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Auteur Sujet :

Ecriture d'un roman d'heroic fantasy

n°2065279
Damrod
Posté le 16-02-2004 à 20:23:46  profilanswer
 

Reprise du message précédent :
:bounce: :bounce: encore http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif  :bounce: :bounce:

mood
Publicité
Posté le 16-02-2004 à 20:23:46  profilanswer
 

n°2065651
Grenouille​ Bleue
Batracien Azuré
Posté le 16-02-2004 à 21:09:04  profilanswer
 

Un petit alors ?
 
Mais bon, il n'en reste plus énormément avant la fin du premier tome...
 
Chapitre XVIII
___________________________________________________
 
En ce milieu de journée, les bois étaient plus magnifiques qu'ils ne l'avaient jamais été. Le printemps était proche. Cela se voyait; cela se sentait. Les arbres bourgeonnaient en une symphonie de couleurs, et le vent était chargé de senteurs herbacées. Le soleil brillait dans un ciel sans nuages, caressant doucement la peau fatiguée de l'empereur. Habituellement, un tel spectacle aurait réjoui son c?ur. Il avait toujours apprécié la beauté là où on pouvait la trouver. Dans les ?uvres d'art qu'il collectionnait, dans les maîtresses qu'il avait eues, dans les paysages sublimes qu'il aimait à peindre.
 
Pourtant, aujourd'hui, il ne parvenait pas à se détendre. Ses pensées ne cessaient de revenir à Rekk, et à ce qu'il lui avait demandé de faire. Accepterait-il ? Serait-il à la hauteur ? Ce n'était pas certain. L'empereur se souvenait de l'homme que le Banni avait été. Un homme d'acier, prêt à tuer pour ses convictions. Un homme qui n'aurait reculé devant rien pour faire régner sa propre idée de la justice et de la paix. Un homme, véritablement, qui s'était révélé un outil plus que parfait pour l'ancien empereur dans sa jeunesse. Un parfait bouclier contre la vindicte populaire.
Lorsqu'il réfléchissait au jeu dangereux qu'avait joué son père, plus de vingt ans auparavant, Marcus ne pouvait s'empêcher d'être admiratif.
L'empereur Bel, durant son long règne, avait man?uvré comme un serpent pour restaurer l'unité de son immense empire. Il avait hérité de la somme de près de deux cent ans de conquêtes, de provinces divisées, prêtes à se soulever sous le moindre prétexte, fourmillant de faux prophètes, de rebelles, de héros populaires et de bardes qui entretenaient la flamme de la révolution par leurs chants vengeurs. Alors qu'il avait encore les mains pleines de la guerre Koushite qui s'éternisait, la province de Realb, à l'extrême-ouest de l'Empire, s'était soulevée.
Alors, il avait utilisé Rekk. Il avait vu le potentiel de cet homme dès le début, de ce fameux épéiste qui ne semblait pas se soucier de bien ou de mal, uniquement de justice; de sa justice.
Bel l'avait d'abord envoyé écraser Realb, pour le tester, et il l'avait fait en moins d'un mois. Son armée anéantit les quelques troupes qu'avaient levées la province. Il pendit les meneurs, et exécuta leurs familles devant leurs yeux. Bientôt, Realb n'avait plus été qu'une forêt de gibets, un véritable charnier. Mais le calme était revenu dans une rivière de sang. Les soldats de Rekk étaient partout et avaient carte blanche. La dénonciation était monnaie courante.
Le gouverneur de Realb avait fini par se jeter à genoux devant le trône de Bel pour l'implorer de faire cesser ces massacres. Dans sa grande mansuétude, l'empereur avait accepté, et rappelé Rekk à lui. Des manifestations de liesse eurent lui dans toute la province alors que le Démon partait, et le peuple reconnaissant ploya l'échine devant la magnanimité de Bel. Rekk, lui, avait gagné dans cette histoire plusieurs qualificatifs. Aucun n'était particulièrement flatteur.
Et Bel ne s'était pas arrêté là. Partout où le mécontentement grondait, il envoyait son bras armé. Il le laissait tuer, piller, massacrer, puis le rappelait lorsque la population le suppliait. L'empereur était ravi. Dans le même mouvement, il anéantissait tout espoir de rébellion en faisant pendre les meneurs, puis se faisait passer pour un sauveur en rappelant son exécuteur auprès de lui.
 
C'avait dû être un véritable crève-c?ur que de finalement devoir se séparer de Rekk. Marcus soupira. On ne pouvait toujours utiliser le même chien pour la même tâche. Les exactions du Démon étaient trop nombreuses. S'il voulait acquérir définitivement la loyauté de ses sujets, Bel n'avait qu'un geste à faire. Il devait abandonner Rekk à la vindicte populaire.
Marcus était déjà passionné par la politique et les affaires de l'Empire, à l'époque. Il avait suivi le déroulement de cette crise avec intérêt. Pendant un instant, il avait même cru que Bel allait céder et abandonner Rekk au bourreau. Quel spectacle cela serait ! Quel bonheur pour le peuple ! Cela scellerait une véritable histoire d'amour, un pacte de confiance entre l'empereur et ses sujets, si jamais il leur offrait la tête du Démon.
Mais il fallait croire que le prix à payer était trop élevé. Bel avait truqué les cartes, pipé les dés. Il avait organisé un duel grandiose contre le jeune maître Gundron, et avait soigneusement orchestré la défaite du Boucher. La foule avait hurlé, lorsque l'homme qu'elle haïssait s'était effondré sur le sol et n'avait plus bougé. Les chacals assistaient à la mort du lion.
C'avait été un jeu d'enfant que de faire croire à tout le monde que Rekk était mort de ses blessures. Pendant que le véritable Boucher ravalait sa rage et partait en exil dans le nord.
Bel avait quelques soucis avec les barbares qui s'agitaient dangereusement là-bas. Plutôt que de renoncer à son outil favori, il lui avait trouvé une dernière vocation. Et avait gardé sa femme en otage, pour s'assurer son obéissance.
Ah, sa femme ! Elle avait été?
"Une piste ! Ils ont flairé une piste !"
L'empereur revint brutalement à la réalité, alors que le cri excité était repris par tous les chasseurs. Devant lui, les chiens s'affolaient, bondissant dans tous les sens sans aucun contrôle. Les hommes avaient fort à faire pour les suivre.
"Qu'est-ce qu'il se passe ?"
"Les chiens ont retrouvé la piste du cerf, votre grâce" fit Mandonius, rapprochant sa monture de celle de l'empereur. "Vous sentez-vous bien ? Vous avez l'air perdu dans vos pensées ?"
"Pardon ? Non, j'étais? Ca n'a aucune importance ! Un cerf, dis-tu ?"
"Je dirais un gros, au vu des empreintes que nous avons vu tout à l'heure?" Le gouverneur fronça les sourcils. "Vous êtes sûr que tout va bien ?"
"Je te dis de ne pas t'inquiéter, Mandonius ! Je me sens aussi jeune qu'au premier jour ! Allons, rattrapons ce cerf ! Depuis plusieurs heures que nous tournons dans cette maudite forêt, je commençais à me demander si nous croiserions enfin du gibier !"
"C'est la forêt impériale, Votre Grâce. Il y a toujours du gibier, ici"
"Mais tais-toi, tais-toi, tu vas me gâcher mon plaisir !" Malgré ses préoccupations, l'empereur réussit à rire de manière insouciante. Tous les regards étaient sur lui, et il se devait de montrer l'exemple. "Donne-moi ma lance, va !"
Il s'empara de la souple hampe de bois avec précaution. Ce n'était pas un épieu à sanglier, épais comme le poing, mais une lance fine et légère, parfaite pour le lancer. Il en jugea rapidement l'équilibre et, satisfait, poussa sa monture à la suite des chiens. Le premier coup était le privilège de l'empereur, comme le symbolique dernier coup. On prétendait que c'était mauvaise fortune que de laisser quelqu'un d'autre le frapper en premier. Le gibier, lui aussi, devait s'incliner devant l'autorité impériale. Telle devait être la raison première de cette coutume, toujours était-il que Marcus fit tournoyer sa lance avec dextérité. Cela, au moins, allait lui changer les idées.
"Vous semblez habile avec cette arme" fit une voix calme, empreinte d'un accent guttural.
 
Marcus se retourna pour plonger les yeux dans le regard de G'kaa. Il avait complètement oublié que l'ambassadeur Koushite avait souhaité participer à cette chasse. Il se détourna aussi vite que la politesse le lui permettait; les yeux de l'homme, comme ceux de Rekk, étaient de sombres puits qui parlaient de mort et de violence.
Le fait que l'homme ait la peau noire était encore plus déstabilisant pour l'Empereur. Il avait passé une grande partie de sa vie à vivre dans un empire en guerre contre Koush. Les guerriers sombres étaient alors redoutables et redoutés, tendant des embuscades terrifiantes à l'armée impériale, se glissant avec une habileté démoniaque dans les campements, la nuit, pour égorger les gens dans leur sommeil. Oui, les Koushites avaient combattu comme des lions. Il avait fallu un Rekk pour les soumettre. Mais, même maintenant, même après vingt ans de paix, Marcus ne pouvait s'empêcher de se sentir mal à l'aise devant les hommes de ce peuple.
"Cela fait bien longtemps que je n'ai pas combattu avec, mais je n'étais pas mauvais, autrefois" fit-il poliment. "J'aime bien la lance. C'est une arme intéressante"
"La lance, elle est dangereuse, oui." G'kaa sourit de toutes ses dents, qu'il avait d'une blancheur irréprochable. Il caressa la sagaie qui pendait à sa selle du bout des doigts.
Puis, comme si la conversation était terminée, il tourna bride pour rejoindre l'arrière de la colonne.
"Des gens surprenants, ces Koushites" fit Marcus, songeur. "Quoi qu'il en soit? à moi le cerf !"
Il fit signe d'un geste de la main à son escorte, et les chasseurs se remirent en route. Machinalement, les pensées de l'Empereur revinrent à la femme de Rekk.
Bishia FroidVal. Une courtisane aux longs cheveux blonds, aux grands yeux perpétuellement émerveillés. Marcus avait été trop jeune pour se demander comment une aussi belle femme avait pu devenir l'amante, puis la femme d'un boucher sanguinaire. Même maintenant, avec l'expérience de l'âge, il ne parvenait pas à déterminer si Bishia avait été réellement amoureuse, ou si elle jouait la comédie avec cette habileté démoniaque que les courtisanes semblaient apprendre au berceau. Elle était née pour plaire aux hommes. Rekk était jeune et inexpérimenté.
Il n'avait pas eu la moindre chance.
"Père ! A moi le cerf !"
Marcus allait plonger dans les fourrés quand Theorocle passa brutalement devant lui, debout sur sa monture, agitant follement sa propre lance. Il avait les yeux pétillants de bonheur, comme toujours lorsqu'il était au c?ur de l'action. Se tournant vers son père, il lui lança un regard de défi.
L'empereur grogna de colère, luttant avec les rênes pour maîtriser sa monture. Suivant le prince comme leur ombre, une dizaine de jeunes gens en livrées colorées lui passèrent devant sans même le remarquer. Le rouge de la fureur envahit le front de l'empereur.
Il n'avait jamais vraiment apprécié la manière dont son fils s'entourait. Il semblait avoir un talent pour attirer les enfants les plus turbulents, mais aussi les plus teigneux. Des enfants qui, en grandissant, étaient devenus de plus en plus brutaux, de plus en plus stupides, et de plus en plus dévoués au prince qui le faisait vivre. Des fils de nobles mineurs, certains n'appartenant même pas aux branches principales des sept Maisons, qui se croyaient tout permis parce qu'ils avaient l'aval du prince. Le plus énervant, bien entendu, était que tout le monde semblait trouver cela tout à fait normal. Les gens se contentaient de détourner le regard lorsque la malice du prince se posait sur quelqu'un. Comme au bal, par exemple. Theorocle lui avait fait honte. Se comporter ainsi !
 
Marcus serra les rênes d'une main ferme, les jointures blanchies par l'énervement. Il allait devoir se montrer plus ferme avec ces brutes, et plus encore avec son fils.
"Suivez-les, tous !" cria-t-il alors que les chevaux des jeunes gens disparaissaient dans les sous-bois. "Le cerf est à moi, par l'Empire, à moi !"
Il lança son cheval en avant, ignorant les branches basses qui lui fouettaient le visage alors qu'il galopait. Les chasseurs et les courtisans suivaient derrière, alors que les chiens aboyaient de plus belle.
"Je le ferai fouetter" gronda Marcus, furieux. "Pour qui se prend ce gamin ?"
"Il est jeune, votre grâce" fit Mandonius. En quelques foulées, son cheval avait rejoint celui de l'empereur. Marcus lança un regard surpris à la monture du précepteur. C'était un animal qui ne payait pas de mine, la robe banale, sans aucun signe distinctif. Pourtant, un examen attentif révélait un poitrail solide et des jambes nerveuses, faites pour la vitesse. C'était une bonne monture.
"La jeunesse n'excuse pas tout, Mandonius. Il y a des règles, et l'empereur se charge de les appliquer. Theorocle sera empereur, un jour ? même si les dieux veuillent que ce soit le plus tard possible, pour moi et pour le royaume. Comment pourra-t-il édicter des lois s'il ne les respecte même pas ?"
Mandonius haussa un sourcil. Il avait l'air amusé.
"Je vais voir ce que je peux faire, Votre Grâce"
"Non, cette fois-ci, c'est moi qui m'en chargerai. Je vais personnellement? par les enfers, qu'est-ce que c'est que ça ?"
Marcus resta bouche bée de stupéfaction alors qu'il pénétrait dans une petite clairière. Les chiens n'avaient pas flairé le cerf qu'ils chassaient, finalement. Mais quelque chose de beaucoup plus dangereux. Devant eux, acculé contre un arbre par les chiens, se trouvait un sanglier, plus gros que tous ceux que Marcus ait jamais vu. Le cadavre d'un des chiens gisait dans un coin, le dos brisé. Le prince et ses comparses s'étaient arrêtés net à cette vue, eux aussi, mais Theorocle se reprit bien vite.
"Mon arc, vite !" cria-t-il à un des pages. "Je vais clouer cette bestiole au mur ! Et mes flèches, abruti ! A quoi servirait un arc sans les flèches ? Plus vite, allez, allez !"
Poussant leurs montures, le reste de la troupe déboucha enfin dans la clairière, sur les talons de leur empereur. Ils furent donc le témoin du coup de poing magistral que Marcus envoya à Théorocle.
 
L'empereur n'était plus aussi fort qu'il l'avait été, mais dans sa jeunesse, son père Bel lui avait fait participer à de nombreux tournois de lutte pour endurcir son corps. Il prétendait qu'un esprit ne pouvait être sain que dans un corps sain. Et le bras de Marcus avait derrière lui toute la fureur et la déception d'un père. Theorocle lâcha son arc, vida les étriers, et se retrouva cul par dessus tête sur le sol.
"Qu'est-ce qui te prend ?" hurla Marcus, fou de rage. "Si je me souviens bien, je suis encore l'empereur, ici, et tu n'es que l'Héritier. Si les dieux le veulent, tu le resteras longtemps, au moins assez pour que je t'apprenne le respect des traditions et la valeur de l'obéissance ! Qu'est-ce que tu m'as promis pour que j'accepte de t'emmener à la chasse avec moi ?" Se frottant la joue, le prince se releva. Il avait les yeux baissés. Le coup avait durement porté. Peut-être cela lui remettrait-il les idées en place. "Qu'est-ce que tu m'as promis ?"
"De rester derrière et de ne pas intervenir" grommela le prince, boudeur. "Mais?"
"Il n'y a pas de Mais qui tienne, Theorocle. Nous en reparlerons lorsque j'aurai abattu ce sanglier"
La bête n'avait pas bougé durant l'altercation, observant les chiens devant elle de ses petits yeux vicieux. Mais lorsque Marcus leva sa lance, l'animal chargea avec un instinct sûr. Le chien en face de lui glapit alors que les défenses lui perforaient le ventre. D'un coup de tête, il fit un vol plané avant de s'écraser contre un arme.
"Dieux des mondes inférieurs, c'est vraiment le père de tous les sangliers" murmura Marcus, fasciné. Il avait déjà oublié son fils sur le sol. Ses yeux étaient rivés sur la bête, alors qu'il mettait lentement sa lance en position.
"Il va charger !" cria un chasseur. L'animal gratta le sol. Les deux chiens survivants reculèrent.
"Premier sang !" fit Marcus, faisant volter son cheval pour pouvoir lancer son javelot avec précision.
"Votre grâce ! Attention !"
L'avertissement de Mandonius vint trop tard, alors que le sanglier chargeait brutalement l'empereur. La lance vint s'enfoncer dans le sol à quelques pouces de l'animal.
"Raté !" hurla Marcus, furieux.
La monture de l'empereur fit un écart brutal, et les défenses vinrent la cueillir sur le flanc gauche. Il s'empressa de vider les étriers et tenta de sauter à terre, mais son mouvement était lent, bien trop lent. Lorsque ses pieds touchèrent terre, le sanglier était sur lui.
"Votre Grâce !" hurla Mandonius.
Le gouverneur bondit en avant. Instinctivement, sa main trouva la lance enfoncée sur le sol. Il l'en arracha et la planta dans le même mouvement fluide dans le dos de l'animal. Le sanglier rugit, se retournant contre ce nouvel adversaire.
"Qu'est-ce que vous attendez, aidez votre empereur !" hurla Mandonius. Il tenta de récupérer son arme, mais la pointe de la lance était coincée. Il poussa un juron, et se jeta de côté pour éviter un furieux coup de tête. Se relevant, souple comme un félin, il tira son épée.
Les chasseurs réagissaient enfin, mais ils devaient contourner le cheval de l'empereur pour pouvoir intervenir. Quatre flèches vrombirent, trois s'enfonçant dans le flanc de l'animal, la dernière ratant sa cible d'un cheveu. Pour autant, le sanglier ne paraissait pas autrement incommodé. S'ébrouant, il chargea de nouveau Mandonius.
"Aidez-le, par le Sang ! Trucidez la bête" glapit Marcus. Ses riches habits lui collaient à la peau. Il était trempé d'une sueur froide. Les défenses du sanglier avaient bien manqué l'étriper. Si le gouverneur n'avait pas été là pour distraire son attention? Avec colère, il s'écarta de son cheval. Il n'avait pas d'arme. Tout cela n'était censé être qu'une simple formalité.
Les chiens survivants s'empilèrent vicieusement sur la bête alors qu'elle avançait. Concentré, la respiration calme, Mandonius attendit la charge pour bondir brusquement de côté. Son épée frappa la peau du dos et s'enfonça d'un bon pouce, mais cela ne suffit pas non plus.
"Aaaaaiiiiiiiiiiiiii !"
Surgi de nulle part, G'kaa bondit de selle, sa sagaie tournoyant dans ses mains. Poussant un hurlement incompréhensible, il enfonça l'arme de toute sa longueur à quelques pouces de la colonne vertébrale de la bête. Le sanglier grogna, crachant un épais nuage de sang. Quelques coups encore, et il ne bougea plus.
 
