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Auteur Sujet :

La moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar.

n°46234161
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 27-06-2016 à 21:28:15  profilanswer
 

Reprise du message précédent :
Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 30.

 

https://zupimages.net/up/18/04/9y21.jpg

 

Le soleil au zénith dessine dans le ciel gris un cercle imprécis et falot. A bord du Sharsherman immobile au milieu des rocailles, chacun profite des commodités offertes par le vaisseau spatial pour imprimer et avaler quelques pilules de cuisses de cannes aux échalotes. Dans une nef militaire, par principe, on mange toujours très bien. Phil Martinet fait passer ses deux gélules nutritives avec une lampée de sa canette de vin bleu, qu’il partage presque à regret avec Jeff Coupé.

 

– Faut le dire, à cantine dégueulasse, guerre mauvaise. Ce n’est pas le moindre avantage d’avoir trouvé ce zinc.

 

– Dites-donc, lance Jeff lorsqu’il a bu, ils roupillent ou quoi, les défs ? On est venus jusqu’à vous un peu trop peinards. Presque intimidé malgré lui, il regarde du coin de l’œil la grande carcasse de Flash Gourdin assis sur un siège, note au passage que l‘évadé semble indifférent à tout ce qui l‘entoure. Le pilote du Cragstan ne sait pas trop quoi en penser, il lui trouve juste une sale gueule, mais il a toujours eu un a priori férocement négatif sur les taulards galactiques en général.

 

– Ils vont se pointer, le calme ne va pas durer. Ils ne peuvent communiquer, mais ils connaissent parfaitement la position de cette épave. Et ils veulent sans doute se venger. Fanch ne se retourne pas pour répondre, il semble fasciné par l’image informe que tente de crachoter l’holocasteur du cockpit. Un message brouillé du commandement déféré, mis a mal comme le reste par la vigilance incessante de ses hommes. Il est impossible de discerner la moindre cohérence dans le chapelet d’éclairs lumineux qui dansent devant ses yeux.

 

– Bon, fait Jorg, fini l’étape gourmande inoubliable, maintenant on récupère le maximum des trucs utiles que l’on trouvera pour les ramener à la maison-mère.

 

– Oui, lui répond Karela, quel dommage de laisser cet engin à l’ennemi, une aubaine pareille ne se renouvellera sans doute jamais.

 

– Non, fait Flash en sortant de sa léthargie, on ne leur laisse pas. On le fait sauter.

 

Tout le monde se retourne vers le manchot couturé, lorsqu’il ponctue sa phrase en agitant sa prothèses au-dessus de sa tête, avec un moulinet identique à celui que fait l’aileron d’un requin perçant l’océan. Puis, dodelinant de la tête en raison d‘un tic qui ne le quitte plus, il laisse ensuite retomber lentement son membre d’acier. Son autre main dévoile encore des traces de cloques et d’ampoules effroyables, mais il n’en souffre plus.

 

– C’est pas toi qui commande, ici. Phil se croit encouragé dans son intervention par le regard méprisant que vient de lancer Jorg à la dérobée. Siguiline se mord la lèvre.

 

– Allons les gars, c’est ce qu’on va faire, en effet. Et maintenant au boulot. Joignant le geste à la parole, Fanch demande l’aide de Karela pour dévisser de sa niche un lourd cumulozithion. Une incroyable réserve d’énergie douce-tension dont profitera la base pour longtemps.
 
 Comme si leur chef avait donné le signal, le croiseur de l’espace se met aussitôt à fourmiller d’activités diverses mises en œuvre par chacun, dans le but de grapiller quelques appareillages essentiels, rares et précieux. Siguiline arpente scrupuleusement le secteur médical, et note pour Fifi chacune des choses qui l’intéresse. Elle ne dit rien lorsqu’elle le regarde empocher pour son compte un grand nombre de pilules de coïne. Ce guerrier a le droit d’être croyant, après-tout, puis elle se dit qu‘il projette probablement de les revendre au marché noir. Sans l’aide de personne, Flash piège le véhicule en vue du sabotage, suivant tout de même pour ce faire les consignes éclairées de Jorg, qui trouve une combine pour faire péter l’un des missiles HFR 412 à distance. Sachant que trente de ces monstres non déplaçables dorment en soute, l’explosion laissera dans le sol la trace d’un fameux cratère. Un truc à faire basculer Mars sur son axe, a plaisanté Phil, mais il sait lui aussi que cette puissance effective est la raison pour laquelle les croiseurs spatiaux ne s’invitent pas aux conflits planétaires. De la même manière que les robots guerriers ne sont pas de mise dans les guerres humaines, mais pour d’autres raisons. En attendant le tonnerre, on charge le petit Cragstan des trouvailles hétéroclites piochées dans le vaisseau, qui se montre par ailleurs généreux. Fanch et Karela procèdent à un inventaire scrupuleux des fortunes acquises. Tout en sifflotant « A trip to the moon », un cantique de son éminence, Phil remet son scaphandre en premier pour aller faire un tour à l’extérieur, après dévérrouillage du bouclier. Il se laisse un instant griser par la masse du Sharsherman, parce qu’elle s’élève au-dessus de lui avec une hauteur ahurissante. Le soleil fait reluire la carlingue d‘une manière aveuglante, mais il sait que s’il pouvait la toucher du doigt, sa paroi serait glacée.

 

– Hey, l’as des as, fait Jeff dans son casque, t’éloigne pas trop. T’as pas besoin de faire des kilomètres pour pisser dans ta combi.

 

– Ok ok, bien reçu, la pouf du bataillon, je n’ai pas l’intention de rester tout seul ici, paraît que ta sœur adore quand je met le feu dans sa sustente.

 

– C’est ça, vit tes rêves, avant que tu puisses pornifier avec ma frangine, on cultivera des bananes dans les cratères de Cimmeria, trou du cul.

 

– Je monte sur la coque, je verrais mieux le secteur.

 

– Agis comme tu veux mais fais pas le con. Fanch a dit qu’on lâchera une sonde en partant, de toute manière.

 

– Hey, Jeff, de toi à moi, t’en penses quoi de l’handicapé de mes deux, là ?

 

– J’aime pas le genre, il a l’air siphonné mais il est de notre côté et c’est pas à nous de juger. Vas t’amuser mais fais-vite, on va bientôt se barrer. Si tu es encore là-dessus quand ça va péter, tu vas percuter Pluton, fils.

 

Phil assure sa prise pour grimper les échelons saillants sur le flanc de la forteresse volante. Il est content d’accomplir cet exercice physique obligé, puisque aucun scaphandre martien ne posséde de dorsal, de toute manière. La gravité moindre lui facilite une ascension aisée, avant qu’il ne déambule sur le large dos du monstre, dont l‘impression de lourdeur est impressionnante. Une exquise lumière colore à présent de rose les ombres coulant sur la grosse masse bombée. Il profite d’un point de vue privilégié sur l’horizon de la planète rouge et distingue parfaitement le dôme abandonné. Au loin, deux barres montagneuses fort éloignées l’une de l’autre semblent s’interpénétrer par illusion, en gommant conjointement leur distance respective. De fins nuages poussiéreux et délités s’accrochent sans mouvement aux formidables arêtes érodées. Le coin propose un vaste panorama calme et tranquille, qui gonfle de gratitude le cœur du soldat, tout à la joie de se sentir un fière natif martien. Parce que c’est bien pour l’indépendance de ce monde qu’il se bat, puisque c‘est également l‘ambition de tous ses potes mineurs, qui ne se gênent à présent plus pour faire un doigt d‘honneur cinglant à la SGL (Sanchez/Gomez/Lopez) Corporation, monopole marchand des extraordinaires minéraux extraterrestes attractifs puis extractés et tractés dans l’espace. Sans se faire d’illusion, il sait toutefois que la beauté orangée de ce ciel limpide sera sous peu gâchée par l’inévitable irruption rageuse d’un squadron de Panzigs défédérés. Jeff l’appelle au bout d’un moment :

 

– Bon dieu, Phil, tu bronzes ? On ne t’as pas envoyé en mission-suicide, rapplique tes miches en vitesse, on se tire.

 

 De son perchoir, Phil voit s’ouvrir la porte, puis la passerelle qui libère le Cragstan. Il croit apercevoir que ce n’est pas Jeff, mais Jorg qui le conduit. Reprenant l’échelle, il les rejoint en suçant l’eau de son collecteur, dans lequel il a rajouté en douce un petit adjuvant non toléré mais pas du tout mauvais. On ferme la porte, tout le monde garde son scaphandre. De la taille d’une puce de chat, une sonde est lâchée afin de garder un œil sur l’épave, et puis Jorg fait crisser les chenilles.

 

– Lâche le fauve, Jorg, fait Karela en rangeant encore une petite caisse sur une plus grosse. Il faut dégager d’ici le plus vite possible. Flash s’est installé d’office dans la tourelle.

 

Nouvellement promue Panzigoberkanonier de son Panzig Space Rocket SR-1007, Sophia Marso reçoit dans son implant l’ordre de décrocher. Elle signale sa manœuvre aux Panzibéreten qui l’accompagnent, puis vire sur l’aileron gauche afin de neutraliser une microsonde balladeuse signalée près de la cible officielle. L’engin se sépare à une vitesse fulgurante des quarante autres qui composent l’escadrille. La sonde ennemie est muette quand à sa position, mais élargissant volontairement son vol, la pilote défédérée avise un minuscule éclat trahissant un véhicule en mouvement,  en train d’errer dans une zone fort éloignée du Sharsherman. Elle reçoit l’ordre de poursuivre et gérer le feu, car son commandant subodore une présence d’insurgés. Il faut manœuvrer très vite, se rapprocher, plonger et tirer en simultané avec ses deux Ray Guns Robo Hunter MIB Cosplay LARP, mais au moment précis où elle va cracher le feu, c’est elle et son équipage qui reçoit le tir de Flash de plein fouet, lequel les pulvérise instantanément dans un geyser de flammes. Lorsque en altitude l’essaim groupé de ses camarades passe en réduisant de vitesse à l’aplomb du Sharsherman, Jorg renseigné par la sonde déclenche avec une précision diabolique l’explosion du croiseur et les trente neufs appareils volent avec lui en éclat. L’équipage du Dragstan perçoit clairement le souffle de l’immense déflagration dans l‘atmosphère ténue puissamment ionisée, mais ils ont pris soin de se protéger à l’abri d’une haute montagne. Un colossal champignon de sable et de poussières s’élève pour former une monstrueuse colonne dans le ciel ébranlé. A l’emplacement du cratère nouvellement creusé, plus aucune création de l‘homme n‘existe et le vieux dôme ruiné lui-même a disparu. Fanch n’espérait même pas un tel zéro faute en éliminant d‘un coup l‘ensemble des Panzigs. Il félicite toutefois Flash pour l’efficacité de son engagement, mais le bagnard reste sans réaction. Nikos Sirkisi et tout son continuum militaro-marchand vient une nouvelle fois, en une seule seconde, de se prendre une beigne époustouflante.

 

– Think global, act local, se réjouit Phil en tapant sur l’épaule de Jeff, mais faut vraiment que je parle à ta sœur.

 

https://zupimages.net/up/18/04/1t38.jpg


Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 11:54:38
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Posté le 27-06-2016 à 21:28:15  profilanswer
 

n°46265992
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 30-06-2016 à 15:55:32  profilanswer
 

https://zupimages.net/up/18/04/8re1.jpg

 

J'accepte toutes les injures, aucun souci.

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 12.

 

https://zupimages.net/up/18/04/dhan.jpg

 

Pour assurer sa survie, la première chose que doit construire un bon scout en arrivant dans un environnement vierge et hostile, c’est l’autel de Jésus. Bien avant le coin cantine ou les feuillées. Les anciennes carrières de Briepue se présentent sous la forme d’un vaste cirque de trois hectares délimités par de hautes crêtes rocheuses partiellement boisées. Au pied d’une de ces falaises, l’abbé Julio désigne l’endroit où se dressera l’autel pour qu’il puisse réciter sa messe, puis la pelouse dégagée sur laquelle on montera les cinq tentes un peu plus tard. Sur son ordre, les enfants se dispersent donc par groupe de deux, et Gaston part en expédition avec Jean pour aller abattre quelques branches, puisque le seigneur a créé les arbres afin que l’homme les domine. Sans ça, selon l’abbé Julio, les églises n’auraient jamais eu de portes. Il est toutefois curieux que les fenêtres des cathédrales ne comportent jamais de volets. C’est le genre de remarque qui a valu à Gaston une bonne baffe, un jour. Les gosses sont heureux de s’activer au grand air, après le monotone voyage en car. Le patrimoine industriel a laissé sur place un grand nombre d’engins cabossés et de machines rouillées, mais malgré leur désir de s’amuser avec, les deux compères empoignent leurs petites haches pour grimper péniblement vers les bois qui les surplombent. Ils entendent les cris des autres qui s’animent pareillement plus bas, et leurs jacassements aigus se trouvent amplifiés par les parois de l’immense cratère. Peu à peu cependant, les piaillements joyeux du reste de la patrouille se font plus ténus. De manière concrète et vivante, ils ressentent dans leur chair l’émotion qu’a sans doute ressenti Robinson, en débarquant sur son île déserte. Sauf que sa préoccupation première à lui, ce n’était pas d’édifier un retable sommaire en branchage ligaturé, mais de construire une cabane pour lui et sa chèvre. Lorsqu’ils atteignent les hauteurs, les deux copains délaissent le vaste panorama qui s’offre à leur vue pour entrer dans le profond clair-obscur et s’enfoncer résolument dans les frondaisons. Le plan de construction de monsieur l’abbé nécessite quatre branches de hêtre multipliées par deux, d’environ trois mètres de long et de dix centimètres de diamètre. Ils n’ont pas à craindre les loups, qui en cet été 1963 ont disparu de France depuis belle lurette, et c‘est avec confiance qu‘ils arpentent à présent les fourrés. D’après l’abbé, faut juste se méfier des gitans locaux, mais Briepue, ce n’est pas la Camargue, tout de même. Et puis pour le moment, on entend pas de guitares.

 

Alors qu’ils sont à deux doigts de renoncer, Gaston avise sur sa droite une souche garnie de rejets vigoureux, lesquels peuvent parfaitement correspondre aux critères. Toute vision sombre du monde les abandonne, lorsqu’ils se relaient chacun leur tour pour entamer l’écorce des perches soumise à leurs coups de hachette. Jean cogne dur, peut-être parce que son père souffre d’alcoolisme et qu’il ne veut en parler à personne. Peut-être parce que sa sœur de seize ans vient d’accoucher et ne va plus à la messe, ou qu’il a peur d’arrêter ses études après la troisième, à cause des maths. En tout cas, il abat presque à lui seul les trois-quarts du boulot. L’Etat-providence, pas de ça Lisette, chez les scouts on gagne ce qu’on mérite, et les deux longues et fines branches sous leur responsabilité sont bientôt alignées par terre devant eux. Il faut désormais les ramener au camp et les ajouter à celles abattues par les autres. Avec un peu de chance, ils auront gagné là un brevet de bûcheron à épingler fièrement sur la manche. C’est alors que derrière l’énorme éboulis rocheux qui leur fait face, ils entendent un cri de fauve, en tout cas quelque chose d‘à peine humain. Un double râle virile qui perce la forêt d’un écho surnaturel.

 

– C’était quoi ?

 

– Je sais pas.

 

–  J’ai peur.

 

–  Moi aussi.

 

Ils sont tellement terrorisés qu’ils n’osent pas bouger. Ils redoutent sans l’avouer un coup des gitans, mais aucun des deux ne trouve le courage d’aller voir. Gaston a tout de même dégainé le petit poignard qu’il a gagné au tir aux fléchettes de la fête foraine de Troulbled. Puis des voix parfaitement humaines se font entendre :

 

– Ah merde, Marie, fallait me dire que tu étais vierge !

 

–  Pas grave Gabriel, maintenant c’est fait.

 

–  Je t’ais pas trop fait mal ?

 

– Non, t’es un ange. Part en avant, tout ça m‘a donné envie, je fais pipi et je te rejoins.

 

Alors que Jean et Gaston s’apprêtent à prendre leurs jambes à leur cou, c’est à ce moment là qu’elle apparaît devant eux. Non, ils n’étaient en aucune manière préparés à cette glorieuse vision. L’idée de se prosterner devant la noble dame qui les toise à présent est leur premier réflexe, mais les louveteaux sont subjugués devant tant de beauté. Elle fait valser le bleu de sa jupe et le blanc de son corsage, dans lequel Gaston a bien vu qu’elle replongeait en vitesse un sein pâle, comme un agneau fragile gentiment poussé par la main du berger. Jamais encore, sauf peut-être en face de Marité Hissedru, il n’a été confronté à tant de grâce étalée. L’inconnue aux yeux bleus étrangement fiévreux est assurément belle, elle offre aux deux gamins l’éblouissante vision d’un sortilège enchanteur, car elle n’a nul besoin de maigrir. Tant de magnificence idéale ne saurait incarner une vulgaire voisine de palier. Grande, mince, blanche et jeune, ce n’est pas la femme de la rue, cette éblouissante silhouette qui parle à l’ange Gabriel et qui s’appelle Marie. Fatima, Lourdes et désormais Briepue. Toute terreur s’efface dans le cœur des gamins qui se jettent à genoux pour prier avec conviction, car ils ont parfaitement compris à qui ils ont affaire. N’est-elle pas vêtue de blanc et de bleu, et n’a t’elle pas aux pieds de fines sandales d’été, comme en portaient sûrement dans le temps les femmes de Jérusalem ? Amie des pauvres, aussi, car sa mise n’évoque guère le luxe de la haute couture. Une violente poussée de fièvre agite les enfants, qui peinent à ravaler, mais comment ne pas rester coi lorsqu’on se trouve en face de l’égérie du paradis, droite et muette devant vous en chair et en os ? Gaston fait de son mieux pour muscler ses abdominaux, pris d’une soudaine envie de lui offrir des roses blanches, alors que Jean semble tout bonnement écrasé de ferveur. Bien qu’animés de dynamique positive, leur raison bat de l’aile, leurs repères se brouillent, pendant que la vierge Marie farfouille la ceinture de sa jupe pour se donner une plus grande contenance. La belle Dame fait un pas en avant, alors qu’ils entendent une nouvelle fois la voix grave, insistante et lointaine de l’ange Gabriel, lequel appelle plusieurs fois Marie pour qu’elle retourne sans aucun doute avec lui vers le chemin radieux qui mène au ciel où ils habitent. Gaston regrette qu’elle le voit en uniforme scout, et pas en costume du dimanche bien coupé. Dans son trouble, Jean fait tomber de sa poche une sucette colorée déjà bien entamée. L’apparition cligne doucement ses cils d’une singulière profondeur. Sa voix suave est douce et posée, elle pousse la délicatesse jusqu’à prendre l’accent des filles de Briepue, sans doute pour se faire mieux comprendre des petits gars de Troulbled qu‘elle domine de toute sa hauteur :

 

– Qu’est-ce que vous faites là, les mômes ? C’est dangereux pour vous, cette carrière.

 

– On est là pour notre grand camp scout de l’été, parviens péniblement à articuler Gaston en cachant son couteau, tant la vierge Marie ne peut camoufler sa formidable beauté, dont il est irradié ; en particulier celle de ses genoux nus admirablement dessinés, bien que légèrement griffés par les ronces.

 

– Quand on sera grands, lance Jean en bégayant un peu, on fumera pas, on boira pas, on posera une statuette de vous dans le salon des parents.

 

– On aura pas de maîtresses. Et on combattra toujours le démon, surtout celui de midi, c’est le pire, d’après mémé Enerstine.

 

– Bon les mioches, partez maintenant, j’ai un truc à faire. Et vous retournez pas.

 

Evidemment, Marie  projette sans doute d’accomplir en secret un miracle pour témoigner de sa venue. Mais elle a aussi haussé la tige gracieuse de son fin sourcil avec tant de conviction, elle trépigne et vibre sur place avec tant d’ardeur, que Gaston et Jean prennent à regret la poudre d’escampette pour rejoindre le camp. Ils ne leur reste plus qu’à clamer au monde ce qu’ils ont eu la chance inouïe de contempler.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 08:54:00
n°46277188
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 01-07-2016 à 16:07:36  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - Extrait numéro 23.

 

https://zupimages.net/up/18/04/yxn4.jpg

 

Totalement englobé par la lumière pourpre qui grimait d’une singulière fantasmagorie la situation déjà très étrange, Martin plia les genoux pour se pencher sur la chose qu’il venait d’occire. Ce corps inerte aux grands pieds aurait sans doute mérité de subir la plus scrupuleuse des autopsies, puisqu’il venait incarner à lui seul, avec une brûlante actualité, les plus folles rumeurs courant sur les manipulations du docteur Hubert Van Degaffe. L’établissement des Flocons d’argent avait bien partie mêlée avec les agissements et l’organisation dangereuse de ce dégénéré. Il retourna le cadavre dont l’apparence était celui d’une femme parfaitement normale, aux proportions même très agréables. D’une manière vraiment stupéfiante, Martin aurait juré découvrir devant lui un clone parfait du corps de Vaya. Mais la tête se composait en revanche d’un énorme et hideux crâne de rat, que la balle avait partiellement bousillé. Les redoutables griffes que portait cette saleté au bout des doigts venaient cependant de lui entailler le bras, et il pria au passage pour ne pas être infecté par quelque vérole. Non, décidément, les yeux fixes et globuleux, légèrement en amande, qu’il contemplait avec intensité n’avaient rien d’humain, ni même une vulgaire ressemblance avec un regard de primate. D’ailleurs, quelle pouvait-être la véritable part d’humanité dans ce cerveau monstrueusement hybridé ? La gamelle renversée de son dernier repas avait éparpillé de gros morceaux de viande crue, qui venaient se mêler à d‘immondes déjections. Peu importait pour l’heure, ce rongeur humain ne pouvait offrir d’autre réponse au privé que celle de constituer pour lui une pressante menace. Il avait fait mouche sur l’injonction d’un simple tir de défense, mais les bruits de pas dans le couloir et la lumière qui fusa sous la porte de l’autre pièce, dans laquelle il se précipita, ne laissaient aucun doute quand à la volonté de ses futures rencontres. Il rechargea le Remington, puisque c’était le seul outil sur lequel il pouvait compter pour s’échapper du traquenard, puis il se colla derrière l’abri d’une armoire.

 

La porte s’ouvrit brusquement et une ombre sur le sol apporta la signature visuelle d’un ennemi armé, Martin patienta moins d’une seconde, attendit que l’intrus lève la jambe pour amorcer un pas, se révéla et tira en même temps. Une parenthèse enchantée prouva qu’il venait de tuer sur le coup Borz Balkirie, un type qu’il aurait juré nettement plus vif et prudent. Il se pencha pour attraper le gun, tombé sur le sol, du garde du corps de Blanche Pearl, puis s’élança à toute allure dans le couloir, en éteignant la lumière au passage. Un peu plus loin, il tomba sur Bob Oldson qui l’aligna sans dommage de deux coups de feu, en dépit d’un bras en écharpe. Martin roula sur le sol en tirant lui aussi, éclairant brièvement par les flammes de son revolver l’obscurité relative des lieux. Ce nouveau tunnel au plafond pavé de verre épais s’entrecoupait avec régularité de maigres décrochements qui crénelaient les murs. Les bras en croix, Martin se plaqua à l’abri de l’un d’eux. Le carrelage se troua plusieurs fois autour de lui, à chaque fois qu’un projectile venait violemment percuter les murs. Un bref jeu de massacre sans victime éclata entre les deux adversaires, jusqu’à ce que Bob aille enfin à la rencontre de son destin, pour tomber en criant juste Aïe ! Une balle dans le bide, une autre dans le cœur qui dessina sur sa poitrine une petite plaie aussi rouge que des lèvres de mariée. L’écharpe de son bras blessé cachait un poignard désormais révélé, arme blanche que Martin glissa vivement dans sa poche. Il délaissa cette fois le pétard poissé de sang. La mort du frère de Triple Shot laissait la voie libre, mais Martin ne savait qu’elle direction prendre, la tension engendrée par ces fusillades le désorientait complètement, occultant dans son esprit le chemin qu’il devait prendre pour rejoindre l’escalier. La porte de la cave qui l’avait conduit ici ressemblait à toutes celles qui s’alignaient devant ses yeux. Des bruits de voix, une cavalcade de plusieurs individus firent taire toute hésitation, il se mit à courir à perdre haleine vers l’arrière, n’ayant pas d’autre choix que de partir explorer un secteur inconnu. Propulsée par une intention bien entendue mortelle, une poignée d’assaillants le poursuivait avec une obstination probablement très serrée. Martin ne distinguait rien d’autre, au gré de sa course, que de longs couloirs percés de portes identiques, certainement fermées. Il n’avait d’ailleurs pas le temps de le vérifier. Son bras griffé saignait peu, mais lui occasionnait une douleur cuisante. Il fuyait, et la seule pensée dérisoire qui dominait son cerveau se nichait toute entière dans son désir de rester en vie pour voir encore le jour se lever. De la survie pure face à des types nombreux, un constat qui décuplait l’allongement de chacune de ses foulées. Il savait pourtant que dans ce lieu clos, il ne pouvait espérer rester très longtemps hors de portée des chacals lancés à ses trousses. Il entendit en passant un déchirant pleur d’enfant, perdit de précieuses secondes pour tenter d’ouvrir la porte d’où provenait cet appel poignant, n’y parvint pas et reprit sa fuite en avant dans les galeries sans lumière. Apres un marathon énervé au milieu du vaste dédale aseptisé, dont les dimensions ne cessaient pas de l’étonner, il tomba sur la porte d’un ascenseur. Le couloir s’éclaira, Martin pianota sans trop réfléchir sur la commande et s’engouffra dans la cabine, les portes d’acier se refermèrent juste à temps avant qu’il ne se fasse plomber.

 

Il avait commandé le troisième et dernier étage. La pleine lumière lui fit plisser les yeux. Pendant l’ascension rapide, il ramassa sur le sol une petite étiquette adhésive écrite en anglais et sur lequel était juste écrit « Human transplant organs ». Bien qu’il la fourra dans sa poche, Martin ne voulut pas s’imaginer de quel contenant cette petite vignette s’était détachée. C’est seulement à cet instant qu’il pensa à rallumer son téléphone, qu’il avait éteint, pour avertir Vaya de sa fâcheuse position, mais il était arrivé et il laissa tomber. Il jouait quitte ou double, si quelqu’un l’attendait derrière les doubles portes, il était mort. Mais par une espèce de grâce voulue des dieux, il n’y avait personne. Profitant de cette chance incroyable, Martin s’échappa, avisa un mur à gauche, tourna donc sur la droite pour marcher à nouveau dans un espace étroit qui présentait l’allure d’un corridor d’hôtel luxueux, en contraste parfait avec ceux du sous-sol glacé. Un groupe de grands vieillards des deux sexes agglutinés là cessèrent leurs bavardages animés pour le toiser méchamment. Martin leur pointa sous le nez son Remington pour les calmer. Il n’avait aucune envie d’en buter un, même s‘il comprenait à présent que ces débris ne prenaient pas vacances en cet endroit uniquement pour se reposer. Tous venaient vaincre ici, on peut l’imaginer d’ignoble façon, l’ennui désolant d’être vieux. Sans doute conscients de leur fragilité, ou impressionnés par le 11 mm, les anciens aux silhouettes grêles ne mouftèrent pas et le laissèrent passer devant eux sans réagir. Comme il se déplaçait à reculons en les tenant toujours en respect, Martin allait s’engager dans l’escalier en lui tournant le dos, lorsqu’il sentit la pression d’un canon sur sa nuque. Une sueur froide l’inonda et le privé s’attendit à périr sur le champ, mais une voix connue et intransigeante lui livra malgré tout quelque espoir d‘imaginer le contraire. C’était celle de cet enculé de Strazdinovsky.

 

– Laissez tomber, Smith, nous avons capturé votre amie. Pour le moment, elle est saine et sauve, faites en sorte que ça dure. Une femme finalement très vulnérable, même si Jordi Longarçon lui doit une balle dans la jambe. Au moindre geste inconsidéré, même infime, je vous abat.

 

Cruel dilemme. Bluff ou pas bluff ? Pistolet réel ou simple tuyau de fer ? Mais venant vers lui en bousculant les zombies retraités, s’avancèrent avec des Glock 17 de 9 mm à la main, Edouard La Hache, La Teigne, Prince Ahmed et Triple Shot Oldson. Ce dernier en particulier exprimait dans le pli de sa bouche haineuse toute la rage d’avoir perdu en bas son petit frère chéri.

 

https://zupimages.net/up/18/04/jrzi.jpg


Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 08:55:46
n°46292748
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 03-07-2016 à 12:18:37  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 09.

 

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Dans les grottes de Bozob où régnait la plupart du temps une humidité excessive, rien n’allait plus. En effet, le fils d’Helga Tetipayday, le fameux Aygot Zeblouse, dit Jacky Kenedi, dit le vaillant hardi, avait pris ses quatorze ans en seulement dix jours, petits poils au menton compris. Comme tous ceux de son âge, il passait désormais ses journées dans sa chambre puante à briquer sa vigoureuse saucisse. Seule sa mère pouvait encore l’approcher au plus près, pour lui jeter à la volée des poulets crus afin de le nourrir, ranger ses placards et faire son lit. Agressif et hâbleur, le petit Onkulé attaquait chats et chiens, fumait le pot et bastonnait tout le monde alentour, car il se disait plutôt fier d’avoir été élu par ses ancêtres le roi des cannibales. Aygot pressait chaque jour sa mère pour qu’elle s’en retourne avec lui sur le Mont Velu, afin qu’elle puisse s’asseoir à nouveau sur le siège de son trône légitime, à Lisneylandem. Personne ne savait comment il connaissait d’instinct ces noms et son histoire, car Helga restait pour lui muette à ce sujet. Et pourtant, il savait d’où il venait, et comment et de qui il était né, car il était issu du rituel de la flemme sacrée. Il effrayait les Bozobis en parlant sa langue inconnue et démontrait constamment par son appétit de bidoche une trouble origine. Plus d’un Troglobite voulaient lui faire la peau, mais une superstition tenace semblait encore efficacement le protéger. Quand au roi Karbone XIV, il se préoccupait d’autre manière, ne pouvant toujours pas digérer le fait que sa fille se soit enfuie avec un roturier, qui plus est soit-disant le fils de son ennemi Raklur de Bidet. Provoquant dans sa grotte un foutoir gigantesque, le père d’Agrippepine avait bien vilainement arraché les rideaux de velours de ses fenêtres et chié sans retenue dans les bassines de cuivre poli de sa cuisine, pour passer sa colère. Son épouse Naphtaline Dumuzdorsay usait beaucoup d’eau chaude pour lui donner quelques longs bains afin de le calmer. La seule bonne nouvelle résidait dans le fait qu’Hivalanoué se remettait complètement de ses blessures. Sans ses compagnons de la gnôle, il se sentait en revanche comme poussin égaré. L’ours avait laissé sur son bide de belles cicatrices parfaitement recousues, mais le chevalier était à présent en parfaite santé ; voilà pourquoi il prenait décision de descendre à son tour au plus vite dans la vallée de Bogland. Il avait hâte de retrouver Mirlen et la compagnie, ainsi que les guerriers de Brakmar à la braguette velue, tous partis en vadrouille pour ramener la dauphine ; car celle-ci se trouvait à fuir du côté des bois de Tamerlaput. Bonne épée au côté et bouclier dans le dos, Hivalanoué alla donc trouver Helga pour lui donner salut. Il la trouva les yeux pochés, triste et mélancolique, allongée sur ses draps de soie blanche sous sa couette brodée de beaux lamas. Elle avait le front tiède et les joues toutes humides d’avoir beaucoup pleuré.

 

– Ah messire chevalier, chaque jour, nous tous les gens normaux perdons un jour, mais mon fillot à lui tout seul, il en avale largement un mois. Et pourtant, aux dires des médecins Bozobis, je n’avois point diabète, grosse tension ou col par trop ouvert. Toujours est-il qu’à peine né, icelui de mon doux fils fête déjà quinze années !

 

– Latorzequem, fit le sale gosse irréductible qui jouait seul dans son coin à se gratter les coilles.

 

– Si fait, dame Helga, l’accouchement ne sera jamais l’essentiel dans le rôle d‘une mère, mais point n’avez-voulu l’occire d’un méchant coup d’abloc quand il était grand temps, comme tous l‘avaient si bien conseillé.

 

– Va liéchem dans ta laissequème, monarque ! De rage, Aygot lui balança son nounours, complètement pelé et sauvagement dépecé.

 

– Allons, allons, jeune Jacky, cessez-donc de farfouiller gonades quand vous parlez devant maman. Et cessez par le même d’employer sans arrêt votre patois de mangeur d’homme. On me dit que vous n’êtes bon qu’à réveiller vos chers voisins. Vous méritez pour sûr bonne buffe à la joue, car vous avez le nez crotté !

 

– Va te lairefem loirvé, langratte lonquesse, tu n'es pas mon lèrepé.

 

– Ainsi, chevalier Hivalanoué, reprit Helga sans plus faire attention aux invectives de son garçon, vous formez donc projet de nous quitter sur l‘heure ?

 

– Juste une escale sur le chemin de la fleur de Pinette, car je dois retrouver nos amis. Ensuite, nous reprendrons notre quête sacrée, car Bozob ne se montre rien d’autre qu’une simple étape appréciée de promeneurs curieux. Je vous rappelle qu’une guerre y menace, et qu’elle n’est pas la notre.

 

C’est ainsi que laissant Helga aux prises avec son mioche magique issu de cannibale, Hivalanoué arpenta les placettes pavées sous les hauts murs, afin de grimper dans une benne en osier pour rejoindre la vallée. La vue plongeante était époustouflante. Les gardes chargés de la manœuvre firent crier les sifflets pour obliger les lamas à le faire descendre, et même le roi et la reine avaient tenu à lui faire leur adieu, agitant leur mouchoir pour louer son courage et sa résolution.

 

– Ramène ma fille et son chum de moron, fit Karbone, ça presse en maudit, Hivalanoué, avant que cte gang de caves de la bande à Raklur y mette sa criss de sale pogne dessus eux-autres. Est y est un peu nounoune, Agrippepine, mais tabernak de Kramouille, j’ai pas d’autre fille à marier, moué !

 

Faisant craquer l’échafaudage en bambou, une nuée de lamas marchant à reculons se rua au boulot pour faire descendre le chevalier. En dix secondes et quinze étages plus bas, il toucha le sol par estimation. Puis, sans aucune assistance, il s’élança au pas de course en direction du lac de Blanche perte. De temps à autre, il ripaillait d’un maigre bol de nouilles, puis repartait vaillamment, allongeant grand les jambes pour voyager malin. Nullement impressionné par la blancheur du lac, il plongea dedans et le traversa à la nage, en fort bon rythme et bon sillage. Au bout de 15 minutes, il toucha la terre ferme sur l’autre rive, pour reprendre aussitôt sa course au milieu des chênes de Tamerlaput, dont le vert des feuilles filtrait les rayons du soleil. C’est ainsi qu’au beau milieu de la nature aussi démesurée que généreuse, alternant course et marche, il retrouva sans anicroche ses bons amis, qu’il considérait à présent comme étant pratiquement de sa famille. Mais c’est d’abord sur Atéred le poivré, posé en guette et fort bien mousqueté dans les règles de l‘acrobranche, qu’il tomba :

 

– Hey toé le colon, face de pet de vagabond, crosseur de con, un pas de plus et je te fais un trou de cul dans le front. Je veux toute savouère ce que tu viens faire icit dans le Bogland. Il gardait son bras d’arc à hauteur de sa cible, main de corde et coude bien alignés.

 

– Calmez vous, ami, c’est moi Hivalanoué, copain intime du mage Mirlen de La Pérouse et de la communauté de la gnôle.

 

– Ok boy, ‘s’cuse moué, je te reconnais. Disons qu’on est ben joyeux de te voir icit, tout ben vite cancellé au rendez-vous. Viens t’en manger la caille avec nous-autres, c’est ct’e criss d’Ursuline grande ciguë qu’a préparé le mangé.

 

Les retrouvailles d’Hivalanoué entre Mirlen le tchatteur, Erald de Bavevieux, Belbit le Huelabit et William de Bochibre, seigneur de Balaizebaloches, les transportèrent de bonheur. En recevant des nouvelles de Bozob, ils furent cependant alarmés de ce que leur raconta Hivalanoué au sujet de Jacky-Aygot, car le vilain fils d’ogre avait beaucoup grandi. Son récit fourmillait en effet d’anecdotes inquiétantes concernant le rejeton d’Helga. Et puis, comme il y avait un temps pour tout,  on oublia la mauvaise heure pour ripailler, en louant les talents d’Ursuline et d’Isolde au bas blanc, car elles œuvraient toutes d’eux conjointement au barbecue. Un vrai repas de fête improvisé, lequel, comme l’aurait dit un Bozobi, sentait vraiment très bon en fameux maudit.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 08:57:59
n°46328203
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Posté le 06-07-2016 à 16:19:01  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La Jet larguée - Extrait numéro 05.

 

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La visibilité horizontale dominante VVVV permettait d’observer un troupeau de vaches sur la gauche, dans un champ proche de l’aéroport, et la direction du vent DDD et sa vitesse FF s’observait aisément à la course lente des papiers gras voletant devant l‘appareil. Ouf, pour le moment, pas de quoi faire s’envoler de manière impromptue une casquette de pilote. L’éternelle routine faisait toujours regretter au commandant Steven Eight l’absence d’une certaine part d’improvisation dans son travail, en laissant quelquefois survenir dans ses manœuvres une petite intervention du hasard. Vic revint chercher les gobelets vidés.

