail de Statiquonaute de notre Champion : le bracelet, la pince de mise à la terre et le tapis antistatique. La toque et les lunettes, c’est évidemment sa touche perso (« professionnelle »).
Au final, on se rend compte qu’il a zappé le peu de technique que contient l’ouvrage pour se concentrer uniquement sur les futilités (sûrement parce que ce sont les seules choses qu’il est arrivé à saisir). Tout ce qu’il aura retenu c’est la fixette sur le nettoyage et l’électricité statique que font les auteurs. De ce dernier, il ne retient d’ailleurs que les accessoires, l’explication sur la manière de se relier à une masse, il ne l’a visiblement pas comprise non plus (il faut dire que le carré de texte dédiée à l’explication est le plus gros dans la page).
Sa fameuse vidéo « quasi professionnelle » en réponse à EH est la parfaite démonstration qu’il ne sait ni lire, ni interpréter correctement la moindre information pertinente qui percute sa boîte crânienne : il lui suffisait de mettre bêtement en scène certains paragraphes encore à peu près d’actualité du bouquin pour paraître un minimum crédible (un peu daté, simpliste, mais crédible).
Tout ce qu’il n’a pas saisis et qui ne rentre pas assez dans les détails pour fournir une explication technique cohérente dans la phrase qu’il essaye péniblement de terminer devient de facto « compliqué », mot magique qui implique qu’il sait de quoi il parle, qu’il pourrait en parler mais qu’il n’en parle pas pour ne pas perdre ses spectateurs. Je suis malgré tout persuadé que quand il emploi ce subterfuge, il est pleinement conscient de ses propres limites : il sait pertinemment qu’il ne peu pas terminer sa phrase parce que l’explication technique qu’il cherche n’est justement pas dans le bouquin. Bob a finalement le même problème que sa Bible, vouloir tout traiter sans ne rien expliquer.
Enfin, le plus drôle vient de son vocabulaire, entièrement pompé sur le livre et restitué tel quel dans sa bouillie intellectuelle habituelle : CMOS, blocage, anomalie, mauvaise connexion, vitesse de l’information etc.
Ça confirme mon sentiment que ce pauvre gus n’est qu’une éponge qui s’imprègne maladroitement des choses qui l’entoure, dont il ne retient finalement que les aspects superficiels de ces dernières, son esprit malade se chargeant de combler toutes ses lacunes comme il le peut pour donner naissance à la salade mentale que l’on connaît: on lui aurait offert un livre sur la pêche à la place de celui-ci, on aurait eu cinq ans de tutoriels sur la température de conservation du cabillaud.
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