Le calme redescendit sur la clairière. On n'entendait plus que les hennissements du cheval de l'empereur, qui gisait avec les boyaux à l'air. Mandonius, essuyant la sueur qui lui coulait dans les yeux, vint lui trancher la gorge.
"Pauvre bête" murmura-t-il. "Quelle pitié."
"Plutôt elle que moi" grommela Marcus en réponse. Il haletait. "Je te dois une vie, Mandonius. Et vous aussi, ambassadeur"
"Vous ne me devez rien, votre grâce. Je n'ai fait que mon devoir" répondit le précepteur.
"Les sangliers, ils dansent bien, mais G'kaa danse mieux, oui ?" sourit G'kaa avant de se détourner et de disparaître dans les buissons comme il était venu.
"Certes, certes?" fit l'empereur, déstabilisé. " Cependant? Ah, peu importe. Quel énorme monstre !"
"J'en ai rarement vu d'aussi gros, votre grâce" acquiesça le gouverneur. Il avait l'air contrarié, et se mordait nerveusement la lèvre.
"Mais tu vas rarement à la chasse aussi? Bah, quoi qu'il en soit, c'était vraiment une grosse bestiole." Il éclata de rire. "L'excitation de la mort ! Ca me manquait, tu vois ! Je ne me suis jamais autant senti en vie depuis des années que maintenant, couvert de sang et de boue"
"Je connais ça" fit Mandonius, souriant légèrement. "Mais vous ne direz pas la même chose dans quelques minutes, lorsque l'excitation disparaîtra. Nous devrions rentrer au château"
"Très vrai, très vrai"
"Père?" fit Theorocle d'une petite voix. Il était remonté à cheval; sa joue était gonflée. Il garderait probablement une marque quelques temps. "Je suis désolé. Pour tout"
Marcus secoua la tête avec colère.
"Nous en rediscuterons au palais. J'ai beaucoup de choses à te dire, je pense" Theorocle sursauta comme si on l'avait de nouveau giflé. "Bah ! cette histoire m'a donné soif. Personne n'aurait du vin ? De la liqueur de prune? Quelque chose de fort, en tout cas !"
"J'ai du vin? père" murmura l'héritier, sortant une gourde de ses fontes.
"Ah, ça ! Tu servirais à quelque chose, finalement ? Je ne peux pas y croire ! Donne-moi cette flasque !"
Comme l'avait dit Mandonius, le plaisir du combat quittait progressivement son corps, le laissant tremblant, alors que Marcus réalisait à quel point il était passé proche de la mort. Il but avec plaisir et gratitude, chaque gorgée lui faisant prendre conscience qu'il était encore en vie. C'était une sensation délicieuse, enivrante.
"Nous devrions rentrer, Votre Grâce" fit Mandonius, surveillant les alentours de la clairière comme si un second sanglier pouvait surgir des sous-bois. "Nous avons perdu trop de temps pour le cerf, de toute façon. Un sanglier, voilà une prise de qualité !"
"Comme tu dis, Mandonius, comme tu dis? Cependant?" Il hésita, puis se pencha à l'oreille du précepteur pour murmurer: "C'est toi qui a porté le premier coup à la bête, pas moi. Penses-tu que c'est un présage ? D'abord mon fils qui veut m'enlever cet honneur, ensuite, par un concours de circonstances, toi qui frappe en premier?"
"Je cherchais à sauver votre vie, Votre Grâce" fit Mandonius sèchement.
"Bien sûr, bien sûr? Je voulais juste savoir? Non que je sois superstitieux? Mais ce n'est pas un mauvais présage, n'est-ce pas ?"
Le gouverneur eut un léger sourire.
"Si j'ai pu apprendre quelque chose de ma vie sur les champs de bataille, c'est que les présages de mort sont rarement vérifiés. Ceux qui souffrent sont ceux qui ne s'attendent à rien"
"Ah. Bon. Bien"
L'empereur cligna des yeux un instant contre la lueur du soleil. Il se sentait un peu désorienté; toutes ces émotions n'étaient plus de son âge. Il n'avait plus qu'une seule envie: rentrer au château, et se coucher pour prendre un repos bien mérité.
Ses réflexions sur Rekk et sa courtisane attendraient.
 
G'kaa était songeur alors qu'il remontait souplement à cheval. Il y avait beaucoup de coutumes qu'il ne comprenait pas, même après une dizaine d'années passées au sein de l'Empire, à essayer de signer des traités, de définir des routes commerciales, et d'essayer de se sortir le mieux possible de la honteuse capitulation que leur avait infligée Rekk ? le Danseur Rouge ? et l'empire dans son ensemble.
Il n'appréciait pas particulièrement le travail qu'il avait à fournir ici. Ses amis lui manquaient, et son âme attendait avec espoir de pouvoir rentrer à Koush. Là-bas, il n'aurait plus à supporter ces hivers glacés, cette eau gelée que les gens appelaient neige, et ce soleil si pâle qu'il ne réchauffait pas la peau. Surtout, il avait la désagréable impression d'avoir mis le pied dans un repaire de vipères. Tout le monde ici souriait à tout le monde, mais jamais le sourire n'atteignait les yeux. Dans un certain sens, l'Empire était un endroit bien plus barbare que Koush. Là-bas, au moins, les gens disaient ce qu'ils pensaient. Lorsqu'un différent ne pouvait être réglé autrement, les gens venaient danser la mort ? et le problème était finalement réglé. Après autant de temps passé à Musheim, G'kaa était prêt à admettre que ces duels mortels étaient peut-être une erreur. Pourtant, ils avaient l'avantage de ne pas laisser de mauvais sang entre les gens. Là-bas, on pouvait faire confiance à son prochain.
G'kaa bailla, étirant ses muscles. Il avait trente ans, maintenant, si les chamans de sa tribu avaient bien inscrit le jour de sa naissance. Le combat contre le sanglier lui avait fait du bien. Cela faisait trop longtemps qu'il n'avait pas combattu, pour une raison ou pour une autre. L'envie de danser le démangeait. Avec quelqu'un. N'importe qui. Mais personne ne semblait réellement habile à la lance, ici. De toutes les personnes qu'il avait pu croiser au palais, seul celui qu'on appelait Mandonius bougeait avec la grâce du guerrier. Contre le sanglier, encore, il s'était comporté avec vaillance et habileté. G'kaa aimait bien l'homme, même s'il semblait cacher de nombreux secrets. Parfois, G'kaa sentait une odeur de nervosité en lui, difficilement réprimée.
"Pousse ton cheval, face noire. Tu bloques la route"
 
Sans se retourner, G'kaa fit volter complaisamment sa monture. Le prince avait visiblement récupéré rapidement son arrogance après la correction que lui avait administré son père. Il n'y avait bien que lui pour appeler G'kaa face noire. Le Koushite sourit langoureusement.
"Lorsque le sanglier a chargé l'empereur, le fils de l'empereur, il a mis une flèche dans son arc, oui ? Mais le fils de l'empereur n'a pas tiré. Pourquoi est-ce que le fils de l'empereur n'a pas aidé son père ?"
G'kaa n'avait pas voulu intervenir au début du combat. Il lui avait été expliqué clairement que l'empereur devait toucher la bête en premier, et que sa sagaie ne serait pas nécessaire. Par conséquent, il avait pris le temps de regarder les gens, leur manière de bouger et de réagir. Des détails intéressants, trahissant souvent le caractère et le c?ur de la personne. Deux des chasseurs étaient des vétérans, ainsi, qui avaient rapidement surmonté leur surprise pour décocher des flèches. Mais ils étaient également un peu vieux, et devaient manquer de pratique. Les deux autres étaient plus jeunes et plus influençables. Mandonius avait des réflexes de combattant. L'empereur avait du courage. Et le prince? le prince?
Theorocle devint blanc.
"Qu'est-ce que tu as dit, sauvage ?"
"Lorsque le sanglier a chargé l'empereur, le fils de l'empereur, il a mis une flèche dans son arc" répéta G'kaa, imperturbable. "Mais le fils?"
"Je sais ce que tu as dit, pas la peine de le répéter !"
"Le fils de l'empereur, il se contredit." nota G'kaa.
L'héritier alla pour s'approcher de lui, mais eut un geste de répulsion visible. Le Koushite était habitué aux réactions que provoquait la vue de sa peau chez les gens, mais la plupart tentaient au moins de se montrer polis et diplomates. Une légère irritation montait en lui. Surpris, il se força à la supprimer. La voie de la sagaie nécessitait un esprit clair et ouvert.
"Tu n'as rien vu, sauvage. Rien" cracha Theorocle. "Prends garde à tes paroles. Je pourrais te faire fouetter"
"Les ambassadeurs, ils sont sacrés." G'kaa sourit, un éclair de dents blanches, comme une morsure à venir. "Le petit héritier devrait plus écouter, ses leçons, oui ?"
"Il peut arriver des choses, dans cette ville. Les nuits ne sont pas sûres, même pour les ambassadeurs" murmura le prince. Derrière lui, ses comparses ricanèrent lourdement. Un simple regard du Koushite leur fit cependant baisser les yeux. G'kaa n'était pas quelqu'un de violent, mais une puissance animale se dégageait de lui. Même ces simples sycophantes le sentaient. Seul le prince paraissait insouciant du nuage menaçant dans les yeux du guerrier.
"Que se passe-t-il, ici ?" Mandonius remontait la petite colonne, exaspéré. "Prince, je vous ai dit de venir avec moi. Je ne le répéterai pas !"
"Pour cela, il faudrait pouvoir me rattraper, Mando !" Le prince lança un regard venimeux au Koushite. "Tiens ta langue, vipère noire" Il éperonna sa monture et partit au galop.
Mandonius arrêta sa monture à hauteur de l'ambassadeur, puis enleva son chapeau pour s'éventer. L'exercice contre le sanglier l'avait visiblement épuisé. Quelques gouttes de sueur coulaient encore sur son visage, et ses rides s'étaient creusées.
"Veuillez l'excuser, Seigneur. Il est jeune, et trop gâté. Ne tenez pas compte de ce qu'il a pu vous dire. Il ne représente en rien la position de l'Empire au sujet de Koush"
Le noir s'inclina.
"Je le sais"
Le précepteur haussa un sourcil.
"Vous avez vu l'arc du prince ?"
"Quel arc ?" s'enquit G'kaa innocemment.
Mandonius resta un instant silencieux, scrutant le visage du Koushite. Puis il haussa les épaules.
"C'est sans importance. Je vous souhaite une bonne journée, Seigneur"
"Vous de même, Précepteur"
 
Il regarda d'un ?il impavide l'homme se lancer à la poursuite du prince. C'était quelqu'un de dangereux, ce Mandonius. Son visage ne révélait rien.
Les jours à venir promettaient d'être intéressants.

n°2068616
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 17-02-2004 à 10:48:29  profilanswer
 

Bon !! serveur en rade ce matin, tout est réparé maintenant, j'ai eu un peu chaud... :sweat:  
 
Heureusement il y a un nouveau chapitre pour se détendre  :sol: !
 
Vite, la suite, on veut retrouver les persos principaux !!!
 

Citation :

Il n'avait jamais vraiment apprécié la manière dont son fils s'entourait. Il semblait avoir un talent pour attirer les enfants les plus turbulents, mais aussi les plus teigneux. Des enfants qui, en grandissant, étaient devenus de plus en plus brutaux, de plus en plus stupides, et de plus en plus dévoués au prince qui les faisait vivre.  
 
Lorsqu'un différend ne pouvait être réglé autrement, les gens venaient danser la mort ? et le problème était finalement réglé. Après autant de temps passé à Musheim, G'kaa était prêt à admettre que ces duels mortels étaient peut-être une erreur. Pourtant, ils avaient l'avantage de ne pas laisser de mauvais sang entre les gens. Là-bas, on pouvait faire confiance à son prochain.

n°2069291
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 17-02-2004 à 12:01:39  profilanswer
 

:bounce:  :bounce:  :cry: LA SUITE :cry:  :bounce:  :bounce:  
 
siouplé siouplé !!!

n°2074313
Damrod
Posté le 17-02-2004 à 22:26:43  profilanswer
 

ben alors où est notre chapitre quotidien ??
c'est qu'on est en manque nous !!!
http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif

n°2074444
Grenouille​ Bleue
Batracien Azuré
Posté le 17-02-2004 à 22:41:35  profilanswer
 

Un chapitre où l'on retrouve notre Rekk national  :D  
 
 
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Chapitre XIX
 
 
S'il ne s'agissait pas d'une prison, ça y ressemblait fort.
Il n'y avait qu'une porte, épaisse de plusieurs pouces et verrouillée à double tour. Il y avait un matelas, deux chaises, un tapis sur le sol. Les murs étaient dépourvus de la moindre décoration et l'humidité coulait doucement contre la roche. Si jamais quelqu'un avait habité cette chambre autrefois, il devait décidément avoir des goûts bien spartiates.
Rekk alla jusqu'à la seule fenêtre et plissa les yeux, pensif. Elle s'évasait en meurtrière, ce qui laissait filtrer assez de lumière pour pouvoir voir correctement dans la pièce, tout en empêchant qui que ce soit de se pencher trop en avant. Seul un enfant aurait pu se glisser dans l'espace qui restait à l'extrémité. Sans compter que la pièce était au sommet de la tour. Même en supposant qu'il puisse passer par ici, ce qui nécessitait des talents de contorsionniste dont il ne disposait pas, il restait à descendre plus de cent pieds de mur lisse, sans la moindre aspérité à laquelle se raccrocher. Oui, il était bel et bien prisonnier. Le baron FroidVal était peut-être considéré comme un hôte, mais un hôte dont on se méfiait.
Il sourit. Il avait tué le maître de l'Académie, considéré comme une des plus fines lames de l'Empire, avec un simple morceau de bambou. Il était normal qu'on prenne quelques précautions, malgré le message signé de la main de Marcus qu'il avait mis tant de zèle à exhiber.
Il s'en voulait d'avoir oublié que l'empereur partait à la chasse aujourd'hui. Il l'avait mentionné lors du bal, mais Rekk était alors préoccupé par bien d'autres détails, et n'y avait plus pensé. Maintenant, son manque d'attention lui coûtait cher. S'il avait de la chance, cela voudrait dire une journée de perdue. Si jamais la chasse se prolongeait, ou si le gibier tardait à se montrer, peut-être la cour passerait-elle plusieurs jours dans la nature. L'ancien empereur, Bel, était coutumier du fait. Si c'était le cas, il ne pouvait savoir quand l'empereur rentrerait enfin. Même s'il revenait, le Banni ne serait probablement pas au bout de ses peines. Il n'imaginait que trop bien les nombreux reproches dont l'accablerait Marcus. Cautionner un duel n'était pas la même chose que justifier une exécution, et la limite était ténue entre les deux. Beaucoup de témoins n'avaient aucune raison de le porter dans son c?ur.
 
Rekk haussa les épaules. Cela n'avait aucune importance. L'empereur avait trop besoin de lui pour le laisser tomber. Et si même il le faisait? eh bien, il s'en sortirait une nouvelle fois. Il s'était échappé en vie de situations bien plus complexes et bien plus dangereuses. S'il le fallait vraiment, il pourrait remonter dans le Nord. Là-bas, il était le seul maître. Ses hommes n'obéissaient qu'à lui, non aux ordres d'un empereur à un mois de cheval de là, vautré dans des coussins dorés. Il attendrait patiemment que le vent tourne, comme il l'avait déjà fait lorsqu'il s'était fâché avec Bel. Et, à soixante ans, on le rappellerait de nouveau pour servir d'épouvantail aux provinces en rébellion. Il eut un sourire amer. Ce n'était pas toujours facile à porter, cette réputation.
Il leva ses mains à ses yeux. Avec elles, il avait porté l'épée, la hache, la lance, le marteau de guerre, le glaive et la masse. Avec elles, il avait tendu des arcs, chargé des arbalètes, lancé des couteaux. Il avait tué et massacré plus de gens qu'il ne pourrait jamais compter. Etait-ce sa punition de se voir enlever sa fille ? La seule personne à qui il ait jamais tenu réellement ?
"Aaaah, que les dieux me maudissent !" jura-t-il, marchant en long et en large dans la pièce.
 
Le blasphème aurait fait se hérisser les cheveux des prêtres les plus tolérants, mais Rekk n'avait jamais été un homme d'église. De plus, en ce qui le concernait, il était déjà maudit.
Rester ainsi à ne rien faire le minait de l'intérieur. Il était homme d'action, pas de réflexion ! Mais les heures s'écoulaient, et rien ne se passait, personne ne venait, personne ne lui tenait compagnie. Ses pensées tourbillonnaient alors que la lumière diminuait lentement à travers la meurtrière. Le soleil n'allait pas tarder à se coucher. Est-ce que Shareen et Malek lui avaient obéi ? Etaient-ils allé rejoindre Dani ? Et qu'avait-elle appris ? Il alluma une bougie, et la lumière tremblotante dansa sur son visage.
Pour la première fois, la culpabilité montait en lui. Il était venu ici avec dans l'idée que sa fille était morte sous le couteau d'un ruffian de passage. Elle avait manqué de chance, et était présente au mauvais moment au mauvais endroit. Mais, pour la première fois, lui venait à l'idée que, peut-être, cette mort n'était pas aussi innocente que cela. Et si la personne qui avait tué la jeune fille savait exactement ce qu'il faisait ? Et si elle était morte, justement parce qu'il était son père ?
Non, cela ne rimait à rien. Haussant les épaules, Rekk se rassit. Il ne savait plus quoi penser. Décidément, réfléchir ne lui amenait rien de bon.
On frappa à la porte. Rekk se leva.
"Entrez" grommela-t-il. "Vous n'avez qu'à enlever les deux barres, ouvrir les trois serrures et tourner le loquet"
Il y eut plusieurs bruits métalliques indiquant que l'on suivait ses conseils, ainsi que le cliquetis métallique d'une clef dans la serrure.
Rekk fixa, surpris, celui qui se tenait dans l'embrasure de la porte. C'était un des gardes de Semos, un de ceux qui s'était ensuite proposé de surveiller sa porte pour bien vérifier qu'il ne quitte pas la tour. Rekk ne voyait pas vraiment comment on pouvait imaginer qu'il serait capable de briser une porte de chêne solide aussi épaisse à mains nues, mais c'était finalement plutôt flatteur de voir tous les moyens mis en ?uvre pour le voir conduit devant l'empereur.
"Votre repas" fit le garde, souriant joyeusement en désignant les plats qui encombraient ses mains. "Viande de chevreuil tendre, pâtisserie impériale, du pain tout frais et du jambon délicieux. Même un peu de vin."
"Ca ne m'a pas l'air mauvais, en effet" nota Rekk. "Un repas de fête, pour un prisonnier"
"Je crois que les maîtres de l'Académie préféreraient le terme d'invité, Seigneur" répondit l'homme sans se départir de son sourire. "Ils ont peur de vous, vous savez ?"
"Ils n'ont aucune raison d'être inquiets" fit Rekk sourdement. "A condition qu'ils ne me laissent pas ici trop longtemps. Je commence à me demander si je ne vais pas provoquer un autre de ces crétins en duel, juste pour le plaisir."
"C'est qu'il y a la délicate question de la succession, Seigneur. Les maîtres sont tous en train d'avancer leurs pions et de compter leurs forces pour pouvoir présenter des requêtes claires à l'Empereur. Des messagers sont en train d'être envoyés à toutes les maisons pour s'assurer de certains soutiens." Il sourit. "Certaines bourses seront beaucoup plus remplies avant la fin de la nuit, je peux vous l'assurer"
 
Rekk haussa un sourcil.
"Tu m'as l'air fin politique, pour un garde"
"Oh. Eh bien, je suppose qu'on apprend à avoir l'?il pour ces choses-là, lorsqu'on travaille dans l'Académie." Il entreprit de déposer la nourriture sur la table. "Bon appétit, sur ce. Je vais devoir reprendre ma ronde"
"Bon appétit" répondit Rekk d'un air absent.
Il attendit que la porte se fût refermée et que les bruits de pas aient décru, puis il entreprit de faire passer la totalité de la nourriture par la fenêtre, à l'exception de la miche de pain. A ce qu'il savait, on ne pouvait empoisonner aussi facilement le pain qu'on pouvait le faire pour la viande. De plus, il mourait de faim. Il eut une pensée amusée pour le pauvre bougre qui s'aviserait de passer sous la tour à ce moment précis. A cette hauteur, le cuissot de chevreuil pouvait se révéler mortel. Rekk haussa les épaules. Il y avait de pires façons de mourir.
Il n'avait pas confiance dans les maîtres de l'académie. Ils étaient certainement en train de comploter pour essayer de récupérer la place tant convoitée de Grand Maître à la place de feu Semos, mais certains pouvaient avoir quelques minutes de libre pour se dire qu'il y avait des manières expéditives de se débarrasser d'encombrants barons pendant que l'empereur n'était pas là. Sans compter les gens qui avaient pu, tout simplement, apprécier Semos au point de vouloir le venger. Il doutait que ces individus-là soient nombreux, l'homme étant aussi asocial qu'il le paraissait, mais la possibilité existait.
 