 

– Alors mes pilotes, aujourd’hui pas un qui me pelote ?

 

– Pas le temps pour ça trésor, on va décoller vois-tu, fit Jack-André en effectuant un contrôle rapide de l‘APU.

 

– T’es pas drôle, Tintin. Elle s’éclipsa en lui faisant une moue délicieuse.

 

– Hé Steve, je crois qu’on embarque un peu trop de carburant.

 

– Bof, faudra juste veiller à pas prendre feu trop vite.

 

– Tu es lourd, vraiment.

 

Jack-André Tyler appelait souvent indifféremment toutes les hôtesses « trésor » et elles avaient en revanche l’habitude de le surnommer Tintin, à cause de l’irréductible houppette brune qui surmontait son crâne prématurément dégarni. Une fois posé son casque sur la tête, cette petite mèche rebelle lui donnait un air impayable et vaguement enfantin. Il se tourna vers Steven, tout en vérifiant l’heure à sa montre, juste pour le plaisir de mater encore une fois le cadran, parce que cette beauté suisse qu’il portait au poignet lui avait coûté un bras, enfin, façon de parler.

 

– Elle est sympa Victoria, hein ?

 

– Affirmatif, mais même avec son décolleté impressionnant, son coefficient de trainée sera toujours très inférieur à celui de Summer. Bon, FN/PJ 612 - PK, on est parés à décoller, Charlie deux unité.

 

– C’est ça, C21, barrez-vous les glandeurs. Confirmez, et en ligne droite, si c’est possible.

 

– Check. Tommy Boomerang, hein ? je reconnais ta voix. Il avait une fois vendu en douce un de ses uniformes usé à l’aiguilleur, pour qu’il aille s’éclater dans une fête déguisée. La compagnie interdisait naturellement ce genre de transaction, mais Tommy, c’était pas le genre à faire chier le monde et la Petro Jelly n’avait jamais rien su. Et puis, comme convenu entre les deux hommes, c’était juste pour une seule soirée.

 

– Ouais, bon voyage Steven. Et c’est pas à moi de te dire que personne n’est obligé de décoller, mais qu’on est par contre toujours contraint d’atterrir !

 

La piste glissa à vive allure sous l’appareil, qui augmenta sa vitesse avant de pointer son gros museau blanc vers les nuages. Sur le LGD GEAR, le témoin UNLK s’éteignit comme prévu. Les deux pilotes restaient muets, absorbés par leurs indicateurs et la majesté de leur nouvel environnement, au milieu duquel ils moulinaient des bras en s’attachant à s’élever rapidement. Le temps était très clair et la vue se présentait plus imprenable que Summer. Pendant la montée, assise sagement sur son siège des premières, Pamela en fermant les yeux s’imaginait sur la pointe d’une puissante fusée en partance vers Mars et rêvait en secret de se prendre 3G dans la gueule, elle se faisait à chaque envol son petit compte à rebours personnel. Elle jeta tout de même un rapide coup d’œil sur le sac où sommeillait Perlin. Elle s’interrogea une fois de plus sur le fait notoire que les astronautes n’embarquaient jamais avec eux leur animal de compagnie. Les hommes et les femmes de l’espace devaient tellement souffrir d’un tel manque affectif, elle n‘aurait sans pas supporté une aussi longue absence de son chihuahua. Perlin démontra justement qu’il ne dormait plus et couina plusieurs fois. Comme l’avion se redressait et atteignait une altitude correcte, elle se détacha pour le libérer. Le petit chien en s’ébrouant dans l’allée s’attira aussitôt les compliments enjoués des actrices porno Brigitte Dubuisson, Loana Inpool et Laetitia Doujouet, lesquelles accompagnaient leur producteur Brandon Poutrelle. En dépit de leur profession sulfureuse, les filles affichaient les mises anodines et tout à fait correctes de madame tout le monde. Loana montrait juste qu’elle avait beaucoup plus de matière dans les seins que le bon dieu ne lui en avait donné à la naissance, et Laetitia avait sans doute effectué son premier lifting à quinze ans. Poutrelle en revanche ne pouvait nier son job, avec sa gueule de mafieux trop sérieux et son costard en satin, tout en lui démontrait l’apparence d’un VRP cynique et douteux attaché sans scrupule à la promotion d’une certaine culture de la baise. Pas loin d’eux, stoïque derrière ses lunettes noires, Moktar Bouif restait droit comme une règle sur son siège. Pamela ne pouvait s’en rendre compte, mais l’agent du Boukistan jetait en revanche un regard venimeux sur les déambulations innocentes de Perlin. Qui n’aime pas les chiens n’aime pas les gens, aurait certainement conclu Pam. Après les annonces d’usage sur la sécurité, récitées en souriant par Steward et Lorraine, le député Dominique Quenique et sa call-girl Rachida Ix réclamèrent une boisson que Wanda s’empressa de servir. Une alarme hurlante sembla se déclencher dans le cerveau de l’homme politique vieillissant, lorsqu’il vit arriver la blonde aux formes idéales. Il resta bouche bée devant l’image sublime de l’hôtesse à l’esthétique unique, et son attitude fort peu discrète amusa un temps sa pute de luxe en robe classieuse, avant qu‘elle ne s‘abandonne à la lecture de son livre. Au moins, comme le dit Lola plus tard au son du cliquètement des ceintures des passagers qui se désanglaient peu à peu, l’Etat veillait constamment à satisfaire tous ses besoins, et en particulier ceux de ses représentants. Les hôtesses se lamentèrent pourtant conjointement sur leurs impôts. Elles aimaient leur métier, néanmoins, et le prélèvement administratif sur leur salaire n’offrait pas pour autant une raison suffisante pour aller se faire éleveuse de chèvres en Ardèche.

 

En bas, Shirley délivrait les magnums de rosé aux ouvriers charcutiers de la Kelien, entreprise Bretonne rendue mondialement célèbre pour son fameux pâté de porc Strakouilh. « Du Strakouilh sur du pain, tout le monde se sent bien, Strakouilh, le pâté qui vous donne bonne bouille. » Visiblement, les syndicalistes en goguette se lançaient dans un programme ambitieux, tout en pinaillant sur le goût du fruit qui se laissait désirer. En revenant de s’occuper en particulier de son haltérophile vénézuélien Bastardo Comoquiendice, Summer lança à Kim que d’après Kurt, on allait rencontrer des cumulocunnilingus, ce qui enchanta au passage Kinni et Lorraine. Depuis le décollage, Kinni avait déjà sifflé en catimini plus de verres de bière qu’une chef pâtissière Berlinoise, ce qui ne l‘empêchait pas de vérifier scrupuleusement le nombre des gratins de poisson à la sauce de laitance d’ablette, cuisson rapide vapeur, pour les prochains repas. Kim était comme toujours impressionnante, après avoir parcouru la liste des passagers et leur emplacement, elle pouvait réciter par cœur le nom de chacun en passant entre les sièges. Ainsi de la 30 C occupée par Brandon Courage, le petit garçon en famille buissonnière qui voyageait tout seul, et pour lequel toutes redoublaient tour à tour d‘attentions. Rangs 23 à 27 munis d’accoudoirs relevables, s’étalaient le chorégraphe Georges Pinson et ses Pinsonnettes, en route pour l’une de leur prestation exceptionnelle à l’affiche au Grand Théâtre Moderne de Kilapile. Et puis Steward attrapa le bras de Shirley pour lui faire franchir le rideau de couleur criarde et la conduire en face du pax étonné. Il lui chuchota dans l’oreille qu’il avait plus qu’envie de lui caresser le nombril de l’intérieur, mais pour les autres, il s’empara du mégaphone avant de lâcher sa déclaration.

 

– Mesdames et messieurs, nous les navigants vivons sur un style nomade, mais aucune distance ne pourra jamais séparer deux cœurs fidèles. Je profite donc de l’occasion de ce voyage qui nous réunit aujourd’hui pour faire devant vous ma proposition officielle de demande en mariage avec ma charmante collègue Shirley Cebiène, ici présente.

 

Un tonnerre d’applaudissements joyeux éclata dans l’appareil, alors que Steward se fendait en souriant d’une rose qu’il avait soigneusement planqué à la vue de son amie, avant de lui offrir cette fleur unique à genoux. Puis il montra longuement à tous la petite boîte d’un grand Joailler parisien contenant l’alliance en or qu’il comptait lui donner, ce qui redoubla la joie des passagers et leurs encouragements. Les jambes de Shirley tremblèrent sous le coup des aveux du steward et de cette incroyable lubie. Ah l’enculé de salaud, pensa l’hôtesse outrée, là, comme ça, devant tout le monde !
 

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 08:59:23
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Posté le 10-07-2016 à 11:29:55  profilanswer
 

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Aujourd'hui : L'Epilée du Nil - Extrait numéro 59.

 

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Avant qu’il ne parte pour sa mission vengeresse, Vequetum Fourlanus grimpa à bord du Pamalrâssé pour y être présenté à la pharaonne. L’idée d’employer un romain afin de mener à bien sa petite combine assassine n’enchantait guère Néefièretarée, mais elle faisait entièrement confiance au général Merdenkorinnanâr sur sa capacité à gérer ses ressources humaines. Près de la rive, la grande silhouette du palais coloré bâti en surplomb du port d’Ipetasonthoûr s’éloignait peu à peu. Une longue queue de nouveaux riches encombrait déjà les immenses marches, puisque les stucs et les dorures de l’ex chambre à coucher de la reine pouvait dorénavant se visiter en semaine. Sans parler de la somptueuse galerie d’art antique occupant le rez de chaussée. Sous le soleil caniculaire, le charme principal de l’oasis résidait pourtant plutôt dans ses modestes maisons de pêcheurs égayant les plages, et devant lesquels on pouvait déguster des sardines carbonisées. En face des nombreuses échoppes en faillite jalonnant les ruelles ordonnées, on fêtait l’événement du départ de la reine en foulant le raisin au pied, afin de pouvoir dignement se torcher le nez avec du pinard à 13°, par au moins 50°C. Tranquille et sinueux, le Nil se faufilait entre les dunes d’or parsemées de monuments de pierre construits à la gloire des dieux. Devant l’étranger solide qui lui faisait face en saie minimaliste et armure argentée, Néefièretarée s’efforça de faire bonne figure, mais en sondant cette âme perdue, elle devina chez lui une certaine expérience du meurtre et de la torture. Une habitude évidente du romain de croiser le destin des ennemis blessés de guerre en les transformant sans attendre, d’un coup de son glaive, en morts au combat. Un tueur né, ce qui expliquait parfaitement le coup de cœur du général. Elle savait ce dernier toujours soucieux de favoriser la prise d’initiative personnelle et la créativité chez ses salariés. Oui, de prime abord, la reine se trouvait quelque peu intimidée devant Fourlanus, et ce sentiment craintif constituait somme toute un très bon début. Derrière lui, se tenaient silencieux les quatorze Shardanes aux longues épées chargés de l‘accompagner.

 

– Bon, Veuquetum, on ne va pas trainer, parce que nous on rame vers l’aval et toi tu dois te diriger en amont. Je te souhaite bonne route, à toi et tes Shardanes, avec également un bon courage pour me débarrasser de mon mari, sa sœur et leur môme. Je veux retrouver en revenant dans le nord un palais Thébain absolument clean, sans couple ni enfant.

 

– Aucun problème de ce côté là. La dure expression de son visage mal rasé témoignait pour lui de sa propre résolution.

 

– Naturellement, la question des suppléments apportés au voyage est superflue, je ne négocie jamais avec mes prestataires, mais vous ne serez pas dans la gêne.  Et je ne veux pas non plus entendre parler d’un retard de mission résultant d’un problème technique ou météorologique.

 

– Glorieux sourire d’Amon, ô divine pharaonne, tout ce que je demande personnellement en échange, c’est d’avoir suffisamment de monnaie pour investir plus tard dans l’importation de liège berbère, mais toi, tu vas pouvoir sans crainte reprendre tranquillement ta séance de bronzette. On s’occupe de tout, pour préserver entre tes jambes graciles le dur bâton du commandement. Comme tu vois, j’emmène avec moi des collègues sérieux et résolus et les augures que j‘ai consulté par correspondance sont très favorables. Par Jupiter, je serais rapidement sur place pour régler ton problème. Que Schrèptètnuptèt et Ramassidkouch profitent bien sur leur terrasse de leurs soirées avant mon arrivée, car ce seront les dernières qu’ils vont vivre.

 

– Sans oublier le petit Moisi, ne le sauve pas des autres. Et même surtout lui. Bon, dis-donc, toi, le fils de la louve, tu préfères quoi en récompense décorative pour tes mérites, une médaille ou des galons ?

 

– Une médaille, je sais pas coudre. En ce qui concerne le mioche, bien entendu, on va le renvoyer pioncer pour toujours chez ce bon vieux Khnoum.

 

– Te moques pas de nos dieux, romain ! Avec un geste un tantinet méprisant, elle lui balança pour ses frais un gros sac d’argent.

 

Prenant congé sans relever la remarque sur son inconduite, Fourlanus plaça la bourse dans sa ceinture, puis il révéla toute sa culture de Romain en faisant claquer sèchement les talons de ses bottes sur les planches du pont. Les Shardanes aux casques cornus se contentèrent quand à eux de lever haut le bras droit devant elle. Ils se quittèrent au son des doux bruits de la nature, des battements de rames réguliers, des coassements des grenouilles et des cris des ibis régulièrement dévorés par les crocodiles. Un gigantesque panneau publicitaire installé sur la berge annonçait en hiéroglyphes tapageurs la création prochaine d’un golf pharaonique près de l‘oasis, au grand dam du capitaine amiral Sésoscristop, anti-pub et toujours prompt à dévoiler son âme écologiste. Mais il n’avait rien contre une augmentation substantielle des pourboires du petit personnel de bord, dont il faisait évidemment partie. Derrière la nef royale, mats soutenus bien droits par les cordages tendus, les autres navires s’enfonçaient lourdement dans le Nil, sous le poids des chars, des chevaux et des cavaliers dont ils étaient chargés. Il n’était toutefois plus question de pause balnéaire prolongée, et l’escadre filait à toute voile vers son but ultime, le fameux chantier interrompu du tombeau de Néefièretarée dans la ville de Larnak, dont on était encore très loin. Il leur faudrait auparavant faire escale dans l’opulente cité d’Halopolis. Avant que le commando ne s‘en aille, la reine demanda encore à Fourlanus de régler à sa manière un petit conflit qui opposait un skipper à une équipière, sur une question de partage du linge de toilette compris dans les cabines. Le mercenaire rendit une justice équitable en faisant bientôt couler par dix mètres de fond les deux dépouilles derrière le bateau, lestées de grosses pierres. Avant de les plonger entre roseaux et papyrus, il les avait occis lui-même de grands coups de gaffe dans l’estomac et de pare-battage sur la nuque. Il fournissait ainsi l’occasion à la reine de constater la pleine véracité de sa première impression sur le romain plein de morgue, puisqu’il affichait une totale et froide absence de scrupule dans le meurtre. Avec un type aussi dénué de pitié ou d’empathie, ses affaires allaient rondement tourner comme une meule de moulin. La reine d’Egypte avait l’assurance qu’il ne faiblirait pas au moment de sacrifier le gosse de sa belle-sœur. Descendue en cabine, Néefièretarée délaissa les soucis de la gouvernance pour aller frotter sa chatte bien nourrie qui sommeillait en ronronnant sur l’oreiller posé sur le lit. Dans la lumière des lampes à l’huile de ricin, une autre forme couchée sous un drap révéla seulement les anneaux de chevilles de son amie Trêmouatoli qui se reposait, après avoir pressé de nombreuses noix avant le départ. La reine alla remplir de bière un bol de banquet en obsidienne pour s’abreuver, tout en jetant un œil au trou percé dans la coque pour servir de hublot.

 

Prenant victoire sur le ciel jusqu’à présent radieux, Seth, le ténébreux seigneur des orages, lâcha sur le désert une vague de lourds nuages dans l’air étouffant. Après quelques menaçants roulements de tambour, le tonnerre craqua brutalement au loin, sans pour autant libérer la pluie. En sueur, la patronne de l’Egypte se débarrassa de sa robe fourreau pour se dénuder complètement et s’allonger à son tour, ce qui eut pour effet de faire miauler sa petite chatte. En la touchant doucement, elle eut soudain la révélation d’un terrible vision, car si elle envoyait une poignée d’assassins nettoyer le trône Thèbain, nul doute que des tueurs aux ordres de Ramassidkouch devaient en ce moment-même faire le chemin inverse pour chercher à la rejoindre et lui faire la peau. Elle crispa ses doigts sur la douce fourrure de son animal, lequel surpris d’être aussi cruellement pincé la mordit jusqu’au sang en criant avec force. Néefièretarée appela aussitôt un prêtre pour qu’il vienne lécher la plaie avec sa bouche afin de la nettoyer. Dans son pays en partie ruiné, qui ruisselait chaque jour un peu moins de lait et de miel, la pharaonne devait bien reconnaître que la couronne n’était plus totalement sous sa main. Il n’y aurait cependant de part et d’autre plus aucun pardon, mais comme disent les alliés du Mitanni, quand y‘a plus de bois, y‘a plus de feu. Et puis, dans un fracas bref aussi terrible que prévisible, le ciel se déchira pour de bon au-dessus du sol torride, en déversant au passage sur les bateaux en ligne quelques trombes puissantes rapidement évaporées.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:01:34
n°46384273
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Posté le 11-07-2016 à 16:38:55  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 31.

 

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La cloche A12 du dômus présidentiel martien abrite à elle seule une petite jungle verdoyante dans laquelle Nikos Sirkisi et Jolie Goyette se sont installés avec les administrants Steve Magouine et Jack Giriaque pour discuter. Les Bougainvilliers et les Flamboyants qui s’épanouissent dans un air saturé d’humidité offrent un contraste étonnant avec l’aridité de la grande plaine martienne visible derrière la haute verrière convexe. Doucement ventilé, un calme bassin d’eau claire offre également au centre ses chatoiements brillants pour le plaisir de l’œil et de la baignade. Le couple présidentiel s’y glisse d’ailleurs chaque soir avec volupté. Sous le couvert d’un charmant petit kiosque construit en Alucuiv sur la berge, les hôtes et leurs invités prestigieux se sont allongés sur des sustentes invisibles, afin de ne pas déranger le service d’un robot Goliath N.Z, venu leur proposer des canettes de Portoprune. La mort brutale de Jilouc Mélenchouille, cénazteur de Pavonis Mons, est bien évidemment au centre de leurs débats. Magouine a enfin l’air décidé à déballer son sac, après une courte intervention du robot qui tient à leur rappeler ce qu’il faut faire des déchets ménagers de petite taille qui ne peuvent être valorisés. Afin de ne rien perdre de la conversation, Jolie le déconnecte provisoirement, encouragée avec bienveillance par l‘approbation muette de Magouine.

 

– Depuis le début de l’insurrection des indés, défense de fer et attaques de feu de l’armée n’ont pas empêché Yoland et ses troupes de la tenir en échec. La guerre que nous menons contre les mineurs et une bonne partie des natifs mérite d’être repensée. Avec nos seuls financements, le général Diguoule s’épuise à tenter d’organiser ce qui constitue pour lui sa priorité, à savoir une victoire totale, mais pendant ce temps-là, les armateurs perdent énormément d’eullars. Certains sont déjà pratiquement ruinés. Les mineurs de cette planète sont à l’arrêt, nos cargos sont vides et le financement de vos armes ne nous est d’aucun profit, bien au contraire. Comprenez que nos modes de gestion interplanétaire ne sont plus compatibles avec un tel chaos.

 

– La terre et d’autres planètes peuvent encore intervenir pour nous épauler, assène Sirkisi, qui commence cependant à soupçonner où l‘armateur du Granny on pot veut en venir. Il suffit de faire appel à eux.

 

– Ni le terrien Joke Esgala, ni aucun président de Conseil Défédéré de cette galaxie ou d’une autre n’interviendra, nous pouvons l’assurer. Vous êtes isolé.

 

– Que cherchez-vous ?

 

– Une paix durable sur Mars.

 

– Nous la souhaitons tous, mais croyez-moi, les heures les plus chaudes sont encore à venir. Pourquoi avez-vous éliminé Mélenchouille d‘une façon aussi scandaleuse ?

 

– C’était un connard de va-t-en-guerre avec trop de partisans, et qui cherchait obstinément à vous supprimer, nous ne pouvions accepter une telle surenchère dans l’inconnu. Alors que vous…

 

– Vous vous jouez de moi ! En prononçant ces mots, il prend conscience d’un ricanement diffus qui cogne dans son implant.

 

– Nous vous avons fait réélire, c’est vrai, pour vous éviter un exil évident et la mort politique, mais prenez bien conscience qu’à présent, avec Yoland, le temps est venu de négocier pour sortir de l’impasse dans lequel le congrès se trouve plongé. Il nous faut travailler ensemble à reconfigurer ce cauchemar économique, pour le bien commun.

 

– Concernant les déchets odorants…

 

– Bon sang de robot, mais ferme ta gueule ! Messieurs, je vais réfléchir à vos conseils, mais que diriez-vous de continuer à discuter au cours d’une petite partie de lancer de boomerang ?

 

C’est au moment où ils commencent à jouer, Jack Giriaque prenant la main en dépit de son âge, qu’un Shaleclair Thunder Flash X-40 crève le ciel pour déposer le général Digoule sur l’astroport présidentiel aux abords sécurisés, après avoir prévenu Sirkisi de son arrivée. D’abord surpris par la présence des armateurs, le haut gradé délivre d’une manière confidentielle dans l’implant du président sont rapport alarmant, concernant la perte simultanée des quarante Panzigs et du Sharsherman, terrassés par une explosion d‘une puissance époustouflante.

 

– Ces putains de Martiens déconnectés ont outrepassé les lois de la guerre, il faut les vitrifier à notre tour en utilisant une force intergalactique ! Nous savons qu’ils s’enterrent, allons sans attendre les sortir de leurs terriers, avec nous aussi l‘appui d‘un croiseur, s‘il le faut.  Il est temps d’en finir une bonne fois pour toute ! De colère, il tape de toutes ses forces sur le front illuminé du Goliath venu avec diligence lui proposer une boisson. Et je vous rappelle que Flash Gourdin n’est toujours pas neutralisé.

 

–  Vos déchets recyclables ne sont pas destinés à être collectés par les avaloirs bleus, mais convoyés sans délai vers une unité de réusinage, lâche en nasillant le robot, avant de proposer sans rancune à Digoule quelques arachides, ou quelques olives.

 

– Allons général, cessez de vous en prendre à mon employé, intervient Sirkisi. Messieurs les administrants et moi-même pensions plutôt à la rédaction d’un traité.

 

– Vous vous foutez de ma gueule ! Cette guerre n’est plus conventionnelle, il faut en réponse mettre le paquet pour éliminer ce Yoland, faire passer tous ses copains de l’animé à l’inanimé,  même si ça doit mettre momentanément sur la paille le haut du panier.

 

–  Dites-donc, général Diguoule, le reprend Giriaque, avez-vous conscience que c’est de nous que vous êtes en train de parler ? Tenez-vous tellement à vous retrouver affecté aux prévisions météo sur 55458 - Madonna ?

 

– Un traité de quoi, d’ailleurs ?

 

–  Un traité de paix, lui répond Sirkisi, visiblement mal à l‘aise.

 

– Allez vous faire voir, monsieur le président, le croisement des points de vue n’est pas le dénominateur commun de ma mission. Face à la menace, j’exige au contraire de suite, en coordination avec les attachés défédérés de défense orbitaux, une coopération opérationnelle multilatérale interplanétaire. L’utilisation d’un croiseur spatial hors cosmos sur un champ de bataille planétaire constitue une première que nous devons impitoyablement sanctionner. Un consensus mou, ce n’est vraiment pas le moment ! Yoland n’est pas le fauve, et je ne suis pas sa proie. La logistique opérationnelle exige au contraire que …

 

–  Allons mon général, le coupe Jolie avec son plus grand sourire, tout en lui prenant doucement le bras pour l‘entrainer sur le terrain de jeu, quel couleur de boomerang désirez-vous prendre, le bleu, ou le jaune ?

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:02:50
n°46401936
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 13-07-2016 à 10:34:12  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 13.

 

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– On a vu Marie de Nazareth, on a vu Marie !

 

Lui, la seule chose que voit l’abbé Julio, c’est les deux mioches arriver de loin en courant comme des antilopes traquées par un lion, évidemment sans leurs branches participatives. Il est en train de donner des directives précises à Claude Fronçois et Jean-Philippe Smut, afin qu’ils puissent construire au mieux le vaisselier du camp avec des rameaux de saule. Une activité qui exempte temporairement ceux-là de participer comme tout le monde à la mise en place de l’autel. En se prosternant aux pieds de leur aumônier, Gaston et Jean semblent vaincus par la grâce. Lorsqu’ils ont terminé de raconter leur formidable histoire, Julio a la confirmation qu’il devait bien s’attendre à quelque embrouille avec un orphelin né d’un autre et un fils d’alcoolique. Les grâces de Dieu s’achètent plutôt cher. D’un autre côté, bien que le doute soit incompatible avec la foi, il se demande ce qu’ont réellement vu les scouts, et comment il pourrait dignement annoncer lui-même la bonne nouvelle au Pape Paul VI. Une preuve religieuse scientifiquement irréfutable aurait la particularité de pouvoir se répéter en suivant le protocole, la quête de véracité commande donc d’espérer une deuxième apparition, voir une troisième, et si possible en sa présence impartiale. La plus grande prudence s’impose donc naturellement, avant de vouloir construire une basilique dans la carrière de Briepue sur le modèle de la chapelle de Notre-Dame-du Haut, à Rondchamp, bâtie en 1955 par Le Corbusier ; sans parler de quelques boutiques de souvenirs. Dans un moment d’humanité et d’intelligence, l’abbé se fait violence pour ne pas rappeler à Jean que sa sœur est une petite pute sordide, une enfant naufragée fille-mère qui vient si violemment de claquer la porte au divin en mettant au monde un gosse à peine plus jeune qu‘elle. Mon œil que la Vierge se montrerait au frère d’une aussi exécrable et vicieuse trainée. Claude et Jean-Philippe le rappellent tout d’un coup à la réalité, afin qu’il vienne superviser leur savant bricolage, lequel il faut bien le dire tient à peine debout. Il profite donc de cette diversion pour cacher sa perplexité sur le phénomène soi-disant entrevu par ses scouts, jouer le patron intransigeant et obliger les deux autres ordonnateurs de gamelles à tout refaire, sans gaspiller la ficelle. Pendant ce temps-là, toujours en plein bouillonnement mystique, Gaston et Jean forment à genoux un tableau vivant et pathétique, encore sous le choc d’un pur trip sensoriel qu’il charpentent de prières compulsives. Avec poigne, Julio les remet doucement sur leurs pieds.

 

– Les enfants, quand Marie vient, elle fait des miracles. A-t-elle fait un miracle ?

 

– On l’a clairement entendu parler avec l’ange Gabriel. Il l’a appelé la vierge, mais y’avait pas de chœur, de cuivres ou de cordes. En tout cas elle était très belle, ajoute encore Gaston.

 

– Et elle sentait super bon l’eau de Cologne et le foin coupé, ajoute Jean, en se signant une nouvelle fois au nom de la mère, de la fille et de l’intuition.

 

La différence entre un enfant et l’adulte est que, tout en étant homme d’église certifié, on n’avale pas comptant des histoires à dormir debout, surtout si l’on n’a pas l’immédiat besoin d’une propagande royaliste. Alors qu’il se disait que le mieux serait d’opter pour une stratégie d’isolation, en renvoyant les gamins attendre en haut de la carrière une nouvelle apparition, ceci surtout pour éviter en passant qu’ils ne contaminent leurs camarades, Julio se trouve lui-même sous le coup d’une épatante révélation.

 

–  Et où sont vos piquets destinés à l’autel de Jésus ?

 

–  Ben, fait Gaston, on a tout plaqué pour vous avertir.

 

–  Et vous croyez pouvoir utiliser un horrible blasphème pour justifier votre détestable paresse ?

 

L’abbé est pris d’une sainte colère, car il comprend que les gosses sont en train de se jouer de lui, dans le but d‘éviter à bon compte leur corvée. De bien mauvais scouts, des fainéants qu’il va bien évidemment devoir punir. Il est d’autant plus énervé qu’il se voyait déjà lui-même presque canonisé de son vivant. Il lève le bras et leur assène deux paires de baffes à chacun, ce qui fait quatre.

 

– Ah petits cons, bougres de feignasses, on ne lui brisera pas les os, mais ils regarderont celui qu’ils auront transpercé, mes salopards, et si un aveugle prétend conduire un autre aveugle, ils tomberont tout deux dans le même fossé. Espèces de Pharisiens, je vais vous en donner, moi de la Sainte Vierge. Vous irez passer la nuit là-haut, sans boire ni manger, et vous reviendrez demain matin, pour le lever des couleurs. Allez, barrez-vous, et prenez tout de même vos sacs de couchage, ça va cailler dans les hauteurs, une fois le soleil couché.

 

Non, décidément, l’amélioration des âmes ne se fait pas sans peine, et Julio veille bien à ce que Gaston Boudiou et Jean Micheton retournent immédiatement d’où ils sont venus, pour expier dans la crainte et le froid leur veulerie coupable.

 

Gaston Boudiou a t’il été réellement témoin d’une apparition de la Vierge Marie ? Quoi qu’il en soit, à la demande de son troisième éditeur, il aura vingt ans plus tard écrit trois livres très bien vendus pour le confirmer. Faute de la moindre preuve tangible venant corroborer notre analyse de terrain, nous nous sommes donc tournés vers les confidences éclairées de Jean Micheton, lequel est par la grâce de dieu toujours vivant, ceci bien évidemment pour tenter d’apporter ici quelque éclairage nouveau. Le complice de Gaston à l’époque semble nettement infirmer la proposition de son ami, et nous en rendons compte ici, mais un doute persiste néanmoins, puisque nous savons que devenu adulte, Micheton adhèrera très tôt à la CGT, après avoir été embauché comme redresseur de bananes à Rungis. Le retentissement sur l’activité économique de Briepue est cependant certifié, puisque la ville est passée de 569 habitants en 1963 à deux millions de pèlerins aujourd‘hui. En revanche, la construction d’une cathédrale et d’un aéroport sur le site des anciennes carrières ont toujours été énergiquement combattus par les anciens ouvriers carriéristes, en tant que défenseurs du patrimoine industriel local et sa conservation. Farouchement attachés à la promotion de leur projet muséographique, ils ont cependant approuvé la construction en 1965 d’une autoroute à péage par le Conseil Régional, dans le but de remplacer l’étroit chemin tracé peu à peu par les fidèles pour les conduire au site. Nous ne défendons aucune cause, nous sommes seulement attachés à retracer le plus fidèlement possible le parcours exceptionnel de Gaston Boudiou. Nous renverrons donc le lecteur aux ouvrages écrits par notre homme sur ce sujet, afin qu‘il se fasse sa propre idée. Force nous est seulement de constater qu’après cet épisode singulier, mue en cela par une certaine célébrité engendrée par le bienfait de sa révélation de jeunesse, comme il l’a toujours affirmé, notre homme s’est trouvé une disposition miraculeuse pour lire l’avenir de sa clientèle dans les tarots, activité lucrative non-déclarée qu’il a un temps exercé avec profit dans la plupart des bars de Troulbled, entre mars 1978 et juillet 1982.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:03:50
n°46410380
talbazar
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Posté le 14-07-2016 à 08:47:49  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - Extrait numéro 24.

 

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Martin Smith aurait volontiers poinçonné sa viande, au Triple Shot, ce bellâtre à la chevelure soignée qui alignait comme des perles des dents impeccables, mais Gordon Strazdinovsky le chatouillait désagréablement dans le dos. Il songea un instant à Vaya, pensa qu’il était sans doute trop gentleman pour la laisser payer toute seule l’addition, puis il se dit que sans autre issue, il valait mieux capituler et que la meilleur chose à faire serait sans doute temporairement d’abdiquer. Si le patron de l’institut avait désiré le plomber, il l’aurait déjà fait. Le Remington chuta lourdement sur le sol et Prince Ahmed se jeta aussitôt dessus avec un sourire féroce. Comme il se trouvait très près, Martin lui balança tout de même son pied dans la gueule, avant de recevoir par derrière un violent coup de crosse sur le crâne. Plus de doute, Strazdinovsky l’avait réellement mis en joue. Le privé plié en deux à genoux resta un bon moment sonné avant de se relever péniblement. Sa tête douloureuse cognait comme une cloche en folie. Prince Ahmed se vengea et lui balança un gnon dans la figure pour en rajouter. Ouch !

 

– Faut le descendre comme prévu, fit Edouard La Hache, il a flingué Bob, Borz et la ratte.

 

– Changement de programme pourtant, rétorqua Strazdinovsky, puisqu’on a la chance de les avoir tous les deux vivants. Menez-le au labo 3 où se trouve déjà sa copine.

 

C’est La Teigne qui l’empoigna durement pour l’obliger à descendre les marches, sans prendre l‘ascenseur ; les autres suivaient, leur Glock fermement tenu dans les pognes. On passa de l’univers cosy et luxueux des étages à la froideur impersonnelle du sous-sol. Retour à la case départ, en somme. La Hache ouvrit une porte et le poussa brutalement dans un laboratoire aux dimensions modestes. La vision misérable de Vaya ligotée sur une chaise fut malgré-tout pour Martin un véritable soulagement. En l’apercevant, elle prit l’air ahuri d’une biche qui se prend des phares de voiture en plein dans la tronche. Sur une table, Martin entrevit à l’intérieur d’une boîte transparente un cerveau humain baignant dans un liquide bleu, mais il était tout petit ; c’était celle d’un enfant, cette cervelle, comme il le constata avec horreur. Celle d’un singe, peut-être, espéra-t-il néanmoins sans trop y croire. Il n’eut pas le loisir de se questionner davantage, Prince Ahmed le colla brutalement sur un fauteuil et La Teigne attacha solidement le privé à son tour. Lorsque ce fut fait, Martin se prit une seconde baffe en prime avec le poing fermé de Triple Shot, visiblement ravi de pouvoir enfin se défouler. Ouch ! Pâle comme une flaque de lait, Vaya s’agita de sanglots lourds, en donnant l’impression que les larmes sortaient de sa gorge, mais son ami avait trop mal à la mâchoire pour articuler dans l’instant le moindre mot. Par contre, son odorat fonctionnait parfaitement bien, et dans cette pièce brillamment éclairée par les rangées de néons, il régnait un écœurant parfum de charogne. Les quatre cogneurs restaient debout devant leurs prisonniers sans rien dire, en train d’attendre sans doute une directive de Strazdinovsky, mais Martin se rendait bien compte que ces types n’avaient absolument rien d’intellectuels incarnés. Les coups qu’il venait de recevoir n’avaient pas non plus été des épisodes merveilleux. Le patron des Flocons d’argent prépara deux seringues en les remplissant d’un liquide jaunâtre. Puis il les posa sur un meuble mobile en prenant aussitôt l‘air de les oublier.

 

– Jouons cartes sur table, monsieur Smith, vous possédez un petit carnet rempli d’une littérature essentielle. Un ouvrage-clef qui manque terriblement aux travaux d’une certaine personne, pourriez-vous nous indiquer la façon de le récupérer rapidement ?

 

– Je ne vois pas de quoi vous parlez, mais tout prouve ici qu’on n’a pas les mêmes lectures et que vous êtes un sacré tordu.

 

– Allons, voyons, vous avez la chance inouïe d’être encore de ce monde.

 

– Si on me donnait le choix, vous n’y seriez plus !

 

– Naturellement. Nous sommes bien d’accord que vous êtes venu mettre un beau bordel dans mes affaires. Voyez-vous, certains fantasmes légitimes impossibles à obtenir auparavant peuvent désormais devenir réalités, mais pour y parvenir, il semble que cela dérange du monde. C’est pour ça que nos travaux exigent un peu de discrétion. N’avez-vous jamais caressé le rêve de posséder l’éternelle adolescence dans un monde désormais trop vieux pour vous ? Ou de prendre l’apparence de quelqu’un d’autre, de meilleure qualité ? Etes-vous tellement satisfait de ce que le miroir vous renvoie chaque matin, un peu plus cruellement chaque année ?

 

– Je fais confiance au grand architecte et pour l’instant, en ce qui me concerne, il ne se débrouille pas trop mal. Vous avez bien une gueule de grand dépressif, vous, quand je vous vois là, devant moi, entouré de vos crapules mafieuses. Visiblement, ni vous ni vos amis ne profitent des bienfaits des travaux du docteur Van Degaffe.

 

–  Où est le carnet ?

 

–  Je ne l’ai plus.

 

– Cette jeune fille a un corps pour l’instant merveilleux, fit Strazdinovsky, en tournant vers le visage de Vaya une lampe à la blancheur aveuglante. Vous jouez l’enfant un peu trop gâté, Smith, je ne vous demande pas de me chanter une comptine. Je vois que vous êtes blessé au bras, c’est notre petite souris qui vous a fait mal ? Vous avez été dur avec elle, c’est un peu navrant. A tous les coups, ça va s’infecter, malgré nos précautions, elle baignait dans sa merde.

 

–  J’espère que ta mère est morte avant d’en faire d’autres comme toi, sale taré, lâcha Vaya en essayant de se débattre vainement pour tenter d‘échapper à la violente lumière qui lui brûlait les yeux. La Teigne s’approcha en levant la main, mais son chef l’arrêta.