Et, surtout, Rekk n'avait aucune confiance dans l'homme qui lui avait apporté la nourriture. Ce n'était pas un garde ordinaire. Il avait l'air trop propre, trop net, pour porter la cotte de mailles et la lance comme les autres soudards. Par ailleurs, quelque chose était étrange dans son attitude, quelque chose sur lequel il n'arrivait pas à mettre le doigt. Ou plutôt, une absence de quelque chose ? Oui? peut-être? ses lèvres se pincèrent alors qu'il cherchait à se souvenir.
Puis il comprit: le garde n'avait pas montré la moindre peur, ni la moindre curiosité. Il avait plusieurs fois croisé son regard sans ciller, et il n'avait pris aucune précaution pour mettre de la distance entre eux alors qu'il avançait. A vrai dire, si Rekk l'avait souhaité, il aurait pu s'emparer de l'épée que le garde portait au côté, et se tailler un chemin vers la liberté. C'était étrange. Après l'épisode du duel, le garde aurait dû se sentir nerveux ou excité. Mais il n'y avait rien eu de tout cela dans ses yeux. Le Boucher était un bon juge de caractère, et ce détail le troublait.
Son estomac se rappelant à lui, il entreprit de mordre à belles dents dans le pain. C'était une miche toute fraîche, juste sortie du four. Ce n'était pas très nourrissant, mais cela suffirait à caler son appétit le temps de sortir d'ici. Il eut une pensée émue pour le quart de vin qu'il avait jeté par la fenêtre, mais on pouvait trop facilement empoisonner un tel liquide.
"Peut-être, un jour, pourrais-je boire et manger tranquillement sans craindre pour ma vie" murmura-t-il, fataliste.
Il ne se faisait pas beaucoup d'illusion. Il se rappelait le vieil adage: vis par l'épée, meurs par l'épée. Et lorsqu'on était trop habile, cela devenait: vis par l'épée, meurs par le poison.
La porte se rouvrit, interrompant ses pensées morbides. Le garde venait probablement récupérer les plats. Cela tombait bien. Il avait plusieurs questions à poser.
"J'aimerais savoir quelque chose, petit?" commença-t-il.
Il ne termina pas sa phrase. Tous ses instincts lui criaient au danger alors qu'un éclat métallique brillait dans la main de l'homme. Sans plus réfléchir, il se jeta de côté. Il y eut un tschink, et le carreau vint frôler l'épaule du Banni pour s'enfoncer dans le mur.
"Maudit?" siffla l'homme.
Il lâcha son arbalète de poing sur le sol. Une dague apparut dans chacune de ses mains alors que Rekk se jetait en avant. Surpris par la charge brutale du Banni, il n'eut pas le temps de les lancer que déjà il se faisait déstabiliser par un violent coup d'épaule. Le garde tomba cul par-dessus tête dans le couloir, poussant un cri perçant. Il roula sur le côté avec souplesse.
"Tu as de bons réflexes, Rekk" murmura-t-il.
Le Banni s'empara d'une chaise et avança de quelques pas, prudemment.
"Nous nous sommes déjà rencontrés ?"
"Bien sûr? Tu ne me reconnais pas ? Je te croyais plus physionomiste !"
L'homme se mit en garde, et les dagues se mirent à danser dans ses mains. Le mouvement évoquait quelque chose, pourtant?
"C'est? c'est toi qui nous as attaqués avec Comeral ?" murmura Rekk, incrédule.
"Perspicace, avec ça." Eleon sourit, s'inclinant en une révérence moqueuse. "Je ne pouvais tout de même pas partir sans terminer mon travail"
 
Rekk ne pouvait s'empêcher de sentir une certaine admiration devant l'habileté du tueur. Jamais il n'aurait pu le reconnaître. Il avait coupé ses longs cheveux noirs, et les avait teints en blond. Il avait maintenant un début de moustache, et ses yeux n'étaient plus de la même couleur. Il avait une corpulence plus imposante, également; probablement portait-il plusieurs couches de vêtement sous l'armure.
"Celui qui te payait est mort. Tu n'as plus rien à faire ici"
"Ah, mais tu oublies Comeral. Il faut bien que je venge ce grand balourd. Et puis, je n'aime pas lorsque quelque chose me résiste"
Rekk resta un instant silencieux.
"Il y avait du poison dans la nourriture, n'est-ce pas ?"
"Bien sûr. Même si je n'espérais pas vraiment que tu la manges. Tu l'as jetée, n'est-ce pas ?" Rekk hocha la tête. "Je m'en doutais un peu, mais ça ne coûtait rien d'essayer. Qu'est-ce qui m'a trahi ?"
"Ton comportement global" fit simplement Rekk, avançant d'un pas. "Tu peux peut-être ressembler physiquement à un garde, mais il t'est difficile de changer ton caractère aussi radicalement"
Eleon soupira.
"Je m'étais toujours cru bon acteur. Hélas, trois fois hélas. C'est donc pour ça que tu as pu éviter mon carreau d'arbalète ? Il était empoisonné aussi, tu sais ? Une simple éraflure aurait suffi, mais non, il ne t'a même pas touché. Tu es contrariant, Rekk. Je ferai plus attention la prochaine fois."
"Il n'y aura pas de prochaine fois. Attaque-moi, et finissons-en."
"Tssk tssk" Eleon secoua la tête, amusé. "Moi, me battre contre le grand Rekk ? Je ne suis pas suicidaire, moi." Il tendit son index en l'air, laissant une dague en équilibre dessus. "Je n'agis que lorsque je peux piper les dés."
Rekk avança sombrement sur l'assassin.
"Cette fois-ci, tu ne peux plus tricher."
"On peut toujours tricher, Boucher. Toujours." Prenant une grande inspiration, Eleon se mit à hurler. "A moi, la garde ! Le prisonnier cherche à s'évader !"
"Que?"
Pris par les événements, Rekk n'avait pas envisagé ce qu'il faisait sous tous les angles. Il gémit intérieurement alors que le cri d'Eleon se réverbérait dans les murs du château. Les choses n'allaient pas tarder à se compliquer.
"Je ne joue jamais sans un atout dans ma manche, Rekk" fit Eleon. "Maintenant, à toi de choisir. Vas-tu essayer de me tuer, pour ensuite te justifier auprès des gardes qui arrivent ? Ou vas-tu te laisser trucider par moi entre temps ?"
 
Il se jeta en avant, lançant ses deux dagues au visage du Banni. Rekk se retrancha derrière sa chaise, et les lames jumelles vinrent s'enfoncer dans le bois, arrachant des copeaux qui lui griffèrent le visage. Déjà, Eleon avait deux nouveaux couteaux dans les mains, et il était maintenant à portée de main. Rekk se jeta de côté, tentant de nouveau de parer le coup avec la chaise. Il grogna lorsqu'une des deux lames vint lui érafler l'épaule gauche.
"Est-ce que cette arme était empoisonnée aussi, Rekk ?" chantonna Eleon, dansant vers la gauche. "Veux-tu le savoir, veux-tu le savoir ?"
Rekk pouvait maintenant entendre les bruits de bottes qui martelaient les dalles du couloir. Il lui fallait réfléchir, vite et bien. Eleon avait tissé sa toile soigneusement, mais maintenant il était bel et bien englué dedans. Avec ce qu'il avait fait dans la cour, aucun garde ne voudrait prendre de risques avec lui. S'il tuait Eleon, et encore fallait-il qu'il en soit capable, les hommes d'armes ne prendraient probablement pas le temps de comprendre et l'abattraient sans hésiter, dans le pire des cas. Dans le meilleur, il se retrouverait en prison, mais sous une meilleure garde encore. L'empereur serait-il prêt à le soutenir même jusqu'ici ?
Mais s'il ne faisait rien, il allait se faire dépecer sur place. Le bougre était habile avec ses dagues !
"Quel effet cela fait, de sentir la mort se rapprocher, Rekk ?" susurra Eleon, allongeant une botte vicieuse des deux bras à la fois. Rekk pivota et bloqua de nouveau. La chaise était peu maniable, mais elle était assez large pour faire un bouclier convenable. "Quel effet cela fait de soudain se sentir mortel ?"
"La même chose qu'une botte trouée" grogna le Banni, tentant pour la première fois de contre-attaquer d'un mouvement de chaise. "Ca me dérange, mais ça ne m'empêche pas d'avancer".
Eleon esquiva d'une feinte de corps, et tendit sa jambe pour lui faire perdre l'équilibre. Mais Rekk se rétablit sans effort et parvint enfin à toucher. Le dossier de la chaise vint se briser sur le tueur, le projetant au sol.
Portant la main à son visage ensanglanté, Eleon éclata de rire.
"Trop tard, Banni, trop tard ! Les gardes sont là !"
 
Les bruits de bottes se faisaient plus insistants. Une demi-douzaine de gardes arrivait sur les lieux du combat, arbalètes au poing; le premier poussa un juron en découvrant la scène. Quelques secondes plus tard, Maître Heilban lui-même débouchait dans le couloir. Sa bouche s'incurva en un rond parfait alors qu'il prenait la mesure des événements.
Rekk eut un rictus sauvage. Les choses se compliquaient. Eleon avait vraiment bien man?uvré. Ce que les gardes devaient voir, après avoir été attirés par les cris de l'un des leurs, c'était leur prisonnier, une chaise fracassée à la main, en dehors de la pièce qu'il n'était pas censé quitter, et frappant un garde sur le sol. L'image parfaite de l'homme cherchant à s'échapper, et prêt à user de violence pour se faire. Six arbalètes se tendirent vers lui.
"Abattez-le !" hurla Eleon, sur le sol, imitant à la perfection une voix déformée par la peur. "Il va me tuer ! Tirez, tirez !"
"Ne tirez pas !"
La voix, tranchante et autoritaire, stoppa les gardes au dernier moment. Rekk avait déjà bondi de côté, anticipant la volée de carreaux. Le fait qu'aucun trait n'ait été tiré rendait son mouvement inutile. Il se rétablit tel un félin et s'accroupit près de la porte, attendant de voir qui venait de le sauver. Il connaissait cette voix, il en était sûr; mais dans l'excitation du moment, il ne parvenait pas à la replacer.
Il n'eut pas longtemps à chercher. Le visage crispé par la fureur, Mandonius écarta les gardes pour aller le rejoindre. Maître Heilban courait sur ses talons, obséquieux, réussissant le tour de force de s'incliner bien bas à chacune de ses enjambées.
"Ecartez-vous, bande de bons à rien ! Crétins ! Abrutis ! Cet homme est sous la protection personnelle de l'empereur !" Il pointa un doigt vers Maître Heilban, qui se protégea le visage comme s'il attendait une gifle. "Comment avez-vous osé le séquestrer contre son gré ? Comment avez-vous osé remettre en cause un mot venant de l'Empereur lui-même, avec le sceau de l'Empereur ? Et ça ? Vous ne m'aviez pas dit que vous vouliez le tirer comme un lapin, non plus ?" Il tourna sa colère vers les gardes. "Et vous, vous pouvez m'expliquer ce que vous faisiez ? Estimez-vous heureux que je sois arrivé à temps. Si jamais vous l'aviez ne serait-ce que blessé, ne serait-ce qu'effleuré, je peux vous assurer que vous auriez fini vos jours aux galères, comme un vulgaire esclave ! Alors cessez de rester comme ça à me regarder stupidement, et baissez vos arbalètes avant de vous blesser"
Avec une hâte coupable, les gardes baissèrent leurs armes.
"Mais? il cherchait à s'évader, et il allait tuer son geôlier" protesta pourtant l'un d'entre eux.
"Tuer quelqu'un ? Réfléchis un peu, voyons. Il avait une chaise à la main, crois-tu qu'il ait pu tuer qui que ce soit avec une chaise ? Assommer, peut-être, pour pouvoir partir de cet endroit. Et je ne le blâme pas, au vu de votre sens de l'hospitalité ! C'est une honte, maître Heilban. Une honte. Ne comptez pas sur la maison impériale pour appuyer votre candidature à la succession de Semos après ce déplorable incident"
 
Heilban, qui était resté jusque là coi, se redressa soudain, les yeux exorbités. L'imminence de sa disgrâce lui rendit l'usage de la parole.
"Gouverneur, je conçois parfaitement votre colère, mais tâchez de me comprendre. Ordre de l'Empereur ou pas, cet homme a assassiné maître Semos sous nos yeux ! Même l'empereur ne saurait pardonner aussi aisément la mort d'un de ses plus fidèles serviteurs !"
"J'ai cru comprendre qu'il s'agissait d'un duel" fit Mandonius, agitant négligemment la main.
"Oui, mais?"
"Eh bien alors ? Il s'agit d'un regrettable manque de chance, voilà tout. Un accident est bien vite arrivé, même avec des épées de bambou. Maître Semos savait ce qu'il faisait. Il a perdu, tant pis pour lui. Je ne vois pas pourquoi vous vous mettez dans des états pareils"
Partagé entre la stupéfaction, la colère et l'obséquiosité, Maître Heilban ne savait plus quel ton adopter.
"Mais? mais? qu'il s'agisse d'une erreur ou non, on ne peut pas tuer les gens comme ça, cela ne se fait pas !"
"Contestez-vous la décision expresse de l'Empereur ?"
"Pas du tout, mais?"
"Alors taisez-vous. Au prochain mot de votre part, je vous fais traduire en justice pour entrave aux serviteurs de Sa Grâce. Maître Semos peut s'estimer heureux de mourir avec son honneur intact comme il l'a fait. Nous avons appris aujourd'hui qu'il avait utilisé plusieurs procédés déloyaux au cours de sa vie, qu'il avait truqué nombre de ses duels, et attenté à la vie d'innocents. Si le Baron FroidVal ici présent n'avait pas, fortuitement bien entendu, mis un terme à la vie de ce misérable, la justice impériale s'en serait chargée. Rendez donc grâce au baron d'avoir permis à votre maître de mourir une épée à la main."
 
La mâchoire de Maître Heilban s'agita sans un son alors qu'il ravalait ses objections. Vaincu, l'homme baissa la tête. Il regardait probablement les lambeaux de sa carrière à la cour disparaître dans le vent.
Rekk restait là, incrédule, à regarder Mandonius commander aux hommes de le relâcher. Il n'avait jamais eu peur de la mort. Son seul regret, lorsqu'il avait vu les arbalètes et compris qu'il ne s'en sortirait pas vivant, avait été de ne pouvoir venger en personne l'assassin de sa fille. Il avait espéré que Malek et Shareen, peut-être, reprendraient le flambeau.
"Eh bien, eh bien. Voilà quelque chose de fâcheux" murmura Eleon, toujours allongé sur le sol. "Je dois dire, Rekk, que tu as la chance d'un pendu. D'un pendu cocu. Et crois-en quelqu'un qui a échappé à plus de gibets et de femmes que tu ne peux l'imaginer, ça veut dire beaucoup"
"Tu es mort" siffla Rekk.
Eleon se releva avec empressement.
"Devant tout le monde ? C'est une mauvaise idée, je dois dire. Même Mandonius risque de te laisser tomber si tu fais cela en présence de témoins. Mais tu as raison, je pense que le temps est venu pour moi de partir"
"Tu ne vas nulle part"
"Au risque de te décevoir" fit Eleon alors que Rekk avançait sur lui, "je crois bien que si"
"Non. Ta souricière se referme sur toi." Le Banni haussa la voix. "Abattez-le ! Cet homme n'est pas un garde, mais un assassin ! Abattez-le tout de suite !"
Mandonius haussa un sourcil étonné devant le cri de Rekk, mais il se reprit rapidement.
"Vous avez entendu le baron FroidVal ? Tuez l'assassin ! Dépêchez-vous, et peut-être l'empereur vous pardonnera vos erreurs"
"Ca se gâte" murmura Eleon.
Alors que les arbalètes étaient de nouveau levées, il bondit dans la pièce que Rekk avait occupée, fermant violemment la porte derrière lui. Deux carreaux de gardes particulièrement inspirés vinrent se planter dans le bois.
Furieux, Rekk rouvrit la porte à toute volée, intimant aux gardes de le suivre. Eleon était en train de se couler dans la meurtrière, disloquant son corps avec une habileté déconcertante pour parvenir à se glisser dans la mince fissure.
"Nous nous reverrons" lança-t-il en souriant avant de disparaître.
Mandonius entra à son tour dans la pièce. Son regard se posa sur la petite fenêtre, et il fronça les sourcils.
"Comment a-t-il fait ça ? Qui était-ce ? Personne ne devrait pouvoir se faufiler par là."
"Il faut croire que si. Vous devriez revoir la taille de vos meurtrières, au palais. Ca peut devenir dangereux" Rekk sourit. "Merci, Mandonius. Tu es arrivé à temps"
"On dirait bien, oui. Mais je crois que tu as beaucoup de choses à me raconter" Il baissa la voix. "Ta lame va là où tu lui demandes d'aller, Rekk. Ce n'est pas à moi que tu pourras faire croire cette histoire d'accident, et probablement pas à l'empereur non plus. Il va falloir que tu m'expliques ce qu'il t'a pris. Tu penses que Semos avait quelque chose à voir avec la disparition de ta fille ?"
"Nous en parlerons ailleurs, si tu veux bien. Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu ne devais pas être à la chasse avec l'empereur ?"
 
Mandonius prit son temps pour répondre, attendant que Rekk ait récupéré ses affaires et ses armes auprès d'un Maître Heilban se confondant en excuses. Ils sortirent de l'Académie, et ce ne fut qu'une fois dans la rue qu'il consentit à parler.
"Nous avons dû abréger la chasse. Nous sommes tombés sur un sanglier, et les choses ne se sont pas très bien passées. A vrai dire, sans l'ambassadeur de Koush, je ne sais pas comment les choses auraient tourné"
"L'ambassadeur de Koush ?"
"Oui, G'kaa. Tu dois certainement te rappeler de lui, c'était un des jeunes chefs de guerre qui nous affrontaient lors des guerres Koushites. C'est lui qui avait tué Borlan Main-gauche, et Jaklen Strahl. Tu te rappelles ? Tu étais fasciné par son habileté à la sagaie, à l'époque, tu voulais absolument l'affronter"
Rekk haussa les épaules.
"Oui, maintenant que tu me le dis, je me souviens. Ca remonte à longtemps, mais je crois que je me souviens. Un grand gaillard, souple comme une anguille, avec une unique tresse de cheveux noirs crépus ?"
"Il a coupé sa tresse depuis le temps, et ses cheveux ont grisonné, mais c'est bien lui." Il sourit. "Que veux-tu, on vieillit tous. Ah, mais ça me rend malheureux, parfois, de voir les ravages de l'âge."
"Ne dis pas n'importe quoi, tu as l'air toujours fort comme un taureau"
Mandonius grimaça.
"Je ne parlais pas de moi, en fait. C'est l'empereur qui m'inquiète. Il a une santé précaire depuis quelques années, mais ça va de pire en pire. Il s'est senti fatigué après seulement une demi-journée de chasse, et il a souhaité revenir au palais. Et il n'a pas quarante ans !"
"Et c'est ça qui te tracasse ? Ne t'inquiète pas, Marcus en a vu d'autres ! Je n'ai jamais eu beaucoup d'amitié pour Bel, mais il a bien élevé son gamin. Pas comme Marcus, justement. J'ai rarement vu quelqu'un de plus insupportable que son fils, et pourtant je ne l'ai croisé que quelques instants. Si l'empereur n'était pas intervenu, au bal, c'est moi qui l'aurais fait"
"? et tu te serais mis dans les ennuis jusqu'au cou, comme d'habitude. Ne sois pas ridicule, tu n'aurais pas pu porter la main sur l'héritier, pour de simples raisons de loi et de protocole. L'empereur ne t'aurait certainement pas soutenu, la cour ne l'aurait pas compris. Tu aurais ruiné tous ses plans, et tu aurais probablement fini pendu"
"Vu comme tu présentes la chose, je suis en effet content de m'être retenu"
Mandonius haussa les épaules.
"Pour te parler franchement, cela fait plusieurs années que je me retiens. Je souhaite tous les jours à l'empereur longue vie avec ferveur. Imaginer que ce petit monstre pourrait monter sur le trône?" Il frissonna. "Tiens, tu as entendu parler de ses dernières frasques ? Le démon semble décidé à montrer à toutes les filles qu'il croise qu'il est un homme, maintenant. Personne n'ose se plaindre, bien entendu, mais je suis convaincu que plus d'une fille de la cour a eu à subir ses assauts. Et que dire des filles du peuple ? Je sais de source sûre qu'il en a déjà violé plusieurs . Et, bien sûr, les parents ne peuvent rien faire. C'est une véritable plaie. Ah, ses sorties nocturnes dans Musheim? je me rappelle qu'il est revenu une fois avec du sang sur le visage. Il n'a pas voulu dire d'où ça venait, mais je soupçonne que ce n'était rien de bon."
 
Rekk s'était soudain raidi.
"Du sang sur le visage ? Le sien, ou celui de quelqu'un d'autre ?"
"Comment veux-tu que je le sache ? Au hasard de ses virées avec les maudites brutes qui l'accompagnent tout le temps, il a dû rencontrer quelqu'un qui?. Pourquoi ?" Il haussa un sourcil devant l'expression de Rekk. "Non. Tu penses qu'il pourrait être impliqué avec ta fille ?"
"Je ne sais pas. Mais j'ai bien l'intention de le savoir. Avec un peu de chance, Malek et Shareen devraient avoir plus d'informations pour moi demain. J'espère, du moins"
"Je vois." Mandonius changea habilement de sujet. "Parle-moi du garde que tu frappais lorsque je suis venu ? Tu dis que c'était un assassin ?"
En quelques mots, Rekk expliqua de quoi il retournait. Mandonius avait toujours été un mentor, parfois un ami. Les deux hommes avaient construit leur confiance mutuelle sur les violences de la guerre, et c'était peut-être le seul genre de camaraderie que le Banni pouvait accepter.
Mandonius hocha la tête lorsqu'il eut fini.
" J'ai déjà entendu parler de cet Eleon. Ca m'a l'air d'être un adversaire redoutable. C'est dommage que tu aies tué Comeral, je me souviens de lui. Je l'aimais bien, je pariais sur ses victoires dans l'Arène"
"Mmh. Il n'était pas mauvais. Il a perdu beaucoup de combats ?"
"Il a perdu le seul qui ait été vraiment important, on dirait" fit Mandonius avec tristesse. "Mais ce qui est fait est fait. Quoi qu'il en soit, dépêchons-nous. L'empereur nous attend. Il était impatient de savoir si tu avais commencé à faire ce qu'il t'avait demandé." Mandonius fronça les sourcils. "Qu'est-ce qu'il t'a demandé, exactement ?"
Rekk haussa les épaules.
"Ce n'est pas à moi de te le dire. Mais, de toute façon, je ne m'en suis pas encore occupé. Chaque chose en son temps."
"Je? vois." Le gouverneur s'enferma dans un mutisme troublé.
La lune brillait dans le ciel. Elle en était à son premier quartier, et dessinait comme un sourire pensif au-dessus de la ville. La rue qui remontait au palais était presque déserte. Seul le bruit de leurs bottes sur le pavé venait troubler le silence.
Lorsqu'ils arrivèrent aux portes du palais, les deux hommes se tendirent soudain. Mandonius connaissait les coutumes de l'endroit par c?ur, et les courtisans qui se pressaient autour des grands vantaux du portail n'en faisaient certainement pas partie. Quant à Rekk, il n'était pas au courant des usages de la cour, mais il pouvait sentir d'ici la tension qui émanait du petit groupe. Machinalement, sa main se porta à son côté. Il n'avait pas d'épée.
 
Ils n'avaient pas fait deux pas dans le palais que les courtisans se précipitaient sur le gouverneur, les yeux écarquillés, la respiration hachée.
"Que se passe-t-il ?"
"Est-ce vrai ?"
"Dites-nous ?"
"Ce n'est pas une mauvaise plaisanterie ?"
Mandonius leva les bras, irrité.
"Qu'est-ce qui se passe ici ? Qu'est-ce que vous avez tous à piailler ainsi ? Ecartez-vous, laissez-nous passer ! Dieux Sacrés, vous avez donc perdu tout respect ?" Une jeune courtisane lui tira nerveusement la manche. Elle avait de beaux yeux écarquillés. La mémoire exercée de Mandonius se mit automatiquement en marche, et lui sortit un nom. Gallaine de Blondhal, une petite famille sans importance. "Quelqu'un va-t-il enfin me dire ce qu'il se passe ?"
Les lèvres de la fille s'entrouvrirent en une expression d'incrédulité.
"Vous n'êtes pas au courant ? On prétend que l'empereur se meurt"

n°2076496
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 18-02-2004 à 09:28:09  profilanswer
 

http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif
 

Citation :

Il avait tué et massacré plus de gens qu'il ne pourrait jamais en compter.  
 
Est-ce que Shareen et Malek lui avaient obéi ? Etaient-ils allés rejoindre Dani ?  
 
Il y eut un tschink, et le carreau vint frôler l'épaule du Banni pour s'enfoncer dans le mur.  
"Maudit?" siffla l'homme.


 
ça fait bizarre ça...


Message édité par Panem le 18-02-2004 à 09:29:15
n°2076761
PunkRod
Digital Mohawk
Posté le 18-02-2004 à 10:41:55  profilanswer
 

:bounce:  :)


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Assistants SWGOH
n°2078911
Damrod
Posté le 18-02-2004 à 15:08:53  profilanswer
 

:bounce: http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif :bounce:

n°2080324
flytrap
Posté le 18-02-2004 à 18:02:55  profilanswer
 

Bonjour
 
Bravo bis la suite?.
Je viens de lire attentivement le début de ce roman, et j'ai vraiment beaucoup apprécié, le scénario est bien monté et l'histoire entraînante.
 
Mais bon j'ai quand même quelques remarques à faire. :)  
 
Concernant le scénario, il semble quand même un peu classique, j'aurais bien aimé y trouver un ou plusieurs personnages influents mais pas officiellement dans un camp ou dans l'autre. Laisser peut être un doute sur les motivations, dans ce que j'ai pu lire, on retrouve la vengeance et le pouvoir, je pense que j?y aurais inclus une part mystico gélatineuse, quelque chose d?obscur qui chapote un peu tout les antagonistes.
 
Ma deuxième remarque concerne plus la construction des chapitres, ils commencent un peu toujours de la même façon, une description et on rentre dans l?action.
C?est sympa, mais cela fait un peu monotone, j?aurais bien aimé lire deux chapitres consécutifs sur les mêmes personnage, ou alors faire en sorte que es personnages se croisent en cours de chapitre et que l?on change de centre d?intérêt. Un peu comme au cinéma où l?on suivrait un personnage, il en croise un autre et la camera change et se focalise sur cet autre personnage.
 
En tout cas encore bravo continue, on attend la suite avec impatience?

mood
Publicité
Posté le 18-02-2004 à 18:02:55  profilanswer
 

n°2082587
Gounok
Faux traître
Posté le 18-02-2004 à 23:00:23  profilanswer
 

Oui, vivement la suite [:youpi]

n°2082750
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 18-02-2004 à 23:19:04  profilanswer
 

:cry:  :cry:  :cry: La suiiiiite pliiiiiiize !!!  :cry:  :cry:  :cry:

n°2082918
Grenouille​ Bleue
Batracien Azuré
Posté le 18-02-2004 à 23:35:26  profilanswer
 

Voici le XX
 
Flytrap, je te remercie de tes commentaires :) Mais j'avais pourtant l'impression que certains protagonistes étaient plus tordus qu'ils en avaient l'air. Attends de voir les coups fourrés qu'ils ont en réserve...  :ange:  
 
______________________________________
 
 
La nuit était complètement tombée et les lumières s'allumaient les unes après les autres dans la ville. Les échoppes fermaient, les chariots se remplissaient, et les fermiers amorçaient le retour chez leurs femmes et leurs enfants. Le serpent humain que les jeunes gens avaient vu à leur arrivée dans la ville repartait maintenant dans l'autre sens, lentement, obstinément. Les rares torches qui brûlaient encore donnaient à Musheim une aura malsaine, comme des feux follets tremblotant à la surface d'un marécage.
Le vent souffla dans la Rue des Potiers, puis s'engouffra avec bonheur dans la porte à moitié réparée. Un silence irréel régnait dans la petite maison de dame Dani. Les meubles avaient été rangés sur le côté, les débris balayés dans un coin. Tous étaient montés à l'étage pour s'installer dans les chaises encore intactes. Trois paires d'yeux fixaient Laath sans ciller.
La grosse femme avait pris les choses en main avec sa vigueur habituelle. En quelques aboiements rauques, elle avait congédié l'homme qui réparait sa porte, et réuni les deux jeunes gens autour d'elle. Elle avait pris le temps de leur trouver un endroit où s'installer, de vérifier qu'on ne pouvait pas les entendre du rez-de-chaussée, et de faire chauffer du thé. Maison dévastée ou non, Dani ne serait pas Dani sans son thé. Elle revint rapidement, chaloupant de ses amples anches, pour apporter des tasses à ses trois invités. Tous s'en emparèrent machinalement sans même lever le regard.
Malek restait frappé de stupeur. Il observait le jeune garçon avec des yeux ronds, mais il évitait son regard, baissant les yeux avec obstination. Shareen paraissait tout aussi stupéfaite, bouche ouverte, cherchant à trouver ses mots.
"Arrêtez de le regarder comme une bête curieuse, va, le pauvre" protesta finalement Dani, brisant le silence de sa voix profonde. "Il a l'air tout terrorisé, le petiot ! Mais on ne va pas te manger, eh ? Tu as peur de la vieille Dani ?"
Le jeune homme secoua la tête, un geste qui pouvait aussi bien signifier oui que non. Avec un effort manifeste, le garçon leva des yeux craintifs vers Malek et Shareen. Il n'avait pas l'air habitué à être le centre de l'attention générale et, clairement, cela le terrifiait. Tout aussi visiblement, il n'avait aucune envie d'être là. Il affichait une moue à la fois boudeuse et obstinée.
 
"Laath ? Tu t'appelles Laath ?" fit Shareen doucement. "Enchanté. Moi, c'est Shareen. Et celui qui te regarde avec de grands yeux, là, c'est Malek. Nous étions des amis de Deria. Tu n'as pas à avoir peur"
Elle se sentait étrangement attirée par le jeune homme, qui frappait son instinct maternel comme jamais personne ne l'avait fait. Elle avait envie de le faire se moucher, de lui ordonner de se tenir droit, de ne pas s'agiter nerveusement comme ça. Elle avait envie de le gifler, aussi, et de lui dire de se prendre en main. Etonnant qu'une personne puisse provoquer autant d'émotions contradictoires, rien qu'en la regardant. Déesse Vierge, mais il avait de beaux yeux !
"Je crois que tu as beaucoup de choses à nous dire" murmura Malek, regardant le jeune garçon d'un air incrédule. "Beaucoup?" Ca ne pouvait pas être possible ! Deria, sa Deria, ne pouvait pas être tombée amoureuse de? de ça ! "Alors comme ça, tu étais le? l'ami de Deria ?"
Laath hocha la tête de nouveau, un petit mouvement bref.
"Oui. Enfin? je crois" ajouta-t-il après réflexion.
"En voilà un autre qui est bien dégourdi, allez !" ricana Dani. "Comme si je n'avais pas déjà assez à faire avec les deux amoureux sur les bras !"
Malek se raidit sur sa chaise. Le rouge lui montait au visage, mais il était incapable de déterminer s'il s'agissait de colère ou d'embarras.
"Amoureux ? De quoi est-ce que vous parlez ? Et toi" cracha-t-il en se tournant vers Laath, "essaie d'être plus cohérent dans tes réponses. Ca veut dire quoi, je crois ? Tu couchais avec elle, oui ou non ?"
Le voleur se recroquevilla sur sa chaise devant la vindicte du jeune noble. Son visage était livide.
"Je?"
"Du calme, Malek, du calme. Il va parler, ne le bouscule pas" Dani se pencha, difficilement en raison de sa corpulence, et posa sa main sur l'épaule du garçon. "Ne t'inquiètes pas, petit. Ce sont des amis de Deria, des grands amis. Ils ont beaucoup voyagé pour elle." Elle eut un sourire amusé. "Comprends leur réaction, ils ne savaient même pas que tu existais. Je pense que tu as beaucoup de choses à leur dire, tu ne penses pas ? Ensuite, nous parlerons de cette histoire de?" elle hésita "Sijwoural."
 
Laath resta un instant silencieux.
"Vous avez raison" finit-il par dire. Il avait une voix profonde et grave, qui ne correspondait absolument pas à son physique. C'était une voix de barde, de chanteur, de conteur, une voix habituée à captiver les gens. "Deria ne vous a pas parlé de moi, alors ?"
Il y avait une expression de douleur, sur son visage.
"Pas du tout" fit Shareen, pleine de sympathie. "Parfois, elle faisait le mur de l'Académie, mais elle prétendait qu'elle avait besoin de respirer un peu, de se promener en dehors de ces murs. Elle n'a jamais eu un grand respect pour l'autorité, et elle ne s'en cachait pas. Je n'aurais jamais imaginé, par contre, qu'elle soit? elle était très secrète" finit-elle misérablement.
Shareen se sentait furieuse et humiliée. Durant plus d'une année, elle s'était convaincue qu'elle était la meilleure, voire la seule, amie de Deria, et que celle-ci lui faisait des confidences qu'elle ne faisait à personne d'autre. La jeune fille semblait rechercher sa compagnie et être heureuse avec elle, pourtant elle ne s'était absolument pas ouverte à Shareen de ses escapades nocturnes, et de l'existence même de ce garçon. C'était frustrant. C'était même presque insupportable; Deria lui mentait ? Deria lui cachait des choses ? L'image parfaite qu'elle s'en était faite vacilla imperceptiblement. Et puis, comment sa maîtresse avait-elle osé faire semblant de ne pas s'intéresser aux garçons et de ne pas se soucier de leurs regards, dédaignant toute conversation légère avec sa servante ? Quelle désillusion !
"Je peux comprendre ça" murmura Laath. "Je ne suis pas sûr qu'elle ait été très? fière de moi, en fait"
Malek gronda sourdement. Lui aussi sentait la colère l'envahir devant cette lavette, mais pas pour les mêmes raisons. Durant près d'un an, il avait tenté de courtiser Deria. Il s'était montré sous son meilleur jour. Il avait combattu avec elle de nombreuses fois. Il avait rêvé d'elle la nuit, pensé à elle en se levant. Il n'avait jamais éprouvé cela pour aucune autre fille. Et le fait qu'elle le repousse n'était mitigé que par le fait qu'elle se comportait de manière pire encore pour toute autre personne qui tentait de l'approcher. Il lui suffisait de fermer les yeux pour se remémorer comme s'il y était les rebuffades qu'avaient essuyées quelques-uns des séducteurs de l'Académie, des grandes gueules pleines d'assurances que Deria avait renvoyé avec un coup de pied au derrière. Et que dire de celui qui avait tenté de lui rendre visite, la nuit, et dont elle avait déboîté l'épaule ?
 
Apprendre que toute cette façade de? de pureté n'était qu'une image, apprendre qu'elle avait un amant, était quelque chose qui lui faisait perdre pied. Et pourquoi quelqu'un comme ça ? Pourquoi avait-elle refusé ses avances, si c'était pour s'enticher d'une telle loque ? Il s'était déjà rendu compte à plusieurs reprises que les goûts des filles étaient inexplicables ? et souvent ridicules ? mais tout de même?
"Il y a de quoi" cracha-t-il. "Regarde-toi ! Tu ne méritais pas une fille comme Deria ! Aaaah? personne ne la méritait, mais certainement pas quelqu'un comme toi ! Alors prends-toi en main, et décide-toi à nous dire ce que nous voulons savoir. Plus tôt tu auras fini de tout nous expliquer, plus tôt tu pourras et retourner te rouler dans la fange que tu viens de quitter" Il surprit le regard hautement désapprobateur de la grosse dame, mais il ne se laissa pas démonter. "Quoi ? Il ne sent pas mauvais, peut-être ? Mais qu'est-ce qu'il croyait, ce garçon, en venant ici ? Qu'on lui ferait un grand sourire ? Pour ce qui me concerne, je ne comprends pas Deria, et je ne sais pas ce que?"
"Malek, ça suffit maintenant" fit Shareen, posant la main sur son épaule. "Je sais que tu es énervé, moi aussi. Mais ce n'est pas sa faute, à lui. Il n'y est pour rien !"
"Comment ça , pour rien ? Et s'il l'a embrassée ? Et s'il a couché avec elle, il n'y était pour rien, aussi ? Il était en train de penser à autre chose ?"
"Ce n'est pas ce que je veux dire, et tu le sais très bien. Calme-toi, Malek.."
Les mots étaient fermes alors qu'elle pressait son bras. Ses muscles se crispèrent puis, lentement, il se détendit. Son visage prit une expression hantée.
"Tu as raison. Je suis désolé. Je suis désolé, Laath. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. La fatigue, probablement. Ne fais pas attention à tout ce que je viens de dire.. Ce n'est pas contre toi que j'en ai."
Laath essaya un sourire timide. Il avait l'air d'un enfant, caché derrière les jupes de Dani. Pourtant, il se redressa et avança vers les deux jeunes gens. Le mouvement semblait lui coûter, mais il le fit quand même.
"Non. Vous avez raison. Elle me le disait, elle aussi. Elle me disait de me prendre en main" Il haussa les épaules, un mouvement timide. "Elle disait qu'il y avait du fer en moi, et que cela deviendrait de l'acier un jour. Que cela viendrait avec le temps. Mais elle se trompait. Je suis un lâche"
"Eh ? Elle aimait bien les métaphores de forgeron, on dirait ?" sourit Dani. "C'est bien, une bonne manière d'élever les garçons, ça. J'aurais aimé la connaître, cette Deria."
 
Malek ne voyait certainement pas de métal, quel qu'il soit, dans le garçon en face d'eux. C'était un cloporte mou et larmoyant, sans la moindre once de volonté. Il y avait beaucoup plus de courage et d'énergie dans Shareen, bien que ce fût une fille, que dans celui qui leur faisait face. Et il n'avait pas besoin de regarder Dani pour savoir qui, parmi eux, avait une âme d'acier. Les dents serrées pour ne pas dévoiler ses pensées une nouvelle fois, il s'absorba dans la contemplation de sa tasse de thé. Soufflant doucement pour refroidir le breuvage, il en prit une gorgée, puis se renfonça dans son siège. Calme et serein. Il resterait calme et serein.
"Fascinant" fit-il, le sourire lui vrillant douloureusement les mâchoires. Mais encore ?"
Laath prit une grande inspiration. Il leva les yeux, regardant tour à tour Shareen et Malek. Il semblait rassembler son courage.
"J'étais présent lorsque Deria est morte" murmura-t-il. "J'ai vu beaucoup de choses. Ce qui s'est passé?"
"Minute, minute" interrompit Malek. "Explique-moi d'abord comment vous vous êtes connus, et depuis combien de temps ?"
"Ca n'a pas d'importance pour l'instant, Malek" protesta Shareen.
"Ca en a pour moi. Ca m'aidera à comprendre"
"Je peux faire court, si vous voulez" proposa Laath. Il se troubla de nouveau quand les deux le regardèrent. "Très bien. L'histoire complète, alors ? Bon. J'ai rencontré Deria il y a quatre mois environ, alors qu'elle cherchait à? à cambrioler une maison"
Malek hoqueta. Shareen ouvrit des yeux ronds.
"Cambr? Cambrioler quoi ?"
"Oh, vous ne saviez pas non plus ?" Il eut un sourire nostalgique. "Elle disait qu'elle s'ennuyait dans cette ville. Elle trouvait qu'il n'y avait rien à faire, aucun danger, aucun ennui. Elle affirmait qu'elle avait vécu son enfance dans un monde de violence et de guerre, et que ça lui manquait. Elle était étrange, mais ça la rendait si belle?" Il eut un sourire rêveur.
"La suite" gronda Malek. Ses mains s'ouvraient et se refermaient nerveusement. "La suite"
Le sourire de Laath s'évapora. Il déglutit bruyamment.
"Oui. Oui, bien sûr. La suite. Elle était en train d'escalader cette maison, dans le quartier des bijoutiers. Et le hasard voulait que je sois sur le toit de la même maison. Pour? affaires, également"
"Tu peux parler franchement, Laath" fit Dani. "Que tu sois un voleur ou non, je pense que ce n'est pas ça qui risque de les choquer"
"Pas un voleur. Un cambrioleur" protesta Laath. "Je ne suis pas comme ces tire-laine qui cherchent à couper les bourses dans la foule. Je choisis mes cibles avec attention. C'est beaucoup plus difficile d'être un bon cambrioleur qu'un vide-gousset, vous savez ?"
"Je m'en fiche !" cracha Malek. "Que tu sois balayeur, serviteur, cambrioleur ou tout-ce-que-tu-veux en eu si ça te fait plaisir. La suite !"
"Du calme" fit Shareen de nouveau. Elle eut un gentil sourire pour le garçon, comme si elle parlait à un enfant. "Ne lui en veux pas, il est très tendu en ce moment, il en oublie ses bonnes manières. Mais ne fais pas attention à lui, continue ton histoire"
Laath détourna les yeux alors que Malek tentait de foudroyer du regard simultanément Shareen et lui. L'effet en était un strabisme tout à fait perturbant.
"Toujours est-il que? nous nous sommes croisés sur ce toit. Il pleuvait à verse, et elle n'avait pas prévu ça, je pense. Elle n'était pas très bien équipée, elle glissait sur les tuiles. Elle allait faire beaucoup de bruit et attirer la garde si elle tombait, alors je l'ai aidée à se rétablir"
"Tu l'aurais laissée tomber si ce n'avait pas été pour le bruit ?" fit Shareen, choquée.
"Bien sûr. Je ne la connaissais pas, après tout" Il eut un sourire bref. "Mais je suis content de ne pas l'avoir fait"
 