 

– Elle est jolie, dit-il seulement à l‘adresse de Martin, mais pas très polie. Bon, je vais vous laisser un instant à vos retrouvailles. Désolé de ne pas trinquer avec vous, c’est dommage d‘ailleurs, parce que les vignes de cette vallée produisent un excellent vin.

 

–  Où se trouve à l’heure actuelle le docteur Van Degaffe ?

 

–  Vous croyez savoir beaucoup de choses, peut-être, mais en réalité, vous ne savez rien. Quoi qu’il en soit, vous n’êtes pas en position de me poser la moindre question, fit sèchement Strazdinovsky, en essayant dans le même temps de maîtriser une sorte de rire échappé de sa bouche malgré lui.

 

Redevenu sérieux et concentré, il s’empara des seringues pour injecter au couple son sale jus brun dans leurs veines. Terrorisée, Vaya pinça les lèvres pendant l’intrusion de l’aiguille dans sa chair, tout en jetant à son amant un regard déchirant. Alors qu’il partait dans les vaps à l‘instar de sa chérie, la mémoire de Martin était hantée d’images récurrentes et instables où dominait l’ignoble vision de la femme-rat qui se jetait sur lui pour l‘écharper. Et puis, alors qu’il sombrait dans l’inconscience en fermant les yeux, il entendit à des années-lumière le son de la voix chevrotante de Blanche Pearl parvenir dans ses oreilles.

 

–  Le sien, c’est le sien que je veux.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:04:59
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talbazar
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Posté le 15-07-2016 à 20:37:17  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 10.

 

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Les bois touffus commandaient à présent à l’arroi de Raklur de Bidet de faire une halte obligée. Engoncé dans ses fourrures voyantes et sa longue chevelure gominée coiffée d‘un bonnet de feutre, le frère bâtard du roi Karbone ordonna de décrocher les lamas et les bœufs. Six villages composant autant de clans en rébellion contre la capitale l’accompagnaient dans leurs chariots, et le faux roi nomade commanda au chef de l’une de ces tribus de venir dans son quartier général, afin qu’il s’attelle à lui gratter le dos en signe de servitude. Raklur avait donc levé sa propre armée, une force centrifuge redoutable pour lutter contre le pouvoir royal de Bozob. Il avait même retrouvé opportunément un fils pour en faire son successeur et établir chez les Troglobites une dynastie nationale. Sa royauté nouvellement établie devait par conséquent bientôt éclipser l’autre, et il laisserait aux prêtres de Kramouille le soin de trouver un nom à cette lignée moderne. L’incursion de la horde sauvage arrivait à présent à la frontière du royaume Bozobi, et personne ne doutait que cette campagne soit prochainement gagnée. Couché lascivement au sein de sa yourte, Raklur était agité d’un courant de pensées proprement révolutionnaires, puisque une fois au pouvoir il abolirait la propriété privée et tous les biens des familles devraient être mis à sa disposition. Une organisation propre à bouleverser la structure sociale dans les grottes, sous son autorité forcément acceptée de Roi des rois. En attendant le jour béni de sa victoire, il se gavait d’ouvrages sur les techniques de combat et la poliorcétique, tout en s’amusant du spectacle des bouffons et des jongleurs issus de ses formations auxiliaires et vassales. Il s’amusait de même longuement avec la raie des fesses de sa petite esclave appelée Zénobite, puisqu‘il voulait de même incarner pour ses alliés un pur génie romantique. Quand à lui, porte parole de l’aristocratie actuellement sur le trône, le jeune Monoïsurmékos prenait tendrement la main d’Agrippepine au fond de la tente de son père biologique, en essayant de convaincre ce dernier de renoncer à combattre Karbone.

 

– Watch ben papa, a vaut pas le coup de chicaner, on s’en crisse de se battre entre Troglobites, puisque quand j’aurais marié ma douce Agrippepine, cé moué qui sera le prince couronné, de toutes les façons, t’en vois-tsu ?

 

– Maudit fiston, t’es ben coqueloeil, ça t’arrive t’y de réfléchir un peu de même ? ça  me chicote de te le dire, mais ton mariage chambranlant, tu peux le passer dans le beurre. Chuis demi-frère de c’t’ostie de Karbone que je m’en va bientôt le faire saigner des yeux, pour dire. Adonc ta blonde, là, est y est ma nièce, et moué chuis par conséquent son uncle. Toi té mon fillot, et donc Agrippepine est y est ta cousine en vrai. Ton mariage avec elle, c’est tout bonnement absolutly impossible, acré calisse d’épais de consanguin. Comprend tsu ?

 

– Ostie de mouche à marde de tabarnak ! lui répondit le jeune homme, prenant d’un coup conscience de la parenté qui le liait à la jeune fille.

 

Sous le coup de la colère, celle-ci se détendit comme un ressort des profonds coussins qui l’hébergeaient, pour interpeller violemment Raklur :

 

– Acré décâlisse de vieux schnock, t’es vraiment tout mêlé toi, mon criss d’uncle. Faut tsu être sans conscience pour venir dire des choses pareilles ! T’sen vois tu pas qu’on s’aiment, nous dzeux ? A fin d’toute, on se marira, lui et moué.

 

–  Holà cousine ! lui lança Monoïsurmékos, chuis plus de game, a pu question de tsa ! Si tu m’approches encore je te pète la yeule. T’en crois tsu que je serais le père d’un ostie de mongol ? Encore heureux que j’ai pas fourré ta p’tite bizoune en ostie, parce que manquerait plus d‘un maudit niaiseux dans ton tiroir pour s‘enfarger. On l’a échappé belle là-dessus, nous autres !

 

– Ah bon, bande de chieux, pisque c’est comme ça , je vois ben que y’a de l’inside job entre vous deux et que j’ai pas le mot à dire sur ce coup de cochon. Du coup je me fais ben flushé pour une conne, là ; ‘coute moi bien, Monoïsurmékos, je m’en vais me pendre dans forêt , et pis c’est toute !

 

Agrippepine s’échappa alors de la yourte en pleurant, pour courir comme une folle à travers les bois. Elle n’avait en réalité nullement l’intention de se tuer, car elle n’avait dit ça que sous le coup d’une grande colère, mais elle était tout de même proprement ravagée de désespoir. Elle reprenait à corps perdu la direction de la grotte de Bozob, jurant qu’en tant que princesse légitime du royaume Troglobite, elle n’abdiquerait jamais en faveur de son cousin et que promis, elle s’intéresserait davantage aux arts et aux sciences. Il lui fallait péniblement oublier la relation passionnée qu’elle venait de vivre avec le fils de Raklur, ce jeune crétin qui venait de refuser de s’enfermer avec elle dans le cadre rigide du mariage, pour éviter une union consanguine et ses dangers chromosomiques. Elle courait si vite, propulsée si ardemment par le malheur, qu’aucun garde des hommes à Raklur ne parvint à l’arrêter. Pris de court sur son siège d’ivoire, Raklur envoya néanmoins sur ses traces un petit détachement, car en faisant la différence entre choses divines et choses humaines, il se rendait compte qu‘il perdait en la personne de la princesse un otage précieux. Il voyait bien aussi le fardeau porté par son fils, car cet amour déçu avait affreusement tracé sur le front de l’adolescent, sans doute à nouveau anorexique, l’affreux tableau de la misère humaine. Même la douce et avenante Zénobite échoua à le dérider, malgré tout son talent de courtisane et sa sollicitude.

 

Comme elle gravissait une pente dans sa fuite éperdue, les larmes aux yeux et toute pareillement remplie d’une peine inhumaine, Aggripepine fut soudainement aperçue par la bande de Brakemar et surtout par Popol le borgne, qui l‘arrêta en lui faisant méchant croche en patte. Katrakat au fier baston dut retenir son chien féroce avant qu’il ne la bouffe.

 

– Wesh les cousins, doupirates de restant de poignet, cé moué, Agrippepine Dumuzdorsay, princesse de Bozob, a me reconnaissez pas ? bande de fond d’entrepoche !

 

– Wesh, wesh, cousine, ostie de rectum de mouffette, fit Katrakat, on est ben joyeux, mais où qu’il est donc, Monoïsurmékos ?

 

– M’en parlez pas ! J’ai cassé avec mon chum, qu’est y est mon cousin en vrai. C’te maudit péteur de boutons de dessus sa gueule m’a dumpé en maudit.

 

Brakemar ne cacha pas sa joie de voir cette liaison rompue, mais il fronça sévèrement les sourcils, en apprenant que l’ost de Raklur se tenait à deux pas devant eux. Il ordonna de suite à sa troupe de se tenir prête pour batailler leur avant-garde.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:06:07
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Posté le 15-07-2016 à 20:37:17  profilanswer
 

n°46439359
talbazar
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Posté le 17-07-2016 à 12:25:36  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La Jet larguée - Extrait numéro 06.

 

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La triste mise en scène prouva ensuite qu’elle manquait totalement d’humour. Steward posa la précieuse bague dans la main plus que réticente de Shirley, qui en trouva le contact glacé, en toute subjectivité. Loin de glisser l’anneau à son doigt , elle le rendit tout de suite à son collègue, très énervée du zèle dont il venait de faire étalage sans vergogne ni consultation préalable. Plus jamais, à partir de ce moment, elle n’aurait le désir de se blottir contre lui. C’était mort, enfin fini, elle ne voulait plus de cette relation, et ce n‘était pas sur ce vol qu‘il la prendrait encore mine de rien dans les chiottes. Ni ailleurs. Plus jamais. Cette liaison amoureuse s’échouait là, brusquement, à des milliers de pieds au-dessus du plancher des vaches. Une idiote lueur de gaité continuait cependant de briller au fond des naïfs yeux bleus du steward et dans ceux d’un bon nombre de passagers. Debout et blessée, comme une cruche au centre de l’avion, Shirley ne pouvait plus masquer son embarras et repoussa Steward sur un mouvement d’humeur à peine contrôlé. Elle le regarda bien en face pour réduire à néant cette regrettable comédie de mœurs.

 

– Non, jamais de la vie, va te faire foutre Steward !

 

Elle savait qu’elle allait s’attirer les foudres de tous les rêveurs embarqués, mais il ne lui laissait plus le choix. Plusieurs des joyeux ravalèrent leurs exclamations sympathiques, d’autres qui venaient d’exprimer bruyamment leur solidarité avec l’instant de grâce se figèrent brusquement en prenant un air de ne pas vouloir comprendre. Quand la sexualité devient sociétale, on peut s’attendre à se faire abreuver jusqu’à en devenir sourd par les sempiternelles sentences des frustrés toutes catégories. Tous ceux qui la regardaient à présent montrer son doigt bien tendu à Steward semblaient en lutte avec un pitoyable sentiment d’abandon. Il remballa finalement sa rose et sa bague, puis il battit en retraite lamentablement, mais Shirley savait que si sa rupture était pour sa part consommée jusqu‘à la lie, elle n’échapperait pas plus tard à quelques douloureuses mises au point avec le pauvre garçon. Il ne fallait même pas compter sur Summer pour le consoler charnellement en attendant, il y avait déjà belle lurette qu’il avait crapahuté sur la nympho et qu’elle s’était pour toujours lassée de lui. La gourmande n’était pas factrice, elle sonnait rarement aux mêmes portes une fois qu’elles étaient franchies. Parfois, bien que cela soit en réalité très rare, les hôtesses de l’air se montraient peu solidaires entre elles. Et certainement pas ces fameuses Taupatechs, ces petites putes à pilotes et autres taupes à personnel technique, dont Summer incarnait si bien le profil à son corps si peu défendu. Sans compter que pour ce voyage, elle n’avait d’yeux que pour son splendide latino aux pectoraux gonflés. Sans la moindre envie de jouer plus avant les starlettes de haut-vol, Shirley fut heureusement sauvée des quolibets, de la vindicte et de la fureur grandissante des passagers à son égard par une annonce qui fusa dans les hauts parleurs de l’avion.

 

–  Mesdames et messieurs, chers passagers de la Petro Jelly, ici le commandant de bord Steven Eight, la température extérieure est de 25 ° avec une légère bise et bien entendu de ma part un gros bisou dans le cou des plus jolies que je transporte. Le soleil devrait complètement se lever dans une quinzaine de minutes, un peu comme ma bistouquette si l‘hôtesse venue me servir un thé ne quitte pas mon cockpit immédiatement. Sur ce, le copilote Jack-André Tyler et moi-même vous souhaitons un agréable voyage sur ce vol.

 

Usant de gouaille et de bonne humeur, la diversion auditive éclipsa aussitôt l’effroyable malentendu qui venait d’avoir lieu et les nombreux déçus retournèrent à regret vers l’ennui, leurs cocktails fruités à prix doux et leurs longues escapades sans but entre les sièges. Dans ses mules à talons, Loraine vint la prévenir qu’on pouvait désormais démarrer les jeux collectifs, une spécialité exclusive offerte sur chaque long-courrier de la Petro Jelly, qui goûait en revanche très peu le sport cérébral, genre double sens ou mots carrés. Mais la compagnie avait tout de même refusé l’installation d’un bowling dans l‘appareil. Redoutant un peu de tomber sur Steward en allant préparer les accessoires, Shirley croisa Lola descendue du paradis des premières, elle semblait un peu contrariée.

 

– Ah bordel, tu sais, le gynécologue, là, le docteur Akim Zemblablek, 69A bussiness, il n’arrête pas de harceler la femme enceinte, Brigitte Rural, en 82F premium, pour qu’elle lui fasse don du cordon ombilical quand elle accouchera, histoire de recueillir quelques cellules souches pour la banque qu’il dirige. Il dit qu’elle est sa sauveuse et sa dealeuse, qu’il a besoin du sang de son mouflet absolument.  Il est tellement chiant qu’elle n’arrête pas de se lever de son siège pour venir se plaindre à nous. Déjà qu’elle a plutôt du mal à se trainer !

 

Shirley se consacrait exclusivement aux secondes éco. Pour bien remettre les choses au point, elle resta pieds joints devant sa collègue aux joues rieuses et délicatement fardées. Elle garda ainsi stoïquement ses mains croisées et le regard ironiquement compatissant pour dévoiler sans ambigüité qu’elle ne comptait pas s’investir une seule seconde dans cet amusant conflit. Elle n’exprimait rien d’autre qu’un point de vue personnel, en faisant bien gaffe que Lola ne confonde pas sa froideur apparente avec une attitude provoquée par un soupçon de timidité. Un peu contrariée, Lola retourna sans insister vers l’étage supérieur s‘occuper une fois de plus des soucis de la future maman, en tâchant de clouer son bec à l‘importun. Victoria s’engouffra à son tour dans le galley, et sans doute crevait-elle d‘envie d‘apporter quelques commentaires sur la vie de couple en cendre de Shirley, après le désastreux show unilatéral de Steward, mais elle fut préventivement réduite au silence là-dessus. Le malheureux Roméo plaqué par sa Juliette restait pour l’instant quand à lui heureusement invisible. Ensemble, les deux femmes s’attachèrent à dégager d’un coffre le nécessaire aux jeux désopilants qui devaient occuper tout le monde pour un bon moment. Kinni s’approcha aussi, quelques seaux de pop-corn vides à la main. D’une façon rassurante, la chef de cabine parvenait à marcher droit, mais elle fleurait fortement le rhum Jamaïcain sur une distance considérable.

 

– Bon, les filles, on va arrêter d’abreuver au rosé les charcutiers de la Kelien, avec qui j‘en ai marre de croiser le fer, avant qu’ils ne nous pourrissent odieusement la vie. Ils sont déjà totalement bourrés et mon petit cul n‘est pas leur manucure, comme je me tue à leur répéter. Ils le martèlent à chaque passage comme un comptoir de bar.

 

Réprimant un sourire pincé, Vic échangea avec Shirley un regard qui en disait long sur ce qu’elles pensaient sur la sobriété de l’abreuvoir humain avec qui elles devaient travailler. Elles laissèrent néanmoins la femme de footballeur imbibée s’emparer du micro et prendre une voix délicieusement sucrée :

 

– Mesdames et messieurs, votre attention, s’il vous-plait ! Nous allons procéder aux activités récréatives et passer devant chacun d’entre vous pour lui délivrer un petit avion en papier aux couleurs de la Petro Jelly. Au top, on lance devant soi et le pliage qui tiendra le plus longtemps en l’air gagnera la manche, amusez-vous bien. Nous vous rappelons qu’à l’issue de tous nos challenges rigolos, notre grand gagnant gagnera un parachute en premier prix, alors donnez-vous à fond, c’est gratuit. Et maintenant, jouons !

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:08:16
n°46456898
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 19-07-2016 à 09:40:04  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : L'Epilée du Nil - Extrait numéro 60.

 

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Après trois jours, Veuquetum Fourlanus aurait facilement donné sa cuirasse pour mettre un peu de garum dans ses tétines de truie, mais avec ces foutus égyptiens, il fallait se contenter le plus souvent d’ibis braisé à l‘oignon, sans la moindre sauce. Les Shardanes s’en foutaient, ils préféraient les poissons du Nil crus, qu’ils pêchaient à la ligne en glandant sur le pont du petit bateau aux planches cousues, censé les conduire vers Thèbes. L’embarcation à l’unique voile rectangulaire non décorée filait droit, portée par un vent modéré mais suffisant. Quand ce dernier tombait, on se contentait d’une grosse godille pour avancer. Assis en poupe le pagne relevé, Vequetum laissait trainer ses jambes dans l’eau pour se rafraîchir. Quand cette dernière affaire serait conclue, il prendrait une retraite anticipée, pour retourner en Italie se faire construire une belle villa comportant un atrium de ouf et un triclinium de malade. Des mosaïques partout au sol, des posters de chars de course et de superbes fresques avec des gauloises à poil. Avec un peu de bol, il épouserait une fille de consul pour qu‘elle tienne en sa compagnie une petite boutique de souvenirs égyptiens importés grâce à ses anciennes relations ; un petit commerce certainement florissant de 80m² et naturellement incorporé à la baraque. Il s’imaginait déjà sans peine en train de lutiner son épouse toute la nuit dans le cubiculum tapissé en rose, sur une belle couche en pierre taillée. En rusant, il parviendrait peut-être à frauder l’impôt sur le sel et à planquer sa monnaie chez les helvètes. Le genre de plan à mourir peinard à un âge avancé et dans son lit. Lorsque l’un des Shardanes reçut sans prévenir une flèche dans le ventre, le romain dut admettre que cette fin de destin n‘était pas gagnée. Les rêves de grandeur sont souvent contrariés par la réalité, et Veuquetum savait bien qu’en fait, les filles de consul se tapaient toujours en douce des enfoirés de gladiateurs au mépris de leur mari. Un autre soldat bascula par dessus bord. Puis un troisième. Les flèches était tellement tordues que le Romain sut de suite qu’elle avait été fabriquées par des Philistins, des types qui baclaient tout ce qu‘ils faisaient. Effectivement, ils se voyaient attaqués traîtreusement par une flotille conséquente de ces pirates, lesquels avaient sournoisement déguisé leurs navires en bateaux de commerce. Les dards acérés volaient en grand nombre autour de lui et Veuquetum ne trouva pas d’autre échappatoire qu’un plongeon salvateur dans le Nil. En quelques instants, tous les Shardanes hérissés de flèches comme des porcs-épics venaient d’être victimes d’une mort subite, sans pouvoir se défendre. Un désastre qui laissait le romain le seul survivant de cette agression rapide. Comment aurait-il pu faire face, devant une centaine de bateaux bourrés de guerriers résolus ? Alors qu’il nageait éperdument pour rejoindre les roseaux de la rive afin de s‘y abriter, le rescapé comprit que leur but était en réalité le convoi royal et le pillage des navires de Néefièretarée. Les Philistins venaient de massacrer toute sa vaillante équipe en un temps record, en les confondant probablement avec une patrouille pharaonique isolée, ce qui gâchait pour eux l’effet de surprise. Buvant la tasse d’une eau boueuse, dans laquelle il était enfoncé jusqu’au cou dans les vagues, masqué fort heureusement par les hautes herbes, Veuquetum comprit qu’il lui fallait rapidement rebrousser chemin par tous les moyens, pour prévenir la reine du danger imminent qui la menaçait.

 

Alors que les bandits brûlaient son bateau et continuaient leur route sans l’avoir vu, le romain attendit un long moment puis, marchant dans le sens du courant, il tomba sur Amétatla qui faisait sa lessive sur la berge, près d‘un temple ruiné. Fière et arrogante, la femme de Tépénib jugea de suite la tenue débraillée et les traits occidentaux de l’inconnu très suspects. Elle appela aussitôt son mari, en menaçant l’intrus avec son battoir à drap.

 

– Holà, femme, pas de panique, je ne suis pas un vulgaire squatteur de tente barbu, mais un soldat romain auxiliaire de notre armée. Je viens de me faire attaquer par des pirates Philistins, je réclame votre assistance.

 

– Il est clair que de nos jours, la pauvreté des troupes n’est plus à prouver. Si encore la mondialisation antique avait un côté rigolo. Sans parler de la pollution du Nil. Mais bon, les pharaons, ça se prend pour des dieux et ça préfère vivre dans le luxe et l’opulence plutôt que de nous protéger. Sans parler de la décadence des mœurs au palais, il paraîtrait que la sœur du roi Ramassidkouch lui sert chaque nuit de douillet trampoline.

 

Tépénib, Valisansoùth et Mer-Amen Tesmich s’étaient enfin approchés, des épées courbes à la main, en compagnie de plusieurs bédouins armés. La plupart des salariés de l’ONS le prenait pour une sorte d’espion artisanal à la solde d’une manufacture d’Hébreux. Veuquetum portait pourtant bel et bien une armure en cuir de soldat, ce qui acheva en grande partie de les rassurer.

 

– Hé les gars, je travaille pour la reine, mes hommes viennent de se faire décimer par des pirates. J’ai besoin d’aide.

 

– Ah merde, fit Tépénib, un réfugié.

 

– Casse toi en Mésopotamie, lança Valisansoùth, ou en Assyrie, nous on vend des tissus, le reste on s’en tamponne.

 

– Toujours aussi peu sympas, les gens du voyage Thébains.

 

– T’as faim ? fit Amétatla, car elle gardait l’esprit pratique, il nous reste un peu d’âne. Je te le réchauffe, si tu veux. Elle ordonna néanmoins aux petites filles nues de la caravane, qui se baignaient tout près, de sortir de l’eau. On ne sait jamais, avec les romains.

 

Dans le campement des négociants, en vue de la pause casse-croûte d’une demi-heure, Aménorée soufflait dans son roseau pour attiser le feu, aux côtés de sa tutrice de stage, la comptable Katikèlsalop. Cette dernière l’avait mauvaise, parce que la jeune fille venait d’être soudainement promue Analyste-responsable en alternance, ce qui lui ouvrait un boulevard vers un futur poste de Chef de projet à l‘ONS. Tout ça parce que la stagiaire était odieusement pistonnée par son père auprès du grand patron, alors que la comptable comptait vingt ans de carrière sans le moindre avancement. Katikèlsalop n’hésitait donc jamais à médire sur Aménorée auprès des stagiaires du département voisin, et l’on ne pouvait nier qu’une certaine rancune animait ces derniers contre Aménorée, pourtant exemplaire dans la gestion de ses papyrus. Tout le monde pris place en tendant sa gamelle, exceptée la comptable qui les quitta pour aller peser de l‘or dans sa tente, avec des poids en forme de tête de taureau. Evidemment, Veuquetum ne pouvait révéler aux autres la nature de sa mission secrète et fut soulagé que les conversations s’orientent sur la critique des fonctionnaires et des prêtres qui dévalisaient honteusement les fouilles urbaines des habitants des grandes villes, comme celles des paysans, d‘ailleurs. Mer-Amen Tesmich était celui qui la ramenait le moins, parce que outre le fait d’avoir été esclave attitré de la belle-sœur de la pharaonne, son propre frère était chef-sculpteur à Thèbes, ce qui en faisait un gars de la classe dirigeante. Peu désireux d’entrer en polémique avec ses associés, tout en suçant l’os de son âne épicé de coriandre et de fenugrec, il désigna du doigt Veuquetum Fourlanus:

 

–  Avec une armée de ploucs Etrusques qui se laisse vaincre aussi facilement, pas étonnant si un jour le royaume est envahi par des envahisseurs venus de Syrie-Palestine.

 

–  Bon, fit le mercenaire, je veux bien rester poli, mais avec ce genre de phrases, tu pourrais bien de retrouver dans pas longtemps avec un coup de glaive dans la gueule de ma part.

 

Et puis, portant une meilleure attention au bras droit du colosse, il remarqua sur celui-ci un tatouage au motif floral particulier, ce qui faisait de ce type un esclave de haut-rang du palais Thébain.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:12:03
n°46482802
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 21-07-2016 à 14:17:30  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 32.

 

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Teuf, teuf, teuf, teuf, teuf, l’interminable feulement continue sa lancinante rengaine au coeur de la jungle lumineuse, aux cimes éclairées par l’astre principal orangé et son doublet d’étoiles verte et mauve, les étonnants triples soleils de 8495SK-Rolling Stones. Les saccades extrêmement rapides évoquent le ronronnement éléphantesque de quelque machinerie étrange, une mécanique aux frictions rapides qui ne cessent d’inquiéter et d’étonner tout à la fois l’équipage de la Marie-Jeanne. Charlie Badelaire, Jhon Piol Balmundo et Kishi Kikurséwawa sont partisans d’aller à la rencontre du phénomène, afin de s‘en faire une meilleure idée, tandis que Emeline et Basile Decock, appuyés par Arnold Montburg, se montrent beaucoup plus réticents et voudraient quand à eux retourner dans la fusée, qui représente selon eux un abri sûr. Tous regrettent la perte du lasergun Rogers-XZ-31 Rocket Pistol tombé au fond des eaux. Charlie se remet à peine d’avoir été avalé tout cru par le Blauquevécé :

 

– Tu parles d’un accouchement ! Heureusement, cette chose n’était pas blindée de l’intérieur. Résister au laser-zithium, incroyable, un truc pareil !

 

– Relax, Charlie, t’es toujours avec nous et tu l‘as finalement bien tabassé. Mais c’est vrai que la bosse lumineuse de cette grenouille aurait méritée un examen poussé. Bon, fait Arnold à l’adresse des autres, le boucan me tape sur le système, ce vacarme infernal rendrait l’ouïe à un sourd.

 

Emeline s’attarde un instant pour observer une petite limace aux yeux jaunes, qui dresse brusquement par réflexe sa queue hérissée de crêtes molles et bleues vers la tête, lorsque que la terrienne pose le doigt sur celle-ci. Un bref couinement s'échappe finalement de l’animal.

 

– Fais attention quand même, la prévient Basile, rien ne prouve que ce truc est sans danger. Vaut mieux se méfier de tout ce qui vit ici, à présent.

 

– On a commis une erreur en laissant les deux armes à un seul homme, assure Jhon Piol, on doit se montrer plus prudents désormais.

 

Il n’a pas terminé sa phrase que deux hommes et une femme habillés de longues toges blanches font irruption en surgissant brusquement parmi les fougères. La surprise entre les deux groupes est absolument réciproque, mais Charlie crispe son poing sur son Space Outlaw Atomic Pistol qu’il pointe ostensiblement sur les individus. L’émoi de cette rencontre est palpable, mais les inconnus ne sont quand à eux pas armés et n’ont pas l’air agressifs. Cette apparence pacifique oblige Kishi à tempérer la tension de son ami, en spécifiant qu’en cas de grabuge, un ou deux uppercuts dans les tronches de ces gars maigrichons devraient suffire à les calmer. Pendant quelques instants, chacun dévisage l’autre en silence. La femme aux cheveux vaporeux et bruns, une très jolie dame aux yeux bleus denses et profonds, les toise longtemps sans cacher son énorme étonnement, mais son insistance à observer la nudité des explorateurs naufragés a toutefois quelque chose d’un peu dérangeant. Le déshabillé traditionnel au sein des défédérations a depuis longtemps figé cette coutume dans sa banalité. C’est sur le sexe des hommes, en particulier, que son regard s’attarde longuement. Puis, quittant l’appel intérieur et muet de ses réflexions, elle s’exprime dans une langue que les implants s’efforcent avec succès de traduire. Derrière cette étrange interlocutrice impudique, le vacarme augmente singulièrement, ajoutant à ses chuintements précipités deux ou trois explosions sporadiques. La chose qui produit ces halètements rauques et puissants est désormais très proche.

 

– Que faites-vous là ?

 

– Nous sommes des voyageurs de l’espace, fait Basile, en souhaitant ardemment que ces gens non colonisés aient déjà eu au moins un contact avec une défédération.

 

– Oui, nous savons, nous avons vu votre engin des étoiles. Mais pourquoi êtes-vous venus par ici ?

 

– A la bonne heure ! lâche Jhon Piol pour ses compagnons, en voyant qu’une certaine communication pouvait heureusement s’installer, et rassuré de plus par le fait que s‘il comprend ce que disent ces étrangers, eux en revanche ne sauraient deviner ses mots, filtrés à la demande par les implants.

 

Un énorme coup de sifflet strident déchire l’espace en coupant la parole à l‘ex second pilote du So long sucker, puis le bombardement rythmique s’apaise d’un coup et la mélodie s’exécute aussitôt en sourdine.

 

– Nous sommes en panne sur votre monde, fait Kishi, alors que l’un des indigènes remonte un pan de sa toge pour les inviter à le suivre. Son expression semble toutefois indiquer autant d’hébétude que de frustration.

 

Si les natifs masculins ne déclinent pas leurs identités, la femme se présente cependant aimablement comme étant la princesse Olila, fille de la reine Amygdala. Elle donne à la planète 8495SK-Rolling Stones le nom local de Kourdukon. Arnold fait à son tour les présentations et Charlie prend bien soin de fermer la marche, son laser toujours à la main. Ils progressent un court instant vers une clairière, où trône la machine responsable du barouf précédent, près de laquelle s’affaire un nouveau couple, un petit brun et une belle femme blonde ornée de bijoux. Tous deux sont couverts des mêmes longs tissus blancs. La locomotive montée sur quatre roues gigantesques à rayons lâche derrière elle un gros panache de fumée grise qui s’échappe d’une haute cheminée cuivrée. Dépourvu de carrosserie, excepté un long capot muni de phares à l’avant, le lourd chariot métallique laisse apparaître dans ses entrailles noires la complexité de ses tubulures, des cadrans, des grosses chaînes, des volants de différents diamètres et de tout l’appareillage rutilant qui sert à le faire fonctionner.

 

– Merde de merde, les gars, regardez-ça ! s’exclame ébahi John Piol à la vue du grand véhicule vers lequel il s’avance fébrilement, un camion à vapeur préhistorique ! Je n‘aurais jamais pensé voir ça de ma vie, et pourtant, j‘en ai vu des mondes bizarres.

 

– Venez avec nous, gens des étoiles, leur fait Olila en désignant l’engin, vous n’avez guère le choix, et notre forêt est parfois dangereuse pour nous, pauvres humains.

 

C’est alors que Basile désigne aux autres une route soigneusement empiérée qui traverse la jungle. Visiblement, la lourde voiture n’attend que de reprendre cette voie étroite pour repartir. Cette sorte de diligence en métal brut, équipée d’une grosse chaudière fumante, est équipée à son sommet de larges banquettes en cuir, sur lesquelles tout le monde s’installe en se serrant, même si trois des hommes prennent place en s’asseyant sur le capot ; puis un autre debout près du foyer rajoute quelques bûches dans le ventre de la bête. L’étrange chariot se lance alors rapidement sur la route en reprenant ses rugissements têtus.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:14:20
n°46532263
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 26-07-2016 à 17:01:16  profilanswer
 

This is America
 
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Revue de presse.
 
Aujourd'hui : Le scandale du bijoutier.

 
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Revue de presse.
 
Aujourd'hui : Le boucheur de paille arrêté.

 
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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:21:44
n°46542382
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 27-07-2016 à 14:36:36  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 11.

 

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Chacun fit rond autour du maigre feu pour pisser dessus afin de mieux l’éteindre, et Isolde au bas blanc crama son cul en voulant faire pareil. Osgard belle anguille et Doucine suce clairon s’en allèrent vers l’arrière, pour mettre le vieux Mirlen et Agrippepine à l’abri des combats à venir. Sans clairement vouloir se l’avouer, celle-ci tremblait pour son cousin. Un peu surpris de tomber sur eux au détour des fourrés, la patrouille de Raklur fonça sur les hommes de Brakemar comme des sangliers. Wallala forte fesse et Kilav le blanc furent les premiers à porter coups. Puis ce fut belle mêlée sanguinaire, à cogner comme des brutes sur les casques luisants. Le bruit des entrechocs fit trembler Tamerlaput et les cors fièrement portés en bouche résonnèrent en puissance dans la vallée de Bogland. Ursuline grande ciguë lâchait flèche sur flèche sur les ennemis, averse mortelle qui retombait sur eux comme une pluie d‘Avril ; les traits portaient chez ceux d‘en face une grande hécatombe. Hivalanoué accompagné d’Erald dérouillèrent leurs épées sur les corps démembrés, faisant partout voler les têtes mal protégées. William de Bochibre cloufichait sans faiblir l’adversaire sur les troncs sanguinolents, Belbit le Huelabit achevait les blessés d’un vilain coup de dague en plein cœur. Popol le borgne, Bébertlatrik côtes de porc et Gudfrid Jidaire fils d’Olglason tombèrent raides morts dans les fougères, puis Aragne reine des joutes et Knut drague baleine furent odieusement blessés. Tout les combattants tournaient comme toupies folles et tailladaient les chairs, en abominable fureur de faire couler le sang des autres. Alors que Brakemar perçait les ventres et les poitrines, ce fut au tour de Iva le démonté de mordre la poussière. Ursuline reçut un méchant coup au bras qui déchira sa broigne, mais elle se défendit des pieds, des mains et du bout de son arc creva l’œil d’un maudit. Hélas, alerté par le bruit provenant du fond des bois, Raklur envoya une seconde équipée vers le lieu du massacre et vaincus cette fois-ci par le nombre, Brakemar et ses guerriers furent forcés à la reddition. Tous durent poser les armes, y compris les nobles chevaliers du Fion, Belbit de la Godée et William de Bochibre. Avec plantes rares, force prières et bouse de lama, Mirlen s’occupa de suite à soigner les blessures les plus graves. Le calme revint dans la contrée. On laissa là les morts, puis tout le monde fut conduit vers les blanches yourtes du camp de Raklur. Là, Monoïsurmékos se montra ravi que son père adoptif ne fut pas au nombre des occis. Passant dans l’âcre fumée des tentes, les prisonniers furent vilainement raillés par les soldats, traités de fouteurs de poney et de fuckés de chorogne de marde. Assis près du pilier central de son abri, Raklur dégustait son vin cuit, tout en croquant des piafs rissolés dont le jus gras lui coulait sur la barbe. Au-dessus de lui, les feux des braseros faisaient trembler les tissus tendus pour faire toit à la yourte. Il fut informé par ses gardes que son attaque jouait de succès, et qu’on lui ramenait enchainée la fille du roi des Bozobis. Mains derrière le dos, il délaissa son plat pour descendre de son piédestal et s’avança vers les prisonniers quand ils furent amenés devant lui. Brakemar l’interpella aussitôt, sans même la crainte de recevoir un coup.

 

– Wesh, cousin, ostie de baiseur de bique, va te faire varloper, pour dire ! Où qui y est, mon fils ? Chuis venu icit pour ramener à maison.

 

– Hey tête de pissette, décâlisse, ta fameuse parenté c’est rien que de la bullshit. C’est moué son père en vrai. Ben comme y faut. C'est tu assez clair ?

 

– Acré castré de débile de séducteur, t’as juste autrefois ben joué à spin-date avec mon Alignore et pis stou, mais c’est moué et pis sa maudite garce de mère qu’on l’a ben bichonné depuis qui y est né, c’te saleté d’ado qui veut rin manger. Où qui y est d‘abord ?
 
 Voyant qu’entre ses pères la conversation risquait de s’envenimer, le jeune Monoïsurmékos se dégagea des voiles pour tenter de s’interposer.

 

– Ayoye mais les deux, là, on la connaît l’historiette, j’ai deux pères au tableau d‘affichage, mais faut arrêter de vous chicaner pour ça. Pis Agrippepine c’est ma cousine, on s’est ben mis d’accord. Faut voir à muter l’institution familiale. Si c’est plus de confort, je choisis vos deux noms, a pas seize possibilités. C’est pas pire que le stigmate d’une câlisse de marde d’absence de père, tout de même. Pis vous allez pas me couper en deux !

 

– Attend de vouère, toué, lui lança Brakemar, comment que papa y va te crisser son poing dans face pour t‘être barré du foyer avec c‘te maudite blonde !

 

– Messieurs, messieurs, fit Mirlen en s’avançant un peu, vos sentiments obscurcissent votre lucidité. Point ne laissez une mélancolie naissante venir ternir une ouverture prometteuse. Une dose de réalisme serait grandement bienvenue. Les Onkulés cognent à vos huis, j’en ai vision, vous devez dès ce jour vous unir pour les guerroyer.

 

– Mais qui t’es donc, toué ? fit Raklur au regard tout à coup assombri.

 

– Ce gars là, précisa Brakemar, c’t’un ramancheur du Fion qui coure au Guilidoris après de la pinette pour guérir sa reine, en compagnie de ses amis, la communauté de la gnôle.