Il cligna des yeux, cherchant à éclaircir sa vision alors que la pluie tombait à verse. Le manteau qu'il avait emporté ne se révélait pas une protection suffisante; les gouttes coulaient à l'intérieur du capuchon, glissant dans ses cheveux puis sur son visage. C'était un sale temps, donc une nuit parfaite pour les cambrioleurs. Les toits étaient plus glissants, mais les gardes étaient moins regardants. Ils se serraient autour des braseros, sous les poternes, à l'abri de la pluie. Lorsqu'ils patrouillaient, ils essayaient de boucler leur parcours le plus rapidement possible, et ils levaient rarement les yeux au ciel. Non, ils avaient la tête baissée pour se protéger de la pluie. Avançant ainsi, ils auraient aussi bien pu ne pas être présents, pour ce que cela concernait Laath.
Le jeune homme était confiant. S'il y avait bien une chose en laquelle il mettait sa foi, c'était ses talents d'escalade et de crochetage. Cela faisait deux jours qu'il observait la boutique, et le trafic qui s'y déroulait. Les gemmes étaient gardées ailleurs, et même lui n'était pas assez fou pour tenter de les subtiliser. Mais, pierres ou non, la maison devait regorger de richesses et de trésor. Si jamais tout se passait comme prévu, Laath serait enfin riche. Il pourrait enfin quitter l'impasse boueuse dans laquelle il dormait, et manger à sa fin. Il montrerait aux autres voleurs qui se moquaient de lui de quel bois il était fait. Ils cesseraient de l'appeler Laath-rine et de se détourner ostensiblement lorsqu'il arrivait.
Et il avait fallu que cette fille débarque. Pourquoi cette nuit ? Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ?
Plaqué contre les tuiles, il l'avait regardée monter, appréciant malgré lui l'habileté et la souplesse dont elle faisait preuve. Elle était loin d'être aussi douée que lui, bien sûr ? mais personne ne l'était. Pour une débutante, elle se débrouillait plutôt bien. Ses mains trouvaient instinctivement les failles dans la pierre, et sa progression, bien que lente, n'en était pas moins sûre.
Lorsqu'elle avait enfin mis le pied sur le toit, les tuiles glissantes l'avaient prises par surprise. Elle agita les bras, dérapa, et sa jambe partit dans le vide. Instinctivement, Laath s'était jeté en avant.
Et voilà ce que ça lui avait rapporté. Les muscles tendus par l'effort, il tenait la jeune fille par le bras. Elle se balançait doucement dans le vide. Elle n'avait pas crié, en tombant. Les gardes ne penseraient pas à lever les yeux.
"Merci" fit-elle d'une voix tranquille. On aurait pu croire qu'elle était tranquillement en train de siroter son thé dans un palais pour toute l'émotion qu'elle laissait transparaître. Elle leva les yeux, accrochant fermement son regard. "La pluie a rendu le toit glissant"
"Je ne pourrai pas te tenir longtemps" grogna Laath, les dents serrées. "Je glisse"
"Tu peux me hisser ?"
"Je n'ai pas assez de force !"
"Je vois" murmura la jeune fille. Elle commença à se balancer.
"Arrête ! Tu vas me faire lâcher ma prise !"
"Tout ira bien, ne t'inquiète pas. Et cesse de crier, tu vas attirer les gardes"
Laath faillit la lâcher de stupéfaction. Elle avait raison. Il venait de hurler. Comment avait-il pu faire une telle erreur ? Malgré l'orage, si jamais une patrouille était à proximité? Un nouveau cri lui monta aux lèvres alors qu'elle se tordait dans son étreinte, cherchant à retrouver une prise contre le mur.
"Je vais lâcher !" siffla-t-il.
"Parfait, j'y suis !"
Ses doigts glissèrent, mais la jeune fille s'était déjà assurée une position stable. En quelques instants, elle remonta sur le toit. Cette fois, son regard était clairement méfiant alors qu'elle regardait les tuiles.
"Saleté" murmura-t-elle.
"Tu peux le dire" fit Laath. Il bougea ses doigts nerveusement. Sa main lui faisait mal.
Ils restèrent un instant allongés sur le toit à laisser la pluie leur tomber dessus, récupérant lentement de leurs émotions. Au-dessus d'eux, l'orage se déchaînait. Les éclairs déchiraient le ciel en violentes éclaboussures de nuit.
Ce fut elle qui se redressa la première, passant la main dans ses cheveux trempés. Laath en eut le souffle coupé..
"Tu es ici pour cambrioler la maison ?"
"On peut le dire". Il hésita. "Toi aussi ?"
"Oui. Mais je vois que tu étais là le premier. Je vais te laisser à ton travail" Elle lui sourit, et lui planta un baiser sur la joue. "C'était gentil, ce que tu as fait. Beaucoup de voleurs m'auraient laissé tomber"
"Je n'ai pas vraiment réfléchi" avoua-t-il.
"C'est comme ça que l'on devient un héros"

 
 
"Et vous avez dévalisé la maison ensemble, finalement ?" demanda Shareen, captivée par la voix hypnotique du jeune homme. Il avait un véritable talent. Ses mots lui faisaient presque sentir la pluie sur sa peau, et elle remonta le col de son manteau avec un frisson.
"Oui. Je ne voulais pas qu'elle parte, et puis, la maison était assez riche pour deux. De toute façon, elle n'était pas vraiment intéressée par l'or. Elle me disait qu'elle faisait ça par goût du danger. A la fin, elle m'a tout laissé."
"C'est quand même extraordinaire" murmura Shareen. "Je ne me suis jamais douté qu'elle menait une double vie, comme ça. Passer sa nuit sur les toits à cambrioler ! Elle disait tout le temps qu'elle avait besoin de sensations fortes, mais là, ça dépasse tout !"
"Et vous vous êtes retrouvés, ensuite, je suppose ?" fit Malek. "Pour d'autres cambriolages ?"
"Oui. Elle manquait de technique, mais elle avait un potentiel extraordinaire. Elle m'apprenait à me battre. Elle était très douée, vous savez. Et elle voulait que je lui apprenne tous mes trucs, comment forcer une serrure sans laisser trop de traces, et comment briser une fenêtre sans bruit, et beaucoup d'autres choses encore" Il sourit fièrement. "Je suis le meilleur monte-en-l'air de la ville, je suis sûr"
"Et c'est la seule façon dont vous? montiez en l'air ?" demanda Malek, soupçonneux.
"Malek !" fit Shareen, choquée. Dani gloussa. Le son paraissait déplacé, venant d'un corps si imposant. "Ce ne sont pas des choses qui se disent !"
Laath se contenta de hausser les épaules.
"Nous nous aimions, je pense que c'est le plus important"
"Tu l'aimais ? Comment tu pouvais l'aimer après aussi peu de temps, foutu bâtard ?" cracha Malek. "Comment est-ce qu'elle pouvait t'aimer, alors que tu n'as même pas le courage de me regarder en face ? Allez ! Regarde-moi en face !"
Laath leva les yeux. Un tic nerveux agitait sa joue.
"Je n'ai pas l'intention de me battre, mais je n'aime pas non plus me faire traiter de bâtard" fit-il, et soudain sa voix était aussi froide que celle de Rekk. "Si vous voulez, je peux aussi bien partir maintenant. Sijwoural sera déçu de tes services, Dani."
 
La grosse femme exhala un soupir puis se redressa de toute sa taille, ce qui représentait un véritable exploit. Les poings plantés sur les hanches, elle avança vers le jeune noble.
"Malek, s'il te plaît. Je comprends que tu sois traumatisé, mais ce garçon aussi. Et tu n'es pas vraiment sympathique avec lui, je trouve. Essaie de mettre ta fierté dans ta poche, juste deux secondes. Sinon, je sais lequel des deux sortira de ma maison. Est-ce que je me suis bien fait comprendre ?"
Malek se mordit la lèvre un instant. Il se sentait coupable, et même un peu honteux, mais il serait mort plutôt que de l'avouer. Lentement, la couleur reflua de son visage.
"Je? suppose que je peux faire un effort" murmura-t-il finalement. Il détourna ostensiblement les yeux, regardant le morceau de ciel qui s'insinuait à travers la fenêtre. Les étoiles le regardaient avec tendresse. Elles, au moins, ne le jugeaient pas.
Dani vint se rasseoir, satisfaite. Un demi-sourire flottait sur ses lèvres en voyant l'air boudeur du jeune noble.
"C'est tout ce que je demande ! Laath, nous sommes tous attentifs. Continue ton histoire, je t'en prie."
"Ignore-le pour l'instant" murmura doucement Shareen, se penchant en avant. "Il est perturbé, mais c'est un bon compagnon. Tu verras qu'il ne fera pas la tête trop longtemps"
"J'ai entendu !" cria Malek en retour.
"Qu'est-ce que je disais ?" La jeune fille redevint sérieuse. "Peu importe pour l'instant de savoir vraiment les relations que tu avais avec Deria. Mais raconte-nous comment elle est morte"
Laath lança un regard hésitant vers Malek, puis haussa les épaules. Il paraissait troublé.
"Très bien, très bien. Mais ce n'est pas facile à dire? J'aurais? j'aurais dû intervenir, et?"
Dani secoua gentiment la tête.
"Nous ne sommes pas là pour te faire des reproches, mais pour comprendre, et pour savoir qui l'a tuée. Si tu as vu la scène, alors il faut nous le dire"
 
Laath prit la peine de prendre une gorgée de thé avant d'acquiescer faiblement.
"C'était affreux?" murmura-t-il. "Elle est venue me voir, les yeux brillants, alors que je n'attendais pas du tout sa visite. Je? j'habite dans un endroit qui n'est pas très agréable à voir, et elle n'était jamais venue jusqu'à maintenant. Je savais que ça lui ferait un choc. Mais elle n'a pas réagi. Elle s'est jetée dans mes bras, en grognant qu'elle avait gagné, et qu'elle était tellement heureuse qu'elle voulait me le faire partager. Elle me disait, que les gens là-bas étaient tous des abrutis sans aucun?" il s'interrompit, bouche ouverte, et resta un instant muet en réalisant ce qu'il venait de dire. "Je veux dire, elle prétendait que certains en particulier la rendaient folle. Je ne sais pas de qui elle voulait parler, mais certainement pas de vous puisque vous étiez ses amis. J'espère que vous ne l'avez pas pris personnellement." Malek ne répondit rien. Il fixait obstinément le sol.
"Toujours est-il que je l'ai félicitée comme j'ai pu. Nous sommes allés nous promener sur les rives du Verdoyant. C'est très beau, la nuit, surtout aux limites de la ville, là où plusieurs maisons ont été détruites. Il y a beaucoup de place, c'est agréable" Il grimaça devant le regard impatient de Shareen. "J'y arrive, j'y arrive. Nous n'étions pas installés depuis plus de quelques minutes que nous avons entendu les rires et les cris de fêtards qui revenaient d'une taverne. Ils étaient nombreux, et ils avaient beaucoup bu."
 
Brièvement, sobrement, il raconta de nouveau l'histoire qu'il avait livrée à Gundron et Mandonius. Les jeunes gens étaient pendus à ses lèvres, et même Dani ne l'interrompit pas avec ses sempiternelles questions. Il ne dissimula pas sa fuite, et ne détourna pas les yeux lorsque le regard de Malek se chargea de mépris. Mais ce ne fut qu'une fois l'histoire terminée que le noble explosa.
"Tu l'as laissée seule contre ces assassins ?" hurla-t-il. "Tu ne l'as pas aidée ? Tu n'as pas au moins essayé d'appeler la garde ?"
"J'étais terrorisé !" protesta le jeune garçon, levant les bras pour se défendre.
"Terrorisé, c'est facile d'être terrorisé ! Mais comment est-ce que Deria a pu tomber amoureuse de quelqu'un d'aussi lamentable ! N'importe qui d'autre se serait interposé ou aurait essayé de calmer les choses ! Peut-être qu'elle serait encore en vie, à l'heure qu'il est. Peut-être? qu'elle serait encore avec moi, à l'heure qu'il est !"
La main de Shareen sur son bras le fit sursauter, et il s'interrompit. Doucement, presque maladroitement, il répondit à cette pression. Ses yeux étaient humides, mais il se calma.
A la place, ce fut Laath qui bondit de sa chaise, le regard brûlant.
"Tu crois que je ne me suis pas déjà dit ça ? Dix fois, cent fois ? Tu penses que ça ne me ronge pas de l'intérieur ? Tu crois que je ne regrette pas ? Bien sûr, que je regrette, mais les regrets ne me la ramèneront pas. Mais je tenais à elle. Je? tenais à elle."
 
Aussi soudainement qu'il s'était levé, il se rassit, secoué de sanglots sporadiques. Il paraissait réellement vulnérable ainsi, son âme à nu, complètement déchiré. Shareen dut se faire violence pour ne pas le serrer dans ses bras et le bercer. Il était comme ça, Laath.
Malek et Shareen se regardèrent un instant, silencieux.
"Et cette cape bleue avec la tête de cerf? tu sais à quoi ça peut bien correspondre ?"
Laath secoua la tête.
"Pas du tout. Mais ça doit être quelqu'un d'important, parce que c'est de là que viennent tous mes ennuis. Lorsque j'ai raconté cette histoire au Capitaine Gundron et au Gouverneur Mandonius, ils sont devenus comme fous ! Ils ont?"
"Attends une minute?" Malek fronça les sourcils. "Tu as parlé de ça à Mandonius ?"
"Bien sûr ! Oh, je regrette maintenant, mais je croyais qu'il était aussi compréhensif et généreux que le disaient les histoires qui couraient sur lui. Mais il n'a pas été particulièrement compréhensif lorsqu'il a demandé à ses hommes de me tuer. Et généreux, il l'a surtout été pour fixer le montant de la prime sur ma tête?"
 
Shareen n'avait pas parlé depuis un long moment. Silencieuse, les bras croisés, elle avait tout absorbé sans relever la moindre chose. Maintenant, elle releva la tête.
"Ce? Mandonius. Ca n'est pas l'ami de Rekk ? Celui qui l'a amené devant l'empereur ? Ils avaient l'air de bons amis. Pourquoi est-ce qu'il n'a rien dit ?"
Malek fronça les sourcils.
"Je ne sais pas. Peut-être pour protéger la personne qui porte ce fameux manteau ?"
"Comment ça ?"
"Ca paraît logique ! Regarde, si jamais il connaît cette personne ? parce qu'un tel manteau d'une couleur aussi criante, ça ne doit pas être banal ? il a dû avoir peur que Rekk réagisse de manière totalement incontrôlable et décide de la tuer tout de suite pour venger sa fille."
"Mmmh?" Shareen se mordilla la lèvre inférieure. "Tu penses ?"
"J'en suis presque sûr ! Je ne vois pas d'autre raison. Et puis, ça colle avec tout ! C'est aussi pour ça qu'il a souhaité éliminer Laath. Pour que personne d'autre ne sache. Oui, tout correspond."
"Ca me paraît un peu simple" fit la jeune fille, dubitative.
"Un assassinat, des mensonges, le Gouverneur et le Capitaine impliqué? ça ne m'a pas l'air particulièrement simple, à moi" protesta Dani.
Elle se leva et entreprit de débarrasser la table. La plupart des tasses étaient encore remplies. Tout à leur discussion, personne n'avait réellement profité du thé. Elle empila les tasses sur son plateau. Une expression de douleur infinie lui traversait le visage.
 
"Dans quoi est-ce que Rekk s'est embarqué, Dieux Infernaux. Dans quoi est-ce qu'il a mis les pieds ? Oh, je vous en prie, faites qu'il ne lui arrive rien de grave et qu'on ne me l'abîme pas?"
La prière était étrange. Elle fit s'incurver les lèvres de Malek, la grimace la plus proche d'un sourire qu'il ait faite depuis l'arrivée de Laath.
"Jusque là, ce sont plutôt les autres qui ont été abîmés."
Le regard de Laath allait de l'un à l'autre, chargé d'incompréhension. Il hésita un instant avant de poser la question qui le démangeait.
"Ce? ce Rekk, dont vous parlez ? Qui est-ce, exactement ?"
Malek se tourna vers lui. Sa grimace se changea en un sourire jusqu'aux oreilles, et sa voix était chargée de sarcasme.
"C'est vrai que vous n'avez pas été présentés. Laath, il faudra absolument que tu rencontres Rekk. Le Boucher, le Maudit, le Démon Cornu? revenu d'entre les morts pour devenir ton beau-père."


Message édité par Grenouille Bleue le 19-02-2004 à 00:15:43
n°2083101
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 18-02-2004 à 23:59:22  profilanswer
 

:)  :)  :) Aaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhhhh !!!  :)  :)  :)  
 
 

Citation :

"Je m'en fiche !" cracha Malek. "Que tu sois balayeur, serviteur, cambrioleur ou tout-ce-que-tu-veux en "eu" si ça te fait plaisir. La suite !"  
 
Les gemmes étaient gardées ailleurs, et même lui n'était pas assez fou pour tenter de les subtiliser. Mais, pierres ou non, la maison devait regorger de richesses et de trésors.  
 
Lorsqu'elle avait enfin mis le pied sur le toit, les tuiles glissantes l'avaient supriseprises par surprise. Elle agita les bras, dérapa, et sa jambe partit dans le vide. Instinctivement, Laath s'était jeté en avant.


 
 
"La suite" gronda Panem. Ses mains s'ouvraient et se refermaient nerveusement. "La suite." Le sourire de Grenouille Bleue s'évapora. Il déglutit bruyamment.  
"Oui. Oui, bien sûr. La suite. " :p  :whistle:  
 

n°2083241
Damrod
Posté le 19-02-2004 à 00:13:43  profilanswer
 

:love:  :bounce: enfin un nouveau chapitre !!!  
mais c'est trop court  :cry:  on en veut d'autre http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif  :bounce:

n°2083322
taftonf
Posté le 19-02-2004 à 00:20:40  profilanswer
 

Le grondement du tracteur cessa alors que la porte d'entrée s'ouvrit dans un grand fracas. Là, au milieu du seuil, se dessinait une étrange silhouette. Alors que la forme s'avancait en bondissant, les traits de l'inconnu s'éclaircirent et tout le monde reconnu le plus bougon paysan du coin. Pinot-Gris était avachit sur son fidèle destrier Taftonf, le lapin fou. Menacant Grenouille Bleue de sa fourche porte-bonheur, il dit alors d'une voie gutturale :
La suite crévindiou !! [:arg]


Message édité par taftonf le 19-02-2004 à 00:26:12
n°2083353
Grenouille​ Bleue
Batracien Azuré
Posté le 19-02-2004 à 00:29:33  profilanswer
 

Ya pas à dire, l'attente stimule votre créativité :D


Message édité par Grenouille Bleue le 19-02-2004 à 00:29:51
n°2084351
flytrap
Posté le 19-02-2004 à 10:45:37  profilanswer
 

ca eclaire nos mornes et sombres journée de fastidieux travail.
 
La suite, la suite, on on te prend en otage :D

n°2084743
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 19-02-2004 à 11:39:47  profilanswer
 

Allez une petite manif :
 
http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gifhttp://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gifhttp://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gifhttp://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif

n°2084912
Grenouille​ Bleue
Batracien Azuré
Posté le 19-02-2004 à 12:09:17  profilanswer
 

Voici le XXI.
Mais je vous préviens, le premier tome s'arrête au 24... donc ça ne laisse pas beaucoup d'histoire, bande de morphales. J'ai peur que ce post ne sombre dans les tréfonds du forum  :sweat:  
 
__________________________________________________
 
Les extérieurs du palais étaient habituellement très calmes durant la nuit. La majeure partie des cris et des rires se déroulait dans les salles de banquets, et les jardins extérieurs désertés faisaient l'objet d'une surveillance suffisante pour décourager les indésirables. Seuls quelques amoureux de haut lignage se promenaient à travers les parterres de fleurs, prenant la lune à témoin et se promettant une fidélité extravagante. Oui, la nuit, les abords du palais étaient un havre de paix, paisible et silencieux.
Jusqu'à ce soir.
"Vous pouvez répéter ce que vous venez de dire ?"
La jeune fille recula d'un pas, comme giflée, alors que Mandonius se retournait et la secouait violemment. Son calme et son impassibilité légendaire venaient de voler en éclats en même temps que ses manières. Ses yeux étincelaient de rage, et sa voix oscillait à la limite du hurlement.
"Je? Gouverneur, vous me faites mal !" protesta Gallaine de Blondhal, cherchant à se dégager. "Lâchez mon bras !"
Rekk haussa un sourcil étonné devant la réaction de son ancien capitaine. Mandonius avait toujours eu des nerfs d'acier. Lors des guerres Koushites, lorsqu'il avait servi sous ses ordres, il en était venu à apprécier cet homme d'airain, toujours décidé et sûr de lui, audacieux sans être téméraire, qui parvenait en quelques minutes à saisir la situation à laquelle il faisait face, et la meilleure manière de l'affronter. Il semblait bien que l'âge avait effacé tout cela.
 