 

Le temps resta un instant suspendu. Cheveux longs et barbes frisées, Hivalanoué et Erald se parlaient à voix basse. Belbit se contentait de perdre son regard sur les piliers de bois sculptés, puis il rêva aux fesses de Zénobite, qu‘il trouvait fort jolie.

 

– Soit, reprit Raklur, chez les Troglobites, toute personne venue de l’extérieur est l’envoyée de Kramouille, mais pendre tout votre maudit gang au poteau, a prend deux secondes à faère. Je sais pas comment vous avez fait pour dévaler la rudesse du Mont Velu, mais vot’ ostie de guide a quitté la route, tabarnak. Gosser de grimper le maudit volcan du Guilidoris, c’est pas aussi simple que de sortir les vidanges de sa grotte. A me demande ben ce que je dois faire avec vous-autres, crisse de ti-bums minables.

 

Prenant l’appui d’une poutre, Mirlen refit son diplomate :

 

– Par sainte Kramouille qui veille sur vos grottes et vos gouffres, toi, Raklur de Bidet, déclare la paix au roi Karbone, pendant qu’il est temps, car les cannibales de Lisneylandem vont certainement mener grande offensive. Il est urgent pour tout votre peuple de se réconcilier pour les combattre ensemble.

 

– Pour le moment, ton discours sent la pisse de malade et chuis ben tanné de vous voir en maudit. Notre Dame de Kramouille, elle va plutôt veiller sur mon dessert, lui répondit Raklur, en tapant fortement sur un gong suspendu pour qu’on éloigne de sa vue les prisonniers.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:23:56
n°46620314
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 05-08-2016 à 13:17:25  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 14.

 

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Sur les flancs rocheux de la carrière de Briepue, lesquels forment un grand mur au-dessus du campement des scouts de Troulbled, Gaston Boudiou et Jean Micheton ont pris en pénitence leur froide et pénible garde nocturne, sans boire ni manger. Toutefois, comme dit l’autre, un bon scout reste potentiellement un animal à sang froid solidaire autant que fraternel et ce qui est déjà fort ne saurait s’endurcir. Des mouvements furtifs s’agitent soudain aux milieu des fourrés, car la nuit est sombre et pleine de branleurs. En effet, ceux de la tente des caribous se sont offert l’audace de grimper voir les punis. Même les bisons installés juste à côté n’ont rien entendu et dorment toujours à poings fermés. A l’écoute des bruits, Gaston s’est brusquement extirpé de son sac de couchage, puis il braque sa lampe Wonder sur le visage des nouveaux-venus. Rassuré de voir venir François Pignouf, Philippe Jobard, Pascal Barjot et Jean-Yves Peignecul, il se rallonge aussitôt. Les autres s’assoient en tailleur autour des deux amis.

 

– Alors, les gars, c’est vrai que vous avez vu la vierge ?

 

– Laissez tomber.

 

– Vous êtes pas drôles, répond Pignouf. Et puis arrêtez de vous la racler, l’abbé a fait sa petite enquête au village en allant chercher du pain, celle que vous avez vue, c’est probablement Marie Tafiole, la vendeuse de la boucherie Napoléon. Elle vient tous les jours ici se promener avec Gabriel Gromanche qui travaille au garage Simca. Il parait qu’ils vont se fiancer bientôt.

 

– Bande de cons.

 

– Bon, on se la fume ? fait Peignecul, en sortant de sa poche un paquet de Royale Menthol fripé qu’il a subtilisé à sa mère avant de partir en camp. Il en tire une cigarette qu’il allume aussitôt avec son briquet amadou, en rejetant la fumée par sa bouche en cul de poule. Il la passe ensuite à son voisin, en autorisant à l’adresse du groupe une seule taffe pour chacun. Le paquet de blondes doit tenir jusqu’à la fin du séjour.

 

– De toute façon, assène Jobard en toussant violemment, y’a pas eu de miracle.

 

– Et bien détrompez-vous, lâche fièrement Micheton en tirant à son tour sur la clope, quand on est revenus, les branches qu’on avait préparées formaient une croix sur le sol.

 

 Gaston sait bien que sa croix avait plutôt vaguement l’air d’un X, mais il comprend que son ami ne cherche en faisant cette remarque qu’à leur sauver la face. Les autres en restent un instant bouche-bée, et puis conscients qu’ils ne tireront sans doute jamais vraiment cette apparition au clair, ils terminent le mégot à tour de rôle et en silence. En fin de compte, le menthol, c’est bien dégueulasse. L’attente immobile promet d’être longue vers la frontière de l’aube. Un moment, Jobard tente d’interpréter une chanson du folklore iroquois, mais façon soliste argentin. On le fait taire tout de suite, compte tenu de la menace représentée par un possible réveil de l‘abbé, sans parler du fait que personne n‘est ni mort, ni sourd et qu‘on a pas de guitare. Par esprit de confrérie, l’abandon de l’hymne nocturne met en effet tout le monde d’accord, et le pauvre Philippe se plie sans plus rien dire aux arguments des copains. Deux heures plus tard, les caribous retournent dormir dans leur tente et Gaston et Jean se retrouvent seuls. Avant de dormir, ils entament à leur manière la fameuse prière des scouts : Seigneur Jésus, poil au cul, apprenez-nous à être généreux, poil au nœud, à servir comme vous le méritez, poil au nez, à donner sans compter, poil au pied, à combattre sans souci des blessures, poil aux chaussures, à travailler sans repos, poil au dos, à nous dépenser sans attendre d’autre récompense que de se faire baiser par un moins con que nous, amen. Peut-être une manière personnelle pour Gaston Boudiou de se venger du ciel, pour avoir entraperçu deux secondes le joli téton rose de Marie Tafiole. Et puis le lendemain, après la toilette matinale à l’eau froide dans le ruisseau glacé, le lever des couleurs et la gymnastique, les jours suivant passeront au gré d’activités variées encadrées par l’abbé Julio. Courses d’orientation, lecture de cartes, visite édifiante aux grabataires scrofuleux de l’hospice, parties de tir à la corde acharnées et démonstration de sport de combat en cas de rencontre inopinée avec un gitan, remise de décorations, puis fin d’après-midi autour d’un goûter sympathique, après la découverte de la population civile locale dans les rues de Briepue. La troupe qui apprend dans la bonne humeur à endurer la souffrance et la peur, le froid et la faim, la fatigue extrême et la perte de tous les repères, s’éclate dans le calme environnant de la carrière, en arpentant gaiement les sentiers étroits et caillouteux. Sous les encouragements permanents de leur leader attaché aux valeurs et principes de leur mouvement, et dont une petite flamme danse en permanence au fond des yeux. La camionnette jaune du facteur leur apporte un matin le courrier des parents, mais c’est seulement une courte lettre de sa sœur Angèle que Gaston reçoit, dans laquelle elle lui raconte avoir embrassé un gars de Pleurotte sur la bouche, et qu’elle a peur de tomber enceinte.

 

C’est pourtant une toute autre et triste nouvelle que le jeune garçon va apprendre ce soir-là, puisque l’abbé le prend à part pour lui annoncer la mort brutale de son grand-père Léon Cocominute de Givenchy, rappelé à Dieu en tombant d’une échelle, alors qu’il allait piquer un jerrycan d’essence chez son voisin. Comme le retour à Troulbled est cependant prévu pour le lendemain, Gaston n’aura pas à envisager la fin prématurée de son séjour pour aller enterrer papi dans le caveau familial, auprès de sa femme Louison. Face à la souffrance de ce cœur d’enfant mis à nu, l’abbé craint de voir ce gamin plonger soudainement en carence affective et danser un jour à l’âge adulte sur une table de bistrot. Dans l’avenir, il faudra à l’abbé tout faire pour construire chez ce pauvre orphelin une bonne estime du petit Jésus, histoire de le cogner au réel et le prévenir du danger des salles de bal. Gaston est de fait très chagriné et ses camarades scouts, affichant pour lui une amitié complice et solide, forment aussitôt à son égard une vaillante unité support, béret bleu incliné sur la droite. Et puis, avant l’arrivée du car qui va les reconduire à la maison, la troupe met le feu au campement, dans le cadre d’une organisation rationnelle du travail. Ce qui vaudra ensuite aux pompiers volontaires de Briepue trois heures d’intervention dans les bois alentours, applaudis par les scouts éblouis par leur matériel et leurs méthodes, et qui leur réservent évidemment avec enthousiasme un accueil extraordinaire. Plongé au milieu de ses sanglots lourds, nous sommes en mesure de penser que c’est en ces heures flamboyantes que Gaston Boudiou pensera déjà à mettre au point une lance à incendie révolutionnaire enrubannée à pédales, avec un système incorporé d’hélices inversées en alliage de magnésium dans la tuyauterie de diffusion.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:25:05
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talbazar
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Posté le 07-08-2016 à 12:02:58  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - Extrait numéro 25.

 

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Vaya s’était battue comme une lionne, dès qu’elle avait vu s’approcher les types armés. Au premier coup de feu tiré par elle, Guy s’était glissé sous un siège de la bagnole, un renvoi de pistache au bord du bec. Sa maitresse avait rapidement contourné la voiture et essuyé le tir approximatif de Prince Ahmed, puis celui plus précis d’Edouard La Hache, avant de riposter à son tour sans compter ses balles. Couchée sous le châssis, elle avait aperçu brièvement une paire de jambes galoper au loin, celles de Jordi Longarçon. En appuyant sur la gâchette, Vaya avait parfaitement atteint une de ces guiboles remuantes et fait tomber le connard, mais c’était sa dernière balle. Après un instant de flottement, les autres l’avaient parfaitement compris et s’étaient prudemment approchés avant de l’obliger à se rendre. Etrangement, aucun n’avait usé de gestes réellement violents pour s’emparer d’elle, on l’avait seulement emportée au château pour la ligoter solidement sur une chaise du labo 3, avant qu’elle y retrouve Martin également prisonnier. Livré à lui-même, le perroquet s’était alors enfui à travers le pare-brise anéanti, pour voler longuement par-dessus les toits de la maison de retraite. Voyant qu’il ne distinguait rien, il avait décidé de prendre la direction de la vallée afin d’avertir les flics et les forcer à déclencher une action immédiate. La nuit promettait de s’éterniser et Guy Ness avait le sentiment de glisser dans l’hiver polaire, tant les coulées d’air qui glissaient sous ses ailes délicates étaient froides. Au moins, avec leur petite visite nocturne, Martin et Vaya venaient de lever un pan de mystère et prouver que l’institut pour vieillards abritait quelques douteuses activités, protégées par un bataillon de patibulaires armés. C’était flippant de savoir ses amis à présent enfermés entre ces vieux murs, et la situation urgente effaçait pour Guy l’utopie de terminer cette nuit en roucoulant sous les étoiles en compagnie d’une petite perruche andalouse. De ce qu’il avait déjà entrevu en volant longuement devant les fenêtres, le bâtiment était un véritable labyrinthe de pièces, de couloirs et d’escaliers tournicotant pour les desservir. Va savoir où le couple se trouvait à présent là-dedans, il fallait juste souhaiter qu’il était encore vivant et qu’une action vigoureuse des poulets pourrait encore les sortir de ce pétrin. Tout reposait à présent sur la capacité de Guy à pouvoir les convaincre de donner l’assaut. Au moins, dans ce noir d’encre, il ne courait aucun risque de se voir plomber par un bigleux affairé dans une chasse aux canards sauvages ; l’oiseau exotique avait pour l’instant sa dose de projectiles brûlants. Il plia l’aile pour effectuer un dégagement vers la gauche en arrivant sur la ville. Terminée la ballade bucolique dans le vent d’altitude glacé, mais il semblait peu probable que la police l‘accueille avec un bol rempli de pistaches. Il possédait cependant l’argument fatal pour les décider à agir, en évoquant les cris d’enfant qu’il avait entendu, ce qui pouvait relier l’institut aux enlèvements récents.

 

Il cogna tant et tant du bec aux carreaux qu’un fonctionnaire de garde le laissa rentrer pour qu‘il puisse déballer son témoignage, quand bien même l‘histoire qu‘il devait raconter risquait de le faire passer pour un piaf accroc aux drogues dures. Un véritable dossier à charge sur la vénérable institution des Flocons d’argent, probable résidence secondaire d’une bande de mafieux kidnappeurs de gosses. Il suffisait juste de connecter les bons câbles pour se mettre en relation avec l’inspecteur Barracuda N’Dyé qui pouvait en dire plus, en l‘informant au passage que Martin Smith et sa copine venaient de plonger dans de sales draps. Une véritable armée fut donc mise aussitôt sur pied avec l’aide d’une compagnie d’assaut, deux véhicules blindés et un hélicoptère, puis dirigée vers le coin montagneux où nichait le repaire de F. Gordon Strazdinovsky. Guy ne fut pas pour autant invité à faire partie des effectifs, mais il emporta pourtant le casting puisqu’il avait la précieuse faculté de voler et qu‘il ne manquait pas de souffle, en dépit de la promenade courageuse qu‘il venait d‘effectuer pour donner l‘alerte. Les forces opérationnelles entourèrent les grilles de la propriété, laissant l’hélico tournoyer pour surveiller le vaste domaine. Le ministère une fois informé, la conduite d’une frappe fut autorisée dès que l’appareil essuya le tir d’un fusil d’assaut en provenance d‘une mansarde. L’action au sol fit sauter la porte d’entrée principale de la résidence, suivie d’une progression entravée par la présence effarouchée d’un grand nombre de personnes âgées et du personnel, qu’on s’efforça d’évacuer dans la nuit. Dans ce contexte difficile, des coups de feux furent échangés à la fois dans l’étrange sous-sol et au dernier étage, provoquant la mort de deux policiers et celle de La Teigne, de Triple shot et de Jordi Longarçon. Après l’ahurissante découverte des laboratoires et la libération des enfants kidnappés, l’action de l’unité spécialisée s’intensifia avec l’envoi de renforts. La réponse adaptée nettoya les étages en éliminant Prince Ahmed qui menaçait toujours l’hélicoptère. Après la mort de deux nouveaux policiers et d’un autre individu identifié plus tard comme s’appelant Joe Main Chaude, avec malheureusement deux anciens pris par lui en otages, le château ne sembla plus opposer de résistance, mais après une fouille approfondie, il ne livra aucune trace de Martin Smith, de Vaya Condios et du directeur F. Gordon Strazdinovsky. Guy Ness en aurait bouffé les plumes de sa crête.

 

Pendant que le poulet gabonnais désemparé voletait en version croisière en réclamant son lot de pistaches, le terrain libéré révéla une incroyable implantation de laboratoires très bien agencés, au service d’une organisation secrète au but encore mal défini. Un échafaudage scientifique énigmatique que le mutisme total, généralisé et obstiné des pensionnaires âgés ne parvint pas à éclaircir. On procéda en cours de journée à une surveillance accrue du réseau routier alentour et de la zone aérienne, sans hélas trouver la moindre trace du privé et du patron de l’institut, visiblement habilement exfiltrés au cours de l‘attaque. Pas un des bosquets du parc n’échappa à l’œil des policier, pas une seule chambre du château ne fut oubliée et malgré tout, la recherche du couple et de son ravisseur échoua mystérieusement. Bien qu’ils n’éclairèrent pas pour autant le mystère du lieu, un certain nombre de documents remis aux autorités permirent néanmoins de relier les Flocons d’argent au docteur Van Degaffe, et tous les cadavres identifiés révélèrent leur étroite affinité avec Gros Bill. Y compris ceux de Bob Oldson et de Borz Balkirie descendus par Smith, comme le prouva l‘étude des cartouches. Interrogés, les pauvres gamins révélèrent en pleurant leur atroce calvaire et les odieux examens qu’ils eurent à subir, mais le plus stupéfiant pour les enquêteurs fut sans doute la découverte dans le dédale souterrain du corps hybridé de la femme-rat, tuée d‘une balle dans la tête, également par Smith. Les forces victorieuses furent chaudement félicitées d’avoir joué si brillamment les invités-surprises, et l’agenda de Barracuda N’Dyé se concentra de façon notoire sur cette affaire, puisque sa possession du carnet mystérieux constituait selon lui la pierre angulaire de son enquête. A tous les coups, retrouver Martin Smith et sa chérie allait donner aux flics dans les jours à venir beaucoup de travail. Ceci dit, pensa l’inspecteur en faisant le bilan, sept associés de Gros Bill de plus envoyés en enfer, voilà qui pouvait se montrer déjà très satisfaisant, en dépit des quatre morts de la maison.

 

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Bon dimanche à tous

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:27:06
n°46690028
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 11-08-2016 à 10:44:49  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 33.

 

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Alors que la machine progresse à une allure soutenue, un puissant lâcher de vapeur fuse brièvement d’une soupape, provoquant l’effarouchement dans la jungle de grosses créatures molles et luminescentes qui s‘envolent plus loin. Chahuté par les cahots mal amortis, Basile sent la main de la reine Amygdala remonter avec insistance sur sa cuisse, et Jhon Piol reçoit une douce caresse identique de la part de la princesse Olila. Kishi est quand à lui effleuré de pareille manière par la blonde inconnue qui se presse sans façon contre lui. Emeline trouve les nanas de Kourdukon bien cavalières et n’en pense pas moins. Des femmes plus que familières avec les explorateurs masculins, faisant preuve d’une ostentation érotique très culottée. Elle ne reçoit quand à elle heureusement aucun de ces signaux épidermiques de la part des mâles indigènes. La réaction positive de Basile ne se fait guère attendre, et sa moitié lui balance un coup de coude dans les côtes pour calmer une érection naissante. Amygdala regarde quand à elle, tout au contraire, le phénomène physiologique qu’elle vient de provoquer chez Basile avec une certaine gourmandise, sans se soucier du regard furieux d‘Emeline. Jhon Piol se laisse pour sa part complètement aller, visiblement satisfait des attentions coquines que lui procure Olila. Non concernés par ces sympathiques grivoiseries, Charlie et Arnold semblent de leur côté passionnés par l’environnement exotique que traverse en ronflant leur étrange voiture sur la route rectiligne.

 

– J’avais bien vaguement remarqué des portions découvertes de ces chemins, avant d’atterrir dans la jungle, mais bizarrement pas des fumées de machines, et encore moins de villes. Ces gens ne doivent pas être très nombreux à vivre sur cette planète forestière.

 

Plus que jamais vaincu par les tripotages indécents de la reine, Basile entame avec elle une conversation destinée avant toute chose à calmer un peu les ardeurs insistantes et royales.

 

– Vous avez donc déjà été visités par des gens des étoiles ?

 

– Ho, il y a de cela fort longtemps, mais nos livres nous ont gardé les moindres détails de cette rencontre. Nous savons ainsi qu’il ne s’agit pas de légendes inventées par nos mères. Vous en prendrez connaissance bientôt, puisque nous arrivons désormais à Utruss.

 

Ce qui se présente finalement à eux au bout de leur voyage trépident peut effectivement s’apparenter à une petite cité. Elle est constituée d’étranges maisons ocrées et sphériques, nichées en grappes au cœur d‘une végétation plus ordonnée. Emeline est soulagée de voir les majestés retirer leurs mains baladeuses des cuisses de ses amis, pour saluer leurs sujets. Tous, hommes et femmes, sont habillés des mêmes longues toges d’une blancheur immaculée. La stupeur et l’incompréhension se lit sur les visages à la vue des étrangers qui côtoient leur reine. Si les hommes semblent marcher derrière leur compagnes en prenant à leur suite quelque distance soumise, ces dernières affichent à la vue du carrosse royal des mines réjouies et l’acclament joyeusement de la voix.

 

– Honneur à la reine Agmydala ! Gloire aux matriarches du Triangle Doré !

 

Baignée de lumière orange, Utruss propose un décor charmant dans lequel déambulent de nombreux piétons entre les plantes mobiles aux corolles évasées ; mais aussi quelques attelages surprenants, constitués de charrettes en bois bien conçues, tirées par des bestioles à dix pattes aux corps massifs et transparents, munis de soixante yeux rouges. De rares et petites voitures à vapeur portant couple et chauffeur circulent également en animant les rues d’un vacarme notoire. C’est la femme qui conduit. Surgissant des grosses boules agglutinées de taille variable qui servent visiblement d’habitations, on distingue parfois quelques ravissants moulins à eau ou à vent. Aux balcons des fenêtres circulaires et sans vitres de ces alvéoles, qui font de cette ville une ruche étonnante, des femmes agitent la main au passage de la reine. Les visiteurs de l’espace tombent immédiatement sous le charme de l’ambiance paisible dégagée par cette bizarre poésie urbaine. Quelques grosses bactéries et des méduses géantes volètent au milieu de grandes volières, en émettant continuellement de plaisantes lueurs vives et multicolores. Elles sont en fait destinées, comme le précise Olila, à l’éclairage nocturne. Même au sein de la ville, Kourdukon se montre riche d’une flore et d’une faune originale, bien que les espèces rencontrées dans les rues bien pavées soient visiblement apprivoisées. Sur l’une des places dégagées, un immense ballon captif retenu par des cordages semble attendre pour prendre son envol, prouvant à lui seul que les indigènes possèdent quelque maîtrise des airs. Les habitants d’Utruss se reposent ou travaillent tranquillement dans leurs petites échoppes sphériques, aux ouvertures protégées des trois soleils de plomb par de beaux voiles tendus et colorés. La ville grouille en réalité d’activités diverses, mais son architecture particulière alimente bien des commentaires auprès des visiteurs.

 

– Vous savez ce qui me botte ? fait Jhon Piol dans les implants de ses camarades, pas un seul de ces gars-là n’a l’air armé.

 

– Ouais, lui répond Charlie de la même manière. En plus, j’ai vaguement l’impression qu’ici, les nanas font la loi.

 

L’un des globes atteint de gigantisme et muni d’une haute cheminée abrite visiblement une forge conséquente, où s’affairent de nombreux ouvriers en sueur, vêtus cette fois de courtes tuniques pour être plus à l’aise. Des hommes, uniquement. De cette fabrique située un peu à l’écart des maisons, sortent des bruits assourdissants évoquant clairement quelques travaux de métallurgie. La princesse Olila confirme d’ailleurs la présence d’une fonderie jouxtant cet atelier. Elle ajoute au passage que si différentes machines à vapeur proposent leur service pour le bien-être de tous, les véhicules comme celui qui les transporte reste des privilèges aristocratiques. La circulation dans les rares voitures alimentées par l’eau bouillante signe donc l’apanage d‘une caste avantagée. Le goût commun pour l’architecture des maisons rondes, qui rend l’atmosphère de cette cité si particulière, semble en revanche partagé par tous. Des vendeurs nonchalants font les cent pas devant les boutiques, afin de faire l’article de leurs étals, qui proposent aux yeux de l’équipage de la Marie-Jeanne toutes sortes de denrées inconnues. Quelques bestioles curieuses, livrées à elles-mêmes dans ces ruelles sans angles, semblent simplement à la recherche de quelque nourriture au gré des lentes ondulations de leurs flagelles. Les animaux ne se préoccupent aucunement des humains, lesquels les croisent d’ailleurs dans une indifférence identique. Le chariot à vapeur s’arrête devant une maison un peu à l’écart. Sur le mur brun et bombé, les gens de la défédération aperçoivent avec stupeur le dessin délavé du logo rouge au cœur fléché de son éminence.
 
– Bordel à pute, fait Charlie Badelaire en montrant du doigt la peinture défraîchie, cette baraque a tout d’une ancienne mission !

 

– C’était effectivement celle de Gourou Ouzy Osburne et de ses nones, lui confirme Amygdala, venus nous visiter voici plusieurs siècles au temps de ma très grande aîeule la reine Klito. Ce sont ceux par qui nous savons désormais l‘univers habité. Nos ancêtres ont soigneusement préservé cette ancienne bulle en pisé, par effort de mémoire. En plus d’être tous reçus dans les alvéoles de ma loge royale, c’est dans cette maison que vous séjournerez.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:28:21
n°46755213
talbazar
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Posté le 16-08-2016 à 12:38:30  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La Jet larguée - Extrait numéro 07.

 
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Les passagers chahutaient dans le zinc, dans une ambiance débridée de fort bon aloi. Pendant que Lola, Pamela et Lola animaient à l’étage le karaoké de chansons paillardes, en classe éco les allées pratiquaient la chenille en parallèle et bataillaient pour former la chaine humaine la plus longue. Hilares, Georges Pinson et ses Pinsonnettes exécutèrent en se déhanchant un excellent début de cortège, attirant derrière eux un maximum de participants. La travée sur l’aile gauche fut déclarée gagnante, à trois voyageurs près. Vaincue provisoirement par quelques verres de vin californien, Kinni était allée se reposer pour une heure ou deux sur une couchette réservée au personnel. Tout comme Summer s’offrit pas loin d’elle un intermède brûlant avec son haltérophile, côté face et côté pile. Sur le pont supérieur, Perlin fut gratifié d’un million de caresses par les trois actrices porno et la star française anonyme Ines Deloncle. Peu motivé par les jeux, le général d’infanterie Karl Ashnigof se planqua sous une couverture en compagnie de son petit copain Janus Ablanc. Cindy Laurel et Jenifer Hardy, les deux mannequins maigres chaperonnés par la directrice du magazine Bellybutton, remportèrent ex æquo le concours de maquillage sur seins nus ; au grand dam des comédiennes du X, mais chaudement applaudies par l’ensemble des associatifs du Puppies Rights Watch. Shirley balança sur les têtes un petit ballon gonflable, le but étant pour les passagers de se le renvoyer sans le faire tomber, sous peine d‘élimination. Quand aux charcutiers rendus furibonds par l’interdiction pour eux de boire davantage d’alcool, il fallut envoyer Wanda près de leurs sièges pour les calmer. La beauté blonde en uniforme rose n’eut même pas à ouvrir la bouche pour les tenir en respect, puisqu‘elle les pacifia par sa seule présence éblouissante. L’avion devint pendant quelques temps un endroit magique et d’une grande convivialité. Ce genre de moments qui rendaient le travail d’hôtesse de l’air à la Petro Jelly passionnant, jamais répétitif, et d’une grande stimulation intellectuelle. Violemment soupçonné de glandouiller en partie collective, le dépressif patron de la marque de slips Rushplug, monsieur Louis de Bourvil, s’avéra en réalité anéanti par les médicaments et fut enfin laissé paisiblement recroquevillé sur son siège. Deux ou trois fois, on dût s’interrompre pour s’attacher, puisque le commandant Steven Eight tint à prévenir tout le monde dans son micro que les organismes pouvaient s’attendre à quelques chutes brutales, en raison de turbulences épisodiques. Summer fila aussitôt vers l’arrière, où l’on se voyait généralement davantage secoué. Dans l’ensemble, les jeux furent menés bon train et en premium, l’écrivain de biographies Ewin Talbaway gagna sans contestation le parachute tant convoité. La série de concours fendards terminée, chacun reprit ses tranquilles occupations pour un paisible farniente, après avoir longuement commenté chacune des épreuves. Lors de cette longue récréation, seuls le prêtre de secte Eloi de Pouillet et l’agent du Boukistan Moktar Bouif étaient restés stoïquement de marbre près de leur hublot, comme des plantes posées devant une petite lucarne. Attentives à tous, Shirley, Kim, Victoria et Summer s’affichaient désormais parfaitement disponibles pour la foire aux questions. Ce boulot d’hôtesse se montrait en effet idéal pour toute celle recherchant un métier qui bouge, avec naturellement ses hauts et ses bas. En attendant de servir les repas, Summer avait pourtant retiré son soutif et enlevé ses bas, histoire d’être plus à l’aise. Bastardo Comoquiendice se trouvait particulièrement fier d’avoir hérité de ces doux trophées, qu‘il brandissait de temps en temps aux yeux des autres, comme un champion le fait de sa médaille d‘or.
 
 Dans le calme revenu, une confrontation entre Shirley et Steward semblait inévitable. Elle eut lieu au niveau des toilettes, à l’avant du pont principal. En dépit d’une habile tentative d’esquive, Shirley ne réussit pas à s’échapper de son ex qui l’attrapa par le bras. De loin, Victoria et Summer virent le coup venir, elles s’éclipsèrent rapidement.
 
– Ecoute, Steward, je dis oui quand je jouis, tu le sais bien, mais quand je dis non, c’est jamais. Je suis beaucoup trop jeune pour divorcer. Te dire oui, c’est penser nous, tu comprends ? Sans parler du fait que nous habiterions fatalement la même rue et la même maison.
 
 Le pauvre Steward marqua un temps de pose en farfouillant son nœud papillon en satin rose. Ce n’était pas très difficile de sonder son âme tourmentée, puisque sa partition personnelle lui jouait visiblement des notes désastreuses. Shirley aurait voulu posséder une foulée de Kenyan pour mettre les voiles, mais elle avait le cerveau dur et les jambes molles, et personne ne se trouvait à portée pour l’aider ou la ravitailler d‘un peu plus de courage en plein vol. Son combat intérieur face à cet homme blessé allait-il durer jusqu’à l’atterrissage ? elle avait peur que oui. En voyant son ex tellement perdu, elle avait grandement envie de fermer sur le champ le magasin des sentiments. Elle essaya avec désespoir de repérer au travers d’un hublot quelque image rassurante dans la forme des nuages, le ciel lui proposa un unique cumulonimbus offrant l’aspect d’un préservatif. Parfois, notre simple désir n’est qu’un lourd boulet que l’on traîne sur le chemin de la vie, surtout quand l‘autre voudrait que ça dure.
 
– Shirley, quand mon cœur bat, il prononce ton prénom, Tu occupes toutes mes pensées. Comment me voir malheureux pourrait-il suffire à ton bonheur ? Je croyais qu’on étaient faits l’un pour l’autre.
 
– Non, c’est fini. Tu es toujours super drôle, la vérité ne devrait pas te blesser à ce point. Moi, j’en ai plus que ras le bol de supporter tes sourires de bambin. Cesse de te voiler la face, à présent. Tu trouveras bien quelqu’un qui te correspondra mieux que moi.  
 
– Ce n’est pas possible, ce n’est pas juste. La vérité ne peux pas me toucher mieux que toi, même en pleine journée.  
 
 Victoria vint brutalement interrompre le désagréable interlude dans lequel s‘empêtrait sa meilleure amie, car le cockpit venait d’annoncer quelques signes d’inquiétude. Le couple incrédule l’écouta décliner son message alarmant :
 
– Collision aviaire ! Tout le monde s’attache, vite !
 
Number two, fifty, check. Le commandant Steven Eight venait juste de terminer son paquet de chips au goût bacon, en laissant partout sur ses commandes la trace de ses doigts gras. Sans que ni lui, ni son premier officier ne le vit arriver, un groupe de quatre colibris s’écrasa violemment sur le pare-brise de l’avion. Fort heureusement, aucun de ces oiseaux horriblement massacrés en plein vol stationnaire ne s’était engouffré dans un réacteur. Mais il y avait à présent sur les verrières une vilaine bouillie brune entachée de jolies plumes aux couleurs vives qui les maculait, en masquant toute visibilité.  
 
– Bird Strike ! Lâcha Steven dans son micro à l‘attention du contrôle au sol, tout en actionnant les essuie-glaces avec la manette multifonction. Puis il envoya en douce un SMS à sa mère.
 
 Hélas, comme plusieurs oiseaux s’étaient coincés dans les branches des balais, il n’obtint qu’à effectuer un brossage dégueulasse et désastreux, lequel obtura encore plus les vitres avec pour seul résultat de les rendre définitivement opaques. Comble de malheur, la météo n’annonçait pas de pluie salvatrice en vue. Avec courage, Jack-André Tyler regardait son collègue combattre la crise sans déni ni fuite, mais avec une grande rage de s’en sortir, car l’accident lui masquait à présent complètement ce ciel magnifique, pour lequel il avait tant sacrifié et qui représentait toute sa vie. Il fit en conclusion facilement admettre à Jack qu’un changement de cap ne serait sans doute pas nécessaire.
 
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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:29:38
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talbazar
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Posté le 19-08-2016 à 10:31:10  profilanswer
 

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Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : L'Epilée du Nil - Extrait numéro 61.

 

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– Ainsi donc, la pharaonne est vraiment tout près d’ici ?

 

Amétatla prit la pose et fit sa fière, tant la nouvelle paraissait l’exciter. Elle fut parcourue un court instant par un vilain frisson d’angoisse, puisqu’elle n’était pour l’heure ni parfumée, ni maquillée. La mère d’Aménorée tira nerveusement sur sa jupe mouillée qui composait sa triste tenue de lessiveuse. La nomade n’avait jamais pensé pouvoir rencontrer la reine un jour, et toute son attitude visait désormais à se composer un moi idéal, en vue d’une possible confrontation avec le fameux soleil rayonnant de l‘Egypte. Elle imaginait sans doute pour sa fille une trajectoire somptueuse, en la mariant prochainement avec un haut fonctionnaire du palais Thébain. Du concret et des contacts utiles, deux atouts précieux qui permettraient à Aménorée de décrocher rapidement un mari influent, en plus d‘un taf bien rémunéré. La plupart des marchandes de tissu en gros ne sont finalement jamais ce qu’elles aimeraient pouvoir être. Elle essaya tant bien que mal d’éviter les gestes et les mots qui puissent trahir sa soudaine bouffée d’ambition maternelle. Valisansoûth, Tépénib et Mer-Amen Tesmich disséquaient en revanche avec rigueur la situation, en compagnie de Vequetum Fourlanus. Le romain bourré d’énergie brute demanda à cette bande de nomades suceurs de fric de lui prêter un bon chameau, afin que lui puisse avertir au plus vite Néefièretarée sur la présence menaçante des Philistins.

 

– Déjà que tu mutiles ma langue maternelle avec ton accent de merde, voilà qu’en plus tu veux nous piquer une de nos bêtes ! Valisensoùth tâchait de parler au cœur et au corps du soldat sans tricher. Ce projet va te coûter un maximum, car nos animaux se payent chers, tu sais comment les faire démarrer, au moins ?

 

– Raison d’état. Je ne peux pas louer ce chameau, mais la reine vous le remboursera.

 

– Il a raison, approuva Amétatla, il y a urgence et il faut gérer les priorités. Tout en se tortillant les cheveux, elle se voyait bientôt mettre un pied à la cour, avec à la clé un changement radical d‘environnement. Elle était certaine qu’Aménorée la remercierait un jour. Peut-être même que la petite n’aurait pas besoin de se mettre à poil dès le premier jour, pour faire une bonne impression. Quand à la mère, elle s’imaginait déjà avec une certaine volupté avoir ses entrées au palais, couverte de bagouzes et richement fringuée en manteau de guépard.

 

– Evidemment, intervint Tépénib, prévenir la reine semble bien l’option la plus adéquate. On va inscrire ta demande de prêt auprès du secrétariat concerné, ma fille va te préparer le papyrus et tu signeras le formulaire de reconnaissance de dette en deux exemplaires. Je l’ai toujours pensé, le désert sera toujours un excellent moyen de faire des rencontres profitables et de joindre l’utile à l’agréable. Mais compte pas sur nous pour jouer les compagnons de route.

 

– Pas besoin, ça me retarderait. On se retrouvera sur le navire de la reine pour solde de tout compte, avec intérêts.

 

L’idée d’être enfermée quelques instants en face-à-face avec la reine émoustillait plus que jamais Amétatla. Elle alla elle-même choisir le chameau sur le parking de la chamellerie voisine, en ordonnant à un employé de faire rapidement à la bestiole son plein d’eau et de fourrage. Elle préféra prendre une femelle, pour éviter à son maître les départs intempestifs et dangereux. La feuille de route de Veuquetum était on ne peut plus simple, il lui fallait foncer à brides abattues au milieu des dunes pour griller de vitesse les bateaux philistins. De leur côté, Valisensoùth et Mer-Amen Tesmich nourrissaient sans le savoir en secret des pensées identiques, puisqu’ils étaient au départ motivés pour la pharaonne d’intentions assassines. Une décapitation providentielle de la tête couronnée par les Philistins aurait été admirablement utile à mener ces sombres plans à bien, en les dédouanant au passage de toute responsabilité. Par une communion d’idées muettes, ils se trouvèrent pourtant en phase sur une conclusion identique, en se disant qu’ils avaient plus à craindre des manigances de Ramassidkouch et de Schrèptètnuptèt, même en ayant accompli leur sombre mission. Ainsi, tous deux furent animés d’un certain élan rédemptoire qui les poussa à renier leurs précédents employeurs. Ils auraient en revanche beaucoup de choses à dire à Néefièretarée lorsqu’ils la verraient, sur la trahison effective de sa petite famille. Vequetum perdit encore un peu de temps avec l’Egyptienne d’Assurance, laquelle couvrait les risques de dommages causés à un tiers par son chameau, de sorte que Valisensoùth et Mer-Amen Tesmich réussirent à le convaincre en définitif de partir avec lui. Tépénib restait donc seul avec sa femme et sa fille pour veiller sur la caravane. Tout le monde se donna rendez-vous dans le bateau de la reine. Plaçant dans sa ceinture son papyrus de « contrat émis en main avec assurance », Vequetum fouetta les flancs de son haut coursier au pelage vieil ivoire, les autres tapèrent sur les couilles des leurs, frissons garantis, puis le trio résolu s’élança vers les berges du Nil. Le vénérable fleuve éternel chantait dans ses flots son rêve et sa nostalgie du temps où l’humain n’existait pas, de sorte que ses vagues n‘étaient jamais polluées par les bédouins. Les messagers n’avaient cependant pas le loisir de l’admirer et circulaient à bonne distance des rives, afin de pas être vus par les Philistins. Ils se mirent d’accord sur le fait que le meilleur itinéraire passait forcément par la ligne droite. Par un coup de chance extraordinaire, les pirates avaient décidé entre-temps de piller un village pour se ravitailler en bière, ce qui offrait aux trois hommes le bénéfice d’une avance confortable.