Un muscle joua dans sa joue alors qu'il promenait son regard autour de lui. Les courtisans regardaient Mandonius avec des yeux ronds, une expression d'incrédulité presque comique sur leur visage. Ils allaient attirer une attention mal placée. Le Boucher ne voulait rien tant que passer inaperçu. Il avait assez de choses à gérer ainsi pour ne pas non plus se voir coincé dans des intrigues de palais. Sa main se posa sur l'épaule du gouverneur et ses doigts se crispèrent jusqu'à ce que la prise devienne douloureuse.
"Du calme, Mandonius, du calme. Elle n'y est pour rien" murmura-t-il.
Le gouverneur grinça des dents devant la douleur qui sourdait de son épaule, et il se dégagea d'une secousse avant de lâcher la jeune fille. Son visage gardait une expression figée. Il se massa le bras d'une main absente.
"Ce n'est pas possible ? Où avez-vous entendu cela ? Par qui ?" Alors qu'il reprenait ses esprits, le ton de commandement revenait dans sa voix. "La nouvelle est-elle confirmée ?"
"On ne parle que de ça dans le palais, Gouverneur. Les couloirs bruissent de rumeurs contradictoires" murmura un des courtisans, s'inclinant obséquieusement. "L'empereur a mal supporté les rigueurs de la chasse, semblerait-il. Il est allé se coucher aussitôt, et son état n'a fait qu'empirer."
"Ridicule. J'étais avec lui il n'y a pas deux heures. Il était fatigué, voilà tout. En aucun cas il n'avait l'air malade. Vous exagérez beaucoup les choses, comte?" Le nom lui échappa un instant, et il fit une pause. C'était bien un signe de sa nervosité qu'il ne parvienne pas à s'en souvenir instantanément. "? de Lamilcar."
"Constatez par vous-même, Seigneur. On m'a dit qu'il a été pris de mauvaises fièvres et d'une toux sanglante, et que ses forces le quittaient rapidement. Une telle tragédie"
Mandonius frémit.
"On, on ? Qui est ce on, à la fin ? Quelqu'un peut-il me l'amener ? Il sera sans aucun doute beaucoup plus précis que vous ! L'empereur est malade, et personne n'a de nouvelles ?" Il leva les mains au ciel. "J'abandonne. Ecartez-vous, par le Sang, et laissez-moi passer !"
Joignant le geste à la parole, il repoussa d'un bras rageur les courtisans qui s'agglutinaient autour de lui et s'engagea à grandes enjambées dans le couloir qui menait aux appartement royaux.
Rekk s'engagea à sa suite, mais il n'avait pas fait deux pas qu'une main se posait sur sa manche et tirait fermement.
"BaroncFroidVal ? Vous ici ? J'ai entendu dire que vous aviez vaincu Seigneur Semos en combat singulier ?"
Les courtisans devaient se régaler: les rumeurs allaient bon train, aujourd'hui. Mais, à bien y réfléchir, il n'était pas étonnant qu'une nouvelle aussi importante soit déjà arrivée au palais. Mandonius était bien au courant, d'une manière ou d'une autre.
"C'est vous, alors ?"
"Vous l'avez tué ?"
"Un regrettable accident, j'ai entendu dire"
"Les armes de bambou, quel malheur ! Quand je pense que mon fils?"
".. Pauvre homme, je le savais. On rencontre toujours plus fort que soi?"
Les courtisans s'amassaient autour de lui, tournant, regardant, palpant, comme s'ils ne pouvaient imaginer avoir devant eux la personne qui avait mis fin à la légende de Semos. Pour un peu, tous semblaient presque avoir oublié leur empereur. Il valait mieux parler directement à un aussi fameux épéiste, plutôt que de gloser et de spéculer sur des bruits de couloir concernant la santé de l'Empereur. Le gravier crissait sous leurs bottes richement décorées, et le froid de la nuit semblait n'avoir aucune prise sur eux tant leur excitation était grande. Rekk grinça des dents. Sa main descendait vers son côté par spasmes successifs.
"Assez !" hurla-t-il lorsqu'une dame d'un certain âge, au visage masqué par un loup de dentelle, entreprit de lui tâter le biceps gauche avec un regard approbateur.  
"Laissez-moi ! J'ai à faire !"
"Le tempérament de feu qu'on pourrait attendre d'un tel combattant" gloussa la femme sans desserrer son emprise. "Savez-vous que la Maison Lamilcar pourrait bénéficier des services d'un homme tel que vous ? Mon mari sait être généreux avec les gens qui lui plaisent, et je n'ai aucun doute que vous lui plairez." Sa main se posa brièvement sur sa cuisse. Rekk frémit.
"Racontez-nous votre combat. Cela a dû être épique, j'en suis sûr ! Maître Semos était un tel épéiste !" Un jeune homme, presque un enfant, qui avait visiblement passé beaucoup de temps à transformer ses quelques poils au menton en un bouc acceptable. Il avait les yeux brillants alors qu'il se glissait devant Rekk. "Je l'ai vu combattre, j'ai étudié sa technique. Vous l'avez eu sur la durée, n'est-ce pas ? J'ai remarqué qu'il s'essoufflait rapidement !"
"Absurdité ! Il était endurant comme un chêne ! Non, c'est sur le poignet droit qu'il avait une faiblesse, je suis sûr que vous avez profité de cela, n'est-ce pas mon garçon ?" Une main poilue vint lui claquer le dos en signe d'encouragement.
"Racontez-nous ! Je meurs d'envie de composer une ballade sur vos exploits !" s'exclama un homme vêtu d'un habit chatoyant, agitant sa cape en une parfaite révérence. Un barde de cour, certainement. Cette vermine fleurissait partout où les gens acceptaient de payer. "Laissez-moi y réfléchir. Vous avez un nom qui sonne bien, vous savez ? FroidVal? ovale ? vorpale ? opale, peut-être ?  
Le grand guerrier aux yeux d'opale
qui nous fut présenté au bal
vainquit Semos, c'est peu banal  
Acclamons le Baron FroidVal !"
 
Rekk grimaça. Même pour son oreille non exercée, les vers étaient exécrables. L'importun était non seulement un barde, mais un mauvais barde.
"J'ai frappé, il n'a pas bloqué, il est mort. C'est comme ça que se passent les combats, d'habitude" grogna Rekk en tournant les talons.
Mandonius avait déjà disparu au loin, et il était illusoire d'espérer pouvoir le rattraper dans cette cohue. De plus en plus de carrosses arrivaient dans la cour du palais, probablement attirés par la rumeur de la maladie de l'empereur, et les nobles en sortaient par dizaines. On n'avait jamais vu autant de ducs, de marquis, de comtes, de chevaliers se presser ainsi tels des vautours, attirés par la curée. Au fur et à mesure qu'ils arrivaient, certains s'agglutinaient dans le groupe déjà formé autour de Rekk, et leur mouvement, par réaction, attirait de plus en plus de monde. S'il laissait faire les choses ainsi, il allait se retrouver encerclé pour la soirée par ces abrutis emperruqués, plus désireux les uns que les autres de tromper leur attente en patientant pour des nouvelles de la santé de l'empereur.
Rekk avait subi sans ciller les moustiques et les chaleurs de Koush, le froid et les avalanches du Nord, les combats incessants dans l'arène. Mais s'il y avait bien une chose qu'il ne pouvait supporter, c'était bien ces courtisans inutiles. Il était mal à l'aise, lorsqu'il ne parvenait pas à régler un problème par l'épée.
"Ca suffit !" cria-t-il de nouveau, sans plus de succès. "J'ai à faire ! Nous nous reverrons plus tard dans la nuit, si vous êtes toujours là"
"Dieu des Poètes, mais vous ne restez pas pour avoir des nouvelles de Sa Grâce ?"
"Mandonius m'enverra chercher s'il le jugera utile. Adieu"
Il se fraya un chemin à grand peine dans la foule, croisant sur son chemin de nouveaux carrosses richement décorés. Le duc de Cormeral descendait à peine de l'un d'entre eux, et son regard s'éclaira lorsqu'il avisa Rekk.
"Ah ! Baron Gaffick. N'auriez-vous pas vu mon fils ?"
"Je n'ai pas le temps, désolé. Voyez avec cette foule. Ils se feront un plaisir de vous renseigner"
Agitant la main vers la meute qu'il avait sur les talons, Rekk se lança dans un trot soutenu, atteignant les portes du palais alors qu'une nouvelle voiture arrivait, frappée cette fois du blason des Blondhal. Un lion de sable rampant sur fond de gueules. Plus les familles étaient mineures, plus leurs armes étaient ronflantes.
Ce fut avec soulagement qu'il laissa toute cette agitation derrière lui. Il maintint son allure jusqu'à ce qu'il soit sûr que personne ne le suivait, se retournant plusieurs fois. Ses pensées étaient sombres. Les allusions qu'avaient faites Mandonius sur la culpabilité du prince dérangeaient.
 
Rekk se repassa mentalement la scène du bal dans la tête, se souvenant du premier regard qu'il avait jeté sur Théorocle. C'était un être vain, il n'y avait aucun doute à cela. Un garçon mal élevé, mal éduqué, sûr de son pouvoir et de la puissance que lui conférait son titre. Il méritait sans doute une paire de claques, mais était-il réellement coupable des atrocités dont parlait Mandonius ?
Rekk avait fait beaucoup de choses horribles dans sa vie. Il n'avait jamais été avare de sa lame avec les gens qui se dressaient contre lui, de quelque manière que ce soit. Par ordre de l'empereur Bel, il avait même passé tout un village à la lame de l'épée, pour faire un exemple. Hommes, femmes, enfants. Lorsqu'il se couchait, la nuit, certains de ces visages venaient le hanter. C'avaient été des gens honnêtes, courageux et travailleurs. C'étaient des gens qui mettaient la survie de leurs enfants avant la loi. Le sens de la justice de Rekk en avait été perturbé. Si de telles situations pouvaient se produire, alors c'était la loi qui était mauvaise, et il fallait la changer.
Mais Bel avait tenu à sévir. Ces gens, impunis, pouvaient planter les graines de la révolte. Ce n'étaient que des paysans ruinés, bien incapables de payer quoi que ce soit, mais la loi ne s'embarrassait pas de détails. Et Rekk avait obéi. Il y avait une fille, en particulier, un bébé dans ses bras, qui avait tenté de couvrir l'enfant de ses bras alors même qu'elle se mourait. Il avait eu du mal à ne pas hurler, alors. Mais il avait accompli sa tâche jusqu'au bout.
Pourtant, même si Rekk savait que son âme était au-delà de toute rédemption et que le Dieu des Charniers réclamerait sa dépouille le jour de sa mort, comme on accueille un ami de toujours, le Boucher avait espéré que sa famille puisse vivre tranquillement. Toute sa vie, il s'était battu pour leur donner fortune et honneurs, pour compenser l'infamie de son nom et la souffrance de sa réputation. Qu'on touche à sa famille, et il ne connaissait plus de bornes. Prince ou pas prince, le coupable mourrait dans la douleur. Rekk avait mis du temps à se remettre de la mort de sa femme. Il avait espéré épargner ce destin à sa fille.
 
Pour la première fois depuis des années, le souvenir de Bishia revint le hanter, et le visage de Deria se brouilla devant ses yeux. Les traits s'étirèrent, les yeux s'étrécirent, et les cheveux déjà blonds s'éclaircirent encore.
"Bishia?" murmura-t-il doucement.
Soudain, sa gorge était nouée, et ses dents se serrèrent pour contenir une vague de douleur plus violente que tout ce que Comeral avait bien pu lui infliger. Un goût métallique remontait dans sa bouche. Il se souvenait? il se souvenait.
Ce n'était qu'une fille à soldats, une courtisane, une fille de rien. Une de ces femmes sans noblesse ni relations, qui se servait de sa beauté comme d'une rapière, et de son intelligence comme d'une armure. Une fille comme il y en avait des centaines à la suite de toutes les armées, prêtes à tout pour quelques piécettes. Mais Bishia était différente. Elle était? tendre.
Rekk frissonna. Le vent semblait s'être levé, et le froid pénétrait soudain ses vêtements. C'était étrange; il ne s'était pas rendu compte que le temps avait autant fraîchi. Il se frotta les tempes machinalement.
La tendresse, la douceur. Des hommes comme lui n'étaient pas destinés à en profiter. C'avait été une telle surprise de voir la compassion sur son visage lorsqu'il était revenu d'expédition, son bras en écharpe.
"Comme vous devez souffrir" avait-elle murmuré, les yeux écarquillés.
Il avait haussé les épaules et mis pied à terre sans aide.
"J'ai l'habitude. Ce n'est qu'une blessure superficielle."
"Je vais vous mettre un bandage tout de suite"
"Ne me touchez pas" avait-il grondé.
Tous ici connaissaient sa réputation. Tout le monde l'évitait. C'était un fou furieux, une bête sanguinaire sans le moindre honneur. Seuls ses hommes l'adulaient, comme on idôlatre un dieu. Mais Bishia avait pointé son doigt et lui avait donné une pichenette sur le nez, avant d'éclater de rire.
"Les hommes, tous les mêmes. Je suis sûr que vous avez plus peur des soins que des blessures. Allez, venez, je vais nettoyer tout ça. Ce serait dommage que ça s'infecte."
"Je suis le Faiseur de Veuves, le Boucher? le Démon Cornu" avait-il cru bon de préciser.
"Moi, c'est Bishia. Bon, vous venez, ou il faut que je vous pousse ?"
C'était plus fort que lui. Il avait éclaté de rire.
 
Maintenant encore, alors que les souvenirs remontaient en lui, sa bouche s'étira en une parodie de sourire. La fille n'avait peur de rien, et certainement pas de lui. Elle avait aussi un manque de pudeur total, et une intelligence aiguisée qui l'avait tout de suite mis à l'aise. Un an plus tard, couvert d'honneurs, il l'avait épousée.
C'était une période glorieuse. Il avait eu toute la vie devant soi. Elle était la seule pour qui il éprouvait quelque chose. Pas de l'amour, probablement pas. Rekk se sentait incapable de l'abnégation et du sens du sacrifice nécessaire à l'amour. Mais de la passion, certainement. Lorsqu'elle lui avait donné une fille, il avait senti quelque chose s'ouvrir en lui, une porte dont il ne soupçonnait même pas la présence.
Des années durant, il avait obéi à l'Empereur pour que sa femme et sa fille soient bien traitées et accèdent à la noblesse qui lui faisait tellement envie. Il avait accepté son bannissement en serrant les dents, malgré l'éloignement que cela impliquait. Bishia était restée à Musheim.
Il la voyait peu, mais toujours avec un plaisir non dissimulé. Lorsqu'il se rendit compte qu'elle l'avait trompé, il ressentit beaucoup de tristesse en la tuant.
Depuis, il n'avait vécu que pour sa fille. Et maintenant? maintenant?
Il finit par hausser les épaules et chasser ces pensées de son esprit. Avec un peu de chance, Dani avait obtenu quelques informations de son côté. Si tel était le cas, cela ne servait à rien de se torturer de la sorte avant de savoir.
Lorsqu'il atteignit les premières rues du Centre-Ville, il réfléchissait maintenant à cette soi-disant maladie de l'empereur. Il n'avait pas beaucoup d'amitié pour Marcus, et encore moins de respect. Mais si l'homme mourait, alors le bout de papier qu'il avait dans sa poche perdrait soudain toute sa valeur. Cela, c'était ennuyeux.
Il avait écouté Mandonius se plaindre du fils de l'empereur et, à dire vrai, comprenait parfaitement le précepteur. Il doutait fortement des capacités de Theorocle à régner justement et équitablement. Mais ce n'était pas son problème. Une fois qu'il aurait vengé sa fille, il rentrerait tranquillement dans le nord. Les soucis et les remous de la vie impériale ne l'affectaient pas, là-bas. Si les prisonniers cessaient d'arriver pour renforcer ses troupes, il quitterait Bertholdton. Que les barbares ravagent l'empire ne le dérangeaient pas plus que cela. Non, que l'empereur meure n'était finalement que de peu d'importance.
 
Rekk serra le bout de papier, dans sa poche. La maison de Dani était désormais bien visible, et une porte de guingois offrait un semblant de protection envers les brigands qui grouillaient dans les environs. Mais, même si le palier était totalement ouvert, aucun d'entre eux n'aurait tenté quoi que ce soit. Dame Dani était une icône, dans le quartier. Elle était.. sacrée.
Il lui avait fallu plus d'un mois pour comprendre comment fonctionnait le réseau de contrebande qu'il ne parvenait pas à juguler, lorsqu'il était Capitaine de la Garde de Musheim. Il avait beau surveiller le canal, et les portes de la ville, et les marchés, les denrées ne cessaient d'arriver, et les armes, et les bijoux. Il avait dû finir par se résoudre à en passer par les clients, les riches nobles désoeuvrés, et en secouer quelques-uns pour apprendre où ils s'approvisionnaient. Bel n'avait pas été content de ce type de méthode. Un mois plus tard, on lui avait dit d'enquêter ailleurs.
Mais ces quelques semaines lui avaient suffi à découvrir enfin comment ce trafic s'organisait, et surtout autour de qui. C'était une sacrée femme, cette Dani, avec son réseau d'informateurs, et ses multiples cachettes dans la ville; il avait mis du temps à la trouver. Et, lorsqu'il l'avait fait, il n'avait finalement pas sévi.
Peut-être était-ce la frustration de se voir relevé de ses fonctions ? Ou peut-être la bonté de la jeune femme l'avait surpris, et ému. Il secoua la tête, amusée par cette pensée. Pourtant, de toutes les personnes qu'il avait jamais rencontrées, Dani avait été la seule à réellement penser aux autres avant elle. C'était étrangement rafraîchissant, en un sens. Et en même temps, extrêmement perturbant.
Il poussa la porte avec soin, prenant bien garde à ne pas faire tout s'effondrer.
"Il y a quelqu'un ?" demanda-t-il.
Quelques bruits étouffés lui répondirent, puis la lourde silhouette de Dani se découpa dans la lumière d'une lanterne.
"Rekk ! Espèce de Boucher de basse-cour, je savais que tu trouverais un moyen de t'échapper ! Et intact, avec ça !"
"Moi aussi, je suis content de te voir" fit-il, amusé. "Les gamins sont là ?"
"Oh, pour ça, oui. Tous les trois !"
"Trois ?"
"Rentre, au lieu de rester là avec un air ahuri. Je vais t'expliquer. Il y a pas mal de nouveau, tu sais ?"
Rekk sourit en essuyant ses bottes.
"Je savais que tes recherches seraient fructueuses, Dani. Je ne connais pas un seul sujet qui t'ait résisté. Tu as trouvé une piste ?"
"Mieux que ça, mon grand. Je t'ai trouvé un témoin"
Rekk haussa un sourcil en embrassant la pièce du regard. Malek et Shareen étaient bien là. C'était une bonne nouvelle. Il se demandait si l'un deux, voire les deux, n'allait pas décider de lui fausser compagnie. Le fait qu'ils soient encore là prouvait qu'ils resteraient jusqu'à la fin. Il pouvait encore avoir besoin d'eux.
Malek venait de se réveiller en sursaut, et son expression était orageuse. Le Banni sourit; il ne se rappelait pas avoir jamais vu Malek arborer une expression avenante. Shareen avait visiblement dormi, elle aussi, mais elle lui dédia un sourire assoupi en se frottant les yeux. Elle était plutôt mignonne ainsi, constata Rekk avec un détachement clinique.
Lorsqu'il aperçut Laath, toutefois, son expression se raffermit.
"Alors c'est donc lui, le fameux témoin ? Il ne paie pas de mine"
"Attends un peu ce qu'il va te raconter, Rekk. Je pense que tu vas apprendre un certain nombre de choses? amusantes"
Il était évident qu'il allait devoir attendre un moment avant de pouvoir obtenir ces précieuses informations. Laath le regardait avec des yeux exorbités, la respiration précipitée, comme si un fantôme venait brusquement de se matérialiser devant lui. En un sens, ce devait être ça, réalisa Rekk. Dani avait utilisé son vrai nom. Le môme devait donc être au courant. Pas étonnant qu'il réagisse ainsi. Malek et Shareen avaient été tout aussi choqués, au début. Rekk s'accroupit et tenta de sourire. Le résultat n'était pas brillant, au vu des yeux choqués du garçon.
"Je ne vais pas te manger, petit. Mais j'ai besoin de savoir comment ma fille est morte. Je suppose que tu peux comprendre ça ?" Laath hocha la tête. "Ce n'est pas toi qui l'a tuée, n'est-ce pas ?" Laath hocha la tête. "Donc tu n'as rien à craindre de moi. Je t'écoute."
 
Il n'avait jamais été vraiment doué pour mettre les gens à l'aise, et cette fois-ci ne se révéla pas particulièrement plus fructueuse. Seule la douceur et la compréhension de Dani lui firent progressivement se détendre. Les mâchoires serrées, Laath posa la seule question qui lui venait à l'esprit.
"Vous êtes vraiment? le?" il se lécha les lèvres "boucher ?"
"Je suis surtout le père de Deria" grommela Rekk, luttant contre le désir d'étrangler son interlocuteur. "Et je? je serais ravi que tu m'expliques ce que tu sais."
Laath finit par hocher la tête. Shareen lui fit un sourire encourageant.
Il entreprit de raconter de nouveau son histoire, non sans quelques interruptions de la part de Dani. C'était une chose d'exposer la double vie de Deria à des amis de la jeune fille, c'en était une autre que d'expliquer les mêmes détails directement au père. Shareen constata avec amusement qu'il laissait de côté un certain nombre de détails, tentant pour une fois d'aller à l'essentiel.
Rekk n'avait pas l'air particulièrement amusé, pour sa part. Au fur et à mesure de la narration, son expression s'assombrissait de plus en plus. Il lâcha une exclamation étouffée lorsque Laath révéla, après avoir tenté plusieurs fois de contourner ces détails, que Deria occupait son temps à cambrioler. Mais ce ne fut rien comparé à sa réaction lorsque Laath laissa glisser qu'il était son petit ami.
"Quoi ?" rugit-il soudain, interrompant le récit pour attraper le pauvre Laath au collet. "Tu peux me répéter ce que tu viens de dire ?"
A moitié étouffé, le jeune homme était bien en peine de pouvoir articuler quoi que ce soit. Ce fut Dani qui vint à sa rescousse, essayant de desserrer l'étreinte du Banni.
"Arrête ça, Rekk, le pauvret ! Tu vas l'étouffer, si tu continues comme ça !"
"Il ne mérite pas mieux !" rugit Rekk. "Tu l'as entendu ? Il a touché ma fille, il a osé touché ma fille ! Ce fils de catin a?"
Il ne put terminer. Sans une hésitation, Dani venait de le gifler de toutes ses forces. De saisissement, il recula d'un pas et lâcha Laath. Le jeune garçon glissa sur le sol, suffoquant.
"Tu as toujours eu moins de bon sens que de poils sur le menton, Rekk, et tu as toujours été particulièrement glabre ! Mais là, je dois dire que c'est la sardine qui fait craquer le filet ! Qu'est-ce que tu essayais de faire à ce pauvre gamin, l'étrangler ? Tu ne crois pas qu'elle était assez âgée pour vivre sa vie, ta fille ?"
"Elle avait dix-sept ans !" protesta Rekk, touchant sa joue d'un doigt incrédule.
"C'est déjà bien assez vieux, crois-en ma vieille expérience" ricana Dani. "Et puis, avoue que tu devais t'attendre un peu à ce que quelque chose comme ça arrive, non ? Sinon, pourquoi l'avoir envoyée à la capitale au lieu de la garder près de toi, dans ton château perdu ?"
"Je voulais qu'elle rencontre du monde, qu'elle se fasse des amis" fit Rekk. "Pas qu'elle couche avec le premier crétin venu ! Mais regarde-le, comment est-ce qu'elle a pu aimer? ça ?"
"Merci pour moi" fit Laath avec l'ironie du désespoir. Le Boucher fit volte-face pour le confronter.
"Je n'ai rien contre toi, gamin, mais regarde-toi ! Ce n'est pas ça qu'il aurait fallu à Deria, pas ça du tout ! Il lui aurait fallu? Il lui aurait fallu?"
"Il lui aurait fallu quoi ? Dis-nous, Rekk, ce qui lui aurait fallu. Tu peux me regarder dans les yeux et me dire que tu aurais accepté qu'un garçon, quel qu'il soit, s'approche d'elle ? Même s'il était grand, beau, fort, intelligent, riche, gentil, patient, doux ?"
"Merci pour moi" répéta Laath. Il avait maintenant un demi-sourire aux lèvres, comme s'il trouvait la situation comique. Shareen le regarda avec surprise, puis éclata de rire. Le jeune homme semblait être plus vif d'esprit qu'il n'avait paru au premier abord.
"Tu n'aurais pas accepté son choix, quel qu'il soit, reconnais-le ! Alors, n'étrangle pas ce pauvre garçon sous le prétexte qu'il ne correspond pas à l'image que tu faisais du prince charmant." Dani ricana. "D'autant plus que je ne suis pas sûr qu'il ait eu beaucoup de choix en la matière. Si Deria avait ne serait-ce que le dixième de ton caractère, l'opinion de Laath ne devait pas beaucoup rentrer en ligne de compte si elle le trouvait à son goût"
"Eh bien, merci de nouveau" fit Laath. "Je peux partir, si vous voulez"
"Non" grommela Rekk. Pour la première fois, il paraissait faire son âge. "Je suis désolé, mon garçon. Tu as raison. Continue ton histoire" Il regarda de nouveau le jeune homme, et ses yeux étaient emplis d'incrédulité. "Mais quand même?"
 
Bientôt, cependant, la liaison entre Laath et Deria n'était plus que le cadet des soucis de Rekk. Il poussa une ou deux exclamations durant le récit, et ses sourcils s'agitaient furieusement. Lorsque Laath eut terminé son récit, il y eut un grand silence.
"Cet homme? celui qui portait la cape? tu pourrais me le décrire ?"
Laath secoua la tête.
"Je ne l'ai pas bien vu. Mais je reconnaîtrais sa cape si je la voyais. Elle était vraiment particulière. Il n'y a aucun doute là-dessus."
"Mmmh. Je vois. Eh bien, je dois dire que j'ai bien un suspect en tête" grimaça Rekk. "Et tu vas pouvoir m'aider."
"Moi ?" Laath écarquilla les yeux.
"Oui, toi. Nous allons au palais. Tu me diras si les gens que je te présente te disent quelque chose." Il haussa les épaules. "De toute façon, il fallait que j'y retourne. L'Empereur est mourant, ou quelque chose comme ça."
Il y eut un silence, puis tous se mirent à parler en même temps.
"Mourant ?" balbutièrent-ils.
"Oui. Du moins, c'est ce qu'il semble. Mandonius croit que c'est l'excitation de la chasse qui? eh bien, quoi ?"
Laath était devenu blanc comme un linge.
"Le gouverneur?
"Eh bien, quoi, le gouverneur ? Mandonius, oui?"
Malek se leva.
"Il y a quelques petites choses que Laath nous a révélées concernant Mandonius que vous devriez savoir."

n°2085280
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 19-02-2004 à 13:08:05  profilanswer
 

Citation :

Voici le XXI.  
Mais je vous préviens, le premier tome s'arrête au 24... donc ça ne laisse pas beaucoup d'histoire, bande de morphales. J'ai peur que ce post ne sombre dans les tréfonds du forum    


 
 
Mais non il ne disparaîtra pas... :)  
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
... puisque tu y mettras le second tome dans la foulée :whistle:

n°2085473
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 19-02-2004 à 13:55:14  profilanswer
 

je viens de lire l'intro et le premier chapitre, j'aime bien :)
 
juste le "c'est ton choix" dans le chapitre 1 qui fait assez anachronisme, a par ca rien a redire, c'est plutot bien écrit !
 
J'attaque la suite ;)


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2085571
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 19-02-2004 à 14:10:34  profilanswer
 

(j'en suis qu'a la page 1, je viens de finir le deuxieme chapitre :o )
 
si tu veux un petit coup de main pour une relecture / correction y'a pas de pb, et si tu trouves que je suis saoulant avec mes petites remarques j'arrete aussi .
 
dans le chapitre 2 :
 
Semos sentit une vague irritation monter en lui. Revor méritait d'être puni, mais c'était à lui qu'incombait de s'en occuper, pas à Gundron ! Comment l'homme osait-il outrepasser ainsi ses droits ? Fermement, Semos étouffa sa colère, et s'efforça de présenter un visage impassif.
 
je ne sais pas si ca se dit impassif, je ne l'ai jamais lu :??: il me semble que l'expression est "un visage impassible" ?


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2086851
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 19-02-2004 à 17:36:10  profilanswer
 

Grenouille Bleue a écrit :

Voilà le chapitre XIII !
 
Une petite question tout de même, parce que j'ai du mal à m'en rendre compte: qui est-ce qui lit régulièrement ? Panem, Taftonf, Punkrod et Damrod ?
 


 
je rattrape mon retard :o
 
mais la je vais faire une pause, 12 chapitres d'un coup j'ai les yeux explosés .
 
Je ne suis pas critique littéraire, mais j'aime bien les JDR. Pas trop les AD&D , c'est beaucoup trop souvent du hack&slash a mon gout .Et pour une fois, un roman de fantasy sauce AD&D avec une intrigue plutot sympa, j'aime bien :)


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2087394
Gounok
Faux traître
Posté le 19-02-2004 à 19:15:16  profilanswer
 

Panem a écrit :

[quote]
Mais non il ne disparaîtra pas... :)  
... puisque tu y mettras le second tome dans la foulée :whistle:  


En vérité, je vous le dis...
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
... Je plussoie :bounce:  
 

Gurumeditation a écrit :


Je ne suis pas critique littéraire, mais j'aime bien les JDR. Pas trop les AD&D , c'est beaucoup trop souvent du hack&slash a mon gout .Et pour une fois, un roman de fantasy sauce AD&D avec une intrigue plutot sympa, j'aime bien :)


Ca résume bien mon point de vue aussi (et je suis d'accord avec ta signature :hello: )

n°2087734
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 19-02-2004 à 19:58:34  profilanswer
 

une petite remarque vite fait:  c'est certainement un fait tres courant, mais on peut lire plusieurs fois par chapitre "il crache sur le sol" . Ca fait un peu remplissage a mon gout :/


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2088523
Invictus
En abysse
Posté le 19-02-2004 à 21:52:52  profilanswer
 

Je suis d'accord avec Gurumeditation et j'ajouterai aussi que j'ai retrouvé pas mal de "sourire sans humour"   :sweat:  
Mais ça reste quand meme tres bien  :whistle:  
 
Pourquoi la suite arrive pas ?!!  [:fight]


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"Mon verre est petit mais je bois dans mon verre, je hais plus que la mort l'état de plagiaire" -- Bossuet le gosu
n°2088857
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 19-02-2004 à 22:29:04  profilanswer
 

Ce? ce Rekk, dont vous parlez ? Qui est-ce, exactement ?"  
Malek se tourna vers lui. Sa grimace se changea en un sourire jusqu'aux oreilles, et sa voix était chargée de sarcasme.  
"C'est vrai que vous n'avez pas été présentés. Laath, il faudra absolument que tu rencontres Rekk. Le Boucher, le Maudit, le Démon Cornu? revenu d'entre les morts pour devenir ton beau-père."
 
ca, j'adore :D (oui bon, je joues du chaotique neutre ou du loyal mauvais, et alors :o )


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2088950
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 19-02-2004 à 22:43:42  profilanswer
 

euhhh sinon, tu postes la suite ou je vais la lire sur l'autre forum ? [:titprem]
 


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2091304
PunkRod
Digital Mohawk
Posté le 20-02-2004 à 09:36:44  profilanswer
 

"l'autre forum" ??
la suite serait déjà lisible ailleurs ??? ;)


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Assistants SWGOH
n°2091342
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 20-02-2004 à 09:47:19  profilanswer
 

chcrois que c'est pas exactement le même texte. Et pi on veut la suite ICI et MAINTENANT d'abord !!!  
 
:cry: allez quoi sois pas vache GB ...

n°2091465
Grenouille​ Bleue
Batracien Azuré
Posté le 20-02-2004 à 10:22:35  profilanswer
 

Je suis victime d'un chantage innommable, c'est absolument honteux  :D  
 
Mais bon, merci pour les commentaires ;) C'est clair qu'un certain nombre de tics nerveux se retrouvent dans tout le récit. En particulier le tripotage d'épée, le crachat sur le sol, le haussement ou froncement de sourcil, le muscle qui joue dans la mâchoire, le haussement d'épaule...
 
_____________________________________
 
La chambre de Théorocle était à l'extrémité de l'aile nord du palais, au fond d'un couloir fastueux. Deux hommes d'armes y veillaient en permanence et surveillaient avec un ?il d'aigle les visites et les déplacements des domestiques. Depuis que la peur des attentats et des assassinats avait saisi le palais, la garde avait doublé. Cela faisait de l'aile nordun endroit calme et tranquille, donc ennuyeux.  
Le jeune prince y passait le moins de temps possible. C'était ici qu'il dormait, et cela s'arrêtait là. Personne n'aurait pu imaginer le trouver ici durant la journée. Au vu de ses virées nocturnes, personne n'allait non plus frapper à la porte pendant la soirée. Ce n'était que bien après minuit qu'il titubait généralement le long des escaliers avant de se faire porter sur les derniers mètres, et qu'il s'effondrait tout habillé sur son lit. Ces derniers temps, il n'était pas non plus rare qu'il passe la nuit ailleurs, au grand désespoir des soldats chargés de sa protection.
Pourtant, la main gantée de Gundron n'hésita pas un instant avant de s'emparer du heurtoir. Il n'était pas là par hasard, et cela ne le surprit donc pas d'entendre une voix étouffée lui répondre. La porte s'ouvrit. Le Capitaine mit un genou au sol.
"Me voici, héritier."
Théorocle se tenait dans l'embrasure. Son visage était un mélange incroyable de frayeur, de détermination et de regret. Il portait toujours ses habits de chasse, et la poussière et la boue maculaient ses bottes de cavalier. Il enjoignit rapidement au borgne de se relever, et referma la porte derrière lui.
"Alors ?" demanda-t-il.
Gundron grimaça, autant à cause des nouvelles qu'il apportait qu'en raison de l'ameublement de la pièce. Si l'on disait que la décoration d'un endroit reflétait les préoccupations de son propriétaire, alors le prince devait être sérieusement obsédé par les filles et la guerre. Des peintures provocantes ornaient trois des quatre murs, alors que le dernier supportait un râtelier d'armes encombré d'un bric-à-brac hétéroclite des différents cadeaux qu'on avait pu lui faire depuis sa première épée. Il y avait une lance, une arbalète, des dizaines de couteaux et de dagues, une hache finement décorée, une masse d'armes entrelacé dans les boules d'un fléau, et tellement d'autres. Tout ce capharanüm débordait joyeusement sur la table et allait jusqu'à se répandre sur le sol. Gundron prit bien garde à ne pas marcher sur quelque chose de pointu en se frayant un chemin jusqu'au mur. Il pinça les lèvres.
"Alors l'Empereur est au plus mal, mais Mandonius se porte comme un charme. Il n'y a pas besoin d'être devin pour comprendre ce que vous avez fait. Héritier, je ne sais pas si?"
"Je ne te demande pas de savoir" grommela Théorocle. Ses yeux boudeurs ne correspondaient pas avec ses paroles tranchantes. "J'ai agi comme je l'ai jugé bon. Mais toi, Gundron, est-ce que tu m'es toujours fidèle ?"
"Sur ma vie." Le borgne haussa les épaules, comme si un régicide n'avait rien d'extraordinaire. Il en fallait beaucoup pour le déstabiliser. "Mais je ne suis pas sûr que vous avez servi vos intérêts au mieux. Si jamais l'Empereur venait à mourir, Mandonius deviendrait régent. Vous n'êtes pas encore en âge de régner. Sans aucun doute, il cherchera à vous manipuler ou, pire, vous faire disparaître !"
Les lèvres de Théorocle se compressèrent.
"Je suis l'Empereur ! Personne ne peut me donner d'ordres, et personne ne peut me commander ! Je ferai jeter Mandonius aux oubliettes dès que mon père sera mort. On verra s'il pourra protester, alors."
Gundron grimaça malgré lui.
"Faites attention à vos paroles, héritier. Des oreilles pourraient nous entendre, et Sa Grâce Marcus est toujours en vie. Vous pourriez vous voir?"
"? me voir quoi ? Je n'ai rien fait d'autre que me défendre !" gronda le prince. "Je ne voulais pas faire ça, mais il m'y a obligé ! Il m'aurait vendu sans plus d'hésitation pour garder son précieux Rekk?" Son visage s'assombrit encore. "Sais-tu que Semos est mort de sa main ? Tué dans un duel. Les gens disent que l'épée a glissé, mais je ne peux pas le croire. Et Marcus n'aurait rien dit. Comment aurais-je pu lui fa ire confiance pour me protéger ?"
"Vous avez raison" admit Gundron, autant pour stopper le flot de paroles que pour s'accorder le temps de réfléchir.  
Ses pensées tourbillonnaient furieusement. Il n'avait absolument pas prévu ce qu'il venait de se passer, et s'adapter demandait un effort colossal. Seuls son contrôle de soi parfait et l'effroi qu'inspirait son ?il lui permettaient de ne pas trahir ses émotions alors qu'il s'adossait au mur.
Cela lui apprendrait à utiliser un outil aussi peu fiable qu'un Prince. Il avait cru que Théorocle se laisserait manipuler facilement et, en un sens, il avait eu raison. L'héritier avait avalé toutes ses demi-vérités sans jamais sourciller. Il n'avait pas fallu beaucoup d'efforts pour le convaincre de la menace qui pesait sur lui si jamais Mandonius révélait ce qu'il savait à Rekk.
Mais tuer l'Empereur ? Ca ne serait jamais venu à l'idée de Gundron et, maintenant, il se sentait complètement désarmé. Il n'était pas noble. Il n'était pas riche. Il n'était à ce poste que par la volonté de Bel et, plus récemment, de Marcus. Seuls ses talents d'escrimeur le sauvaient. Comment ferait-il si Mandonius accédait aussi tôt au trône de Régent ? Aaah, quel stupide gamin. Il le forçait à revoir totalement tous ses plans et toute sa stratégie.
L'héritier s'assit lourdement sur son lit et prit sa tête entre ses mains. Pendant un instant, rien qu'un instant, il paraissait son âge, un enfant effrayé qui venait de faire une bêtise et s'attendait à ce qu'on vienne le lui reprocher. Mais cette fois-ci, ce n'était pas une bêtise aussi légère que les autres. Les différents ducs de l'Empire n'auraient de cesse que de découvrir le coupable, et Mandonius les encouragerait certainement dans la direction qui les intéressait. Ce serait une catastrophe.
Si Théorocle tombait, Gundron aussi. Si Théorocle accédait au trône, par contre?
Un demi-sourire joua sur les lèvres du borgne alors qu'il se levait. Théorocle poussa un petit gémissement, complètement incongru dans la bouche d'un futur empereur.
"Ne me laisse pas, Gundron ! Je ne veux pas rester seul en ce moment ! Je ne sais pas ce qu'il se passe en bas. Peut-être qu'ils se doutent de quelque chose ? Je ne veux pas que tu me trahisses, Gundron !"
Le borgne soupira.
"Que voulez-vous que je fasse, héritier ? C'est moi qui vous ai fourni la fiole. Si jamais je vous dénonçais, vous n'hésiteriez pas à le dire. Non, vous devez me faire confiance. Moi seul ne vous trahirai pas, puisque je suis pieds et poings liés."
Theorocle resta un instant silencieux.
"J'aurais préféré une loyauté basée sur le respect" finit-il par murmurer.
"Croyez-moi, héritier. Ce n'est pas celle qui dure le plus longtemps."
Ils se regardèrent un moment, puis le Prince hocha gravement la tête.
"Je comprends ce que tu veux dire. Très bien, alors. Je vais devoir te faire confiance jusqu'au bout. Qu'est-ce que tu veux que nous fassions ?"
"Eh bien? empêcher Mandonius de devenir gouverneur serait une bonne idée" fit Gundron, vaguement amusé. "Ce serait une très bonne idée."
"Alors fais-le. Attends. Attends."
Le jeune prince semblait tout d'un coup inspiré. Ses sourcils s'étaient haussés, et un pli excité barrait son front. Il se jeta à genoux contre un des coffres, fouillant avec attention les nombreux papiers qui l'encombraient. Il y avait des livres, des parchemins, plusieurs plumes d'oie et des bouteilles d'encre qui devaient leur survie à un véritable miracle.
Theorocle émergea triomphalement avec un nécessaire à écrire et son sceau personnel. Il posa la feuille contre son bureau et balaya quelques armes de la main pour s'y frayer une place. Dans une cacophonie épouvantable, une hallebarde en équilibre instable vint emporter une partie du râtelier. Un garde vint passer la tête par la porte.
"Tout va bien, ici ?"
"Un simple accident" grinça Gundron. "File à ton poste !"
Le garde s'inclina avant de se retirer, et le borgne retourna son attention vers le jeune prince. Il était fortement occupé à écrire quelques choses en grandes lettres malhabiles sur sa feuille de parchemin. Visiblement, certains mots lui demandaient de la réflexion et des efforts, à la manière dont il mordillait le haut de sa plume.  
Il tendit finalement le résultat au capitaine. Son air satisfait le faisait rayonner.
"Voilà ! Comme ça, il n'y aura aucun doute !"
Gundron plissa son ?il unique. Il n'avait jamais été très bon lecteur, même avec ses deux yeux. Maintenant, avec l'âge qui s'en mêlait et la lumière d'une seule chandelle, il renonça rapidement.
"Qu'est-ce que c'est ?"
"Si mon père a donné une telle note à Rekk, alors je ne peux que faire la même chose !" Theorocle se tint plus droit, le sourire aux lèvres. "Grâce à mon sceau personnel, tu pourras peut-être agir plus facilement. N'hésite pas à faire ce qui doit être fait ? mais je veux pouvoir monter sur le trône sans Mandonius, une fois que mon père sera mort. Tiens !"
Il prit le temps de faire chauffer la cire, puis apposa son sceau. Gundron n'aurait jamais espéré autant. Le papier n'avait aucune valeur réelle puisque le prince n'avait aucun pouvoir ? mais il trouverait certainement un moyen de s'en servir. Un jour.
Il s'inclina profondément.
"Je dois vous laisser, héritier. Je pense savoir comment vous aider. Ne vous inquiétez pas. Mandonius ne vous fera aucun mal tant que je vivrai."
Le prince sourit. Il était presque touchant, ainsi.
"Dans ce cas? je te souhaite une longue vie, Gundron !"  
 