 

Néefièretarée continuait son périple avec escale libre à bord de son imposant voilier le Pamalrâssé, sans compter les pourboires en sus au personnel et surtout sans se douter du danger qu’elle courait. Grisées par les continuelles animations de musiques et de danses, la reine et son amie Trêmouatoli profitaient avec bonheur de leur excursion en cabine intérieure, taxes portuaires incluses. Le soleil étincelant, le bleu intense du ciel radieux se reflétant sur les eaux limpides incitaient plus que jamais aux séances de bronzage sur le pont. Alors que les femmes s’étalaient sur le bide de la crème de concombre, allongées voluptueusement sur leur transat, elles virent approcher par la terre trois chameliers, des types énervés qui agitaient les bras en poussant de grands cris pour attirer l’attention. Foulant les tapis en peaux de panthère, le général Merdenkorinnanâr vint peu après prévenir la pharaonne que Vequetum Fourlanus était de retour, et que de nombreux bateaux Philistins mal intentionnés s’approchaient sur le Nil.

 

– Comment ça revenu ? Je savais bien qu’un romain ne pouvait pas faire le boulot.

 

– Apparemment ses Shardanes et lui ont été attaqués. En attendant, je protège tes arrières avec mes gars. Toi, il faut te réfugier dans Halopolis, la ville n’est qu’à une demi-journée en aval. Avec de bons coups de rames, le Pamalrâssé y sera rapidement.
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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:31:58
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Posté le 21-08-2016 à 14:20:34  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 15.

 

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Printemps 1967. Quatre ans après la mort de papi Léon, Mr le Baron de la Tronchedecon a racheté les terres et la ferme du grand-père. Si le notable exploite les modestes champs qui viennent s’ajouter à sa vaste exploitation, la vieille longère et ses dépendances sont en revanche à présent occupées par sa fille Marie-Charlotte, qui fume de la drogue et traîne toute la journée les seins à l’air avec la bande de hippies qu‘elle héberge. Quelques gamines en robes à fleur avec des gars chevelus habillés comme aux colonies et provenant de tous les pays. Revenue d’un trip en Californie pour ses études, la jeune héritière chamboulée par ce voyage a décidé de teindre ses cheveux au henné, puis de jeter aux orties les valeurs immuables et les traditions aristocratiques de ses riches parents. Dans l’ancienne baraque en pierre de Léon, s’agite au son des tambourins et sous les yeux suspicieux des habitants de Troubled une joyeuse communauté plongée au sein d’un fameux bordel permanent. Bien qu’il désapprouve évidemment les frasques scandaleux de sa propre fille parfumée au patchouli, le baron finance malgré lui le remplissage du frigo et toute l‘approche matérielle nécessaire au confort de la tribu. Au cours de sa tournée, l’épicière Marité Hissedru prend souvent sa 4L fourgonnette pour aller ravitailler à domicile la maison du bonheur et parfois, elle reste manger du riz complet et y passe la nuit au bras d’un beau gosse défoncé, qui lui fait l’amour dans une langue inconnue. Ernestine et Alcyme Boudiou, les plus proches voisins de cette bande d’agités, ont ajouté plusieurs rangées de barbelés sur leurs talus. Comme en 14 au chemin des Dames, et celui qui passe quand même - pan dans sa gueule ! - a plusieurs fois averti le grand-père de Gaston, qui tire parfois en l’air dans sa cour au fusil de chasse, quand il aperçoit au loin un ces animaux collectifs, pour bien montrer sa résolution de combattre pied à pied le péril jeune. Et après, il jettera la bestiole à l’accent british au fond de son puits. L’ancien gazé au teint rougeaud n’a jamais pu supporter l’irrévérence. De leur côté, les potes hirsutes de Marie-Charlotte ont finalement renoncé à coller en douce du LSD dans le pain hebdomadaire des vieux, également livré par Marité. Enfin, partie remise. En réalité, les amis de Mlle de la Tronchedecon ne sont pas si nombreux à occuper en permanence la ferme désaffectée au son du Pink Floyd, vu qu’ils passent leur vie d’oisifs à errer autour du monde, le plus loin possible de la société de consommation. Bien entendu, Gaston et Angèle ont l’interdiction formelle d’approcher la petite communauté d’artistes cosmopolites qui fait tant scandale dans la région, cette bande d‘illuminés poilus qui visiblement à une certaine vocation à s‘étendre, puisqu‘elle ne cesse de recevoir de nouveaux membres.  

 

Peu à peu, Gaston est passé du petit chéri au grand gaillard, puisqu’à quatorze ans il a déjà sa taille d’adulte et une pensée précocement amusée par la fonction logarithme népérien. Avec sa paire de jumelles héritée de papi, il occupe aussi beaucoup de temps à la fenêtre de sa chambre pour mater avec plaisir les jeunes filles enfumées qui dansent nues dans le jardin de Marie-Charlotte. L’ancienne fermette de Léon est assurément devenue un haut lieu d’expérimentation totalement ouvert sur un nouveau monde. Dès lors, renseigné par un instinct visionnaire étonnant, Gaston peut annoncer à sa sœur le déclin des pratiques pastorales, la désertification des campagnes et l’avènement proche du secteur tertiaire dans les prochaines années. En général, Angèle décroche lorsqu’il s’égare sur la fonction exponentielle. A la radio, France Gall chante qu’Annie aime les sucettes et tous les jours, Gaston Boudiou s‘aperçoit dans ses jumelles que ses voisines aussi. C’est ainsi que, par la grâce d’un grossissement 12x50, le jeune garçon recevra visuellement ses premières initiations érotiques. Quatre ans plus tôt, il a quitté les scouts tout de suite après le camp de Bripue, bien évidemment encouragé dans cette démission par l’abbé Julio, échaudé par cette histoire d’apparition soudaine de Marie mère de Jésus. L’instituteur a simplement insisté auprès d’Ernestine sur le fait que Gaston ne pouvait faire un bon scout, puisqu’il était trop frêle, trop imaginatif et beaucoup trop sensible pour intégrer sa troupe. Alcyme a ravalé en douce sa honte d’avoir un réformé dans la famille, et puis, au gré des gnons collés aux saligauds de Pleurotte-les-bois, son petit-fils a terminé son temps à l’école communale pour entrer au collège de Troulbled. Jean Micheton est resté le meilleur copain de Gaston et les deux amis se montrent à chaque congé inséparables, grimpés sur leurs vélos pour arpenter ensemble les chemins creux qui sillonnent le pays. Jean a finalement échappé de justesse au placement en famille d’accueil lors de l’envoi de son père en hôpital psychiatrique et vit finalement seul dans sa maison squattée par douze chats persans, avec une mère au cerveau infesté par les zombies. Sa jeune sœur a trouvé du travail à l’usine d’aliment pour bétail, mais n’a toujours pas rencontré un père fiable pour son gosse de trois ans. Vilipendée par les bigotes de la ville et auto-bannie pour toujours de l’église, ce n’est pas à Joëlle Micheton que l’on va apprendre que foi et pardon sont à géométrie variable. A l’instar de Gaston et Jean, Angèle et Joëlle sont devenues de vraies amies en dépit de leur écart d’âge, et Angèle joue souvent en cas de besoin la baby-sitter pour le gamin de la jeune fille-mère. Alertée par ses rudiments de connaissances médicales, la sœur de Gaston est de son côté totalement obsédée par sa crainte d’attraper la poliomyélite, avec une paralysie irréversible qui ruinerait se future carrière d’actrice de cinéma. Sans parler des papillomavirus humains qui la guettent en silence. En attendant de monter à paris pour devenir starlette, elle passe beaucoup de temps à se bichonner devant le miroir de la salle de bain.

 

– Gaston, prend ton vélo et va m‘acheter de la lessive Bonux, je n’en ai plus, demande un matin mémé Ernestine en lâchant la lecture du catalogue, où elle est en train d’admirer la publicité pour les machines à laver.

 

Et c’est comme ça, fièrement dressé en danseuse sur son demi-course Peugeot à boyaux, que Gaston Boudiou va se rendre chez la belle épicière Marité Hissedru afin d’y connaître l‘un des plus beaux jours de sa vie, suivi d‘un summer of love très personnel.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:33:25
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talbazar
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Posté le 24-08-2016 à 09:28:38  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 12.

 

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Mirlen ne dormait point, car mille pensées chahutaient dans sa tête chenue. A ses côtés ronflaient sous les peaux d’ours les chevaliers Erald, Hivalanoué et sieur William, tout près de monsieur nain Belbit le Huelabit. Il régnait dans la yourte l’odeur âcre du fromage de jument qui se mêlait à celle plus vigoureuse des chaussons usagés. Le mage voyait danser les ombres grises sur les parois de feutre, enfantées par sa petite chandelle à moitié moribonde. Un court instant, dans la tente de Raklur qui se trouvait toute proche, on entendit deux fois crier la Zénobite. D’autres campeurs, bien que l’heure soit tardive, s’en allaient prendre douche. Sur le doux mur en laine, les yeux ouverts du magicien distinguaient de nombreuses silhouettes s’agiter dans son rêve éveillé. Celle de la reine Amanda Blair d’abord, dont les gestes et les mots trahissaient son âme tourmentée, puisqu’elle se dévastait en vain son petit trou d’amour avec toutes sortes d’accessoires, sans jamais parvenir à se donner gaieté ; puis ce fut l’armada de ses bateaux de guerre qui s’élançaient en masse sur le vaste océan. D’autres de ses piquiers grouillaient comme fourmis en passant par les terres, pour semer cataclysme dans le royaume de Mouyse, afin d‘y apporter la paix et la prospérité. Perdu dans ses visions, Mirlen s’interdisait de porter jugement, laissant seule Sainte Kramouille arbitrer le grand monde qu’elle a peuplé d’hommes libres. Les temps troublés, cependant, ne les donnaient plus frères et l’heure sonnait à la bataille, car leur amour n’était plus partagé. La déferlante des armées s’effaça, pour laisser place à l’image d’un beau plant de pinette sorceresse qui ployait sous le vent d‘altitude, cette fleur exceptionnelle qui devait orgasmer la majesté du Fion, noble amatrice des officiers dragons, my lady l’imburnée, reine des mandales, pleine des derniers hommes, à l’instar de cette chanceuse de Zénobite, qu’on entendit brailler une nouvelle fois juste à côté. L’Hyperbourrée du Minouland entrait en guerre, mais un autre conflit enflait rapidement sur les terres du Poingé, car les cannibales Onkulés descendus du Mont Velu marchaient sournoisement en direction des grottes Bozobites. Ils venaient réclamer ce roi-démon que la pauvre Helga leur avait malgré elle délivré, alors que chez les Troglobites, deux puissances régionales décidaient de s‘affronter. Le magicien Mirlen accusait âge, stress et douloureuse fatigue. Il souffla finalement sur sa chandelle pour éteindre ses visions, laissant l’obscurité vivre des ronflements de ses amis, tous endormis sur les tapis. Les jeux malgré tout n’étaient pas faits, et dès le lendemain, le ténébreux Raklur de Bidet fit mander devant lui ses prisonniers. L’esclave Zénobite se tenait allongée au pied du trône de son maître, sans doute un poil trop fatiguée.

 

– Ayoye, commença Raklur, en s’adressant plus particulièrement aux oreilles de Brakemar à la braguette velue. J’ai tout ben réfléchi vois t’en, parce que je pense que t’es pas le genre à mettre les pouces en bas, pis moué non plus. Ce que je te propose de faire à nous autres, c’t’un osti de combat loyal entre toué et pis moué. Pis le gagnant, y sera déclaré vrai père du mioche. A pas de quoi piquer la jasette plus longtemps là-dessus. T’en topes tsu ?

 

– T’as ben raison, tabarnak, on va pas fucker la chienne de dessus c’t’affaire là plus longtemps. En bons pères de famille, allons-y voir dre-là se magasiner des claques.

 

On cogna sur le champ les fessiers des lamas et celui des chevaux pour faire la place, puis l’on rendit toutes ses armes à Brakemar. Consolé dans les bras secourables de sa cousine Agrippepine, Monoïsurmékos pleurait à chaudes larmes, mais il savait que la décision de ses pères était irrévocable. Tous firent un large cercle pour laisser les deux hommes mener à bien l’opération coup de poing, laquelle s‘annonçait en vérité potentiellement violente.

 

– Je sens que tu viens dans tes shorts, cré tawouin de niaiseux ! fit Raklur sur un ton de défi, en plaçant l’épée haute.

 

– Et toué, t’es ben sur ton air d’aller. Viens t’en donc recevoir ta morniffe, prend ta chance, nono, t’auras pas deux ! Ou bedonc tsu préfères bisouiller mon trou de cul ?

 

Les adversaires se jetèrent l’un sur l’autre pour un combat splendide, sans jamais se laisser une seule seconde de répit. Ils jouaient des jambes, épris tout pareillement de hardement pour s’envoyer leurs coups. Pas un des Troglobites présents n’avaient en remembrance un duel aussi fougueux, ni le souvenir d’un tel périlleux massacre, car aucun des deux combattants n‘était jugé en couardise. Les hommes de Raklur saluaient leur chef à chaque attaque, les Bozobis faisaient de même pour saluer l’estoc habile de leur Brakemar. On ne pouvait compter les hauts faits, tant les feintes se révélaient nombreuses, avec une part égale de force et de sens. Raklur plongeait en grande prouesse sur l’adversaire, frappant avec une brutale précision, Brakemar contrait du bouclier, voltait et rendait dent pour dent, puis payait l’assaillant d’une cuisante chaleur sur les hanches. Les deux tailladés ne tardèrent pas à se couvrir de vermillon. L’assemblée hurlait, Agrippepine priait, Monoïsurmékos pleurait, tous deux aussi pâles qu’affligés, et le combat de justice s’éternisait. Acharnés à leur perte, ni Brakemar ni Raklur ne faisaient charité, puisqu‘à l‘issu de la boucherie en cours, un seul se verrait demeurer, et plus jamais d‘amour ne jouirait. De brefs instants, l’acier ne sonnait plus et les épées lassent reposaient, alors les bretteurs s’assaillaient de moqueries, jusqu’à reprendre encore leur douloureuse besogne et de retour, le sang giclait en grandes coulées sur les tuniques déchirées, pour offrir aux regards un spectacle effroyable. Au gré des cabrioles, Raklur perça Brakemar au bras, mais ce dernier vexé choqua l’épée pour le punir et découpa avec habileté le cuir de la courroie de son écu. Les pieds des deux dansèrent la gigue brièvement, et puis, comme il n’avait plus rien pour se couvrir, Raklur de bidet fut enfin traversé de part en part par le fer de l’épée tout entier, jusqu’à la garde, en jetant sur le monde un dernier regard ébahi. Le duel acharné se termina ainsi, par la mort effective du roi nomade qui s’affala de tout son long dans l’herbe rougie. Il y eut chez ses guerriers un moment de flottement, mais Sainte Kramouille venait de parler en donnant la victoire au Bozobi, déclaré le seul père sur la terre de Monoïsurmékos. Ce dernier se précipita sur le rebelle terrassé, et une triste pitié coulait de ses yeux, mais on ne pouvait nier que son daron adoptif, pourtant comme chacun sait boiteux, venait sans faillir de triompher de son rival, par conclusion de divine et mortelle procédure. Agrippepine elle-aussi était tombée à terre, car elle allait bientôt se vêtir de robe noire, pour honorer le deuil de son oncle, car le défunt Raklur était le demi-frère de son père. Le camp nomade n’avait plus de chef et du même coup, pour les habitants de la grotte de Bozob, le risque de guerre s’éloignait. En jetant un regard à la ronde, Mirlen de La Pérouse fut soulagé de constater que dans les rangs des guerriers de Raklur, il ne semblait point y avoir d’appel à vocation, pour reprendre après celui-ci le flambeau de la rébellion.

 

– Allons, fit Brakemar en laissant Zénobite s’occuper de sa vilaine blessure sanguinolente, le roi Karbone accordera volontiers son pardon à des mangeux de marde comme vous-autres. Venez tous à suivre, osti de câlisse, on go à l'maison.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:34:35
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talbazar
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Posté le 25-08-2016 à 12:38:33  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - Extrait numéro 26.

 

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Guidé par la lumière saccadée de l’enseigne au néon, Barracuda N’Dyé se gara à un jet de pierre du Tripoli, puis il éteignit ses phares. Il ne descendit pas tout de suite de sa voiture, histoire de surveiller un moment les allées et venues autour du boxon. Guy Ness avait révélé la présence de la vieille patronne de ce club dans les alpes, mais également l’intuition de Martin Smith sur le fait que Blanche Pearl se trouvait en cheville avec les magouilles de l’institut nommé les Flocons d’argent. C’était même en essayant de suivre sa trace que le privé venait de se jeter dans la gueule du loup. Seulement voilà, la mémé restait introuvable et ne semblait pas avoir réintégré son petit commerce. L’inspecteur se demandait donc qui assurait pour l’instant l’intérim à la tête du bordel, dont la signalétique racoleuse lançait à présent de puissants flash rouges sur le capot de sa voiture. Il avait dans ses fiches les tronches de tout le personnel, mais Vaya Condios manquerait forcément à l’appel. Et pour cause. Il venait là seul et en douce, mais sans doute aurait-il mieux valu prévenir ses collègues de la petite visite qu’il comptait faire, trop tard maintenant, finit-il par conclure. De lourds nuages d’orage s’étaient lentement abattus sur la ville toute la soirée, ils se décidèrent finalement à lâcher quelques gouttes minuscules sur le pare-brise. Une fausse pluie ridicule, qui en annonçait forcément une plus vigoureuse dans la nuit. Un vrai temps de merde pour la saison. Peu gêné pour l’instant par la constellation liquide qui picorait ses vitres, Barracuda vit rentrer des clients, le plus souvent des hommes seuls en quête de chair fraîche. Des inconnus. Les agaçants rayons de lumière sporadique qui transformaient sa bagnole en sapin de noël commençaient à lui casser les burnes, il s‘apprêtât à pénétrer dans la boîte. Il patienta toutefois un peu, lorsqu’il vit dans son rétroviseur deux femmes rentrer par la porte de service. Nicotine Queen et La Mouche, il avait soigneusement consulté leur CV. Les partenaires de jeux ponctuelles de ces messieurs, avec dans leur soutien-gorge une ergonomie forcément optimisée. Il était parfaitement clair que les amateurs de ces dames ne venaient pas dans cet endroit pour se taper un documentaire ennuyeux sur les indiens Guarani. Le policier grinça des dents, l’enquête qui débutait venait de prouver que cette ordure de F. Gordon Strazdinovsky avait disséqué deux enfants pour ses ignobles expériences, sans parler du fait qu‘il avait réussi à créer un horrible monstre. Le type avait sans doute enlevé ou buté Smith et Condios, et il était toujours recherché. Confié aux experts scientifiques, le fameux carnet se taisait toujours. Confiné comme il se trouvait dans son véhicule continuellement léché par les feux de l‘enseigne, l’ambiance devenait franchement désagréable pour Barracuda ; il se décida à ouvrir la portière puis se dirigea vers l’auvent de l’entrée du Tripoli. Une garce de pluie froide commençait vraiment à s’abattre sur le trottoir, il hâta son pas, en se protégeant la tête de la main. On le laissa rentrer sans problème.

 

A l’intérieur, Gypsy Sorrow faisait le show. Seule sur la scène, la malicieuse Strip teaseuse aux gants de satin démesurés s’attardait savamment à débrider lentement l’imaginaire des attablés. Loin des acrobaties de cirque, la jeune femme en tenue légère se déhanchait simplement sur une musique appropriée. Sans lâcher pour autant l’effeuilleuse des yeux, Barracuda fila directement vers le bar. C’était Vénus Jade qui remplaçait Vaya derrière le zinc. A la demande du flic, l’eurasienne aux longs cheveux noirs lui servit sans sourire un Grasshopper concocté à la perfection. La magnifique barmaid n’offrit simplement qu’une moue dégoutée à la vue du costard humide de son client.

 

– Elle est pas là, la patronne ?

 

– Qu’est-ce que ça peut vous foutre ?

 

– J’avais rendez-vous.

 

– Ah, ça m’étonnerait beaucoup.

 

Vénus Jade le planta là sans plus de façon, pour lui laisser le loisir de rêver deux minutes sur les tressautements subtils de son petit cul semi-asiatique. Vu qu’il n’était pas en service, il était difficile d’insister, mais il veillerait à ce que l’administration ferme ce bordel le plus vite possible. Autant glander là en attendant, à siroter son délicieux cocktail, en essayant de se faire son propre compte-rendu. La petite bol de riz s’éclipsa un court instant, mais dans la pénombre, il ne vit pas où elle se rendait. Lorsqu’elle revint, elle lui jeta brièvement un regard dur et inquisiteur, puis l’oublia pour s’affairer à servir deux mecs déjà bourrés. Sans qu’elles ne s’échangent de paroles, Maria Goulue vint la rejoindre pour délester un seau à champagne de sa bouteille vide. La pute ouvrit le frigo pour s’emparer d’une pleine, qu‘elle ne déboucha pas mais immergea dans de nouveaux glaçons, puis elle s’en alla pour satisfaire sans doute un nouveau client. Gypsy Sorrow en était à faire tomber le haut, fascinant ses bonhommes avec une réelle efficacité. Tout en lichant son verre, Barracuda approuvait lui aussi logiquement ses méthodes de travail. Cinq bonnes minutes plus tard elle faisait tomber le bas, assaillie d’une multitude de regards concupiscents. Elle quitta la scène sous les applaudissements, avant de laisser la place à la chanteuse Câline Grosby, qui possédait une voix de métal et de velours mêlés. Barracuda fit signe à Vénus de lui servir cette fois un Jhon Collins, elle s’exécuta aussitôt. Un type impatient s’installa sans façon juste à côté de lui, à lui toucher le coude.

 

– Tu bois et tu dégages.

 

– Du calme, Sugar Daddy.

 

– On se connaît ? L’autre avait l’air franchement surpris, mais il se fit instantanément plus sombre.

 

– T’occupes, je veux juste savoir qui dirige les manettes ici, en l’absence de Blanche.

 

– Un putain de flic, c’est ça ?

 

– C’est ça.

 

– C’était bête et franchement dangereux de ramener ta gueule ici. Sugar Daddy pointait à présent discrètement un pistolet sur le ventre de son interlocuteur.

 

– Hé, je voulais juste causer, mais pas forcément avec toi.

 

– Bon, d’accord, mais pas ici, suis-moi.

 

Ils montèrent à l’étage, où ils croisèrent en passant La Mouche et Wanna Toktouyou, quasiment à poil. Barracuda savait pertinemment qu’il était en train de faire une très grosse connerie. Sugar Daddy cramponnait à présent son pétard sans scrupule, mais une fois qu’il eut délesté l’inspecteur du sien, il se décida à ouvrir la porte du bureau de Pearl, sans frapper. Avec un choc auquel il ne s’attendait pas, N’Dyé se retrouva subitement en face de Vaya Condios, en chair et en os, et visiblement très bien portante dans sa somptueuse robe d‘un rouge éclatant.

 

– Vaya, mais que faites vous ici, où est Martin ?

 

La jeune femme se contenta d’abord de lui servir une moue ironique, puis, comme amusée, elle se déplaça légèrement sur la gauche. Un petit bout de langue rose pointa finalement entre ses lèvres sensuelles.

 

–  Pauvre con.

 

Trop surpris par l’étonnante apparition qui le laissait bouche-bée, l’inspecteur oublia complètement de surveiller ses arrières. Sugar Daddy avait entre temps vissé un long silencieux au canon de son gun. Il releva lentement ce dernier, puis, avec un geste empli de précision, il tira sans trembler dans la nuque du visiteur.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:36:36
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Posté le 28-08-2016 à 08:21:02  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La Jet larguée - Extrait numéro 08.

 

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Assise sur le siège jouxtant celui de Vic, Shirley avait pâli. Elle ne pouvait se résoudre à admettre que ce vol vers le Boukistan puisse être son ultime mission. Il était quand même un peu déprimant de penser que Steward puisse figurer le dernier mec de sa vie. Elle espérait un gars largement plus solide pour incarner un jour le père de ses enfants. Un garçon et une fille, forcément, mais surtout pas de jumeaux. En se remémorant la procédure et les conseils pratiques à ordonner pour assurer une possible évacuation d’urgence, Shirley s’en voulait un peu d’avoir si brutalement brisé le rêve de son amant. Après tout, il paraissait vraiment sincère en lui déclarant son amour et sa proposition de mariage n’était visiblement pas bidon. L’hôtesse se rappelait avec une nostalgie touchante de leurs premiers cours de planche à voile pris en commun à Copacabana, de leurs folles soirées en discothèques à ciel ouvert aux quatre coins du monde, de leurs chaudes nuits blanches en hôtel-club et du rigolo partage matinal de leur peignoir. Non, le pauvre Steward avouait ce qu’il éprouvait à l’égard de sa blonde et ne méritait certainement pas de se faire traiter de mytho aussi brutalement. Surtout qu’en remontant à la source de leur histoire d‘amour, c’était bien elle qui avait commencé par le draguer. Peut-être voulait-elle simplement se prouver qu’elle chopperait le petit lover des airs pour elle toute seule ? Elle essaya tant bien que mal de se broder des arguments pour évacuer toute culpabilité, mais le supplice rétrospectif se révélait tenace. Et pourtant, elle venait de lui jeter l’éponge sans trop de regret, à quoi bon se torturer davantage ? Au diable les soirées ébouriffées seule en tête à tête avec lui ! Sur les écrans, le circuit vidéo passait en boucle les actualités commerciales de la Petro Jelly, en french version sous-titrée coréen ; avec en prime, pour illustrer le débat, le sourire idéal de Wanda Vasline en gros plan, laquelle buvait constamment de la flotte au goulot sur un fond flouté de faux palmiers. De la bonne pub, mais le tout formulait surtout un message de menace à peine subliminale adressé aux fabricants d’eau minérale « Fées de la source », pour qu’ils revoient leurs prétentions à la baisse, s‘ils voulaient toujours abreuver la PJ. Mais pour les passagers en proie à un sentiment d’angoisse diffuse, plus question en revanche d’informations en temps réel provenant du cockpit. Avant de s’attacher laborieusement, Kinni avait encore sifflé deux ou trois verres de sky single malt, avec pour malheureuse conséquence de lui faire dramatiquement baisser la garde. Au lieu de maintenir bouche close, elle avait en effet discrètement confié la raison de la soudaine consigne à l’un des fabricants en trois-huit du pâté Strakouilh, presque aussi déchiré qu’elle. Rapidement, l’affaire du pare-brise souillé s’ébruitait de la queue à la tête de l’avion et déjà, les reconduits à la frontière Boukistanais voulaient porter plainte, alors que les agents spéciaux Al Azif Youkhan et Abdoul Alhzobdarqred restaient quand à eux totalement impassibles.

 

A l‘étage, Lola et Pamela avaient distribué largement rhum vieux et cigares cubains, puis fourré le petit Perlin à l’abri dans son sac en toile, dans lequel il pissa aussitôt abondamment. Sévèrement agités, les militants du Puppies Rights Watch promettaient de s’organiser. Ils avaient décidé d’utiliser quelques couvertures en guise de banderoles de fortune, pour manifester et protester énergiquement contre le lâche assassinat des colibris innocents. Entré en phase pré-extatique, Eloi de Pouillet appelait à la prière, bien que sa religion innovante issue de ses propres révélations soit encore en réalité inconnue par tout le monde, mais promise selon lui à un avenir qui promettait à l‘univers de vaincre sa souillure. Les actrices porno s’engageaient solennellement à faire l’amour à tous les hommes et femmes de l’appareil avant le crash, et Brandon Poutrelle précisait tout de même que ça ne serait pas pour autant gratuit. Le général d’infanterie Karl Ashnigof réclamait une réponse ferme et appropriée aux attaques d’oiseaux, aussitôt hué par les protecteurs de chiots, qui lui répondirent que ce long-courrier n‘était pas un avion de chasse. Hors de toute polémique, Georges Pinson et les Pinsonnettes tapaient joyeusement en cadence dans leurs mains pour garder le moral. A l’instar de ses collègues, Moktar Bouif ne révélait aucun sentiment, contrairement aux botanistes Pierre Simon Langevin et Paul Laplace, qui réclamaient avec insistance de se rendre aux côté des pilotes pour essayer de déterminer avec exactitude l’espèce des colibris incriminés, et leur place exacte dans la famille des Trochilidés. A leur suite, la directrice de revue Marthe Lagourdass et ses deux squelettes spécialisés dans le mannequinat réclamaient de la part des hôtesses la plus grande transparence, pour un voyage 100% infos. Le présentateur météo Woody Woudspeaker exigeait pour sa part l’exclusivité du reportage et son seul témoignage pour les Etats-Unis, en cas d’atterrissage réussi.

 

Dans le poste de pilotage, il n’était toutefois nullement question d’atterrir. Bien au contraire, encouragé par ce sentiment de liberté qui l’animait depuis son enfance, Steven contrôlait le vecteur vitesse et les chevrons d'énergie, puis se concentrait sur le pylône central pour pousser à fond les manettes des commandes de puissance des quatre moteurs, à s’en faire péter la sonde Pilot. Bercé par un bruit permanent de sèche-cheveux, manuel du constructeur entre les dents, Jack avait les yeux rivés sur les écrans ECAM, tout en jouant habilement du pied sur le palonnier, comme un breton encore lucide danse seul la gavotte en rentrant chez lui. Assombrissant la cabine d‘une manière inquiétante, un large glacis de merde exotique sanguinolente couvrait toujours l’intégralité du champ de vision, mais on ne signalait heureusement aucune inquiétante fissure des vitres. Un colibri ne sera jamais un pélican. Le sol était prévenu, on grimpait, Roméo Juliette on est tous Charlie et compagnie, puisque coûte que coûte, fallait maintenant trouver de la pluie. Alors qu’on volait aux instruments et qu‘on bataillait à l‘aveugle, Kim et Kurt avaient été autorisés à rester avec les pilotes pour servir de relais constant avec Loraine. L’hôtesse n’osait pas contredire le captain Steven, aussi s’adressa-t-elle à jack-André :

 

– Hey Tintin, t’es au courant que là où on va il n’y a plus de nuages, mais qu’en revanche, on ne va pas tarder à rejoindre la station spatiale ?

 

Steven demanda le silence, car il recevait l’info dans ses écouteurs qu’un 737 de la Well Transit précédait leur trajectoire, 500 pieds sous eux. Le commandant prit un air réjoui, fit un bisou virtuel au variomètre, se prépara à incliner l’avion à 25°, mais se contenta pour les autres d’un commentaire laconique :

 

– Sauvés.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:38:22
n°46906072
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 29-08-2016 à 09:37:34  profilanswer
 

Archaïsmes et présence archéologique.

 

Aujourd'hui : Le mur d'Adrien.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:39:34
n°46934145
talbazar
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Posté le 31-08-2016 à 15:11:32  profilanswer
 

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Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 13.

 

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Sur le pont balayé d’embruns de la caravelle Tatie Nique, se trouvaient réunis Gaëtan Manquedamour, son capitaine, avec le seigneur Gaëtan Maldemer de Posegalettabord amiral de la flotte, et le capitaine-chevalier Franquette de Labonne, général en chef des troupes, grand vizir du Fion. Les trois hommes discutaient en profitant de la douceur marine, sous la faible lueur du fanal de poupe, lanterne qui n’était pas conçue en vue d’éclairer, mais pour que le navire soit aperçu du reste de l’escadre qui les suivait sagement. Selon une obscure théorie complotiste, il se disait que dans la lampe brûlaient en réalité les âmes de marins noyés. Assis sur des tonneaux, le trio entonnait à présent gaiement en savourant la soirée, car il avait pioché du boujaron pour transvaser dans ses timbales d’argent quelque seizième de pinte du brûlant tord-boyaux qu‘on avait embarqué.

 

– Il est encore trop tôt pour recevoir poularde messagère de Gaultier Quilamolle, qui nous suit par les terres, fit Franquette.

 

– Portés par ce bon vent, nous arriverons bien avant ses piétons aux abords des remparts de Mouyse, répondit Gaëtan Maldemer, mais nous aurons sans doute la frisqueté de bien vouloir l’attendre pour démarrer la lutte.

 

– Hélas, intervint Gaëtan Manquedamour, ce n’est pas notre seule victoire qui sera suffisante pour faire entrer la bonne reine Amanda en pâmoison !

 

Avec un peu de retard, réveillant l’équipage qui menaça du fouet, la vigie perchée sur la hune hurla que l’armada entrait en nuit. Tous furent pris d’une immense pitié pour la première dame du Fion et son histoire douloureuse, car si chacun dans le royaume, du moindre valet au précieux marquis, a sincèrement cherché à lui raidir les pattes, oncques ne la vit jamais pâmée au fond de son baldaquin, devenu à ce jour aussi glacé qu’une dure bière de plomb.

 

– Son mal issu de diablerie empire chaque jour, mais nous ferons justice en frappant l’Ovoïde à la joue. Amanda part en guerre, crie vengeance et nous sommes ses barons, beau gentil sire, fit de Labonne en cognant sa chopine sur celle de Maldemer.

 

– Oui, et nous ne sommes pas seuls. Les bons vassaux Duc de Médeux, Robinet Atétard, Vladimir Poustapine et Richard Beurre de Fion n’ont point rompu fétu, car ils nous suivent à présent hardiment pour la farouche mêlée, les uns dans nos bateaux, les autres par les bois.

 

– Oui messieurs, et nous avons courage et vivres pour cent jours. Très bientôt, nous hisserons le drapeau sur le château de Mouyse, et que Kramouille nous patafiole si nous perdons !

 

– Topons là et trinquons !

 

Et puis, les bravos prenant le dessus, tous les trois descendirent à la coquerie pour y croquer quelques mangeailles et soulager leur cuite. Comme ils ne pouvaient deviner la mort de Gisèle, ils discutèrent un temps sur le fait que Vazy Métoian usait de sorcellerie, ce qui les fit trouiller un peu. Mais à présent que les ancres se voyaient remontées et que la météo soit bonne ou mauvaise, il fallait avancer, cap à l’est, en prenant garde de ne point dériver. Après s’être accordés sur la constatation que le timonier de la Tatie Nique faisait un poil pédé, on se salua sur la formule qui les ralliait : « Amanda Blairiscus Kramouille gratia Fionnais regina regnat ! », laquelle était gravée en lettre d’or sur les bannières qu’ils emportaient en soutes. Franquette de Labonne alla donc retrouver sa cabine vers le gaillard d‘arrière, afin de consulter une dernière fois ses cartes, puis s’allonger pour s’endormir sur son petit hamac de drap blanc. Mais il tarda cependant à trouver le sommeil. Bientôt l’apocalypse s’abattrait sur la cité de Mouyse, car son boulot constituait à en tenir la prise, en tant que nouveau vizir du Fion. Sa plus grande satisfaction serait de rentrer victorieux et de voir Amanda souriante et ravie du bon carnage qu’il aurait accompli. Un rêve qui en appelait un autre, vu que s’il parvenait à orgasmer en plus sa majesté, cela lui promettrait de porter la couronne à ses côtés. Si la grande brune se voyait par ses soins déchainée, son propre règne promettait d’être long. Il se voyait déjà attablé dans la salle du conseil du château royal, en train de ratifier un accord sur la non-prolifération des pirates voguant sur la mer de Cybrine. Bien entendu, s’il devait épouser Amanda, il aurait soin de divorcer auparavant de sa mie, la douce Blanche de Pastille, dont il était déjà marié sans enfant. Il n’aurait point  regret de se séparer d’elle, puisqu’il était déjà cent fois cocu. Parvenir à faire jouir la reine du Fion, n’était-ce-pas là un bel objectif stratégique ? Hélas, les jeux n’étaient point faits pour lui, même s’il commandait à présent les 50 000 épées qui sortiraient bientôt de leur fourreau pour égorger l’ennemi. Quand même, c’était un bien doux rêve qu’il caressait, puisque si de sa part Amanda Blair recevait le ballon, il serait père de l’héritier d’empire, beau dauphin qui par grâce de Kramouille régnerait en génération future sur tout le Minouland. Quoiqu’il en soit, lui vivait pour combattre et jamais il n’accepterait de se voir contraint à reddition. Il ferma finalement les paupières sur une ultime pensée, en se disant que le timonier avait décidément une voix de casserole et des manières de gueuse, à n‘en point douter.

 

Le lendemain le vent tomba. Avec un peu de retard, la vigie annonça du brouillard. Sur l’ordre du capitaine, on lui donna par punition quelques coups du chat à neuf queues. Franquette s’était levé de bonne heure, mais l’amiral était encore cuité. C’est donc seul que le vizir prit son petit-déjeuner au pied du grand mât. En milieu de matinée, le jeune pilote qui devait les guider dans les nouvelles eaux usa d’un tire-quéquette pour décoller du timonier, puis il vint trouver de Labonne afin de l’informer. Entre temps, les deux Gaëtan souffrant de gueule de bois s’étaient enfin montrés.

 

– Beaux messires, avertit le pilote, j’ai le devoir de dire que rien ne va dans les fonds que nous croisons, car notre timonier en soit le témoin, j’ai bien mouillé ma sonde en sa compagnie. Nous n’avons que neuf brasses ici, la chose n’est pas trop normale.

 

Manquedamour vérifia et l’incident fut en effet prouvé. La brume continuait d’envelopper les parages dans son grand linceul blanc et l’on n’y voyait goutte. On emboucha plusieurs fois la corne pour savoir si les autres suivaient, ils répondirent et l’on fut rassurés. Bien que mis à la cape le convoi avançait toujours, et la vigie cria « terre » un peu trop tard, mais on lui pardonna car les bateaux étaient aveugles, sinon sourds. La première, la Tatie Nique s’échoua sur un banc de sable. Le jeune pilote s’exprima, puisqu’il était certain qu’en divaguant, on venait par mégarde d’aborder les côtes de Godapat, une île indépendante dont le trône ne pliait le genoux ni devant Mouyse, ni devant Fion.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:41:12
n°46954938
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 02-09-2016 à 13:12:20  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 34.

 

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La porte ronde en bois joliment décorée s’ouvre par une grosse clé métallique qu’Agmydala confie solennellement à Emeline, alors que Basile tend justement la main pour la recevoir. En observant son air dépité, Charlie et Arnold rient sous cape, puis pénètrent dans la maison. Tous remarquent en passant que la serrure présente un archaïsme proprement exquis. Après avoir franchi le seuil en premier, Kishi demande la permission de tirer les rideaux masquant l’unique hublot, pour éclairer correctement l’intérieur assombri. La pièce révèle de ce fait un confort, certes un peu spartiate et désuet au gré des visiteurs spatiaux, mais non dénué d’un certain charme. Jhon Piol s’avise de tirer à lui un ouvrage des étagères de planchettes rouges farcies de livres manuscrits poussiéreux. Avec surprise, il montre aux autres la petite reliure de feuillets en écorce végétale, et si son écriture semble indéchiffrable, les illustrations qui l’accompagnent évoquent clairement les symboles universels de la nouvelle bibeule épicurienne de son éminence. En imitant son geste, Charlie prend un fascicule à son tour, puis un autre, et encore un suivant, aucun de ces ouvrages n’est imprimé, mais soigneusement calligraphié à la main. Jhon Piol remet soigneusement son tome insolite à sa place, tandis que la reine et sa fille les interpellent pour prendre congé.

 

– Voilà, vous êtes ici chez vous, gens des étoiles. Installez-vous à votre aise pour prendre un peu de repos, il y a des lits pour chacun et l’un de nos domestiques vous apportera bientôt des victuailles. Nous viendrons vous chercher pour vous recevoir au palais, quand il sera temps.

 

Avant de partir en faisant tourner leurs longues robes blanches qui balaient le sol, la mère et la fille ont encore à l’égard des hommes l’un de ces regards lubriques qui déplait tant à Emeline, mais qui offusque clairement moins ses compagnons. Lorsque l’ouverture se referme sur elles, l’équipe se met aussitôt à explorer plus en détail l’habitation. Sur la seule table basse d‘une taille conséquente, un haut tube de verre serti d’un couvercle argenté et rempli de quelque liquide fluorescent d’un bleu intense est posé. Sans doute le réceptacle de microscopiques corpuscules flottants chargés d’améliorer la pénombre des nuits ; bien que ces dernières ne soient jamais totalement obscures. Répartis pour former une sorte d’échafaudage bien agencé dans les parois des murs, il y a effectivement des lits de bons draps dont chacun prend possession à sa guise. Dans ce lieu bien isolé de l‘extérieur, le bruit du labyrinthe tournoyant des rues et des bazars d’Utruss n’est plus audible. Il y règne même un calme impressionnant, propice à la réflexion. Quelques fauteuils fabriqués en végétal savamment tressé, un large canapé rond aux couleurs délicates, mais rien dans l’ameublement pour évoquer des arêtes aigües. La maison et son mobilier forment plaisamment un tout très homogène. En dépit de leur solitude et de toute influence d’une quelconque défédération galactique, les indigènes de Kourdukon s’entourent des instruments appropriés qui leur permettent une vie remarquablement sophistiquée. Des objets d’utilité sociale ou intime qui parfois se dégagent nettement de toute survie élémentaire, et qui viennent prouver à eux seuls l‘existence sur cette planète d’une civilisation à part entière. Toujours exécutées sur cet étrange papier d‘écorce, il y a même de plaisantes gravures accrochées aux murs, sur lesquelles ont peut reconnaître le dessin de plusieurs des créatures qui hantent l’immensité de la jungle. Les naufragés savent cependant qu’un apport technologique qui ne soit pas le fait des habitants bouleverserait profondément les bases de leur existence, il ne peut donc être question de venir remettre en cause leurs connaissances. Ne jamais contaminer les projets d’origine. 8495SK - Rolling Stones n’est pas une colonie, bien qu’ayant à l’évidence reçu un jour le label de consacration de son éminence, et la visite d’un enthousiaste gourou de la nouvelle bibeule épicurienne, en compagnie de ses joyeuses nonnes.

 

– Vous avez-vu ? demande Kishi en s’enfonçant avec satisfaction dans l’un des fauteuils tressé en forme de coupelle accueillante, garnie de coussins pelucheux. Aucun objet ni meuble ne se montre dur ou tranchant, les ombres ne sont jamais lourdes, ici. Toutes les masses sont volontairement adoucies.

 

– C’est assez vrai, lui répond Basile en s’asseyant lui aussi avec volupté. Cette ville est vraiment d’une architecture discrète et bien aimable, bien qu’un peu bruyante, à cause de leurs bagnoles à vapeur. Heureusement qu’il n’y en pas beaucoup.

 

– En tout cas, fait Emeline un peu renfrognée, il faudrait être aveugle pour ne pas comprendre ce que ces bonnes femmes attendent de vous, les gars. Fais bien gaffe à toi, mon Basile, ouais, fais bien gaffe, je te tiens à l‘œil.

 

– Moi,ajoute Charlie, peut-être pour calmer le jeu qui menace un tant soit peu le couple, leurs déguisements me font bien marrer. Quelle idée de s’habiller, c’est tellement indécent.

 

Comme si elle veut leur imposer un silence méditatif, la course du troisième soleil dans le ciel turquoise éclaire un instant d’une douce luminosité rose le séjour aux rayons pleins de livres. Visible par la fenêtre, une haute volute de vapeur blanche se diffuse lentement dans le lointain. Un sifflement étouffé l’accompagne brièvement. Pendant quelques instants, signant une qualité contemplative rare, une teinte singulièrement harmonieuse et chaude se met à unir la forêt proche, le ciel et la ville d‘Utruss. Jusqu’à ce que le grand soleil orangé décide d’y jeter des flammes plus vives, sans doute annonciatrices de la fin du jour. Le dernier soleil se cache, car il a déjà glissé depuis un moment derrière les cimes agitées par un faible vent. Une grosse amibe opalescente recouverte d’écailles gélatineuses flotte un moment devant la vitre, comme si elle voulait s’inviter, puis elle s’éloigne lentement en ondulant ses tuiles organiques, après avoir lâché dans l’air des bulles éphémères.

 

– Hé, regardez-ça ! s’exclame Arnold, car il vient de soulever le voile en tissu crasseux qui masque la sphère d’une console holocastique montée sur un long pied de plastacuivre. La charge en zithium se révèle largement suffisante pour délivrer une communication en attente. En observant la procédure adéquate, Monteburg pianote aussitôt sur la commande de manière à révéler l‘enregistrement.

 

Tous voient se tenir devant eux l’image bleutée grandeur nature et lumineuse du missionnaire Ouzy Osburne, lequel s’adresse à eux dans leurs implants respectifs, alors qu’il est censé avoir disparu depuis très longtemps. L’homme abondamment tatoué des symboles bibeuloques épicuriens est nu, mais serre quand même sur son front le bandana jaune recommandé par la règle. Le fils spirituel de son éminence n’a pas l’air d’être sous l’influence de coïne, mais garde au contraire un air grave et soucieux. Aucune sœur en porte-jarretelles ne se tient à ses côtés, nul puissant riff de guitare électrique, aucun roulement de batterie n’accompagnent son apparition, tandis qu’avec une voix doctorale, il délivre à ses compatriotes défédérés quelques précisions en forme de rapport officiel sur le monde qui les accueille.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:43:28
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talbazar
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Posté le 04-09-2016 à 11:11:47  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : L'Epilée du Nil - Extrait numéro 62.

 

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Les servantes restèrent les bras ballants, puisque le bain de lait prévu pour la reine n’aurait pas lieu. Du bon lait fumant fraîchement tiré de vaches de première classe exclusivement nourries au sorgho, fallait pas déconner ! L’enthousiasme initial de Néefièretarée pour sa petite ballade commençait à fortement s’émousser. Par-dessus le marché, le romain venait perturber sa sieste en plein milieu des fortes chaleurs de l’après-midi. De méchante humeur, elle accepta de recevoir Fourlanus et les deux types qui l’accompagnaient. Elle ajusta vite fait sa nouvelle perruque au joli dégradé, puis elle fit face aux nouveaux venus. Si Valisensoùth ne lui disait rien, elle reconnut immédiatement le propre valet de sa belle-sœur en la personne de Mer-Amen Tesmich, un grand baraqué qui jouait continuellement les toutous à sa mémère aux basques de Schrèptètnuptèt. La pharaonne s’alarma aussitôt de sa présence devant elle et fit un signe à ses lanciers pour l’obliger à garder une distance respectable. Elle se rappelait comment l’esclave avait une fois claqué la tête d’un importun qui draguait sa maîtresse, au cours d’une des fêtes de Bubastis ; puis comment le crâne du gêneur, pourtant noble, avait résonné contre un pilier du palais avant d‘éclater comme un melon. Ce n’était jamais la main-d’œuvre qui coûtait le plus cher, mais les dégâts qu’elle pouvait occasionner. Pour afficher clairement son mépris, elle leva les yeux et fit semblant de se passionner pour le vol d’un ibis blanc dans le ciel indigo. Puis elle garda volontairement le silence pendant une demi-heure. Pendant ce temps-là, en grande vigilance, le général Merdenkorinnanâr donna l’ordre aux esclaves de rajouter des bouses de chameaux pour activer le feu des braseros, afin de faire chauffer au rouge des pinces à torture. Il jetait également un œil alarmé au cadran solaire installé sur le bateau, car il devait partir très vite pour soutenir l’attaque prévue contre les Philistins. L’attente s’éternisait et le silence devenait franchement épais, uniquement troublé par la respiration sifflante de Veuquetum, qui avait peut-être choppé la crève à cause de son bain forcé. La pharaonne garda encore un peu un visage hermétique, puis chassa de la main une mouche importune et contempla le romain froidement.

 

– On dirait que je n’ai pas tiré les bons dés, avec toi, Fourlanus.  Je crois bien que le petit Moisi a largement le temps de se faire des dents. Elle foudroyait à présent le mercenaire du regard. Sans compter qu’en plus, tu me ramènes à domicile des mecs pas très clairs.

 

– Les Philistins nous ont coulé, mes Shardanes sont tous morts et les pirates sont sur vos talons, illustre enrubannée de la plume de Maât. Voilà pourquoi je suis revenu aussi vite, pour vous prévenir du danger imminent.

 

– Soit, tu peux toujours essayer de me caresser dans le sens des fibres. En attendant, ta mission première me semble malheureusement compromise. Irritée, elle remonta nerveusement la bretelle de sa robe qui tombait.

 

– Il a raison, s’exclama Valisensoùth en faisant fi du protocole, le Nil est rempli des bateaux de cette tribu belliqueuse. Je suis le PDG d’une entreprise itinérante installée temporairement en amont, et nous les avons vus également. Au passage, je suis fier de constater que l’ONS vous habille, car le tissu de votre belle robe a visiblement été tissé par nos ateliers.

 

– Tu parles, elle me serre un poil sur les hanches, les bretelles me lâchent et l‘étiquette me gratte la nuque.

 

–  La femme et la fille de mon associé Tépénib me suivent, elles la feront retoucher par notre service après-vente. Pour pas un rond, bien entendu, puisque la garantie devrait fonctionner. Nous pouvons même envisager un échange ou le remboursement, si vous le désirez.

 

–  Ta diversion est finaude, mais je dois me méfier de tout le monde, alors n’essaye pas de m’embrouiller. Je me demande d’ailleurs si je ne ferais pas mieux de nationaliser ta boîte sur le champ. Elle savoura un moment l’air dépité de Valisensoùth, avant de se tourner ensuite vers Mer-Amen Tesmich :

 

– Je te reconnais, toi, qu’est-ce qu’un sale espion payé par ma belle-doche vient faire dans le sud, à part vouloir m’assassiner ? Je vais te dire un bon truc, ma grand-mère Tuméménèrabou est morte à presque cent ans, et je compte bien faire pareil. Toutes sortes de bestioles seraient bienheureuses si ton corps pourrissait dans une heure au fond du Nil.

 

– Pardonnez à une existence aussi inférieure que la mienne, ô splendide soleil du matin, glorieuse émanation d’Ouséret qui s’assoit au sommet de la pierre benben pour toiser le beau monde, car mon ancienne fonction est le plus grand démérite de ma vie. La lance qui piquait sa large poitrine l’empêcha de se jeter à genoux.

 

– Donne-moi plutôt des nouvelles fraîches du palais.

 

– Personne ne sait pourquoi, une sorte de folie vulgaire s‘est emparée de votre mari, mais il est devenu complètement cinglé et s‘est transformé subitement en tueur en série, il couche avec sa sœur et cette dernière vient d’accoucher d’un erpatrès. Mais vous le savez déjà, n’est-ce pas ? Il est vrai que devant tant de troubles, je me suis enfui de Thèbes, mais c’est pour mieux venir vous prouver ma fidélité, à vous, étincelante métaphore des cieux qui illumine à chaque interview.

 

– Ma cour royale n’est pas en exil, seulement absente temporairement, je suis pas mûre pour la retraite et c’est toujours moi l’unique reine d’Egypte. De là à te nommer ministre des affaires étrangères, faut pas trop y compter. Si tu veux réellement jouer l’héroïque, alors fais-moi plaisir, va te faire enrôler pour en découdre avec les Philistins. Tout comme toi, là, le bédouin entrepreneur. Naturellement, Vequetum, je t’en pris, je ne raccompagne pas, tu connais le chemin. Phimosis, inscris-moi le nom de ces connards en tant que nouveaux conscrits dans mon armée. Général Merdenkorinnanâr, pars vite combattre à présent, et naturellement, tu veilleras à coller ces troufions en première ligne.

 

Ecoeuré de se voir traiter aussi arbitrairement en variable d’ajustement, Valisensoùth tenta vivement de protester à coups de fulgurances vocales, puisque l’effort de guerre demandé par la pharaonne décapitait deux des associés principaux de l’« Organza et Nylon à Sion », dont son illustre président fondateur. Il hurla moins craindre la mort que la faillite, argua de plus du fait qu’il employait des gens que le chômage guettait, mais Néefièretarée resta intraitable. Alors que le trio embarquait sur un bateau de guerre sous bonne garde, elle coupa court aux réclamations pour aller savourer un jus d’orange en compagnie de Trêmouatoli. Au milieu des planches de surf entassées sur le pont, celle-ci avoua à son amie avoir craqué pour l’impressionnante carrure de Mer-Amen Tesmich. En jouant les félines, la malicieuse esclave fit à sa maitresse la demande officielle de pouvoir se le faire après la victoire sur les pirates, si d’aventure le musclé en revenait vivant.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:45:55
n°47013295
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 08-09-2016 à 17:43:57  profilanswer
 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 16.

 

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La chaussée départementale de Troulbled sur laquelle il pédale s’est bien élargie depuis une dizaine d‘années. Désormais, de chaque côté de la longue ligne jaune qui sépare en deux l‘ancienne voie, des véhicules de plus en plus nombreux circulent à 80 ou 100 à l‘heure de moyenne, en offrant leur festival de carrosseries colorées. Des 403 peintes au bleu Royal Navy, par exemple, et des 204 Peugeot, des DS Citroën, des Volkswagen Coccinelle, des Renault 4L, beaucoup de 2CV, parfois la belle Jaguar blanche MK10 de Mr le Baron. Certaines quittent brusquement leur trajectoire et se prennent un platane, la route tue énormément. Dans la campagne, les tracteurs lents et leurs remorques chargées de foin ont remplacé les brinquebalantes charrettes hippomobiles trainées par de gros chevaux bruns. Jouant des mollets, Gaston passe en trombe devant la maison à vendre de la mère Michu, morte sans héritier en début d’année, parce qu’elle est tombée d’un escabeau en faisant ses carreaux. Au moins, de pauvres chatons enfermés dans un pochon ne seront plus cruellement noyés au milieu de la rivière de Chyprine. Et la vieille toquée aux seize chats aura enfin découvert la bonne combine pour trouver le sommeil et des senteurs meilleures. Le bitume défile sans discontinuer. A chaque faux plat, Gaston s’épuise et lance une bénédiction à la mécanique du tandem, mais personne d’autre que lui ne peut faire avancer son vélo. Le front en sueur, il se fait la promesse qu’un jour, il échappera à l’atmosphère étouffante de Troulbled ; il espère aussi vraiment que sa sœur Angèle finira vedette de cinoche à Hollywood, et pas femme de ménage chez le Baron. Tiens, en parlant de celui-là, un copain amerloque de sa fille fait justement du stop dans l’autre sens, littéralement vautré dans l‘herbe, ce qui lui fait l’intérieur identique à l‘extérieur. Le hippie bien barré lui fait un grand sourire, puis en signe de paix il esquisse un petit coucou avec deux doigts de la main que le cycliste fait semblant de ne pas remarquer. Tous dézingués du ciboulot, ces tordus fringués comme des indiens, et encore, quand ils sont fringués avec autre chose que des fleurs. Il paraît que ces enfumées de chaudières humaines veulent devenir « nous » en eux-mêmes et ne songent qu’à se mettre beaucoup de soleil entre les oreilles. Et puis pas mal de trucs ailleurs, également. A ce sujet Gaston peut le jurer, car les copines de Marie-Charlotte lui ont en quelque sorte enseigné à distance une très imagée éducation sexuelle. Il se remémore les longues scènes champêtres auxquelles il a assisté les yeux rivés sur ses jumelles. La vision coquine de la fille du Baron en train de jouer à la balançoire, seins nus et les jupons relevés très hauts, façon divin marquis, avec ses potes vénusiens qui font la ronde autour pour l’encourager. Le rappel du petit cul de Marie-Charlotte de la Tronchedecon enfin révélé, de sa petite chatte proprement enfilée par le joyeux cercle d‘amitié, cette chaude réminiscence flagelle subitement ses tempes, lui colle une barre dans les épaules, file le long de la colonne vertébrale en un temps record pour exploser dans son bas-ventre. Une montée d’hormones involontaire l’oblige à pousser sur la selle de son vélo, pour calmer l’irruption sexuelle qui vient de le saisir. Quand ça arrive, il attrape en général le catalogue des Trois Suisses et l’ouvre à la page lingerie pour dégager le jus, dans un coin planqué de la ferme. Sauf que là, il est sur la route, à faire du vélo. Le panneau de Troulbled arrive à point nommé pour faire diversion, mais il a l’impression d’avoir pénétré dans la petite ville depuis un bon moment, puisque la route se borde bien avant l’entrée de coquettes maisonnées plaisamment fleuries.

 

Gaston dépasse le coiffeur, la boulangerie, le bar des Goëlands, avant de tourner à droite pour rejoindre l’épicerie, reconnaissable à son antique façade en bois, repeinte d’une seule couche de jaune solaire lumineux. Il pose son vélo au pied des cageots de melons exposés à l’extérieur, en compagnie d’un lot varié de légumes frais. La bonne odeur des fruits l’accompagne lorsqu’il pousse la vieille porte vitrée, puis il est envahi par un nouvel univers olfactif, une fois déclenché le charmant et intemporel cling cling de l‘ouverture. Un effluve né du mélange de l’encaustique, de la lessive, du papier neuf, qui vient se mêler à celui des autres denrées ; un parfum doux-amer qui n’existe que dans ce magasin, que Gaston gardera dans le nez toute sa vie. N’oublions pas que notre homme est le créateur comblé de « Fille de l’air », premier parfum synthétique vintage épicier, que quelques grandes surfaces d’aujourd’hui diffusent sournoisement dans leurs rayons pour forcer à l’achat. En attendant, il est le seul client, mais Marité n’est pas derrière son comptoir encombré de sucreries. Sur le meuble imposant, une petite radio blanche et rouge programme à la suite de Mouloudji « Strawberry fields for ever » des Beatles, que la patronne adore particulièrement. Elle a plusieurs fois fait part de son désir d’aller les voir en concert à Paris. Même si le garçon ne l’entend pas remuer, il devine qu’elle est probablement occupée dans l’arrière-boutique. Il décide d’aller jeter un coup d’œil pour lui dire bonjour, ca ne serait pas la première fois qu’il lui donne un petit coup de main pour ranger quelques cartons. Au-delà du rideau de lamelles en plastique multicolores, elle s’affaire en effet devant son arrivage du jour, pour consulter les étiquettes collées sur les colis qui forment de fameux empilements. Concentrée, elle plisse le front d’une manière admirable. Gaston délaisse le capharnaüm en cours d’organisation pour se repaître de la charmante image de Marité, habillée coquinement d’un fin corsage en coton indien et d’une très courte mini-jupe en daim importée de Londres. Ce jour-là, elle prouve avoir longuement chouchouté ses cheveux devant sa glace. Rayonnante, drôle et vive, elle ne met plus jamais son austère blouse bleue depuis sa rencontre avec les hippies. De cette façon, le jeune homme a tout le loisir de savourer les longues jambes ainsi dévoilées qui s’offrent à lui. Son décolleté appétissant est délicieux à voir. Le troublant sentiment maternel issu de son enfance à l’égard de l’épicière est devenu bien autre chose. Chaque partie du corps de Marité est en fait devenue une attraction particulière propre à faire naitre en Gaston Boudiou un irrésistible désir charnel. Elle l’achève par un de ses plus beaux sourires.

 

– Bonjour Gaston.

 

– Bonjour Marité.

 

–Tu tombes bien, tu ne veux pas m’aider à mettre ces boites sur l’étagère ? Je vais dégager un peu de place avant. File-moi moi l’escabeau, derrière toi.  Tu vas le tenir pendant que je monte, il est un peu branlant.

 

Content de se rendre utile et de fournir ses bras à l‘entreprise, Gaston s’empare de l’échelle pour la placer solidement à l’appui du rayonnage. Ensuite, Marité grimpe lentement et il voit passer sous son nez ses guiboles merveilleuses. Immédiatement, il voit ce qu’il ne pensait jamais voir, car en levant la tête il contemple l‘entrejambe de l‘épicière. Il y a sans doute beaucoup d‘innocence en elle, car elle connaît Gaston depuis qu‘il est tout petit, elle se déhanche sans manière. Elle se penche en avant pour aller chercher plus loin quelques produits, qu’elle a l’intention de refiler ensuite à son aide, attentif pour le moment à autre chose de plus bandant. En faisant ce geste, elle dévoile alors largement sa petite culotte blanche qui lui rentre en partie dans les fesses. La position impudique et involontaire de la jeune commerçante souffle sur le visage de Boudiou une sorte de courant d’air brûlant, ce qui lui procure une importante tension physique et mentale. Son cœur bat de plus en plus vite, une douce pulsation lui chatouille les parties intimes. Décidément, en dépit d’un temps légèrement couvert, la température globale de cette journée est en train de frôler la canicule.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:47:05
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Posté le 11-09-2016 à 08:42:08  profilanswer
 

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Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - Extrait numéro 27.

 

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Pas rapides, les flics mirent deux jours avant de retrouver la voiture de l’inspecteur, toujours garée en face du Tripoli à présent fermé. L’interrogatoire des voisins ne donna rien, excepté leur observation d’une fébrile activité des employés aux abords, deux jours auparavant. On investigua soigneusement la boîte sans y trouver le moindre élément suspect. Tout était resté en place, sauf la paperasserie même anodine, le coffre était vide et tout le personnel évaporé. La disparition soudaine de Barracuda N’Dyé restait un profond mystère, mais la présence de son véhicule la reliait facilement au bordel de Blanche Pearl, et par extension à l’affaire Van Degaffe. Un sous-marin fut placé en observation devant le club pourtant clos, avec trois veinards planqués en permanence à bord du fourgon suréquipé. Pas de doute, la disparition de leur chef se montrait plus que suspecte, mais il était difficile d‘y voir clair. L’affaire Van Degaffe fuitait par tous les trous, mais ce n’était plus les bons qu’elle retenait, on perdait simplement des agents. Une plongée scrupuleuse dans le grand banditisme local et national fit chou-blanc. Le remplaçant de N’dyé, Teddy la Fouine, qui s’appelait en réalité Gilbert Tricard, mais à qui ses collègues de la police lui préféraient un pseudo de mafieux, avait lu les rapports de l‘enquête sur les Flocons d‘argent. On venait de cuisiner soigneusement les vieux résidents. Des révélations incroyables s'étaient échappées de ces bouches à dentier, en dépit du mutisme obstiné du plus grand nombre. Soit par leur volonté pure de garder le secret, soit parce qu’ils étaient réellement hors-service pour raisons médicales, à cause de leur âge. En uniforme, la jeune collègue avenante du policier lui apporta le résultat des interrogatoires et son café, un sucre, déjà touillé.

 

– Merci beaucoup, Angèle, merci.

 

Il bomba le torse, mais n’attira même pas un sourire sur le visage de la jeune femme. Elle secoua juste la tête avec ironie, sans même déranger son chignon soigné.

 

– Tu crois qu’on les aura, Teddy ?

 

–  J’ai monté un plan super, on passe la nuit ensemble.

 

– La mort dans l’âme, bien entendu, la Fouine, mais non. Je le dis tous les jours.

 

– Non, jamais ?

 

– Peut-être que oui.

 

Il resta seul avec ses dossiers pour se consoler. Au contraire de Barracuda, Teddy ne connaissait ni Martin ni sa choupette, mais il savait qu’ils avaient été portés disparus après l’attaque spectaculaire de l’institut. Sur la photo du doc qui récapitulait les circonstances de leur évaporation, Vaya Condios avait tout pour déclencher la bonne humeur. Rien que pour ça, l’affaire valait le coup de la retrouver pour voir à quoi elle ressemblait en vrai. Il détailla également le portrait de Martin. Feu Barracuda N’Dyé et Martin Smith étaient d’anciens briscards de la crim, et de nombreux truands s’étaient couchés à cause d’eux sur le trottoir, au sens propre, pour ne plus se relever. Mais, lui, la Fouine, il n’avait jamais tué personne. Il observa l’arme posée devant lui, un des Beretta 92 inox de son prédécesseur, un petit héritage professionnel qu’il avait tenu à s’approprier. Non, il n’avait jamais refroidi un type, mais avec cette affaire compliquée, la chose risquait fort bien d’arriver sous peu. Puisque Barracuda répondait absent, lui-même se trouvait à présent en tête de liste des personnes à gommer. Il soupira en se penchant pour ouvrir un tiroir, afin d’y poser le flingue déchargé. Par obligation, il rapprocha l’un des feuillets vers son visage en raison d’une vue défaillante, déjà. Les analyses avaient découvert dans le sang des anciens une contamination importante aux virus syncithial et rotavirus, mais bizarrement aucun cas avéré de bronchiolite ou gastro-entérite. Quelques cas psychologiques déroutants révélaient des phénomènes de personnalités multiples très maitrisés chez deux ou trois individus. Après examens, des spécialistes ont préférés quand à eux parler de « fausse mémoire », histoire sans doute de se rassurer à bon compte sur ces étonnantes rémanences mnésiques. Un diagnostic précis stupéfia tout le monde, lorsqu’on se rendit compte que les corps des aïeux parfois centenaires se régénéraient tout seuls, et possédaient d’une façon mystérieuse la faculté de rajeunir, au gré d’un processus de vieillissement inversé. Une conclusion qui signait les travaux de Van Degaffe, sans qu’on y comprenne rien. Les rares croulants qui passèrent à table se montrèrent tous d’une intelligence tactile accrue, et voyaient même presque clairement dans le noir, des facultés qui disparurent cependant rapidement. Ils firent tous état de « stimulation informatique transcrânienne », de pose de sondes dans la veine jugulaire et artère carotide, chargées de filtrer les fluides et d‘en injecter d‘autres. Toutefois, tous précisèrent que Strazdinovsky ne faisait que préparer le terrain aux Flocons d’argent, mais qu’après, sur la foi de la suite proposée garantie, on allait parfaire la rénovation des corps à l’étranger. Avec un coup de bol, on en revenait totalement ado, sans aucune trace d‘oubli. Personne ne savait où se situait ce lieu éloigné et mystérieux où officiait Van Degaffe, mais là-bas se mettait réellement en place la méthode de rajeunissement spectaculaire offerte à la petite élite de grabataires, moyennant bien entendu une bonne partie de leur fortune. Le cas de la femme-rat avait été classé secret et son cadavre dormait dans un congélo bien gardé. Rien pour les flics à ce niveau là, dommage. En parcourant méthodiquement les différents dossiers, Teddy bailla, car il s’efforçait de lire un rébarbatif laïus spéculatif développant en particulier de longs paragraphes sur l’asymétrie des atomes, qui violait entre autre la parité. Ce qui donnait un reflet dans le miroir strictement identique à l’original. Des propositions et des spéculations scientifiques, mais pas l’ombre de certitudes. Comme le document lui échappait, il prit un nouveau rapport nettement plus stimulant, lequel traçait 40 pages sur la découverte dans les labos d’organes isolés, en particulier des foies et des reins d’enfants prélevés, puis maintenus en vie sans raison apparente. Le but étant de fabriquer des humains transphotongéniques, fruits du programme personnalisé et mis en œuvre grâce au protocole révolutionnaire inventé par le docteur Hubert Van Degaffe. On en revenait à cette fumeuse adénoplastie planifiable par programmation d’un ADN synthétique. Les experts se mirent seulement d’accord sur un bouleversement en profondeur des cobayes, par mutation génique de la dynéine, une protéine responsable de la bonne disposition des organes dans le corps. Le dernier dossier vite parcouru vola un instant pour atterrir brutalement sur le bureau ; il s’agissait du résultat des autopsies des mecs tués pendant l‘assaut, tous copains de Gros Bill. Une fois auscultés en profondeur, les gangsters tués n’avaient livré aux légistes que plusieurs et prévisibles balles de fort calibre. La belle Angèle tapa d’une phalange résolue sur la cloison, pour que l‘inspecteur la laisse rentrer. Elle fronça au passage les sourcils à la vue du café froid que son chef avait négligé d’avaler.

 

– C‘est cool, ça, Angèle, t’as changé d’avis ? Je te dis que c’est le bon plan.

 

– Secoue-là toi tout seul, mon bichon. Elle le laissa rougir et grogner à son aise. Bon, Gilbert, plus sérieusement, les putes du Tripoli sont toujours introuvables, mais nos équipes surveillaient les embauches du secteur à 300 km à la ronde. Figure-toi que Holy Ghost, reine de barre pole dance, Câline Grosby, chanteuse et Gypsy Sorrow, une strip teaseuse, viennent toutes trois d’intégrer ensembles un poste à la Rose Noire, un boxon concurrent et nettement moins chic situé à l‘autre bout de la ville. D’après l’indic qui vient de nous rencarder, elles bossaient avant au Tripoli et le boui-boui qui vient de les accueillir serait dirigé par un bonhomme du nom de Sisco Matteï.

 

– D’un autre côté, faut bien payer le loyer. La Rose Noire ? Connais pas. Il tira le tiroir et s’empara du Beretta qu‘il s‘empressa de charger. La mort de ces filles n’est sans doute qu’une question d’heures. Prend la bagnole tout de suite, Angie, on va se promener là-bas, et crois-moi, on va faire chauffer l’ampoule du gyrophare.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:49:56
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Posté le 14-09-2016 à 12:45:25  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La Jet larguée - Extrait numéro 09.

 

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L’avion chutait, mais ce n’était que le résultat salutaire de la manœuvre exécutée par le pilote. Le piqué grisait Steven qui savourait tout seul les sensations offertes par le bouleversement intempestif de ses habitudes routinières. Il ressentait en lui la même jubilation qu’un chasseur en approche s’apprêtant à apponter un porte-avion, de retour de mission. Après avoir labouré à coup de missiles des faces de lune armées jusqu’aux dents planquées dans la jungle ou des rats du désert profondément enterrés sous le sable pétrolifère ; enfin n’importe quel genre de rascal déclaré ennemi de la nation. La savoureuse glissade aérienne sur le ventre d’acier n’était cependant qu’une opportune déroute volontaire exécutée en plein vol commercial du long courrier. Le captain cramponna fermement le joystick, persuadé qu’il allait démontrer à tous la pleine mesure de ses talents. Pour les autres, il fallait reconnaître qu’ils goûtaient moins ce fun subite proposé par le commandant. Des passagers au personnel avec la ceinture scotchée sur le bide, on se contentait juste de serrer les fesses en essayant de s’exercer à la méditation express. Pour les gars en casquette à visière du cockpit dont le corps tremblotait au gré des vibrations, il fallait à présent établir le contact avec l’appareil voisin, qui devait  s’offrir parfaitement en visuel, et vers lequel ils plongeaient à vitesse grand V. Seulement, aveuglés par l’immonde purée de colibri qui maculait leur horizon, ils ne voyaient absolument rien devant eux.

 

– Flight Number PJ612PK, company Petro Jelly, ground Speed 802 km/h - 498 mph, 433 Knots, squawk 2050, heading 205°, une petite senteur boisée, ici le commandant Steven Eight. Panne, panne, panne ! Nous venons de subir une collision aviaire. Naviguons pare-brise obstrué avec 0 de visibilité. On y voit que dalle, mais bonjour quand même.

 

– Reçu. Ici Flight Number WT75LZ, company Well Transit, altitude 11270 m - 36975 ft, un léger parfum de citronnelle, commandant Walter Closed, bien le bonjour à vous et j’écoute. Non merci Cathy, pas de lait, s’il vous plait, un jus de carotte, plutôt.

 

– Commandant Closed, je vais descendre à 11000 et me placer sous vous, vous alignerez avant d’augmenter votre vitesse, et puis vous procéderez à une purge pour régler l’incident en nettoyant mes vitres.

 

– Delta, Alpha, Charlie. Je vois qu’à la Petro Jelly, on voyage au gré de ses envies ! En tout cas, moi je vais améliorer considérablement ma valeur de masse, ce qui n’est pas plus mal. Merci bien de m’avoir gratté le dos, Cathy.

 

– Yankee, Echo, Sierra, je descend, commandant Closed, je me place. On synchronise le DG.

 

– Bien reçu, commandant Height, Ok pour le Delta Golf, Check. Bonne chance à vous.

 

Pendant que l’avion basculait en jouant des volets, le chihuahua de Pamela avait sorti sa petite tête du sac qui l’emprisonnait et régurgitait sur la moquette ses dernières croquettes. Moktar Bouif laissa échapper un juron dans sa langue. Placée en face de Carl Wash qui jouait de la guitare, et de sa groupie préférée Penny Ouiwi aux yeux smoky fumé étalé au doigt, l’hôtesse observait les déboires de son chien et jugeait personnellement que le commandant avait choisi la solution de facilité. La conquête du cosmos prouvait que dans ce genre d’incident, une sortie extravéhiculaire s’imposait pour nettoyer les vitres, façon 2001 l’odyssée de l’espace. Elle était volontaire pour cette mission, si la sécurité des passagers l’exigeait. Cheveux bond platine et rouges, nez percé, peau tatouée, chaines aux oreilles, clous dans le front, Penny la regardait avec un air blasé, mais son copain Carl approuvait chaque parole de Pam. Ils se mirent d’accord sur le fait que l’avion devrait voler en rase-motte pour des raisons d’oxygène et de pression et qu’un nettoyant-vitres ne serait pas forcément nécessaire. Ils enchainèrent ensuite sur leur passion commune des films de SF et même Penny, enfin sortie de sa torpeur, eut quelques critiques à proposer sur quelques nouveautés. Le sosie monégasque officiel de Céline Dion venait de révéler à la star anonyme française Inès Deloncle qu’elle-même s’appelait en réalité Bernard Toupie, et lui demandait si le casting de son prochain film était vraiment bouclé, auquel cas il se disait prêt à faire du cinéma, en tant que sosie d‘acteur ou d‘actrice. Bien que sanglés sur leur siège respectif, le député Dominique Quenique et Rachida Ix se tripotaient goulument sans façon en libérant des tonnes d‘ocytocine, de la tête aux pieds, tout en traitant méchamment leurs proches voisins de sales voyeurs. Plusieurs rangs derrière, Eloi de Pouillet essayait de convertir à la hâte le gagnant du loto Jérome Koulbielle à sa religion, tout en lui proposant de judicieuses solutions de placements au profit de son œuvre. La perception de la manœuvre en cours ne semblait pas la même pour tout le monde.