 
Mandonius avançait dans un brouillard écarlate. Le sang battait à ses tempes avec un bruit sourd, Tdum, Tdum, comme un tambour de guerre qui se réverbérait sur les falaises d'une montagne. Ses bottes résonnaient en contrepoint sur le tapis épais, un son mat et étouffé.
Ses dents étaient serrées; il s'était mordu la lèvre inférieure jusqu'au sang. Une goutte vermeil y perlait sans qu'il ait pris la peine de l'essuyer.  
A chaque détour d'un couloir, des courtisans empressés, inquiets et excités venaient s'agglutiner autour de lui, les yeux pleins de question. L'empereur allait-il bien ? Ses jours n'étaient-ils pas en danger ? Qu'allait-il se passer désormais ? Le gouverneur aurait bien aimé le savoir lui-même. Son ignorance le minait de l'intérieur. Mandonius n'aimait pas ce qu'il n'avait pas prévu.
"L'Empereur est en parfaite santé" finit-il par aboyer, exaspéré. "Rentrez chez vous, et laissez-moi passer. Place, par les neuf enfers ! Place !"
Les nobles présents le regardèrent avec incrédulité, puis s'égaillèrent en un grand froufou de dentelle. Sans aucun doute, ils iraient colporter de nouvelles rumeurs inquiétantes sur la santé de Marcus. Si le gouverneur était aussi énervé, cela devait vouloir dire que tout cela était vrai.
Mandonius porta sa main à ses tempes, et les massa doucement. Il commençait à ressentir le début d'une sourde migraine. Lorsqu'il arriva enfin devant la porte de la chambre royale, sa mauvaise humeur avait empiré. Les deux gardes qui bloquaient l'entrée reculèrent d'un pas devant son visage furieux. L'un d'eux trouva néanmoins le courage de relever sa lance.
"Gouverneur?" balbutia-t-il. "Vous ne pouvez rentrer tout de suite. Les apothicaires impériaux sont avec l'Empereur."
"Raison de plus pour que je rentre avant qu'ils ne me le saignent !"
Mandonius écarta d'une main l'arme mollement tendue devant lui puis poussa la porte. Les lourds vantaux résistèrent un instant, avant de s'ouvrir en grand. Sans prêter la moindre attention aux expressions apeurées des deux gardes, il s'introduisit dans la chambre.
Ce qui le frappa en premier, ce fut l'odeur. Il avait passé ses jeunes années sur les champs de bataille. En tant que fils d'une grande maison, son rang de commandant l'avait protégé des combats les plus violents et des affrontements les plus meurtriers ? mais ça ne l'avait pas empêché de voir le résultat final. Des corps entassés pêle-mêle dans une orgie de tripes et de boyaux. L'odeur d'excréments, de chair brûlée et de sang lourd l'avait suivie toute sa vie. C'était la puanteur de la gangrène, de la chair corrompue et de l'agonie à vif. C'était le parfum qui émanait maintenant de l'Empereur Marcus.
Sa seconde impression fut visuelle. La chambre impériale était très grande, près de vingt pieds sur trente, mais les dix médecins présents s'étaient agglutinés autour du lit à baldaquin où reposait l'empereur, donnant l'impression de mouches sur une jarre de miel. L'un des honorables praticiens se retourna en entendant la porte s'ouvrir, et sa bouche s'ouvrit sur une grimace incrédule.
"Que voulez-vous ? Qui êtes-vous ? Je vous avais dit que je ne voulais voir personne !"
En deux pas, Mandonius avait franchi la distance qui les séparait. Sa main s'accrocha au collet de l'apothicaire, et il attira son visage contre le sien.
"Je ne suis pas personne, charlatan. Je suis le gouverneur Mandonius, et j'aimerais savoir à quoi rime tout ça."
L'homme avait perdu son air de défi en même temps que l'air dans ses poumons. Il prit une grande inspiration, rendue difficile par la poigne de fer du gouverneur.
"Tout? quoi ?" balbutia-t-il finalement.
"J'ai laissé l'Empereur il y a, quoi, trois heures ? Il était en parfaite santé. Un peu fatigué des rigueurs de la chasse, certainement. Mais il n'était pas blessé. Alors pouvez-vous m'expliquer ce que vous faites tous ici ? Et quelle est donc cette odeur ?"
L'homme temporisa, levant les bras en signe de défense.
"Je peux vous assurer que l'Empereur va aussi bien que possible compte tenu des circonstances. Ce n'est probablement rien, et?"
Mandonius le secoua.
"Rien ? Je sais reconnaître une odeur de putréfaction quand j'en vois une ! Que s'est-il passé, enfin ?"
"Taisez-vous, par le Sang ! L'Empereur est conscient, il vous entend !" chuchota l'homme.
Le gouverneur relâcha le médecin brutalement, et se tourna vers le lit. Les autres praticiens le regardaient, médusés. Dans l'espace qu'ils avaient dégagé, Mandonius pouvait désormais voir le lit. Et sur ce lit?
"Oh, non?" balbutia-t-il.
Trois couvertures épaisses recouvraient l'Empereur jusqu'aux épaules, mais cela ne l'empêchait pas de grelotter de froid. Ses yeux avaient sombré dans leurs orbites, et une flamme démoniaque paraissait les avoir envahis alors qu'il clignait désespérement des paupières pour essayer de focaliser son attention. Sa peau était tendue sur son crâne et s'affaissait autour de ses joues en plis informes et jaunes, si jaunes. L'odeur à elle seule n'avait rien auguré de bon, mais la couleur ne faisait que confirmer ses pires craintes.
Pourtant, l'Empereur était bien conscient. C'était peut-être ça, le pire. Cette intelligence, cette compréhension qui brûlait encore en lui alors qu'il vrillait son regard dans celui de Mandonius.
"Ca ne va pas du tout" murmura-t-il, la voix ténue.
Le gouverneur mit un genou en terre; ses pensées se bousculaient sans qu'il parvienne à en articuler une seule. Il foudroya du regard les médecins, qui reculèrent de quelques pas. Finalement, la question principale lui monta aux lèvres.
"Du poison ?"
Le monarque hocha la tête. Ce simple effort parut l'épuiser.
"Probablement." Il montra les apothicaires du doigt. "Ces abrutis refusent de me révéler quoi que ce soit, mais ta réaction ne me trompe pas. Ca n'est pas beau à voir, eh ?"
"Pas vraiment. Mais un changement si soudain? savez-vous quand et comment vous avez pu vous laisser empoisonner comme ça ?"
Il y eut un silence. Visiblement, parler demandait beaucoup d'efforts à Marcus.
"Je ne vois pas? vraiment pas. Il faut mener? une enquête. Voir les cuisines. Le repas d'hier ?"
Mandonius acquiesça.
"Je m'en occuperai. Et aujourd'hui ? Vous n'avez rien bu ? Rien mangé ?"
"Nous étions? à la chasse" balbutia Marcus. "Rien?"
"Vraiment rien ? Je crois me rappeler que vous avez bu du vin plusieurs fois, n'est-ce pas ? Est-ce que le poison aurait pu être versé dedans ?"
Il n'y eut pas de réponse. L'Empereur avait posé sa tête sur les coussins, et sa respiration était laborieuse. Mandonius se redressa. Il se sentait curieusement exalté alors qu'il se tournait vers les médecins.
"Votre diagnostic ? Ses chances ?"
"Faibles, Gouverneur. Très faibles. Nous avons réussi à identifier le poison, du moins j'en suis presque sûr. Les symptômes, enfin, l'absence de symptômes, me font penser à?"
"?de la racine de Khrol" coupa un autre. "Ca ne peut être que ça. Rien d'autre ne pourrait provoquer une putrescence aussi rapide. C'est fascin?" Il s'interrompit et porta les mains à sa bouche en réalisant ce qu'il avait failli dire.
Mandonius serra les dents et ses mains se crispèrent sur son manteau. Il n'avait pas besoin de simuler l'agitation qu'il ressentait.
"Soignez-le, sur votre vie. L'Empereur ne doit pas mourir, vous comprenez ?"
"Nous faisons de notre mieux" protesta le premier.
"? ce qui ne m'a pas l'air d'être très impressionnant" grinça Mandonius. "Je vous laisse avec lui. Faites-moi appeler si son état change."
Il sortit à grands pas, accompagné des affirmations des apothicaires comme quoi ils feraient exactement comme il le leur avait demandé. Un sourire froid joua sur ses lèvres. Cette obséquiosité n'était pas étonnante: l'Empereur mort et son fils mineur, ce serait bientôt lui le véritable maître du royaume.
Il sortit de la pièce et salua distraitement les gardes avant de s'engouffrer dans le premier couloir venu. Une fois hors de leur champ de vision, il accéléra le pas. Même dans ses rêves les plus fous, il n'aurait pu imaginer un tel bonheur ! L'Empereur, empoisonné ? Et sans qu'on puisse remonter à lui d'une quelconque manière que ce soit, puisque, ironiquement, il n'y était pour rien.
Son sourire s'élargit. Seule la pensée qu'on pouvait le voir dans un état de liesse bien déplacé le retint d'éclater de rire devant l'ironie de la chose. Cela faisait plus d'une année qu'il avait commencé à porter des coups à l'Empereur. Plus d'un an qu'il encourageait le réseau de rebelles au sein même de la capitale, qu'il leur fournissait de l'or, des armes et des informations pour parvenir à tendre des embuscades à Marcus.  
Personne ne savait qui tirait les ficelles, bien entendu. Il avait pris soin de se protéger au maximum en passant par l'intermédiaire d'une dizaine de nobles mineurs acquis à sa cause, et d'un réseau d'informateurs aussi dense qu'il avait pu. Mais une telle nécessité de secret diminuait forcément l'efficacité de ses manigances. Sans compter ce Gundron qui lui mettait des bâtons dans les roues. Plus d'une fois, le Capitaine de la Garde l'avait obligé à changer ses plans à la dernière minute. Tout cela avait été incroyablement brouillon.
Et voilà que le destin lui souriait enfin. Qui que soit l'empoisonneur, il méritait des remerciements fervents. Mandonius se rappelait vaguement que l'Empereur s'était emparé d'une flasque de vin, juste après avoir tué le sanglier. Se pouvait-il que le prince lui-même? ?
Il interrompit le fil de ses réflexions alors qu'il sortait du palais. En tout état de cause, il y avait encore énormément de choses à faire. Cette mort n'avait pas été préparée. Il devait prévenir ses appuis, avertir les soldats qui lui étaient loyaux, et faire discrètement pression sur les maisons les plus réticentes. Il fallait que plus aucun doute ne subsiste lorsque l'Empereur pousserait son dernier soupir. Mandonius serait nommé régent, jusqu'à la majorité de Theorocle.
Il pouvait se passer beaucoup de choses, en trois ans.
Son sourire s'effrita lorsqu'il aperçut les soldats dans la cour. Ils étaient nombreux. Beaucoup trop nombreux.
Près de deux cent guerriers portant le tabard de la garde de Musheim discutaient en petits groupes dans l'enceinte extérieure du palais. Une cinquantaine d'autres bloquaient l'entrée des jardins, et ne laissaient passer les nobles qu'au compte-goutte. Vêtus d'une chemise de mailles qui leur protégeait également les bras, d'un casque cônique et de gantelets de plaque, ils étaient habillés pour la guerre. La lune se réverbérait sensuellement sur la pointe d'innombrables lances.
"Qu'est-ce que c'est que ça ?" murmura-t-il, atterré.
"Tiens, Gouverneur ! Si je m'attendais à vous trouver ici en cette heure de confusion? Je vois que les nouvelles vont vite !"
Mandonius fit brutalement volte-face, pour se retrouver nez-à-nez avec la personne qu'il avait le moins envie de rencontre en ce moment. Même en pleine nuit, l'?il ravagé de Gundron le rendait hideux.
"Capitaine ! Puis-je savoir ce que tous ces hommes font ici ?"
Gundron s'inclina en une parodie de révérence. Ses dents brillaient sous la pâle lueur, les canines acérées d'un loup-garou. Mandonius s'attendait presque à le voir renverser la tête en arrière et à hurler à la lune.
"Avec toutes les rumeurs contradictoires que l'on entend, j'ai jugé prudent de ramener mes gardes dans l'enceinte du palais. On ne sait jamais ce que les gens peuvent tenter dans un moment de folie, en profitant de la faiblesse de l'Empereur." De nouveau, il dévoila ses dents blanches. "Et puis, avec tous ces attentats inexpliqués contre Sa Grâce, on n'est jamais trop prudents."
Mandonius frémit. Il n'avait pas prévu que le capitaine réagirait aussi vite. En mettant ainsi ses soldats en place, il faisait une démonstration de force sans équivoque. Le gouverneur pinça les lèvres.
"Je vois. C'est une initiative louable. Continuez à surveiller les environs, dans ce cas. Pour ma part, je vais vous laisser quelques instants. J'ai à?"
"J'ai bien peur que ce ne soit pas possible, Gouverneur" sussura Gundron en se penchant en avant. "Voyez-vous, les portes du palais sont désormais bloquées par mes hommes. Plus personne ne doit pouvoir en sortir. Raisons de sécurité, encore une fois."
Mandonius se redressa de toute sa taille.
"J'espère que vous plaisantez !" fit-il, glacial. "Laissez-moi passer, Gundron, si vous ne voulez pas vous faire accuser de trahison et jeter aux fers. Ecartez-vous, maintenant."
Le capitaine secoua la tête.
"Je crois que vous n'avez pas vraiment compris, Gouverneur. Nous faisons face à une crise sans précédent dans l'histoire de l'Empire. Tant que tous les responsables des différentes maisons ne seront pas là, je ne peux laisser partir qui que ce soit." Il sourit. "Rappelez-vous, Gouverneur. Dans les affaires qui touchent à la sécurité directe de l'Empire, je ne saurais prendre d'ordres de quelqu'un d'autre que la famille impériale."
"Mais l'Empereur est inconscient !"
"Précisément. Vous comprenez donc la délicatesse de ma position."
Mandonius jeta un regard autour de lui. Il y avait un air d'anticipation excitée sur la plupart des soldats. Gundron avait joué trop vite. Sa position n'était pas délicate, bien au contraire. L'inconscience de l'Empereur lui permettait d'agir comme bon lui semblait. Si jamais Marcus avait été conscient, Mandonius aurait pu s'en sortir. Si l'Empereur avait péri, il aurait pu se faire nommer régent. Mais dans l'état actuel des choses, il était absolument impuissant à faire reculer ces deux cent hommes.
"Je suppose que le prince vous fait confiance dans cette affaire ?" demanda-t-il d'une voix morne.
"L'héritier me fait cet honneur, effectivement" Gundron toucha doucement le manche de son épée. "Je vous suggère fortement de rentrer dans le palais, et de ne plus le quitter. Les choses risquent de devenir difficiles en dehors, si jamais les rebelles attaquent. Vous ne voudriez pas vous retrouver au milieu d'une bataille rangée, n'est-ce pas ? Un accident est si vite arrivé."
"Je? vois."
Mandonius pivota sur ses talons et retourna dans la sécurité des hauts murs de pierre taillée. Il n'y avait rien d'autre à faire. Gundron avait toutes les cartes en main, pour l'instant, et se positionnait de manière à ce que le gouverneur ne puisse pas faire appel à ses propres appuis. C'était finement joué? mais cela voulait également dire qu'il avait dû prévoir l'événement à l'avance. Le gouverneur se mordit la lèvre. De près ou de loin, Gundron devait être partie liée avec l'administration de poison. Il avait ainsi pu réunir ses troupes pendant la soirée et les mettre en place dès l'annonce rendue publique. Rien d'autre ne pouvait avoir de sens.  
Pour la première fois depuis longtemps, Mandonius se prit à espérer que l'Empereur survive.  

n°2091587
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 20-02-2004 à 10:49:11  profilanswer
 

[:le repenti] http://tlecaudey.free.fr/img/grenouillebleue.jpg
 
 

Citation :

Cela faisait de l'aile nord un endroit calme et tranquille, donc ennuyeux.  
 
Il y avait une lance, une arbalète, des dizaines de couteaux et de dagues, une hache finement décorée, une masse d'armes entrelacée dans les boules d'un fléau, et tellement d'autres. Tout ce capharnaüm débordait joyeusement sur la table et allait jusqu'à se répandre sur le sol. Gundron prit bien garde à ne pas marcher sur quelque chose de pointu en se frayant un chemin jusqu'au mur. Il pinça les lèvres.  
 
Mais je ne suis pas sûr que vous ayez servi vos intérêts au mieux.  
 
Comment aurais-je pu lui faire confiance pour me protéger ?"  
 
Le gouverneur se mordit la lèvre. De près ou de loin, Gundron devait être partie liée avec l'administration (avec celui qui avait administré) du poison.


n°2092565
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 20-02-2004 à 13:15:45  profilanswer
 

Si l'Empereur avait péri, il aurait pu se faire nommer régent. Mais dans l'état actuel des choses, il était absolument impuissant à faire reculer ces deux cent hommes.  
 
 
il me semble que comme il n'y a pas d'autres chiffres apres cent, on y met un "S" .  
 
comme dans trois cents, mais on écrit trois cent dix  . A confirmer je suis pas certain :jap:


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2092602
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 20-02-2004 à 13:20:50  profilanswer
 

quelques idées en vrac de titre d'apres ce que j'ai pu lire pour l'instant :
 
les outils du pouvoir
Démons et manants  (rekk a le nom de démon boucher, m'enfin gundron, theorocle et mandonius sont pas mal non plus dans le style vicelards . Manants pour marquer la différence des persos que l'ont voit et de tout ce qui gravite autour: les puissants qui veulent le prestige pendant que le peuple se morfond)


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2092619
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 20-02-2004 à 13:23:35  profilanswer
 

et puis je veux la suite, j'ai lu 21 chapitres hier, alors 1 par jour ca fait court :o


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2092741
Panem
Cave Canem et Carpe Diem
Posté le 20-02-2004 à 13:36:11  profilanswer
 

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n°2094059
PunkRod
Digital Mohawk
Posté le 20-02-2004 à 15:40:16  profilanswer
 

Up de 15h40 ! :)


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Assistants SWGOH
n°2094477
Gurumedita​tion
Dépoussiérant
Posté le 20-02-2004 à 16:22:40  profilanswer
 

[:mustang]


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mikhail a dit : Comme j'ai dis plus haut, on va parler des nouvelles découvertes et peut importe qu'elle sont conforme aux lois de la physique ou non. C'es tout. De toute façon, le temps mettras tout a ça place.
n°2096117
ahe
Posté le 20-02-2004 à 19:29:13  profilanswer
 

http://tlecaudey.free.fr/img/icons/lasuite.gif


Message édité par ahe le 20-02-2004 à 19:29:41
n°2096223
Marnie
Posté le 20-02-2004 à 19:44:27  profilanswer
 

:hello:  
Chapitre IX, premier paragraphe : Les deux chevaux marchaient au pas, langue tirée.
Il me semble que les cheveaux ne tirent pas la langue comme les chiens. Ils suent au contraire, comme les humains, c'est pour ça qu'il faut les bouchonner. Maintenant mes souvenirs d'équitations sont assez vieux ...
 
Deuxième paragraphe : Elle-même, elle avait l'impression que la présence du Boucher ...
C'est peut-être pas la peine de répéter le sujet "elle"
 
Nième (:)) paragraphe : Bientôt, seules les flammes généreuses de leur feu de camp leur permettaient de s'entrevoir.
J'aurais mis un passé simple (permirent) au lieu de l'imparfait, à cause de "bientôt" qui indique un instant et non une durée.


Message édité par Marnie le 20-02-2004 à 19:52:53

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Prison d'été, prison d'hiver, prison d'automne et de printemps, bagne pour petits et grands - Prévert, Le Roi et l'Oiseau
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