 

Assise en bas, Shirley restait en position statique, le regard fixé sur les biturés de la Kelien qui faisaient leur cirque et gueulaient comme des oies pour protester sur les carences du transport en commun. En raison de la surcharge émotive imposée sur ce trajet, ils exigeaient de la Petro Jelly qu’elle leur offre en compensation leur séjour d’une semaine à Kilapile en Beach Resort 5*, au cœur d‘une cocoteraie au sable blanc. Et déjà, sur la proposition virulente d’un désosseur de nuit, qu’on leur resserve immédiatement à bord des boissons alcoolisées, sans les compter. Heureusement, avant d’entamer une marche blanche de protestation dans l’appareil, les militants du Puppies Rights Watch observaient une heure de silence à la mémoire des colibris décédés. Le groupe restait donc très calme pour le moment. Shirley était somme toute contente de la concentration exigée par cette diversion qui venait mettre un terme provisoire à ses atermoiements relatifs au chagrin de Steward. Elle pencha le torse en regardant à droite, son ex était assis à côté de Victoria et de Summer ultra-décontractées, mais lui faisait ouvertement une tronche d‘enterrement. Bien entendu, l’aspect relax des hôtesses n’était en réalité qu’une composition chargée d’éteindre toute crainte à bord. Pour Steward au vécu psychique désastreux et encore sonné par sa rupture, la mission semblait tout simplement impossible. Désormais, il lui faudrait affronter seul ses doutes, ses peurs et sa fragilité. Tout comme le patron des slips Rushplug qu‘on avait embarqué, ce Louis de Bourvil qui régulait sa peine de cœur en avalant des poignées de cachetons. Comment imaginer que ce suicidaire largué ait pu bâtir sa fortune sur une amusante collection de boxers fous-fous ? Avec la main, Shirley envoya un message rassurant au petit Brandon Courage qui n’en menait pas large et ne bougeait même pas une oreille. Cramponnant son doudou, le pauvre gosse tracassé avait le visage tout blanc et se voyait déjà faire un culbuto brutal dans les eaux chaudes. En lui souriant constamment, Shirley se rendait compte qu’elle n’était pas encore prête à faire des enfants, raison plus pour se dire qu’avec Steward, elle venait certainement de l’échapper belle. Le mariage constituait un terrain hostile et elle se sentait nullement prise de passion pour les cris de bébé. Son meilleur projet à court terme constituait pour l’instant à différer au maximum l’arrivée de baby. Elle cessa complètement de tranquilliser Brandon, la trouille, ça va bien cinq minutes.

 

A l’approche de l’avion de la Well Transit, une alarme provenant du système TCAS hurla désagréablement aux oreilles de Steven et Jack, mais ce n’était que la manifestation normale du dispositif anticollision, lequel cessa de se manifester lorsqu’ils se trouvèrent en dessous de l‘autre zinc, en parfait alignement vertical.

 

– Bon, fit Steven au jeune officier, tout en pressant un bouton au centre du tableau, maintenant on remet le PA. Jack approuva, puis ouvrit grand la mâchoire pour bailler, à cause du changement d’altitude.

 

En revanche, 300 m plus haut et sans quitter sa trajectoire, Walter Closed accéléra avec une touche de brillance, avant de procéder à la vidange chargée d’inonder le nez de l’avion concurrent, afin qu‘il puisse retrouver un contrôle visuel optimal. Un gigantesque flot brun s’abattit en spray sur ce dernier qui traversa cette pluie sans retrouver la vue pour autant. Echec. Jack tapa rageusement sur l’imprimante du bord, car elle réclamait de l’encre et refusait de fonctionner. Steven procédait à l’analyse la plus juste de la situation. Il attrapa le micro pour faire une communication aux passagers :

 

– Ladies and gentlemen, captain speaking, je n’ai pas une bonne nouvelle à vous annoncer, nous traversons actuellement un vrai temps de merde, mais nous faisons au mieux pour retrouver la vue et un vol normal, en attendant, on garde le cap. La voix de Walter grésilla tout à coup dans son casque, il raccrocha.

 

– Alors ? Merci Cathy, vous pouvez reprendre la cagette de pommes.

 

– Alors, gros malin, tu viens de vidanger tes chiottes sur nous, ok, mais c’est pas ce qui était prévu. Quand on doit larguer de l’avant, c’est pas de l’arrière ! Je demandais une purge de kérosène, pas de pipi bleu. On est couverts de merde et mon pare-brise est devenu encore plus sale qu‘avant. Bon, on recommence et cette fois, prière de chatouiller les bonnes vannes comme il faut pour le fuel dumping. Check ?

 

– Oh, les premières fois ne sont pas toujours les meilleures, hein. Combien t’en veux ?

 

–  De quoi ?

 

–  Du kérosène.

 

–  Déleste 20 tonnes sur nous, si tu peux, mais pas moins.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:54:52
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Posté le 18-09-2016 à 10:19:30  profilanswer
 

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Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 14.

 

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Une série d’énormes craquements se fit entendre, car si la Tatie Nique s’était gentiment posée sur une langue sableuse, plusieurs bateaux venaient en revanche de s’harponner bien vilainement sur les rochers. Coques brisées, flancs percés, la Belle en cuisse, la Moule radieuse, la Fête des mers et le Chasse-mariée s’abîmèrent si bien sur les récifs qu’il faudrait désormais un certain temps pour parvenir à les réparer. Les naufrages occasionnèrent bon nombre de blessés et de noyés, ce qui causait naturellement une grande perte pour l’armée. Au milieu de la brume qui s‘éclaircissait enfin, debout sur le pont oblique de leur caravelle échouée, Manquedamour, Maldemer de Posegalettabord et Franquette de Labonne faisaient le point et se lamentaient du regrettable incident, déplorant le fâcheux contretemps qu’il allait engendrer ; sans compter qu’on était à l’arrêt sur des terres insolentes qui n’entraient pas dans le giron du royaume de Fion.

 

– Oyez seigneurs ! Lança Manquedamour, nous voici au nord-ouest de Godapat, et nous apercevons d’ici les tours de la prétentieuse castellerie du roi Guibert Sonfutal et de sa femme Hildegarde Bourrelareine, roi et reine posés sur le trône de cette contrée. Il nous faudra demander assistance à leurs majestés, si nous voulons rester chez eux pour réparer.

 

– Et où veux-tu que nous allions, après de pareilles avaries ? lui répondit Maldemer. Rallions à nous les camarades, laissons-là les navires et dirigeons nos pas vers ce château de Pleugaphion. Par Kramouille Bonne Dame, il faudra bien que nous ayons de la part de cette île l’assurance d’une douce hospitalité, puisqu’elle est condition nécessaire à notre salut !

 

– J’envoie de ce pas un message à Gaultier Quilamolle par poulette messagère, décida Franquette de Labonne, afin que nos armées à terre arrêtent d’avancer et soient tenues au courant de notre avanie. Je vois, hélas, nos plans de guerre bien contrariés. Ses yeux parcoururent avec tristesse la longue frange côtière inhospitalière où il s’apprêtait contre lui à débarquer.

 

Au loin, l’immense château de Pleugaphion et sa grande cité dominaient l‘hémisphère sud sous son unique autorité, mais il faudrait sans doute la demi-journée pour s’y rendre et parlementer. Métaux précieux et marchandises transitaient généralement par cette île, qui surveillait ainsi les effets du commerce effectué par la mer entre Mouyse et le Fion, en prenant au passage dans son port principal de juteux octrois. Cette situation valait à Godapat son droit séculaire d’exercer une certaine neutralité dans les conflits entre les deux royaumes. Un sol peu généreux aux récoltes médiocres et un climat versatile permettaient tout juste aux Pleugaphiotes de cultiver sur leur île un peu de ganjablé et de cacaofé. Les îliens déployaient également sur leur terre un maigre élevage de castors laineux, dont les cous pelés se chargeaient de colliers à sonnailles pour éviter de les perdre dans les collines. Si la noblesse commerçante et les grands propriétaires du sol étaient riches, ce qui leur permettait de manger chaque jour du bon fromage à trous, les deux tiers de la population urbaine mendiait de par les rues, par vertu civique. Quand aux femmes et aux filles de la ville qui souffraient comme les autres de cette misère, elles allaient tout de même le dimanche se promener dans les forêts, histoire de se mettre des choses en bouche. Une aveugle férocité aurait donc pu animer les gens de ces côtes devant la manne offerte par les bateaux étrangers, selon le coutumier droit de bris, mais ils ne pouvaient certes point brigander la formidable armée qu’elle transportait. La plage où débarqua Franquette se trouvait donc absolument déserte. Après avoir rallié à lui le Duc de Médeux et messire Robinet Atétard, descendus également de leurs rafiots éventrés, on lâcha sur les eaux mouvementées un chapon à message, pour prévenir sans tarder messire Gaultier de leur grave infortune. Un autre volatile fut envoyé vers Fion, afin d’informer la reine Amanda Blair du fâcheux imprévu. En tant que commandant d’escadre, Gaëtan Maldemer de Posegalettabord resta sur place, ceci afin de veiller aux bateaux. De toutes les cales, on fit descendre les chevaux pour les faire paitre sur les landes infestées de castors redevenus sauvages. Naturellement, les charpentiers se mirent tout de suite à l’ouvrage pour sauver au mieux les navires de l‘assaut incessant des vagues traîtresses qui continuait de les harceler. Le brouillard avait cependant complètement  disparu.
.  
 Et puis, folles bannières au vent, les compagnons soufflant dans les fifres, les trompettes et les clairons, on se recommanda pieusement du patronage de Sainte Kramouille, avant de prendre en grande escorte la route rectiligne bordée d’arbres qui conduisait à Pleugaphion. Le grand vizir du Fion emportait avec lui sa belle vaisselle en or, puisqu’elle pouvait servir, selon lui, amplement de monnaie aux futures transactions. Comme il chevauchait en grand silence les pieds collés dans les arçons, son cœur blessé saignait d’une douleur sans nom. Ils marchèrent des heures durant, ignorant les pauvres villages dont les habitants les fixaient d’un œil noir soupçonneux. Ils croisèrent quelques chasseurs isolés qui s’aplatirent dans la prairie en les voyant passer. Sur cette île peu étendue, la côte était toujours très proche et les communautés de pêcheurs se montraient fort nombreuses, tapies dans leurs petites chaumières clôturées de murets branlants. Partout séchaient des peaux de castors et de musaraignes clouées aux portes des maisons. Toutefois, il était peu probable de pouvoir trouver là une demeure amie, et les soldats du Fion avaient grande hâte de rejoindre le château, dont la haute silhouette se mettait peu à peu à grandir devant eux.

 

Lorsqu’il furent au pied de la muraille, le guet hurla du haut des remparts de la courtine pour annoncer l’arrivée impromptue de l’ambassade étrangère. Le roi Guibert causait avec ses comtes en faisant ses comptes, il ordonna que fut levé le pont-levis. Par l’une des fenêtres qui donnait sur la cour, il vit rentrer les grands seigneurs à cheval, équipés pour la guerre. Guibert Sonfutal se gratta le dos avec son sceptre, lequel prouvait à lui seul que le roi de Godapat était maître en sa province, nullement assujetti au pouvoir du Fion. Devant ce déploiement guerrier qui faisait intrusion sur son domaine, il fronça les sourcils et invita sa femme Hildegarde Bourrelareine et son maréchal Thiébaud Kentudor, ainsi que l’épouse de ce dernier, La Pompadore, à venir le rejoindre pour recevoir les visiteurs. Un coulis d’air frais venu de la mer agita les tentures de cuir qui ornaient les murs de la salle ronde, sombre et voûtée où devait se tenir la réunion. Jouxtant les couleurs officielles du blason de Godapat, on distinguait aussi quelques drapeaux qui rappelaient à tous que sire Guibert appartenait à l’ordre Minoulandais des chevaliers Tétonniques. Son anneau royal en portait d’ailleurs le sceau sans équivoque. Devant messire Sonfutal, Franquette se présenta, puis ploya le genoux, laissant par politesse sa majesté parler le premier :

 

– Messieurs du Fion, que me vaut pareille itinérance en mes territoires ?

 

– Hélas, sire, nul doute n’existe sur votre incontestable prééminence et votre souveraineté royale, mais comme vous savez, nous sommes en route pour porter guerre à Mouyse. La vision de notre cortège ne doit point effrayer vos gens. Il se fait juste que nous sommes échoués sur vos côtes et que beaucoup de nos bateaux sont brisés.

 

– C’est fort fâcheux, en effet, car nous ne saurions vous porter assistance sans irriter l’Ovoïde Vazy Métoian LXIX, empaleur de Kiess et roi de Mouyse. Faut-il une fois de plus vous rappeler la neutralité séculaire de notre île, qui a toujours été paradis fiscal pour vos deux royaumes à présent ennemis ?

 

– Allons, mon mari, fit Hildegarde en posant sa main blanche sur la manche de Guibert, laissons-là pour l’instant assauts et batailles. L’idéal chevaleresque commande pour l’heure de secourir au mieux les naufragés. Détendez-vous un peu, enfourchez votre mule et invitez plutôt nos amis à chasser à courre le castor sauvage, comme vous en aviez l‘intention, avant leur arrivée.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 09:58:24
n°47143867
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 21-09-2016 à 10:03:06  profilanswer
 

Salon des inventions :
 
Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Les bijoux organiques.

 

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Que l’on soit une grosse légume ou non, entre l’être et le paraître, la réalité est parfois dure à avaler. Trop souvent, même si l’on se vante d’avoir la patate et la frite, la vie n’est qu’un grand presse-purée, et s’il arrive bien souvent à chacune de s’imaginer princesse, les miroirs existent pour la ramener à plus de modestie. Pourtant, tout ne saurait être perdu, car depuis la nuit des temps, les bijoux sont fabriqués pour y croire un peu. Si 30% des hommes rêvent d’être enfermés avec Sophie Marceau dans un ascenseur, la majorité croise en fait tous les jours d’affreux boudins sur les trottoirs de la jungle urbaine. Mocheté qu’elles transmettent bien souvent à leurs enfants. Voilà pourquoi, sentant l’espèce humaine en danger, la femme préhistorique se couvrait de coquillages et de cailloux percés, un bon truc beauté de l‘époque pour exécuter une habile diversion et détourner le regard des hommes sur la plus-value offerte à son corps par ces colifichets. Ceci couplé à la faculté de bien cuire la viande d’auroch nous a donc autorisé à nous reproduire jusqu’à nos jours. On voit donc bien toute la nécessité pour les femmes en quête d’elles-mêmes de s’acheter des bijoux pour sortir dans la rue ou de se rendre au cinéma sans complexe, afin d’y vivre enfin quelque romance trépidante. Seulement voilà, pour s’installer avec délice dans cette zone de confort, trop souvent, il faut se ruiner. Sans argent, point d’or, et privée de tout artifice clinquant, la grande histoire d’amour devient tout juste cette belle amitié têtue dont on n’a rien à faire. On se sait pourtant folle ou profonde, mais quoi qu’il en soit, la privation de tout collier nous fera prendre conscience de la réelle importance des bijoux de famille. Puisque sans bracelet, sans bague, sans boucles-d’oreilles, la fin du monde passera irrémédiablement au fond de vos yeux inutilement fardés. Vous ne serez plus alors que cette pauvre boule de mohair solitaire en mal d’accouchement, tristement recroquevillée au fond du canapé.
 
 Le pro-fesseur Talbazar aime toutes les femmes, qu’elles soient décorées ou de simple appareil et même si elles chaussent de vielles chaussures. Chez lui, le coup du décolleté marche à tous les coups, mais nous savons avoir à faire à un être d’exception, pas une ne doit se leurrer sur ce point. C’est pour mieux les aider qu’il a décidé de transformer leur corps en concept-store idéal et pas cher, en inventant ces merveilleux bijoux organiques qui permettront aux couples de mieux croquer la pomme. Une fois de plus, la Moyenne Encyclopédie vient réaffirmer son combat pour la beauté, la justice et l’amour. Adieu l’inaccessible et tellement banale bague de fiançailles en or 18 carats, et bienvenue à la rondelle de panais évidée sur mesure. Une bien belle bagouse qui saura tenir sans se flétrir tout le temps que dure un mariage moderne. Voilà en quoi réside l’importante innovation : chaque légume pioché dans la cuisine devient, pour une somme modique et par la grâce d’un set de support universel, autant de pièce basique, odorante et colorée, sur laquelle on pourra même graver à l’éplucheur ses propres initiales. Il était vraiment temps de s’affranchir des terribles diamants de sang qui ont fait tant de malheurs en Afrique. Écologiques, économiques puisqu’en les cultivant soi-même on peut obtenir les bijoux organiques pour pas un radis, c’est l’occasion rêvée pour les mères qui en seront porteuses de rejouer brillamment la noble histoire de la belle et de la côte de bette. En matière de bijoux, désormais, à défaut d’en avoir dans le coffre, vous en aurez dans le buffet, sans craindre le manque de moyens, puisque l’avocat de votre ex se fait trop souvent tirer l’oreille pour payer la pension alimentaire.

 

Tous les bijoux organiques se montrent comestibles en cas de crise économique et l’on n’aura nulle crainte de se les faire voler. Ils sont tous bien évidemment autorisés en douane et il n‘existe pas de contrefaçons. Les Amatrices vont adorer enfiler ces belles courgettes vertes et ces longues carottes d’un bel orangé, et si ces parures font des envieuses, ce n’est pas vos oignons. N’oubliez jamais que c’est vous qui êtes la perle, et pas vos raisins ; mais le constat est garanti, avec ces bijoux organiques, irrésistiblement, vous serez de toute manière à croquer.

 


Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:01:04
n°47150777
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 21-09-2016 à 18:13:16  profilanswer
 

Si un moustique te pique les couilles, tu deviens non-violent
Potka Glaisan

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:01:18
n°47158330
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 22-09-2016 à 12:09:42  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : L'Epilée du Nil - Extrait numéro 63.

 

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Epuisé par ses sorties nocturnes et meurtrières, Tahosétlafer-Ramassidkouch était complètement crevé et dormait debout. Fiévreux, il épongea de sa manche la sueur abondante qui coulait sur son front pâli. Il venait de quitter précipitamment le temple d’Isis pour retourner vers le palais, en proie à d’atroces hallucinations. Marchant par saccades, il croisa sur son chemin le cortège d’une dizaine de prêtres qui portaient tous des masques d’oiseaux en plumes et en carton peint, des ibis et des faucons. Un disque doré brillait en miroitant au-dessus de leurs têtes à chaque mouvement. Comme il manquait de souffle, Tahosétlafer-Ramassidkouch s’appuya au pilier de bois qui soutenait le velum d’un atelier de verriers. Quelques artisans s’activaient autour d’une jolie amphore bleutée et transparente, d‘autre plongeaient leurs longues cannes dans un brasier. Les prêtres aux ceintures en peaux de fauves tachetés passaient dans la rue poussiéreuse en psalmodiant à voix rauque, leurs yeux globuleux et inexpressifs fixaient le roi terrassé de terreur à leur vue. Il avait l’impression que les dieux allaient soudainement fondre sur lui pour le juger enfin, peser son cœur, le condamner et le vouer aux enfers. Il pensait à chaque seconde qu’il allait mourir à nouveau, et cette fois pour ne jamais revenir. L’ancien devin chancela en cramponnant son piquet avec plus de force. Les maudits piafs humains dansaient une sarabande endiablée autour de lui, et balançaient leurs encensoirs vers sa direction pour lui faire respirer des fumées de drogues pas claires. Il se sentait pris au piège sans pouvoir s’échapper de cette bande d’allumés du bocal, des emplumés de première dont les silhouettes se transformaient à chaque instant sous ses yeux brûlants de façon grotesque. Aucun son ne sortait de leurs becs, et pourtant des voix sentencieuses et éraillées martelaient sans vergogne ses tympans martyrisés. La foule menaçante tendait les mains vers lui. Plongé en pleine hallucination, il observa les danses délirantes des grands oiseaux humains, un air de tambourah surgit soudain de nulle part, ajoutant au vacarme ambiant, car pour lui seul la musique diffusait des accords en dysharmonie. Il se sentait en cet instant moins homme que momie, mais son sentiment de toute puissance avait momentanément disparu, pour laisser place à une désastreuse vulnérabilité. Un des prêtres déguisés brandissait un panier d’où s'échappaient les sifflements du serpent énervé qu’il contenait. Quelques spectateurs se courbaient à genoux sur le sol en face d‘eux, en signe de dévotion, mais le pharaon ne pouvait quand à lui effectuer un seul mouvement, il était à la merci des serviteurs des dieux. Avec un effort surhumain, il se dégagea de leur emprise pour s’enfuir en courant vers sa gigantesque et royale maison. La haute façade grise et massive l’écrasa. Après avoir franchi les portes de cuivre que les gardes s’empressèrent de rendre béates, le mort-vivant s’écroula de tout son long en atteignant l’un des jardins du palais Thébain, lesquels offraient de leurs terrasses un panorama époustouflant sur toute la ville, et en particulier ses vieux quartiers. Comme on le croyait mort, les domestiques allèrent immédiatement prévenir Schrèptètnuptèt que son frère venait de faire une attaque et gisait à présent au milieu des géraniums.

 

– O, vous, pharaonne par interim, la sœur du roi, la mère du roi, la femme de Dieu, la mère de Dieu, l’épouse du roi, votre frère est tombé dans les vaps, on croit bien qu’il est mort.

 

– T’as oublié la sœur de Dieu. Apportez-le à mes pieds. Elle ne ressentait aucune tristesse, mais au contraire une certaine jubilation à l’annonce de cette nouvelle. Elle la libérait en vérité d’un poids encombrant. Ses yeux s’embuèrent même d’une joie aussi fugace qu‘imperceptible.

 

– O, majestueuse Aset, glorieuse Het-Sa, les médecins disent qu’on ne doit pas le transporter, son décès n’est pas encore certain. Son « bas » ne serait pas totalement échappé de son corps.

 

– Ben faudrait savoir.

 

Il valait sans doute mieux qu’elle en fasse la constatation par elle-même. Si son frère était mort, elle était seule maîtresse de Thèbes, sinon encore de l’Egypte toute entière, mais les potiers, les bouchers, les tanneurs lui lécheraient plus facilement les bottes en l‘acclamant suprême Hathor, déesse de l‘amour dans les coins sombres et des danses folkloriques. Suivie par le troupeau de ses servantes, elle grimpa sans se presser les larges escaliers pour se rendre au jardin cité, tout en pensant qu’elle allait faire immédiatement construire une belle pyramide conforme à l’époque pour son frangin d‘origine Hittite, évidemment comme elle. C’est leur mère restée au pays qui serait fière de voir leur réussite, enfin surtout celle de sa fille. Ce qui lui donna l’idée d’envoyer Moisi en vacances chez sa grand-mère, somme toute une habile manière de s’en débarrasser temporairement de l‘autre côté de la frontière. Néefièretarée serait bientôt assassinée, Schrèptètnuptèt aurait alors les coudées franches pour gouverner et passerait ses journée à rien foutre plongée jusqu‘au cou dans l‘eau de fleurs d‘oranger. Ce qu’elle faisait du reste déjà, mais sans le panache de se savoir incarner sans rival la reine absolue. Elle se pencha sur le corps inanimé de son frère et amant. Il n’avait plus de sang dans les lèvres et sa peau était glacée. Ses insoutenables paupières mi-closes ne tremblaient pas, rien ne s’agitait dans cette forme inconsciente au rictus figé. Le test du froid miroir d’argent posé sous ses narines prouvait qu’il ne respirait pas. Son pouls ne battait plus. Le bol, il était vraiment mort. Venant adoucir la vision macabre, une légère brise agita subitement les plantes enracinées dans de grands pots décorés, tandis que le ciel se teintait d’un rose charmant aux confins de l’horizon. Schrèptètnuptèt s’éventa sans hâte, le regard toujours plongé sur le père de Moisi. Au pied du bâtiment, passa un moment une bruyante procession religieuse qui mettait le quartier en émoi. Du haut de son promontoire, la belle-sœur de la reine vit s’agiter les prêtres aux masques d’oiseaux et habillés de panthère, marchant lentement en cadence, comme de petites marionnettes bien réglées. L’ensemble formait un défilé haut en couleurs et très plaisant à regarder, que le peuple suivait au trot ; les enfants en premier, probablement pour mieux saluer les hommes-oiseaux habités par les Dieux. Schrèptètnuptèt se détourna, la blancheur des murs de Thèbes lui faisait mal aux yeux. Sans doute effrayées par le tumulte de la rue, plusieurs chèvres bêlaient comme si on était en train de les tuer. L’annonce de la mort du roi colportée par les serviteurs du palais courrait déjà discrètement sur les lèvres des portefaix et des marchands, mais elle rendait tout le monde heureux. On était enfin débarrassé du criminel psychopathe qui faisait régner une terreur assassine dans les ruelles du faubourg. D’un seul coup d’un seul, les palmiers se montraient plus verts, même s‘il restait encore sa bonne femme aux commandes.

 

Cette dernière ordonna que l’on couchât son frère sur un grand lit, avec à côté une fille douée pour jouer de la harpe, pas question de s‘emmerder en veillant. Il faudrait réunir au plus vite tout ce que le palais comptait de noblesse. Il s’agissait de régler les formalités d’embaumement et tout le tintouin funéraire, mais aussi de rassurer tout le monde sur le fait que la reine faisait toujours régner l’ordre entre les piliers roses aux chapiteaux jaunes comme le soleil, sur lesquels s‘égayaient de beaux papyrus peints d‘un vert délicat. Elle appela des gars pour mesurer soigneusement son frère et donner ensuite les mensurations aux sculpteurs, afin d’édifier son image de pierre dans un coin du complexe architectural. Elle demanda aussi aux scribes de lui préparer un rendez-vous pour le lendemain avec les représentants du commerce et de l’industrie. Deux esclaves prirent place autour du lit en portant haut les perches de leurs éventails, car de grosses mouches avides volaient déjà vers le cadavre. En pinçant le nez, la pharaonne fit remarquer à l’un des deux ventilateurs qu’en dépit de son métier, il sentait fort des pieds. Le guépard royal réclamait avec insistance sa part de bidoche, Schrèptètnuptèt fut un instant tentée de lui refiler son frère. Malgré tout, en dépit des apparences trompeuses, contrairement à ce que tout le monde pensait, Tahosétlafer-Ramassidkouch était seulement plongé en état léthargique, mais il voyait parfaitement tout ce qui se passait autour de lui, car en tant qu’immortel, il se trouvait toujours animé de vie.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:04:54
n°47185535
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 25-09-2016 à 08:52:32  profilanswer
 

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Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Biographie de Gaston Boudiou. Extrait numéro 17.

 

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Gaston se sent véritablement aspiré par la vision coquine des petites fesses remuantes de l’épicière aussi totalement mises à jour. Face à l’indiscrétion de cette position, il se met aussitôt à bander comme un turc. Marité farfouille toujours sur l’étagère et lutte véritablement pour ramener des produits vers elle. Elle les range ensuite dans un petit carton. A chaque mouvement qu’elle exécute, sa sueur ramène aux narines de son assistant aux abois un délicat arôme de lavande, propre à le chambouler complètement. Elle se retourne un instant, se penche et confie à Gaston le fruit de sa collecte ; ce faisant il plonge le nez dans son décolleté largement ouvert, les deux seins soulignés par un charmant soutien-gorge blanc à dentelles s’offrent à lui largement. Deux petits amis agités bien sympathiques qui dodelinent avec ironie sous le corsage et viennent encore renforcer une trique de malade déjà bien établie. Il pose le carton au sol en vue d’en attraper un deuxième, Marité a replongé le buste dans le rayon, son slip se trouve à nouveau visible et revient hypnotiser le pauvre garçon livré aux affres d’un désir sans nom. Les longues cuisses absolument lisses et penchées qui conduisent tout droit à cette apothéose lui procurent un sévère tournis. La mini-jupe en daim est aussi ouverte qu’une fleur épanouie qui s’ouvre largement à l’insecte étourdi afin qu’il la butine. Gaston est décidément fasciné par cette délicate amande de chair invisible dans son cocon blanc, qu’elle renfle légèrement. Une mignonne petite bosse admirable dodue comme un bonbon et qui se trouve chargée d’une indicible promesse de paradis. Gaston Boudiou se fait violence pour ne pas y poser son doigt par une pulsion insoutenable. Mais déjà, Marité lui présente une nouvelle boîte, son regard surpris croise alors celui de son admirateur et s’y attarde un instant, puis elle retourne sans rien dire à son activité. Ses gestes sont toutefois légèrement plus brouillons, elle semble moins concentrée sur son travail. Le jeune puceau a de son côté bien du mal à se contenir, car il est de plus en plus débordé par une excitation grandissante. Il sait que si la situation perdure, il va presque devenir incontrôlable, son érection l‘est déjà. En dépit de la gêne exercée par le pantalon, son pénis tendu est devenu très dur et forme une bosse explicite qu’il ne peut pas cacher. Marité vient de nouveau pencher la tête vers lui, elle observe avec insistance le phénomène, un petit sourire attaché à ses lèvres, ses yeux magnifiques avouent une intensive curiosité. Devant la manifestation physiologique mise en œuvre, elle a enfin compris ce qu’elle vient de provoquer chez son adorateur. Loin de s’en indigner, elle décide de corser le jeu. Sans aucune pudeur, elle glisse un index qui vadrouille un bref instant sur son sexe, avant d’écarter à peine le bord de sa culotte pour en offrir davantage au Gaston éberlué. Une affaire de plusieurs secondes magiques, qui terminent tout à fait de le chambouler. La vision fugitive d’un peu de duvet brun l’a visé en plein cœur, il est tétanisé.

 

Gling, gling, le carillon de l’entrée prouve l’entrée impromptue d’un client, que Marité s’empresse d’aller servir. Comme s’il venait de recevoir un méchant coup de sabre, Gaston voit redescendre lentement l’épicière souriante et son éloignement vers l’autre pièce l’oblige à replonger piteusement dans une réalité glacée. En passant, elle lui a encore lancé un coup d’œil dévastateur sur son bazar raidi, impossible à calmer, qui est là pour confirmer les impressions reçues. La contemplation et la proximité physique du sexe de la jeune femme l’on conduit à éprouver des sensations inédites, bien différentes de ses séances de voyeurisme à la jumelle, lorsqu’il mate les ébats campagnards si lointains de Marie-Charlotte et de ses amies sexuellement libérées. Il s’est senti possédé par une irrésistible envie de palper, de toucher, de caresser longuement cette zone interdite offerte au début sans qu‘elle le sache par Marité. De tendre le bras pour tenter d’éteindre en lui ce feu ravageur que le mignon panorama érotique avait déclenché. Rien d’autre en fait que l’aveu spontané et éclatant de son corps qu’il n’était plus sur le sujet un enfant innocent, mais simplement un homme constitué et fortement désirant. Un mec soudainement en rut, à présent laissé seul dans l‘arrière-boutique. Il s’empoigna la queue par réflexe, un geste presque inconscient qui fut très loin de le calmer.

 

– Une boîte de raviolis et une autre de petit-pois. Un chou-fleur, de l’huile Lesieur, des cerises et deux boîtes de sardines, ce sera tout, madame Gloriolle ?

 

– Oui, Marité, merci beaucoup.

 

Gling, gling, la porte se referme sur ce bruit et Gaston entend clairement Marité la fermer soigneusement à clef. Elle n’éteint pas le poste de radio posé sur le comptoir, mais le laisse au contraire égrener la voix de Richard Anthony. Elle revient à grands pas, mais cette fois, elle se désintéresse de son ouvrage pour venir se coller sans façon contre son petit ami. Elle s’empare d’office du gourdin de chair et le tient fermement dans la main, sans le relâcher.

 

– Gaston, mon vilain, à cause de toi, je suis toute mouillée.

 

Elle se presse ensuite sur lui avec tant d’insistance que le jeune homme ne peut que lui rendre sa fougueuse étreinte, ils s’embrassent et se frottent longuement l’un contre l’autre dans le réduit obscur, en proie à une violente excitation réciproque. Curieusement, sans trop réfléchir, Gaston croit connaître les gestes qu’il doit accomplir, en se laissant guider par son instinct, même s’il n’a jamais fait l’amour de toute sa courte vie. Marité est toutefois une experte dans cet art, elle sait très bien que cette fois sera la première pour lui. Une situation qui certainement l’amuse énormément et l’excite à la fois. Elle a parfaitement conscience qu’elle est en train de le déniaiser, mais elle est également prête à lui offrir sans retenue son propre plaisir en partage. Elle ne feint pas sa propre envolée sensorielle et lentement, elle met au jour la bite énervée de Gaston en déboutonnant le pantalon. Sa main douce est chaude et câline, elle s’attarde et glisse en vas-et-viens sublimes sur le membre qui a désormais au moins doublé de volume. Lui a osé, n’y tenant plus il empoigne le sein gauche et le malaxe doucement en poussant un soupir de satisfaction, son autre main s’occupe à farfouiller comme une folle sous la courte jupe. Le contact immédiat de la culotte enfin accessible lui provoque une véritable explosion des sens. Un doigt conquérant s’infiltre dans cette intimité effectivement humide. Lorsqu’il presse à peine le clitoris, c’est à présent au tour de Marité de lâcher un petit râle à peine audible. L’odeur de lavande envahit et submerge tout entier Gaston, lorsqu’il s’enfouit avec délice dans le cou gracieux et les cheveux démêlés. Elle le branle toujours avec application, attentive à ses réactions, lui la pelote avec constance ; soumis à la même tentation, ils sont de plus en plus nerveux. Elle enlève son corsage, dégrafe le soutif et se met à genoux pour glisser le gland rose au fond de sa bouche, Gaston ne s’appartient plus et se laisse aller au formidable plaisir ainsi engendré par les lèvres gourmandes. Pendant des instants merveilleusement sublimes, Marité aux petits seins ronds le pompe savamment avec le plus grand soin. Ses grands yeux charmeurs le regarde fiévreusement, il glisse dans sa bouche avec une volupté qui le conduit peu à peu au bord de la rupture, livré plus que jamais au trouble amoureux .

 

Quand Marité interrompt ses aspirations goulues pour se relever, il semble le regretter, puis, le phallus glorieusement arqué, il reprend aussitôt ses insistantes palpations, avec seulement deux doigts, il perd ainsi les pédales en la pénétrant plusieurs fois. Au toucher, son vagin est à la fois gras et soyeux. Au bout de quelques minutes de ce manège fébrile, elle le repousse aimablement pour finalement enlever sa jupe et sa culotte, sans le quitter du regard. Ils sont à présent deux complices nus animés par une même irrésistible volonté de se ruer sauvagement l’un sur l’autre. Une fois de plus, Marité prend l’initiative, mène le jeu éblouissant et invite par le geste son jeune amant à venir en elle, debout, en la pressant contre les étagères. Il n’oubliera jamais ce sentiment nouveau de glisser tout à coup dans l’infini, de se cogner à l‘univers entier à chaque coup donné par ses reins. Marité se laisse totalement aller, son corps répond merveilleusement au plaisir qu’il reçoit. Ainsi lovés dans la même étreinte, ils font tranquillement l’amour aux milieu des cahiers et des marchandises encore emballées. Gaston redécouvre sa partenaire, car il n’a jamais vu chez elle un tel regard de femme, des prunelles qui se veloutent d’une incroyable acceptation, il voit clairement l’abandon qu’il provoque chez l‘autre, dont la main se crispe avec frénésie sur son omoplate, une empoignade rude que lui prend pour un encouragement, alors qu’il est en train de subir une immersion identique. L’innovation le fait redoubler d’ardeur, avec pour résultat une jouissance qui se décuple et s’intensifie en chacun d’eux, par de sublimes paliers. Il n’en peut plus et se lâche enfin entre les cuisses ouvertes pour éjaculer comme un fou dans ce ventre brûlant, l’esprit et la raison obturés par un orgasme finalement attendu. Peut-être a-t-elle vraiment crié. En tout cas, respirant fort, Marité approuve en le retenant encore un moment contre son corps divin. Comme on le ricane depuis la nuit des temps, Gaston Boudiou est un homme maintenant, même si de franches larmes de joie lui montent un peu aux yeux. Du haut-parleur de la radio trônant sur le comptoir, Salvatore Adamo balance tranquillement son Inch Allah, et raconte en chantant qu’il a vu l'orient dans son écrin, avec la lune pour bannière.

 

– Ben mon petit salaud, fait Marité sur un ton de ravissement amusé, tout en s’agitant pour remettre sa culotte qu‘elle a piochée par terre. Quand même, j’ignorais que la chose te tracassait à ce point là !

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:10:18
n°47197880
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 26-09-2016 à 14:42:00  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 35.

 

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– Je me dois de mettre en évidence l’ensemble des faits que j’ai pu constater ici, puisque j‘en ai le redoutable honneur. Cette planète est au moment où je vous parle sous le gouvernement de sa Majesté la Goween Klito. Les institutions publiques sont complètement contrôlées par les matriarches du triangle doré, sous la gouvernance de la Goween et tant que dure sa vie, qui peut être très longue. D’une façon plus générale, ici, les femmes détiennent légitimement toute la propriété, des maisons aux véhicules et la plupart des biens, transmis de la mère à la fille. Il n’y a pas de mariage, mais une union consentie par la femme seulement, qui prend tous les droits sur les enfants appartenant de fait à la lignée maternelle, laissant au père biologique le rôle de simple tuteur. Assujettis étroitement à leurs compagnes, ces derniers ne sont pas autorisés à porter des armes, et principalement des épées, des poignards ou des arbalètes. Dans ce système rigoureusement matriarcal, seules les femmes le peuvent.

 

– Ah ben ça, c’est une bonne nouvelle ! S’exclame Charlie Badelaire.

 

– Chut !

 

Comme enflammé de bleu, gourou Osburne danse devant eux son être de lumière, avant de reprendre sa conférence aussi précieuse qu’édifiante.

 

– Vous savez qu’une sentence positive pourrait représenter une bonne raison pour une colonisation effective de 8495SK-Rolling Stones, alias Kourdukon, qui au début m‘a offert une sensation fantastique. Hélas, il aurait mieux valu que ma petite promenade spatiale en compagnie de quelques sœurs missionnaires de son éminence nous fasse éviter cette planète forestière aux triples soleils. Et je vais vous dire la raison pour laquelle nous avons échoués : tous les hommes de ce monde sont affublés par naissance d’un minuscule micro-pénis. Voilà pourquoi je donne ici un avertissement solennel aux étrangers qui m’écouteront : un pénis de taille normale est le seul instrument qui puisse donner aux visiteurs mâles un appui favorable, être écouté des possédantes et que les matriarches du triangle doré puissent daigner collaborer avec eux, après vérification. Autrement, c’est la mort assurée. Les zizis écourtés de ces messieurs n’empêchent pas la reproduction, obtenue par panpanspermie, mais une certaine avidité née de la frustration est indéniable chez la plupart des femmes d’Utruss. La jalousie des hommes n’est cependant pas la moindre chose à craindre, car il existe dans la forêt des mâles entrés en dissidence, regroupés sous l’appellation de la Société secrète des Francs-Plaquistes, dont le bras armé se nomme les légionnaires Jidouilles. Bien qu’ils combattent en priorité le matriarcat de la Goween, ils sont fortement à craindre pour tout homme avec un pénis satisfaisant qui débarquera dans cette jungle. Ils ont détruit mon vaisseau, massacré mes nonnes et je suis sans possibilité de retour en défédération Jupitérienne, d’où mon diocèse est originaire. Ce message est donc en quelque sorte l’ultime testament que je vous transmet. Tant que je pourrais la satisfaire, je serais protégé par la Goween Klito dans cette maison d‘Utruss qu‘elle m‘a construite, je m’efforcerai donc de le faire jusqu’à ma propre mort. Kourdukon ne possède pas de minéraux vitaux, mais rien qu’une immense forêt lumineuse qui la recouvre entièrement. Elle brille parfois dans le cosmos proche comme une étoile maléfique. Elle ne constituera jamais un enjeu commercial interplanétaire et ne sera jamais minée par la SLG. Elle reste à l’écart des routes marchandes, ignorées des cargos, et je dirai pour la plus grande sauvegarde des fils bien-aimés offerts au baiser fraternel de son éminence. Pour les historiens que la chose intéresse, voici quelques rappels chronologiques sur le passé d’Utruss. Aux origines de l‘implantation de la ville, une clé de douze lançée par une vieille femme brisa la nuque de la première Goween qui régna sur ce monde, et de nombreuses discordes eurent lieu entre ses descendantes ; alors, une horrible guerre civile ravagea la planète …

 

– Ca suffit, fit Emeline, en prenant un air dégouté, j’en ai assez entendu sur ces garces.

 

– Vous avez écouté comme moi, fit Arnold, ils ont détruit sa fusée, il faut absolument les empêcher d’approcher de la nôtre.

 

– Je comprend mieux l’attitude de la reine et de la princesse envers nous, ajouta Basile sur un ton rêveur, rapidement tancé par un coup d’œil coléreux d’Emeline.

 

– Des épées, des couteaux, des arbalètes maniées par des gonzesses, pas d’autre énergie que la vapeur, c’est pas mauvais du tout, intervint Charlie, tout en caressant avec amour la crosse de son Space Outlaw Atomic Pistol.

 

– Bientôt, nous serons convoqués au palais, il nous faudra être prudents.

 

Comme personne n’interrompt l’holocast en cours, Gourou Ouzy Osburne continue d’égrener d’une voix monotone le passé tumultueux de 8495SK-Rolling Stones. Il évoque de mémoire la longue liste des différentes Goween ayant présidé au destin de la cité dans les temps enfuis. On coupe l’émission au moment où il évoque le sort de Métrogéniale Neutrogénia, arrière-grand-mère de Klito, notoire championne de balle au pied. Il précise encore qu’elle battit à elle seule un commando entier de Jidouilles en allant les extriper dans la jungle du fond de leur tranchée. Puisque ce fut au cours de son règne qu’est née la mâle société secrète des Francs-Plaquistes. Les potentielles maîtresses à fantasmes d’Utruss ont donc depuis lors des ennemis déclarés, qui représentent toujours pour le pouvoir des matriarches du triangle doré un danger permanent et mortel. Maîtres de leur forêt, les Jidouilles vivent libres en compagnie de quelques femmes mises au ban de la société, mais ne s’aventurent jamais dans la cité, pourtant peu protégée. Ils ont de leur côté édifié Ovarie et Placentia, villes perdues de la jungle offrant comme il se doit une architecture ronde puisée dans le sillon ancestral de la tradition locale. C’est pour avoir voulu à tout prix visiter l’une d’elle que les nonnes défédérées du Gourou étaient finalement mortes. Dans la partie plus généraliste du discours d’Ouzy concernant la vie quotidienne, il avait précisé que les habitants ne maîtrisaient effectivement pas l’imprimerie et que toute l‘écriture se traçait à la main, ainsi que toutes les cartes et les plans, ce qui en constituait autant d‘exemplaires uniques.

 

– Bon, je ne sais pas ce que vous en pensez, fait Jhon Piol en brisant le silence revenu, mais on dirait que certaines petites bites font des misères à ces chéries. Moi je veux plutôt leur faire du bien quand on sera au palais, je suis d’accord avec le programme.

 

– Tout pareil, approuve Kishi, carrément en phase, même !

 

– Bande d’idiots, leur lance Emeline, vous ne comprenez pas que la situation a causé la perte de la mission d‘Osburne. Prenez terriblement garde à vous, bande de gros queutards, je suis désolée d’avoir à ternir complètement votre perspective jubilatoire.

 

– Et quoi, Emeline, tu t’es cassé un ongle ? Je te rappelle aussi que d’après cette société, tu as tous les droits et nous pas. Alors ne te plains pas. Pour une fois qu’on a pas à faire une demande d’autorisation officielle de pornifier, tu crois qu’on va se gêner ?

 

Par la fenêtre, ils observent qu’un beau virus au vert diaphane se vautre en parfaite immobilité sur une grosse pierre, en laissant sa fine paroi absorber avec délectation les rayons des soleils. Emeline prend à part Basile pour discuter avec lui, Charlie contrôle une fois de plus l’énergie de son lasergun, Kishi s’empare d’un livre et déconnecte momentanément son implant et puis, à sa guise, chacun vaque un instant à la découverte de la maison. En fin de soirée, tous se rassemblent sur les fauteuils et le canapé. Arnold réinitialise l’holocast d‘Ouzy Osburne, mais cette fois-ci, les naufragés le regardent et l’écoutent attentivement jusqu’au bout.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:12:22
n°47220408
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 28-09-2016 à 11:47:03  profilanswer
 

Salon des inventions :
 
Les machines essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Le casque-antenne.

 

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Peu de gens le savent, mais les indiens d’Amérique vivaient tous en tribus et dormaient sous des tentes pointues fournies par le gouvernement. D’après certaines références (Prix du Kilowatt chez Les Kiowas, Abbé Julio - 1880) ces clans ne se comprenaient guère et n’avaient pas les mêmes us et coutumes, ni la même langue.  La seule chose capable de les rassembler dans la grande plaine était la façon de niquer les aigles royaux.* Quand un Cheyenne voulait faire caca, par exemple, il creusait un trou dans la terre par tradition de sa tribu, et se torchait avec une plume d‘oiseau. Les Sioux confrontés à pareille situation ne connaissaient pas l’usage de la pelle et préféraient se soulager dans les trous des Cheyennes, puis se torcher avec une couverture de selle Cheyenne magnifiquement décorée, ce qui était source de conflits tribaux incessants. C’est la grande histoire de l’Amérique avant l’invention du jean. Pour se comprendre enfin entre eux et prévenir les incidents, les indiens ont donc inventé la langue des signes et les Sioux apprirent ainsi de la part des Cheyennes à chier de préférence dans les trous de Comanches. On voit que de tous temps et en tout lieu, l’être humain éprouve le besoin de communiquer pour apprendre, savoir et le répéter, non seulement avec ses congénères au cerveau reptilien, mais aussi avec les reptiles au cerveau de reptile, c’est le principal attrait des séjours linguistiques et des études scientifiques sur l’Anaconda brésilien. Discuter entre nous, deviner les intentions de chacun, appréhender correctement l’univers semblent donc très compliqué, en raison des infinies disparités d’application. Malgré tous les procédés mnémotechniques, explorer la physique quantique avec son voisin du dessous ou récupérer des conseils d’hygiène de vie par son fils de quinze ans va vous conduire aux urgences, une fois mal digérés lapsus et absurdités. Avant l’invention du casque-antenne pour connectés, il n’existait pas de solution concrète pour affronter en toute sérénité la complexité du monde qui nous entoure. Une étude réalisée par le pro-fesseur Talbazar, portant sur l’appui réel d’Internet et le soutien quotidien de son portable aux mille applis laissait largement ouverte la porte sur le champ des possibles. Ce sont des outils malheureusement très imparfaits. Le mieux était d’imaginer un dispositif simple et permanent porté fièrement par tous les candidats au coaching d‘une hyperconnection. Vie de famille ou départ en vacances, l’occasion nous est enfin donnée d’en apprendre tous les jours sur eux comme sur nous, en plus de vérifier le bon itinéraire sans aucun risque de méprise.

 

Notre précieux chapeau conique et multicolore sur la tête, nous voici enfin réellement connectés avec le monde entier et capables, on s’en doute, de passer haut la main des tests chez la psy. Apprendre, deviner et connaître, tels sont les maîtres-mots de cette invention qui en fait un couvre-chef hautement magique, lequel sait transcender les ondes à coup d’électronique pour vous transformer en petit génie. Un souci, une interrogation, un désir de connaître ? Vous voilà branché en permanence, interconnecté en réseau avec les heureux possesseurs du même casque-antenne, qui deviennent autant d’indispensables bases de données, sinon de référence, au sein d‘une bienveillante et fraternelle communauté. Vous êtes liés et reliés avec un efficace agenda, une impressionnante encyclopédie, connecté aux radars de l’aviation civile et aux terminaux SNCF. Vous vérifiez à chaque minute la météo de Djakarta en temps réel, la fréquentation ce dimanche du parking de la supérette choisie, vous entrez en relation immédiate avec l’homme ou la femme de votre vie, vous trouvez un chien et consultez plus tard les différentes étapes d’une procédure de divorce, vous construisez en attendant une éolienne au fond du jardin. Vous vous transformez instantanément en reporter social et historique. Vous allez enfin apprendre comment faire un bébé ou du canoë.

 

Le tout en remettant les chapeaux à la mode, car cette antenne conique sait rester élégante, même si elle annonce avec une ultime brillance le troisième millénaire. Turlututtu, chapeau pointu de toutes les couleurs : couvert de ce véritable scanner cosmique, me voici plus performant dans ma vie de tous les jours qu’un gars sous cocaïne, et capable au contraire de tout dire avec presque pas de mots. Peuples, croyances et cultures, plus personne ne nous est étranger et tout le monde est séduit par notre casque-antenne qui brille à notre sommet chevelu comme une brave lanterne, pour avaler les œuvres classiques et se livrer à quelques méditations harmonieuses. Nous voilà ok à tous les étages du savoir. On apprend par exemple pourquoi les Sioux ne chiaient jamais chez eux. Ou pourquoi si vous pénétrez dans un indien à Paris, il s’agit plutôt d’un restaurant, dont votre casque-antenne va vous livrer sans faute le menu du jour. Le monde entier se fixe dans nos mémoires au gré d’une acoustique exceptionnelle, de tous les coins de la planète, tant qu’on reste affublé du casque-antenne, somptueusement griffé Talbazar product. Tous les articles nécessaires de la Moyenne Encyclopédie s’y trouvent par exemple réunis. On apprécie de fait une nouvelle douceur de vivre. L’indispensable homme moderne se voit enfin équipé, par la vertu d’un prix modique, de l’outil sérieux qui lui permettra d’évoluer au mieux dans un univers digne de son image.

* (La moyenne Encyclopédie du pro-fesseur Talbazar / Cours universel de zoophilie appliquée - De la bonne manière de niquer un aigle royal.. VOL 2)

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:13:58
n°47222129
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 28-09-2016 à 13:58:40  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Noeud coulant pour Martin Smith - Extrait numéro 28.

 

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Un quart d’heure plus tard, pour filer, Teddy la fouine filait. Ou plus exactement, toute sirène hurlante, la voiture de police se lâchait les soupapes dans les rues de la ville en roulant à tombeau ouvert, par permission de l‘état et du code de la route.

 

– Alors, Angèle, on sert toujours ses petites fesses ?

 

– Un jour, je vais porté plainte contre toi pour harcèlement sexuel de la part d‘un supérieur.

 

– Pas la peine.

 

– Hé, remarque, peut-être bien qu’aujourd’hui, Teddy, j’ai pas de culotte, va savoir ?

 

– C’est dégueulasse.

 

– Je t’avais jamais dis que ma chatte avait des griffes, Gilbert ?

 

– Arrête ton char, Angèle, on arrive. Je te préviens, je ne te paye pas ton verre.

 

– T’es un amour.

 

Gilbert Tricard, alias Teddy la fouine, fit grimper la voiture sur le trottoir et se gara en face de la Rose Noire. Angèle et son chef virent tout de suite que le boxon avait l’air fermé. La lourde porte en chêne foncé percée d’un petit judas grillagé leur disait un merde franc et net. Teddy sonna pour la forme. Angèle consulta les horaires, la boîte devait ouvrir dans trois heures. Pas de réponse. Leur arrivée n’avait cependant pas été très discrète et au premier étage, Sisco Matteï les observait attentivement. Teddy leva les yeux et la silhouette du patron qui se détachait à la fenêtre ne lui échappa pas. Elle s’évanouie pour venir leur ouvrir quelques instants plus tard. Après leur avoir serré la main, Sisco les introduisit chez lui, non sans faire preuve de cordialité. Gros doigts sans doute plusieurs fois brisés et poches sous les yeux, le bonhomme approchant la soixantaine avait tout du gangster en reconversion, puisqu’il avait fait son artiche dans les jeux et les paris clandestins, avant de devenir clean comme l’eau de roche. C’était même à présent un indic notoire, selon les notes laissées à son sujet par Barracuda N’Dyé. Teddy qui avait rapidement épluché son parcours le savait à présent correct. Sisco Matteï avait en son temps largement profité de la guerre des polices locales, avant d‘amasser suffisamment de blé louche pour monter son affaire. Pas de contact connu avec Gros Bill, et il avait toujours miraculeusement évité la taule au cours de sa carrière. Une chose cependant paraissait certaine, ce gars-là n’était visiblement pas du genre à faire compte commun avec qui que ce soit. Ceci dit, si le Tripoli faisait largement dans les putes, la spécialité du cabaret dans lequel Angèle et son chef pénétrèrent lui donnait un air de parfait casino. On devait sans doute jouer gros ici, mais en toute légalité. Le club vide à peine éclairé sentait jusqu’à l’écœurement le vin rance et le tabac froid. La salle principale dédiée aux joueurs de roulette, de poker et autre bandit-manchot semblait immense, mais ils la traversèrent à la suite de Sisco pour se rendre dans celle des spectacles, où se trouvaient le grand bar et la scène, celle-ci somme toute modeste. C’est à cet endroit que devaient officier chaque soir les trois nanas que le couple de policiers recherchait. Sisco accrocha une bouteille de scotch qu’il posa sur le bar.

 

– Qu’est ce qui vous amène ? Vous voulez un verre ?

 

– Non, merci. Ecoute Matteï, ce n’est pas pour partager ta passion du jeu en sirotant un brin qu’on vient chez toi. T’as embauché des girls, récemment ?

 

– Ah, je vois, les filles du Tripoli. Lui se servit un godet de scottish sans façon, qu‘il clapa aussitôt avec gourmandise.

 

– On voudrait leur parler.

 

– Le club ouvre dans trois heures, je suis seul ici. Elles sont chez elles à l’heure actuelle.

 

– Alors tu vas nous donner leurs adresses.

 

– Aucun problème. Il s’éloigna vers son bureau situé de plain-pied et en revint avec les coordonnées de ses employées.

 

– Ca marche, la Rose Noire ?

 

– Faudrait que ça dure. Il esquissa un sourire d’où perçait peut-être un sentiment d’amertume.

 

– Ya pas de raison, si tu fais ce qu’il faut. Merci Matteï. Teddy fit signe à Angèle qu’on mettait les voiles.

 

Fallait faire un choix, ils décidèrent de filer sur le champ chez Câline Grosby. Elle venait tout juste de déménager dans un coquet studio. Ils repérèrent le vrai nom de la miss sur sa boîte à lettres et grimpèrent au deuxième. La porte d’entrée était entrouverte, ce qui inquiéta de suite l’inspecteur. Angèle avait tiré son flingue, qu’elle cachât derrière son dos. Teddy poussa la porte doucement. L’appartement était vide, mais ils trouvèrent la chanteuse allongée dans la salle de bain, plongée dans un hideux marécage de sang coagulé et de boyaux mêlés. Le tableau était si répugnant qu’ Angèle eut le plus grand mal à réprimer sa nausée. Quand à lui, en état de choc, Teddy expliqua plus tard aux policiers l'horreur dont il fut le témoin en contemplant la scène. L’odieux tapis d’intestins couvrant le sol de la salle d’eau signait sans doute possible une œuvre de Gros Bill. La pauvre fille était morte méchamment travaillée par un dingue du surin. Avec le taré en question, son employeur profitait largement du service offert, mais seul Gros Bill pouvait démontrer un aussi spectaculaire génie dans l‘éventration. Les renforts arrivèrent pour fouiller l’appartement ensanglanté, ce qui voulait surtout dire déballer les cartons où se nichaient encore la plupart des biens de la victime. Teddy ordonna qu’on lui fasse un rapport sans tarder, puis il embarqua précipitamment Angèle, car il voulait se rendre sans plus tarder chez Holy Ghost, à dix minutes de là. Cette-fois, n’obtenant pas de réponse, ils explosèrent une fenêtre à l’arrière de la maison, en étant passé par un charmant jardin. La danseuse était assise sur une chaise, les membres ligotés, les yeux cachés avec l’un de ses propres foulards. Une balle dans le front lui avait donné une mort propre et tranquille, peut-être que Bill était pressé. En tout cas le tueur avait pataugé sans façon dans le sang, en laissant des traces de ses pas partout dans la pièce. Il chaussait sportif et plutôt grand. Plutôt lourd, même, s’il s’agissait de Gros Bill. Lorsque le policier dénoua le bandeau, la pauvre gamine au corps athlétique dévoila un visage terrorisé que la mort n’avait pas effacé. Décédée semblait-il depuis un certain nombre d’heures.

 

– Puissant comme la foudre, rapide comme l’éclair, Tu parles, Teddy, on l’a une fois de plus bien dans le cul. Bordel, Gypsy Sorrow est sur la liste, filons vite chez elle !

 

– Oui, Angèle, c’est évident, pourvu que cette fois…

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:17:50
n°47247346
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 30-09-2016 à 15:39:40  profilanswer
 

 

Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : La saga du trône de Fion. Tome 2 - Sus au sein royal. Extrait numéro 15.

 

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 Avant de courir dans la lande pour traquer l’animal, on s’affaira à loger les nouveaux-venus au sommet de la tour pucelle, qui avait bonne vue sur l’océan. En raison d’une crise subite d’arpionnite invalidante et tout en hurlant let me alone, le Duc de Médeux fut porté sur son lit, sans espoir de participer aux battues. Il déclara néanmoins qu’il serait bien présent pour le banquet du soir, offert gracieusement par Guibert aux visiteurs ; puisque celui-ci voulait ranger en bonne place la bonne impression qu’il leur ferait dans le rayon des souvenirs de ces journées. Cette arrivée bouleversait cependant l’ordre politique prépondérant et Mouyse ne manquerait pas de juger un asile trop bienveillant en affront contre ses intérêts. Pour le roi de Godapat, il fallait habilement ménager la chèvre et le choux, mais cette situation nouvelle requérait une exigence de mobilisation nouvelle sur le mode d’une mise en alarme permanente. La catastrophe maritime des navires de Fion mettait brutalement en lumière l’île de Godapat et son château de Pleugaphion, en leur donnant soudainement une envergure internationale dont Guibert Sonfutal se serait volontiers passé. La petitesse du royaume cerné par la mer de Cybrine en faisait somme toute un produit trop facilement marketable pour les grandes puissances ennemies, il fallait donc en toute chose agir de façon rusée, si l’un ou l’autre des protagonistes ambitionnait de profiter de la situation pour le croquer et l‘avaler dans son empire. La mal-baisée reine de Fion n’était point fée merveilleuse, et le tyran de Mouyse incarnait un ours puissant fort mal léché. Ce dernier avait d’ailleurs refusé toute médiation de Godapat au sujet de la séquestration abusive de Marie Stetarte, dont les espions l’affirmaient touchée par le syndrome de l‘otage, puisque la prisonnière devait prochainement épouser son bourreau, en devenant tout de même à l’occasion la reine de Mouyse. Guibert avait fort à faire pour n’être point qu’une simple marionnette dans les mains peu scrupuleuses des trônes dominants de l’Hyperbourrée. Il pouvait cependant compter sur l’amour indéfectible de son épouse Hildegarde Bourrelareine, aux jambes faussement lisses, et qui ne le trompait qu’avec toute sortes d’objets, en particulier des manches de brosses et des embouts de trompette. La grande équipée revint en soirée de la chasse avec 102 castors abattus aux blessures saignantes, qu’on installa en fameux tableau dans la cour du château, car Kramouille reconnaît toujours ceux qui savent la servir.

 

– Bonne gent de noble famille qui êtes dans nos murs, fit Hildegarde debout dans sa jolie robe, en portant largement toast aux hommes du Fion, faisons donc à présent bonne chère et allons ripailler en espongeant bonne vinasse gouleyante. Il y aura cracheurs de feu et attrayantes danseuses de nombril, qui grimperont au dessert faire les malines sur les tables, pour mieux divertir vos seigneuries.

 

– Majesté Bourrelareine, s’exprima galamment Franquette pour répondre à l‘invite, vous êtes plus accomplie qu’aucune dame en ce monde, car vous faites preuve de courtoisie et bonté pour notre pauvre armée, dont je ne suis après-tout que le modeste maître.

 

Huguette Donnsapine, petite servante du château de Pleugaphion, et son collègue le jeune valet Valentin Douceverge, riaient à gorges d’employés et se relayaient pour apporter tour à tour les victuailles à l’immense tablée. Comme il l’avait prédit, le Duc de Médeux allait mieux, car comme il le déclara en souriant «ventre affamé n’a pas d’orteil» ; il fut assis entre le capitaine-chevalier Franquette de Labonne et messire Robinet Atétard, qui se tenait tout à côté d’Hildegarde. Elle avait cette curiosité des gens des îles pour les affaires du continent, réclamant notamment le score final des derniers burns de charrettes ayant eu lieu à Fion. Avant de répondre, elle s’essuya la bouche dans les cheveux d’Huguette pour chasser sur ses lèvres carmines les traces des langoustines coco cuites à l’eau de mer, spécialités de son pays qu’elle venait d’avaler avec délice.

 

– Ho, je suis de bonne noblesse, il faut bien le dire. Si ma mère est morte quand elle était très petite, mon propre grand-père est celui qui a terrassé le dernier dragon ayant terrorisé notre île. Je suis particulièrement fière de posséder un peu de son sang dans les veines. Vous êtes d’ailleurs assis sur des fauteuils fabriqués dans le cuir de ce monstre. On s’exclama pour applaudir.

 

 Elle tança au passage vertement ses deux jumelles de six ans aux longues tresses bondes, Manon et Anaïs, qui jouaient sans vergogne à rouler des boulettes dans leur brioche. Guibert avait depuis longtemps renoncé à différencier ses filles et les confondait constamment. Souvent, il leur collait le nom générique de Manaïs lorsqu’il ne savait plus laquelle était la bonne. Manon et Anaïs Bourrelareine de Sonfutal étaient pour l’instant les problématiques héritières à parts égales de la couronne de Godapat, et leur mère Hildegarde bataillait tous les soirs en chambrée pour engendrer un fils qui ne serait le jumeau de personne. En attendant ce jour qu‘elles craignaient, les deux gamines gâtées profitaient largement de leur statut et s‘exprimaient en employant un accent du sud à faire peur. L’une était allergique au pollen de bouleau et l’autre aux poils de castor domestique. Après avoir traité le laquais Valentin de sombre merdaille parce qu‘il refusait de monter sur le dos d‘Huguette pour faire le cavalier, elles chahutèrent longtemps Robinet Atétard afin qu’il leur dessine un dragon sur la nappe, en s’aidant de la sauce accompagnant la salade de carciofe. Tout en choquant sans compter cornes de bière et culules de pinard, Franquette et le Duc louèrent auprès de leurs hôtes la grandeur de l’architecture du château de Pleugaphion, l’originalité des céramiques et autres plats en pierre de lave posées sur la table et la somptuosité des costumes qui exprimait tout le raffinement culturel de la civilisation îlienne. Ils masquèrent prudemment le fait que les Pleugaphiotes passaient souvent pour de vulgaires et simples contrebandiers aux yeux de tous les Fionnais. Les hommes de Fion payaient bien trop souvent les fourrures de castors laineux exportées au double de leur valeur réelle. Monsieur le duc de Médeux trouvait également en secret que les deux petites princesses auraient plus tard de vraies caboches à sucer des bites, en confondant bien sûr leurs identités pour trop se marrer entre elles de la secret story. En ces jours de la prime enfance, elles pensaient néanmoins encore innocemment que le cœur servait seulement pour la respiration. Personne ne pouvait toutefois être dupé par la situation qui menaçait à présent la neutralité de l’île, mais, même si une attitude pacifique ne veut point dire amicale, les marins d‘Amanda tendaient prudemment à démontrer qu‘ils se dévouaient pour le moment courtoisement à son roi légitime. Franquette fit donc apporter sa vaisselle d’or pour en faire don au roi Sonfutal et son épouse de haute dignité, cadeau ayant pour but de régler le prix de leur séjour et le paiement des engins de levage nécessaires au renflouement des bateaux. Le froissement du métal précieux semblait en effet indispensable pour préserver l’unité nationale de Godapat, gravement compromise par la querelle des autres. Guibert craignait par-dessus tout de se voir attaquer à l’improviste par l’une ou l’autre faction, mais il ne refusa pas ce trésor.

 

A la suite du copieux repas festif, Madame la Pompadore, qui tant est sage et belle, attrapa le bras de Franquette pour danser force pavanes et gaillardes en sa compagnie. Nul ne vit que son mari le maréchal Thiébaud Kentudor avait quitté la table pour agir en coulisse et se rendre au poulailler, duquel il laissa en douce échapper une volaille messagère, munie à la patte d’un message qui prévenait le roi de Mouyse que les bateaux du Fion avaient échoués sur l’île de Godapat, immobilisés ou brisés sur des rochers. Il revint peu-après faire tournoyer innocemment sa mie, non sans avoir acquiescé énergiquement d’un signe de tête au questionnement muet que lui fit Guibert en passant devant lui. Huguette et Valentin s’en allèrent faire coucher les filles, pestant de concert que la tache formée par le dragon dessiné sur la nappe serait très difficile à faire partir. Le roi de l’île accompagna Hildegarde, car c’est habituellement la nuit qu’il couchait avec elle. Les naufragés du Fion s’en allèrent ensuite au petit matin pour aller paisiblement regagner leur chambre dans la tour Pucelle, en faisant tout pour ne pas passer devant les gardes Pleugaphiotes comme de fougueux envahisseurs, venus incarner l‘âme d‘un complot au cœur de leur royaume.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:20:47
n°47260747
talbazar
morte la bête, mort le venin
Posté le 02-10-2016 à 13:10:46  profilanswer
 


Salon littéraire :
 
Les oeuvres essentielles du pro-fesseur Talbazar
 
Aujourd'hui : Coup de chance dans l'hyperbole - Extrait numéro 36.

 

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En mission de guerre, on ne quitte jamais son scaphandre, un principe de précaution qui peut, comme on va le voir, vous sauver la vie. Lors de la destruction du Sharsherman et des Panzigs, le ciel de Mars s’est paré de rouge vif, le temps d’une seule demi-seconde. Les monts environnants se sont floutés d’un rose inquiétant et un mur de poussières mauves s’est mis aussitôt à cercler le point d’explosion, devenu quand à lui un gouffre sombre et profond. La montagne qui abrite l’équipage des saboteurs a naturellement fait en partie obstacle au souffle ensablé, mais le Cragstan Space Tank a malgré tout été durement secoué et ses chenilles se sont soulevées pour retomber dans un fracas brutal. L’une d’elle se trouve endommagée, cela n’empêche heureusement pas le véhicule de reprendre sa course un peu moins rapide en direction de la base enterrée, malheureusement très lointaine. Jouant fort bien du stick, Jorg Glooniais pilote à présent en binôme avec Siguiline Oryal, dont l’arrière-crane métallique du casque offre de vives brillances sous le jeu du soleil traversant les larges hublots de l’engin. Ils ont déjà fait un bon bout de chemin depuis leur forfait gagnant, lorsqu’une pluie subite de roches tombées du ciel se met à les bombarder, accompagnée de multiples scories qui tambourinent méchamment sur la robuste carrosserie du tank. Les abondantes retombées descendent en effet seulement maintenant de la haute atmosphère pour venir menacer l’équipage des rebelles, soudain à la merci de cette averse mortelle, un déversement impitoyable formé de multiples débris et de pierres aux tailles diverses. Dans la petite machine, l’heure n’est pas à la fête pour les hommes et les femmes de Fanch Yoland, même si Phil Martinet demande une fois de plus à Jeff Coupé, en riant jaune, si sa sœur possède effectivement 18 ans révolus. Une sueur abondante vient soudainement embuer la visière du casque de Karela, alors que le dangereux caillassage s’intensifie sur eux.

 

Faisant fi du blindage, un rocher frappe une trappe d’inspection du tank, maltraite ses boulons et la fait voler en éclat, un hublot de l’avant se fendille, l’autre explose, Flash se recroqueville dans la tourelle, la vitesse moyenne de noyau passe à 9,27 ; une buse de réacteur isopotique s’enflamme en conséquence, le puissant rayonnement dégagé en réaction tue instantanément Fifi Filons, le plus exposé. A l’avant, une grosse bouteille d’hélium se décroche, heurtée par un boulet de basalte, son explosion brutale endommage les scaphandres de Jeff et Siguiline, qui ne peuvent plus contrôler le véhicule cabossé, dont l’un des convecteurs à l’oxyde de sous-zithium enrichi fuite dangereusement. Le déluge mortel redouble encore d’intensité sur la coque en plastacier, générant au passage un immense brouillard granuleux, se calme enfin et puis s’arrête progressivement, mais le Cragstan s’est arrêté au milieu du chaos désastreux, irrémédiablement victime de la soudaine rupture d‘une tringle de contrôle du mécanisme. Le feu lèche à présent sauvagement l’habitacle et les équipiers sonnés peinent à s’extirper du danger. Un gros trou circulaire perçant le casque fondu de Fifi prouve que celui-ci est mort sur le coup, on s’acharne à sortir du brasier les corps immobiles de Jorg et Siguiline, dont les indicateurs agrafés sur leur combinaison les donnent encore vivants. Le long tuyau d’une valve d’étranglement en rupture s’agite comme un serpent irrité autour d’eux, fusant son puissant jet de gaz, ses contorsions folles sur le plancher de métal gênent considérablement les sauveteurs. Flash est de son côté sorti précipitamment par la trappe-tourelle au milieu des flammes et saute prestement sur le sol, sans oublier de cramponner son Wee Gee Ray Gun Gun dans sa main artificielle et dans l’autre le petit TZ-24 Sanitizor Tinkerbots. Tous parviennent cependant à fuir le danger et trainent sur le sable constellé de pierres calcinées les corps de leurs amis, afin d’atteindre une distance salvatrice. On peut désormais faire le point. Le Cragstan est un engin militaire, dont les pilotes sont appelés par les défédérés des Gebirgsmützen, et tous redoutent une mise en charge intempestive de la X-1 Flashy Ray Machine gun à double canon, mais le véhicule se contente seulement d’achever de se consumer dans l’air raréfié, en laissant seulement échapper dans le ciel martien un long panache de fumée.

 

En danger de mort, Jorg et Siguiline sont sur bonbonnes de secours, ils reprennent peu à peu connaissance, mais il leur faut de nouveaux scaphandres au plus vite. Tout comme Phil, Jeff regrette la mort de Fifi tué en mission, avec lequel il avait tant bourlingué dans les canyons pour attaquer les soldats isolés. Il se tourne vers Fanch qui lui présente lui aussi un visage très affecté.

 

– Alors boss, il va nous falloir une sérieuse expertise, car nous sommes en carafe sur un territoire plutôt isolé. Je tiens pas à claquer ici et je veux quand même recevoir ma prime annuelle, moi.

 

– Pfff, lui lance Karela, tu voudrais nous faire croire que tu te bats pour notre idéal ou une simple poignée d’Eullares, mais t’es pas autre chose qu’un vilain tueur hanté par une enfance violente.

 

– Ho non, détrompe toi, mes parents étaient vachement cools avec moi et mes sœurs. Et oui, exactement comme toi, je me bat pour Mars, ma biche.

 

Doté de sa force surhumaine, Flash a calé son lourd Wee Gee sur son épaule. Le regard vague de l’assassin en dit long sur son degré d’hébétude, son cerveau ne semble plus réagir qu’à un unique instinct de survie. Le meurtrier n’a aucun souvenir de l’imposture qui la conduit ici, un stratagème de l’armée défédérée qui devait faire de lui le plus grand roublard de tous les temps. L’ex-taulard est au contraire entré en complète synergie coopérative avec sa cible, pour la protection de laquelle il n’hésitera jamais à faire feu. Mais c’est certainement la seule certitude qui l’habite au milieu de l’épreuve. Personne à ses côtés ne peut soupçonner le nombre effarant de jeunes filles qu’il a déjà violé, avant de massacrer ensuite sans pitié ces prostituées parfois mineures, et lui même ne saurait les enumérer. Pourtant, il est certain d’avoir cessé d’aggraver son futur en s’évadant de la planète pénitentiaire 4887BN-Henrico Macias, ce qu’il tient toujours bizarrement pour acquis. Il a toutefois le plus grand mal à se souvenir des heures proches, et la simple idée du lendemain lui est devenue étrangère. Il est absolument incapable d’engager la moindre réflexion sur sa vie présente, se contentant de vivre chaque minute en faisant le mieux possible équipe avec les autres, pour tenter de vaincre en leur compagnie la mauvaise passe. Il attend même et espère lui aussi de la part de Fanch un conseil avisé, pour rassembler à nouveau la communauté pratiquement désarmée. Un long silence glisse dans l’immobilité glacée, Fanch prend la main de Karela, cette femme courageuse dont il est vraiment épris, elle s’échappe gentiment et se précipite pour aider Siguiline, lorsqu’elle constate que son amie a le plus grand mal à se relever. Il est vital que la toubib mesure au plus juste ses efforts. Les deux femmes qui se soutiennent mutuellement offrent un tableau prenant, une empoignade pathétique qui résume à elle seule la fragilité de la situation. L’accident les a largué dans un désert absolu, la communication avec la base est rompue. Ils baignent isolés dans un environnement hautement anxiogène. Jorg est complètement revenu à lui, il respire péniblement mais tient quand même à s’exprimer, son émotion à fleur de peau est parfaitement visible.

 

– C’est de la folie douce d’essayer de rentrer à pied, on va jamais y arriver. J’espère que la base va deviner rapidement ce qui se passe ici et manier son cul pour lâcher au moins un Panzig vers nous. Et vite, parce que mon scaphandre et celui de Siguiline sont salement bousillés. Un sifflement de gorge ponctue ses dires de manière saisissante. Il plisse les yeux pour se protéger du soleil qui percute la bulle de son casque pourtant assombri.
 
 Soudain, une transmission éclectique de voix brouillées vient jouer les troublions dans les casques, mais ce n‘est pas la base. Le son s’affine et se concentre sur une seule voix, pour transmettre la même communication parasite d’une des unités de propagande de la SLG (Sanchez, Lopez, Gomez) corporation, déversée de façon monocorde par un bavard Bauobersoldat. Une parole unique résonne en même temps aux oreilles de tous. Mais il ne s’agit pas de l’invective habituelle des administrants aux indépendants pour les appeler une fois de plus à rendre les armes. « This is the voice, Camarades mineurs, Gavarit Maskva, la voix du congrès défédéré et de l’acamédie des étoiles vous appelle au salut commun. Le président Nikos Sirkisi a parfaitement entendu vos revendications, qu‘il ne trouve cependant pas totalement légitimes. Nous vous offrons quand même l’occasion de traiter ensemble d’une paix durable pour Mars. Vous et nous pouvons agir conjointement dans ce sens en faisant taire enfin les armes. Nous voulons un désarmement bilatéral dont nous sommes prêts à discuter loyalement des modalités avec vos forces. Nous appelons solennellement votre commandant en chef Fanch Yoland à prendre de lui-même contact avec nous, il n’y a aucun piège dans cette demande sincère à cesser les hostilités dans un respect commun. Ce message sera diffusé tous les jours à la même heure. »

 

Siguiline se plaint d’avoir froid. Jorg se racle la gorge et peine à respirer. Il y a quelque chose de très atypique dans ce message de propagande, une proposition qui n’entre pas dans les diffusions habituelles du gouvernement, dont les injonctions sont habituellement d’une puérilité imbécile et suffisante. Karela regarde la silhouette de son mec qui sent un instant le besoin de s’isoler un peu des autres pour réfléchir. Son ombre figée semble méditer sur l’épave fumante du Cragstan complètement détruit, avec toute sa cargaison si précieuse prélevée un peu plus tôt au sein du Sharsherman.

 

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Bon dimanche à tous.

 

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Message édité par talbazar le 22-01-2018 à 10:22:59
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